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DÉSACCORD SUR LES PRIVILÈGES DES ÉVÊQUES DE DOL.

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DÉSACCORD ENTRE LE ROI DE FRANCE ET LES ETATS DE BRETAGNE SUR LES PRIVILÈGES DES ÉVÊQUES DE DOL.

Jusqu'ici, on a pu le constater, les Etats de Bretagne ne s'étaient pas montrés hostiles aux prétentions des évêques de Dol ; ils semblaient en cela rendre hommage à la mémoire de Nominoé et au sentiment patriotique qui avait guidé cet illustre duc en donnant la prééminence aux prélats Dolois.

Maintenant nous allons assister à l'étrange spectacle des Etats de la Bretagne luttant contre les rois de France, qui voulaient maintenir aux successeurs des métropolitains bretons leurs antiques prérogatives.

Ce conflit, qui finalement fit perdre aux évêques de Dol la première place qu'ils avaient tenue jusque là dans l'assemblée des Etats, paraît n'avoir eu pour origine qu'une simple question d'amour-propre : le roi de France voulut trancher la question des préséances, sans consulter les Etats bretons ; ceux-ci prétendirent qu'on touchait à leurs libertés, à leurs droits, et ils préférèrent, que de céder, sacrifier le dernier souvenir de l'indépendance de leur province.

A ce point de vue l'année 1611 est une date mémorable. Les Etats se tinrent à Rennes.

Dans la prévision de nouvelles discussions sur la préséance, les évêques bretons s'étaient adressés au Conseil du Roi. Celui-ci avait, le dernier jour de mai 1611, rendu un arrêt qui avait été signifié aux intéressés, et d'après lequel la préséance était provisoirement accordée à l'évêque de Dol, en « attendant l'avis de messieurs des Etats sur le rang, ordre et séance que sont accoutumés de tenir de tout tems èsdites assemblées d'États, lesdits évêques de Dol et de Rennes ».

Les Etats s'ouvrirent quelques mois après cet arrêt, le jeudi 22 décembre.

L'Evêque de Rennes, François Larchiver, malgré le décret royal, prend la présidence. L'évêque de Dol, Antoine Revol, fait alors connaître ce décret et somme le prélat rennais « de luy ceder et laisser libre la place et chaire qu'il occupoit préparée et qu'a coutume de tenir celuy de Messieurs de l'Eglise qui préside en pareilles assemblées ».

François Larchiver répond qu'il est venu dans l'assemblée pour entendre l'avis des Etats, conformément à l'arrêt royal.

Le substitut du procureur syndic prend à son tour la parole. Il déclare contraire à la coutume que, dans l'assemblée des Etats, on délibère sur des affaires concernant l'ordre des membres, avant qu'elles n'aient été communiquées au procureur syndic. En conséquence, il prie l'évêque de Dol de déposer au greffe l'original de l'arrêt dont il poursuit l'exécution, afin que le procureur syndic en prenne connaissance et que l'assemblée avise, d'après son rapport. Les trois ordres, après délibération, décident qu'il soit fait ainsi, et qu'en attendant il ne soit rien innové.

L'évêque de Rennes garde donc la présidence.

Le lendemain, 23 décembre, M. Salmon Amys, conseiller du Roi en la cour du Parlement, se présente aux Etats, assisté d'Antoine Revol, évêque de Dol. Le conseiller royal somme l'évêque de Rennes de céder la chaire qu'il occupe, à l'évêque de Dol, conformément à l'arrêt obtenu par ce dernier, et, en exécution duquel, il veut mettre Antoine Revol en possession de la préséance provisoire.

Le substitut du syndic fait connaître au conseiller la décision donnée la veille par l'assemblée, et il constate que l'évêque de Dol n'a point déposé au greffe l'arrêt royal, comme il avait été ordonné.

De leur côté, les Etats déclarent que l'arrêt mentionné, « si aucun est », a été donné sans qu'ils aient été consultés, et au préjudice de leurs droits et libertés. Ils s'opposent donc à l'exécution de l'arrêt et défendent qu'il soit rien innové tant que l'évêque de Dol n'aura pas satisfait à l'ordonnance de la veille, et tant que les Etats, après avoir pris connaissance du rapport du syndic, n'auront pas avisé à la conservation de leurs droits, compromis par les prétentions de l'évêque de Dol sur les autres évêques de la province « desquels il est l'un des derniers ».

