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LA FAYETTE et L'INDEPENDANCE des ETATS-UNIS |
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Marie-Joseph Paul Yves Roch Gilbert du Motier, marquis de La Fayette (aussi connu sous le nom de Marquis de La Fayette (6 septembre 1757 – 20 mai 1834). Né au château Saint-Roch de Chavaniac (ou Chavagniac ou Chavagnac), en Auvergne, Marie-Joseph Paul du Motier (La Fayette) est issu d’une famille noble. Son père, Michel-Louis-Christophe-Roch-Gilbert du Moutier (ou Motier), marquis de La Faïette (ou Fayette), meurt à Minden (en Allemagne) en 1759 (âgé de 25 ans), sa mère, Marie-Louise-Julie de La Rivière, décède en 1768 (âgée de 33 ans), et son grand-père, décède en 1770. A l’âge de 13 ans, il se retrouve orphelin et fortuné (220.000 livres de rente). A 16 ans, il se marie, le 11 avril 1774 à Paris, avec Marie-Adrienne Françoise de Noailles († 1807), fille du duc d'Ayen et petite fille du duc de Noailles, une des familles les plus influentes du royaume de France. A vingt ans, il s'embarque pour l'Amérique où il mènera à bien la guerre pour l'indépendance. A voir aussi : les Combattants bretons de la Guerre d'Indépendance des Etats-Unis d'Amérique. la Famille de La Rivière. (côté maternel de La Fayette). |
DEPART
DE LA FAYETTE POUR L'AMERIQUE
Le 4 juillet 1776, les députés des treize provinces qui font parti des colonies anglaises de l'Amérique du nord se réunissent en congrès à Philadelphie et proclament l'indépendance des provinces anglaises qui sont alors constituées en république fédérative sous le nom d'Etats-Unis d'Amérique.
Nota
: Ces treize colonies sont (avec le nom actuel de l'État, s'il est différent
aujourd'hui) :
Connecticut, Massachusetts (idem + Maine), New-Hampshire, Rhodes Islands,
Delaware, New Jersey, New York (idem + Vermont), Pennsylvanie, Georgie,
Maryland, Caroline du Nord (idem + Tennessee), Caroline du Sud, Virginie
(Virginie + Virginie-Occidentale + Kentucky). Les colonies
britanniques restées loyales sont celles qui font partie de l'actuel Canada,
les îles de la côte Ouest ainsi que la Floride Est et Ouest qui intégreront
l'Union plus tard.
Extrait de la Déclaration d'Indépendance des Etats-Unis :"Lorsqu'une longue suite d'abus et d'usurpations, tendant invariablement au même but, marque le dessein de les soumettre au despotisme absolu, il est de leur droit, il est de leur devoir de rejeter un tel gouvernement et de pourvoir, par de nouvelles sauvegardes, à leur sécurité future. Telle a été la patience de ces Colonies, et telle est aujourd'hui la nécessité qui les force à changer leurs anciens systèmes de gouvernement. L'histoire du roi actuel de Grande-Bretagne est l'histoire d'une série d'injustices et d'usurpations répétées, qui toutes avaient pour but direct l'établissement d'une tyrannie absolue sur ces États………. En conséquence, nous, les représentants des États-Unis d'Amérique, assemblés en Congrès général, prenant à témoin le Juge suprême de l'univers de la droiture de nos intentions, publions et déclarons solennellement au nom et par l'autorité du bon peuple de ces Colonies, que ces Colonies unies sont et ont le droit d'être des États libres et indépendants ; qu'elles sont dégagées de toute obéissance envers la Couronne de la Grande-Bretagne ; que tout lien politique entre elles et l'État de la Grande-Bretagne est et doit être entièrement dissous ; que, comme les États libres et indépendants, elles ont pleine autorité de faire la guerre, de conclure la paix, de contracter des alliances, de réglementer le commerce et de faire tous autres actes ou choses que les États indépendants ont droit de faire ; et pleins d'une ferme confiance dans la protection de la divine Providence, nous engageons mutuellement au soutien de cette Déclaration, nos vies, nos fortunes et notre bien le plus sacré, l'honneur" (Thomas Jefferson).
Congrès à Philadelphie et Proclamation de l'Indépendance des Etats-Unis d'Amérique |
Cet
acte d'émancipation produit en Europe une sensation profonde, mais la France
surtout pénétrée de toutes parts des doctrines philosophiques du XVIIIème siècle,
l'accueille avec d'énergiques sympathies ; elle répond à ce cri d'indépendance
parti de l'autre côté de l'Océan par un cri d'enthousiasme.