Sur la demande des Etats de surseoir à l'exécution de l'arrêt, le commissaire royal se retire, suivi de l'évêque de Dol qui déclare qu'il se pourvoira.

Mais lorsque les Etats, à la séance du 28 décembre, rédigèrent leurs remontrances au roi, la première d'entre elles fut une protestation contre les prétentions de l'évêque de Dol.

La voici : « SIRE,
Il est nécessaire pour le bien de votre service, et des affaires desdits Etats, qu'en leurs assemblées générales et solennelles convoquées sous votre autorité, les trois ordres soient bien fournis et que celuy des Ecclésiastiques qui tiennent le premier rang, soit rempli des Evêques et prélats de la Province pour, avec l'ordre de la noblesse et des communautés, délibérer et mûrement aviser sur ce qu'il plait à Votre Majesté leur faire proposer. Est-il qu'en leur dernière assemblée tenüe à Rennes, messire Antoine Revol, évêque de Dol, se seroit présenté, disant que, par arrêt donné en votre Conseil, la préséance et le droit de présider toujours et partout aux assemblées des Etats, luy étoient provisoirement adjugés, duquel arrêt lesdits des Etats qui n'y auroient été ouy ni appelés, auroient demandé communication pour y conserver leurs droits, étans notablement intéressés en telle préséance perpetuelle en toutes leurs dites assemblées, affectée par ledit Evêque de Dol contre l'ordre accoutumé et au prejudice du reglement arrêté par le plus grand nombre desdits Evêques et Prélats [Note : Il ne peut s'agir ici que d'un règlement arrêté entre quelques évêques — sept sur neuf — en dehors des Etats ; car l'Assemblée des Etats ne s'ouvrit, en 1608, que le 27 septembre. De plus, les deux évêques qui n'avaient pas collaboré au règlement étaient précisément les plus intéressés, ceux de Dol et de Rennes. Dans ces conditions, ce règlement ne pouvait avoir grande autorité], le 14ème jour de septiembre 1608, que chacun d'eux aura ladite preséance aux assemblées des Etats qui se tiendront aux villes de son diocèze, et hors ledit diocèze ou en l'absence de l'Evêque diocezain les autres Evêques auroient la preséance selon l'ordre de leur consécration ; que ledit évêque de Dol s'attribuant, comme il prétend, ladite préséance en toutes lesdites assemblées, devant tous les autres Evêques, ce seroit leur donner prétexte et occasion de ne s'y trouver jamais, et demeureroit ledit ordre manqué et de tant l'assemblée desdits Etats affaiblie, et voudroient volontiers lesdits Evêques et leur clergé avec le tems s'exempter de contribuer à l'exécution des délibérations, lesquelles y seroient arrêtées, ce que pourroit apporter du désordre, troubler les dites assemblées, causer un grand retardement aux affaires qui y seroient proposées pour le service de Votre Majesté, occasion que, avec tout le respect dû aux arrêts de votre dit conseil, ils auroient opposé le dessein dudit Evêque de Dol, attendant supplier, comme ils font très humblement Votre Majesté, ordonne que ledit Règlement accordé et arrêté par sept des neuf Evêques de ladite province, sera inviolablement observé, et que chacun Evêque aura la préséance aux assemblées des Etats qui seront tenües aux villes de son dioceze, et hors iceluy et en cas d'absence, ou empêchement de l'Evêque diocezain, lesdits Evêques jouiront de ladite préséance à l'ordre de leur consécration »
.

Malgré tout, le Roi résista et envoya la réponse suivante qui est favorable à l'évêque de Dol :

« Les parties se pourvoiront si bon leur semble au conseil du Roy contre l'arrêt mentionné en l'article, y feront à cette fin appeler ledit sieur évêque de Dol, représenteront les extraits des registres de leur greffe sur la séance et rang qu'ont tenus de tout tems en ladite assemblée lesdits évêques de la province, ledit évêque de Dol présidera à la prochaine séance desdits Etats sans préjudice du droit desdites parties pour le regard desdits Etats tant au principal qu'a la provision ».

A la tenue suivante des Etats (1612), à Redon, dans la grande salle du couvent Saint-Sauveur, Antoine Revol, évêque de Dol, se trouva seul avec l'évêque de Saint-Malo, Guillaume le Gouverneur. Il ne pouvait y avoir de difficulté pour la présidence : elle appartenait à Antoine Revol, ne fut-ce qu'à titre d'ancienneté.

Lorsqu'on donna lecture à l'assemblée de la remontrance sur le cas de l'évêque de Dol, adressée l'année précédente au Roi et la réponse de celui-ci, Antoine Revol prit la parole pour exposer les raisons qui justifiaient ses prétentions et demander aux Etats d'y avoir égard. Mais ceux-ci, mécontents de la réponse du Roi, à la majorité des voix, chargèrent leurs députés vers Sa Majesté et leur procureur syndic de se pourvoir, par toutes voies et moyens de justice, contre les arrêts obtenus par l'évêque de Dol.

L'évêque de Dol n'assista pas aux Etats qui se réunirent à Rennes l'année suivante, 1613.

Mais le 26 octobre de cette année, le conseil du Roi rendit un arrêt (Voir la lettre du foi aux Etats de 1626, ci-dessous) d'après lequel la préséance était attribuée à l'évêque de Rennes dans les assemblées qui se tiendraient dans son diocèse, et le second rang à l'évêque de Dol. Quant aux tenues des Etats qui auraient lieu en dehors du diocèse de Rennes, il était arrêté que l'évêque de Dol y aurait la présidence, l'évêque de Rennes la seconde place, et l'évêque diocésain la troisième ; les autres évêques devaient prendre rang d'après l'ordre de leur promotion.

Encore une fois le Roi donnait raison à l'évêque de Dol, tout en accordant une légère satisfaction à l'évêque de Rennes.

Pour se conformer à cet arrêt, au premier jour de l'assemblée des Etats de 1614, qui se tenaient à Nantes, les évêques présents s'assirent dans l'ordre suivant : l'évêque de Dol, celui de Rennes, celui de Saint-Brieuc, celui de Saint-Malo et celui de Cornouaille.

Le lendemain matin, 19 août, l'évêque de Nantes fit son entrée en l'assemblée, et prit place comme évêque diocésain au troisième rang, au-dessous de l'évêque de Rennes. Cependant il déclara auparavant que ce n'était point là la place que lui était dûe ; mais que l'évêque de Dol lui ayant fait signifier certain arrêt rendu au conseil du Roi sur le défaut et non comparution des autres évêques, il ne voulait pas troubler le service du Roi, « et néanmoins protestait de se pourvoir contre ledit arrêt, et déduire ses raisons ainsi et devant qui il voira l'avoir à faire en temps et lieu ».

De son côté, l'évêque de Saint-Malo protestait contre l'arrêt et déclarait que s'il prenait place après l'évêque de Saint-Brieuc, c'était « pour quelques respects et particulières considérations et pour cette fois seulement sans que par cy apres on en puisse tirer aucune consequence et s'en prevalloir contre luy et ses successeurs évêques dudit Saint-Malo qui sont en possession immémorialle de tenir le quatrieme rang entre les évêques de cette province ès assemblées des Etats généraux d'icelle ».

Les Etats de 1616 se passèrent sans difficultés. Ils se réunirent à Rennes. On s'y conforma à l'arrêt de 1613. L'évêque de Rennes présida et celui de Dol eut le second rang ; puis venaient l'évêque de Nantes, celui de Saint-Malo et celui de Quimper.

Cependant « Messieurs des Etats » n'étaient pas satisfaits de cet arrêt royal de 1613 qui avait le don, paraît-il, d'empêcher les évêques d'assister aux réunions. Aussi à l'assemblée de Nantes, en 1623-1624, à laquelle l'évêque de Dol n'assistait pas, se résolurent-ils à adresser une nouvelle remontrance au Roi sur la question de la préséance dans l'ordre de l'Eglise.