Ce mouvement cependant n'est point secondé par le gouvernement de Louis XVI. Les nécessités de la situation intérieure dominant celles de la politique extérieure, on réprime les trop vives manifestations qui éclatent en faveur des Américains et on autorise qu'avec une extrême réserve l'envoi des secours qu'on veut leur adresser. Mais toute la prudence, tous les efforts des ministres de Louis XVI ne peuvent contenir l'agitation des esprits, et à la cour même de Versailles on défend la cause de l'Amérique du nord avec chaleur. Benjamin Franklin (1706-1790), célèbre déjà dans la science par l'invention du paratonnerre, devient l'objet de l'attention générale. Chacun veut le voir, lui parler, et cette noblesse de France si brillante, si élégante, si fort intéressée au maintien de la monarchie dont elle recevait une partie de sa splendeur, ne sait rendre assez d'hommages à cet homme aux mœurs simples, aux libres habitudes qui vient au nom d'un peuple en insurrection représenter à Paris une république naissante [Note : Benjamin Franklin avait débarqué le 4 décembre 1776 au port de St-Goustan à Auray (à défaut d'avoir pu atteindre Nantes)].
Louis
XVI, qui, après tout, comprend bien que son métier est d'être royaliste,
refuse d'abord de se déclarer en faveur de l'Amérique. Sa politique hésite,
il redoute à la fois de compromettre les intérêts de la monarchie en les
unissant pour ainsi dire à ceux d'un peuple en insurrection et de perdre cette
heureuse occasion d'enlever à la rivale de la France, qu'est l'Angleterre,
treize riches provinces.
La
Fayette, en offrant ses services à l'Amérique, n'est séduit par aucune de ces
brillantes espérances que les chances de la guerre présentent à la noblesse
française : servir comme volontaire et à ses frais, sont les seules conditions
qu'il fait au congrès. Modeste, désintéressé, La Fayette ne recherche
d'autre prix de ses efforts que le triomphe de la cause et des principes à la défense
desquels il se voue : "A la première connaissance de cette guerre, a-t-il écrit, mon cœur
fut enrôlé, et je ne songerai qu'à joindre mes drapeaux". Les fâcheux
événements qui signalent la fin de la campagne de 1776, les défaites
successives des Américains à New-York, à Long-Island, au fort Washington et
aux Jerseys hâtent l'exécution des projets de La Fayette. Les envoyés américains
sont découragés, ils doutent presque de l'issue de la lutte qu'ils ont engagée,
lorsque La Fayette va trouver l'un d'eux, M. Deane, et lui dit : "Jusqu'ici,
monsieur, vous n'avez vu que mon zèle, il va peut-être devenir utile. J'achète
un bâtiment qui portera vos officiers. Il faut montrer de la confiance, et
c'est dans le danger que j'aime à partager votre fortune". Les
propositions du marquis de La Fayette sont aisément acceptées, mais il lui
faut trouver de l'argent, acheter et armer un vaisseau, puis échapper lui-même
à la surveillance dont il est l'objet depuis qu'on soupçonne ses relations
avec les agents américains. La fermeté de ses convictions, l'ardeur de sa
jeunesse surmontent tous les obstacles, et vers le commencement d'avril 1777 tout est
disposé pour un prochain embarquement.
La
Fayette traverse secrètement la France et se rend à Bordeaux. En y arrivant,
il apprend que son projet de départ est connu à Versailles et qu'il est
poursuivi par un ordre d'arrestation. Aussitôt La Fayette fait partir son
vaisseau pour le port du Passage en Espagne et il écrit à Paris, aux
ministres, à sa famille, à ses amis, afin d'obtenir l'autorisation de quitter
la France et d'aller offrir aux Américains le secours de son épée. Pour toute
réponse, il reçoit l'ordre de se rendre à Marseille et de rejoindre son
beau-père, le duc d'Ayen, qui visite l'Italie. La Fayette feint d'obéir et
part pour Marseille avec un officier nommé Mauroy, qui désire comme lui servir
sous les drapeaux de l'indépendance. Mais à quelques lieues de Bordeaux leur
voiture change de direction, prend la route de Bayonne, et, pour mieux éviter
les poursuites, La Fayette, revêt un habit de courrier et monte à cheval. Ils
avaient évité tous les dangers, ils allaient franchir la frontière, quand à
Saint-Jean-de-Luz, La Fayette, qui était passé par cette route du port du
Passage lorsqu'il y avait conduit son vaisseau, est reconnu par la fille du maître
de poste. Mais un signe la fait taire, son adroite fidélité détourne même
les poursuites, et les deux fugitifs atteignent le port du Passage, où ils sont
seulement rejoints par des dépêches royales qui interdisent au marquis de La
Fayette l'entrée du continent américain. Mais il est trop tard, et la cause
des Etats-Unis avait gagné un des plus zélés défenseurs.