Ils s'exprimaient ainsi : « SIRE,
Il est certain que d'autant plus que l'assemblée des Etats de cette province est remplie de personnes d'éminente qualité et de mérite, d'autant en est plus auguste et plus puissante pour le service de Votre Majesté et bien public ; l'ordre toutefois de votre clergé, principal ordre desdits Etats se voit aujourd'huy abandonné de la plupart des évêques de la province à cause des préséance et présidence attribuées aux évêques de Dol et de Rennes par aucuns arrêts de votre conseil, étant rude aux autres évêques, auxquels tout droit de juridiction et préséance appartient par les conciles et canons chacun en son dioceze, de se voir lors de la tenüe de vos Etats seulement précédés, quoique d'ailleurs et en toutes autres actions la préséance leur soit acquise en leurs évêchés, n'ayant aucune dépendance desdits évêques de Dol et de Rennes ni en qualité, ni autorité. C'est pourquoy, Sire, il plaira à Votre Majesté ordonner conforrmément à l'ordre de l'Eglise, conciles et canons, que chaque évêque présidera en son dioceze lors de la tenüe des Etats de cette province, et en cas d'empêchement et d'absence, le plus ancien consacré des évêques qui assisteront à ladite tenüe en rendant égaux en ordre et séance, ceux que Dieu a voulu rendre égaux en pouvoir et autorité »
.

Le roi fit à cette remontrance, le 12 septembre suivant, la réponse ci-dessous :

« Les Evêques de Dol et de Rennes seront appelés et cependant l'évêque diocezain présidera en l'assemblée des Etats et en son absence le plus ancien en promotion, jusques à ce que par sa Majesté en ait été autrement ordonné ».

On ne manquera pas de remarquer qu'il en coûte au Roi de déposséder les évêques de Dol et de Rennes de leurs privilèges, et que d'ailleurs, la concession qu'il fait aux Etats n'est que provisoire.

Néanmoins, les Etats se montrèrent enchantés de cette concession à l'assemblée qui s'ouvrit à Ploërmel, le 15 octobre 1624, sous la présidence de l'évêque de Vannes, mais en l'absence de l'évêque de Dol et de tous ou presque tous les autres évêques bretons.

« Les gens des trois Etats, » après lecture de la réponse du Roi, chargèrent leur procureur syndic de s'opposer à toute entreprise qui, de la part des évêques, serait contraire à cette réponse.

Il y avait une contradiction flagrante entre l'arrêt royal de 1613 et la réponse royale de 1624. Une simple réponse pouvait-elle annuler un arrêt ? La question se posait. Aussi fallait-il s'attendre à de nouveaux tiraillements.

Ils se firent sentir aux Etats de 1626, qui s'ouvrirent à Nantes le samedi 11 juillet. Cette tenue devait revêtir un caractère tout particulier de solennité : le Roi Louis XIII était venu à Nantes pour faire l'ouverture des Etats bretons.

Tous les évêques de la province étaient présents, moins ceux de Nantes, de Saint-Malo et de Tréguier. Prendraient-ils rang d'après la dernière réponse du Roi ou d'après l'arrêt de 1613 ?

Pour l'évêque de Dol, il n'y avait pas de contestation possible : Antoine Revol était le plus ancien évêque de la Bretagne, et l'évêque diocésain n'assistait pas. Mais Pierre Cornullier, évêque de Rennes, ayant voulu prendre la seconde place en vertu de l'arrêt de 1613, se vit contester ce droit par Guillaume Leprestre, évêque de Cornouaille, soutenu par tous les autres évêques qui évoquèrent la réponse du Roi de 1624.

Une députation fut envoyée à Louis XIII pour lui donner avis des difficultés qui venaient de s'élever. Le Roi répondit qu'il y pourvoirait.

En effet, au début de la séance générale du lundi 13 juillet, le greffier des Etats donna lecture de la déclaration suivante du Roi :

« Louis, par la grâce de Dieu, Roy de France et de Navarre, à tous ceux qui ces présentes lettres verront, salut.
Sur les differens meus entre les députés des ordres Ecclésiastique et noble de notre pays et Duché de Bretagne assemblés par notre commandement en notre ville de Nantes pour la tenüe des Etats de la province, après avoir ouy les uns et les autres en notre conseil, et consideré leurs prétentions et raisons qui ont été pour chacun d'iceux respectivement représentées pour les deffendre ; et vû aussi pour le regard des Ecclésiastiques le reglement arresté en l'assemblée des Etats dudit pays tenus en notre ville de Rennes, le 24e jour de septembre 1608 [Note : Nous avons dit plus haut que les Etats de 1608 s'étaient ouverts le 27 septembre ; on ne peut donc pas dire que ce règlement fut arrêté en l'assemblée des Etats, le 14 ou le 24 septembre. Il y a certainement une erreur], — l'arrêt de notre conseil du 26e jour d'octobre 1613 par lequel il est ordonné que l'évêque de Rennes précédera tous les évêques de ladite province ès assemblées qui se tiendront dedans le dioceze de Rennes, et que l'évêque de Dol aura séance après ledit évêque de Rennes avant tous les autres, et qu'aux autres diocezes l'évêque de Dol aura la preséance, et l'évêque de Rennes la séance après avant tous les autres, lesquels à ladite reservation auront séance selon l'ordre de leur promotion après l'évêque diocezain qui aura la preséance en son dioceze en l'absence des susdits évêques de Rennes et de Dol, — la reponse par nous faite sur les cahiers des remontrances desdits Etats du douzieme jour de septembre 1624 par laquelle nous avons ordonné que lesdits évêques de Rennes et de Dol seroient appelés en notre conseil pour repondre sur la demande portée par ledit cahier, et cependant que l'évêque diocezain présiderait en l'ordre ecclésiastique aux assemblées qui se tiendront en son dioceze et qu'après luy les autres Evêques auroient séance selon l'ordre de leur promotion. Nous avons jugé nécessaire d'y pourvoir par quelque reglement pour empêcher les desordes qui pourvoient arriver en l'ouverture desdits Etats que Nous avons resolu de faire en personne et cejourd'huy ; Nous pour ces causes et autres à ce nous mouvans de l'avis de notredit conseil et de notre certaine science, pleine puissance et autorité roiale, avons dit et déclaré, disons et declarons que ces presentes signées de notre main, voulons et ordonnons qu'à la diligence du sindic desdits Etats, et des autres Evêques de ladite province, lesdits évêques de Rennes et de Dol soient appelés en notre conseil pour repondre sur la demande portée par ledit cahier de l'an 1624 et l'instance mise en l'état de juger dans les six mois, et cependant que pour les séances des présens Etats l'ordre porté par ledit arrêt du 26 septembre 1613 soit observé.
[Note : Suit le règlement pour l'ordre de la Noblesse].
Donné à Nantes le unzième jour de juillet, l'an de grâce mil six cent vingt-six, et de notre Règne le dix-septième. Signé : Louis. Et sur le replis, par le Roy, POTIER, et scellé du grand sceau de cire jaulne sur double queüe »
.

Par le fait, Louis XIII annulait sa réponse de 1624 pour s'en tenir provisoirement à l'arrêt de 1613. La préséance était donc maintenue aux évêques de Dol et de Rennes.