Enfin,
après six mois d'efforts, de travaux et d'inquiétudes, le 22 avril 1777 La
Fayette, âgé de dix-neuf ans, s'embarque pour l'Amérique du Nord sur le bâtiment
qu'il avait acheté et qui, par un hasard d'heureux présage, se nommait
"la Victoire". Le 15 juin, après sept semaines de traversée, il
aborde l'Amérique du Nord (à Philadelphie, siège du gouvernement des
colonies). La Fayette offre ses services au Congrès en déclarant : "C'est
à l'heure du danger que je souhaite partager votre fortune". Il est
incorporé non sans difficulté dans l'armée des Etats-Unis avec le grade de
major général. A partir de ce moment, Le Fayette ne cesse de
prendre une part active à la lutte jusqu'au jour où triomphe le parti de la
liberté qu'il avait si chaleureusement embrassé.
Le
départ de La Fayette cause en France, à la cour et parmi le peuple, une vive
émotion. On admire tant de hardiesse et de persévérance unies à tant de
jeunesse, cet amour de la liberté dans un homme appelé à profiter, par la
naissance, de tous les privilèges du rang.
C'est à ce moment que la révolution américaine est décidément et sérieusement
adoptée par la France. La cour de Versailles, qui s'était opposée avec tant
de persistance au départ de La Fayette, le justifie bientôt par ses propres démarches
: sur des instances et par l'intervention de volontaire des Etats-Unis elle
envoie des troupes et des vaisseaux aux Américains, elle unit entièrement ses
intérêts aux leurs contre l'Angleterre et reconnaît la première leur
nationalité.
Le 7 juin 1777, La Fayette envoie une lettre à sa femme où il déclare : "Défenseur de cette liberté que j'idolâtre, libre moi-même plus que personne, en venant comme ami offrir mes services à cette république (des Etats-Unis) si intéressante, je n'y porte nul intérêt personnel. Le bonheur de l'Amérique est intimement lié au bonheur de toute l'humanité. Elle va devenir le respectable et sûr asile de la vertu, de l'honnêteté, de la tolérance, de l'égalité et d'une tranquille liberté".
Le rôle militaire du Marquis de La Fayette est interrompu par une période de 6 mois où George Washington le missionne pour convaincre le roi de France Louis XVI d'envoyer un véritable corps expéditionnaire.
La
Fayette, qui était parti presque proscrit pour les Etats-Unis, est accueilli à
son retour par d'unanimes acclamations, on le fête comme un héros. Il reçoit
le titre de colonel de cavalerie. Les
ministres recherchent ses conseils, les jeunes nobles veulent suivre son exemple
et s'enrôler sous les drapeaux de la république du Nouveau-Monde. Après son
court séjour à Paris, durant lequel il s'occupe de rechercher de nouveaux
auxiliaires aux Américains. La Fayette se dispose à retourner en Amérique.
Mais avant de quitter la France, il reçoit un témoignage public de la
reconnaissance des Etats-Unis : le petit fils de Franklin lui présente
officiellement une épée d'honneur que le congrès lui a décernée. Elle est
chargée d'ingénieuses allégories, qui toutes rappellent quelques-unes des
brillantes actions de celui à qui on l'offrait : "la figure de l'Amérique
délivrée de ses chaînes élève une branche de laurier vers un jeune guerrier
dont les traits rappellent ceux de La Fayette, sur l'autre face il fait au lion
britannique une mortelle blessure". D'un côté Franklin avait inscrit
la devise de l'Amérique, un croissant de lune avec ces mots : Crescam ut prosim (Je croîtrai
pour être utile). De l'autre était écrite celle que La Fayette avait
adoptée à son départ : Cur non : (Pourquoi
non !). Cette fois son départ, le 10 mars 1780, pour le Nouveau Monde a tout l'éclat d'un
triomphe, jusqu'à son vaisseau (l'Hermione) lui et les compagnons qu'il emmène sont
accompagnés par une foule empressée qui les salue de ses cris d'enthousiasme
et de liberté. Sur son bateau flotte le drapeau fleurdelisé, et le canon de la
France répond par une glorieuse salve aux adieux que lui adresse le vaisseau
qui porte La Fayette. C'est précédé d'une réputation qui s'augmentait chaque
jour que La Fayette reparaît en Amérique apportant avec son épée l'heureuse
nouvelle de l'intervention active du cabinet de Versailles, qui accorde à la république
des Etats-Unis le secours de ses soldats et de ses vaisseaux.