La lecture des lettres du Roi devant les Etats donna lieu à une énergique protestation de la part des autres évêques. Au nom de ceux-ci, l'évêque de Cornouaille prend la parole contre les évêques de Dol et de Rennes. Il prétend que la teneur des lettres royales n'est point conforme à ce qui leur fut dit par Sa Majesté et M. le garde des sceaux, desquels ils apprirent que les préséances des évêques de Dol et de Rennes sur les autres évêques de la province n'auraient effet que pour le jour seulement où Sa Majesté honorerait les Etats de sa présence et sans préjudice de leurs protestations et oppositions. Ensuite il réprouve la teneur de ces lettres comme contraire aux saints canons et à ce qui se pratique dans toutes les assemblées du Clergé de France ; comme contraire à la bulle du Pape Eugène IV qui règle l'assemblée des évêques de cette province et leur défend sous peine d'anathème d'en prendre aucune autre que celle qui est portée par ladite bulle ; comme contraire à l'avis du sieur Dargentré, sénéchal de Rennes, qui en fait un chapitre exprès dans l'histoire du pays, et dit entre autre chose que c'est présomption aux évêques et préjudice à la chose publique du pays de prendre autre rang dans les assemblées que celui qui est réglé par la bulle d'Eugène IV ; enfin, comme contraire à l'arrêt du conseil, qui fut rendu avec grande connaissance de cause, sur les cahiers des Etats, et qui ordonne que chaque évêque précédera auxdites assemblées tous les autres évêques, en son évêché, et, en son absence, le plus ancien : contre lequel arrêt les évêques de Dol et de Rennes ne se sont point pourvus.

L'évêque de Cornouaille conclut que les lettres royales ont été obtenues, par les évêques de Dol et de Rennes, avec une évidente et manifeste surprise, et sans voir les droits des autres évêques qui n'étaient point préparés à une telle entreprise. Néanmoins, par obéissance et par respect pour les commandements du Roi, et pour ne pas troubler l'entrée que Sa Majesté veut faire dans l'assemblée des Etats, les évêques protestataires souffrent, en cette considération seulement et pour cette fois seulement, l'entreprise notable des évêques de Rennes et de Dol, avec protestation que, après la cérémonie de l'entrée du Roi, ou aussitôt après la tenue des Etats, ils feront révoquer les lettres royales comme obreptices et subreptices, contraires aux saints canons et à leur possession.

Les évêques de Rennes et de Dol répondirent à leurs collégues que l'arrêt, contre lequel ils raisonnaient, avait été rendu sur la demande faite par les Etats à Sa Majesté, de vouloir bien régler le rang des évêques, et après audition et remontrancès des évêques de Cornouaille, de Saint-Brieuc, de Léon et de Vannes, qui n'alléguèrent point d'autres raisons que celles déjà consignées dans l'arrêt de 1613 ; arrêt que Sa Majesté a jugé raisonnable et a confirmé non pour un jour, comme ils l'allèguent, mais pour toujours, si les évêques-protestataires n'ont pas d'autre prétexte que la bulle du Pape Eugène, laquelle est mentionnée dans l'arrêt de 1613, et la réponse de l'an 1624 qui n'est qu'une pure commission pour appeler les évêques de Dol et de Rennes.

Ils s'étonnent que, sur une simple requête, et sans ouïr les parties, on veuille renverser leurs droits, confirmés par tant de jugements donnés en connaissance de cause, et par une possession de sept ou huit cents ans.

Comment les Evêques de Cornouaille, de Saint-Brieuc, de Léon et de Vannes peuvent-ils prétendre à présent détruire un ordre établi de si longue main, et que leurs prédécesseurs ont souffert ? Il n'est pas présomptueux de la part des Evêques de Dol et de Rennes de vouloir conserver la dignité de leurs Eglises, eux qui ont été honorés de cette préséance sur les autres évêques, conformément à ce qui se pratique en toutes les autres assemblées temporelles des provinces d'Etats en ce royaume. Cela, disent en terminant les évêques de Dol et de Rennes, servira de réponse à tout ce qui a été allégué par les Evêques de Cornouaille, de Saint-Brieuc, de Léon et de Vannes ; ceux-ci ne peuvent valablement s'appuyer sur l'avis particulier de Dargentré, contre tant d'arrêts donnés au profit des évêques de Dol et de Rennes, qui maintiennent être bien fondés à tenir, en cette séance des Etats, et en toutes les autres à venir, les rangs qu'ont eus leurs prédécesseurs sur ceux des évêques de Cornouaille et autres. Quant à la bulle du Pape Eugène, Dargentré lui-même reconnaît qu'elle n'a point été observée, faute d'avoir été reçue et pratiquée dès sa publication et que, en conséquence, elle ne peut servir de loi.

(abbé ROBERT).

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