LA
FRANCE RECONNAIT L'INDEPENDANCE DES ETATS-UNIS
La
guerre de l'indépendance des colonies du nord de l'Amérique est une cause véritablement
nationale pour la France. La lutte s'engage alors autant entre elle et
l'Angleterre qu'entre cette dernière et les provinces révoltées. Lorsque le
cabinet de Versailles, entraîné par l'enthousiasme de la nation, par l'évidence
de nos intérêts politiques, par l'aventureuse expédition de La Fayette, se décide
à combattre, il le fait loyalement et courageusement. Une fois résolu à
s'unir aux Américains, il met nos soldats, notre armée, notre argent au
service du parti qu'il adopte et ne pose pas les armes avant qu'il ait atteint
son but : l'affranchissement de l'Amérique du Nord.
Dès
le commencement de 1777, les Etats-Unis envoient trois commissaires à Paris
pour obtenir la conclusion d'un traité avec la France. Depuis un an on négociait,
sans que le comte de Vergennes, ministre des affaires étrangères, veuille
reconnaître officiellement la mission des agents américains. Cependant ses
intentions étaient évidemment favorables : les représentants de la jeune république
étaient accueillis avec bienveillance. Franklin surtout, dont le nom était
populaire, le caractère respecté, obtient une considération, une influence
qui excitent les susceptibilités de l'Angleterre. On autorise tacitement ses démarches
: il envoie aux Américains des armes, des munitions, il délivre des lettres de
marque aux corsaires français, sans que le gouvernement apporte d'obstacles à
ses efforts. Mais Louis XVI hésite à se déclarer ouvertement : il redoute de
s'engager dans une guerre générale et d'accroître des difficultés qui déjà
entravent son administration. Enfin l'éclat de joie avec lequel est accueillie
par la France la nouvelle de la capitulation du général anglais John Burgoyne, qui avec dix
mille hommes s'était rendu aux insurgés le 17 octobre 1777 à Saratoga, met un terme aux
hésitations du
roi, et à la fin de 1777 il consent à se prononcer en faveur des Etats-Unis
d'Amérique. |
Le
6 décembre 1777 le secrétaire du conseil d'Etat se rend à l'hôtel des
commissaires américains et leur déclare, par ordre du roi, "qu'après
de longues et mûres délibérations sur leurs propositions Sa Majesté avait résolu
de reconnaître l'indépendance des Etats-Unis, de faire avec eux un traité de
commerce et d'alliance". Il ajoute "que
non-seulement le roi reconnaissait leur indépendance, mais qu'il la
soutiendrait par tous les moyens qui étaient en son pouvoir ; qu'il allait
peut-être s'engager pour eux dans une guerre coûteuse, mais qu'il ne
demanderait pas le remboursement des dépenses qu'elle occasionnerait : parce
que, en définitive, les Américains ne devaient pas croire qu'il n'avait pris
cette résolution que dans la vue de les servir, attendu qu'indépendamment de
son attachement véritable à leur cause il était évidemment de l'intérêt de
la France d'affaiblir la puissance de l'Angleterre en en détachant les
colonies".
Cette
déclaration franche et précise explique tout à la fois les doutes et la détermination
de Louis XVI. Les mots qui la terminent expriment assez la répugnance qu'il a
éprouvée à s'unir à un peuple en insurrection, et témoignent qu'il sacrifie
encore plus la paix aux intérêts évidents du pays qu'à l'indépendance des
colonies anglaises. Pour la France, au contraire, c'est avant tout à la liberté
de l'Amérique qu'elle se dévoue. Après deux mois de conférences, dans
lesquelles sont arrêtées les conditions de l'alliance de la France avec les
Etats-Unis, le 6 février 1778, le docteur Franklin, Silas Deane et Arthur Lee,
plénipotentiaires des Etats, et le comte de Vergennes assisté du secrétaire
du conseil d'Etat, qui avait principalement suivi les négociations, signent, au
nom des treize provinces des Etats-Unis d'Amérique et de Sa Majesté très-chrétienne
le roi de France, un traité d'amitié et de commerce.
Cet
acte, le premier par lequel l'indépendance des provinces du nord de l'Amérique
est reconnue, est un des plus importants de la diplomatie du XVIIIème siècle.
Il introduit parmi les Etats modernes une nouvelle puissance, il suscite une
rivalité qui va devenir bientôt redoutable à l'orgueil maritime de
l'Angleterre. Il renferme une révolution morale, il déclare pour ainsi dire la
légitimité de l'insurrection en certaines circonstances. Le traité de 1778
consacre enfin l'existence de droit des Etats-Unis, dont la paix de 1783 doit
constater l'existence de fait. Aussi l'Angleterre le considère comme une déclaration
formelle d'hostilités : elle rappelle son ambassadeur, le nôtre quitte Londres
et la guerre ne tarde pas à éclater entre les deux nations.
Tandis
que l'ambassadeur d'Angleterre s'éloigne sans même solliciter une audience de
congé du roi de France, le docteur Franklin, à la persévérance de qui l'Amérique
doit en partie le succès de ses négociations, est officiellement présenté à
Louis XVI par le comte de Vergennes comme le représentant d'un peuple allié.
Lorsque l'envoyé de la république des Etats-Unis, accompagné de quelques-uns
de ses concitoyens, pénètre pour la première fois dans les galeries de
Versailles et est admis à l'audience du souverain le plus absolu, peut-être de
l'Europe, la curiosité est vivement excitée par cette étrange réception : l'âge
de Franklin, la simplicité affectée de ses vêtements, sa réputation de
savant et de philosophe, l'alliance dont il avait été le plus actif négociateur,
tout contribue à fixer l'attention publique.
Le
ministre des affaires étrangères écarte difficilement la foule des
courtisans, quand revêtu du brillant costume de la cour de France, l'épée au
côté, la poitrine couverte d'ordres en pierreries, de cordons, il conduit vers
le roi ce vieillard dont les longs cheveux blancs, sans apprêt, couvrent les épaules,
qui ne se distingue par nul insigne, par nulle décoration, sur le vêtement sévère
duquel n'éclate aucune broderie. Franklin aborde Louis XVI sans trouble, mais
non sans une profonde émotion et une respectueuse reconnaissance. Il s'incline
devant le monarque, qui lui dit "Monsieur,
vous pouvez assurer de mon amitié les Etats-Unis d'Amérique. Je dois vous dire
aussi que je suis très satisfait de votre conduite en particulier depuis votre
arrivée dans mon royaume". Et d'un geste, il congédie le ministre américain,
le vieil imprimeur de Philadelphie. Après cette audience, Franklin traverse la
cour du palais pour se rendre dans les bureaux du ministre des affaires étrangères.
Alors la foule, qui attend impatiemment son passage, l'accueille avec
enthousiasme et le salue de ses acclamations. Des applaudissements, des cris de
joie prouvent chaleureusement au nouvel ambassadeur quel sincère intérêt la
France prend aux affaires de l'Amérique.
Bientôt
elle le témoigne mieux que par des vaines démonstrations : ses flottes sortent
des ports. D'Orvilliers, d'Estaing, le bailli de Suffren attaquent la puissance
anglaise dans tous ses établissements coloniaux, la frappent à la fois dans
l'Inde et dans l'Amérique. Un an plus tard, en 1779, l'Espagne décidée par
notre exemple accorde son appui à l'Amérique, unit ses vaisseaux aux nôtres,
tandis que la France réunit en Normandie une armée prête à franchir le détroit
au premier signal. La terreur est un moment dans Londres, on tremble à la
menace d'une invasion : "Si l'ennemi
eût débarqué, s'écria un orateur en plein parlement, nous aurions combattu,
mais nous aurions succombé". Les tempêtes écartent ce danger des côtes
de la Grande-Bretagne : les flottes françaises et espagnoles sont dispersées
par les vents et obligées de regagner les ports de France.
Mais néanmoins l'Amérique va triompher par notre courage et notre constance, on peut dire : "Quand elle désespérait de sa cause, lorsqu'elle refusait d'y sacrifier sa fortune, nous la défendions de notre or et de notre sang". En même temps que la France envoie dix millions au congrès américain, six mille hommes d'élite commandés par le comte de Rochambeau, se joignant en 1780 aux troupes conduites en Amérique par La Fayette, se placent sous les ordres de Washington. Ces puissants auxiliaires amènent, le 17 octobre 1781, la célèbre capitulation de York-Town, qui n'est pas moins désastreuse pour l'Angleterre que celle de Saratoga (en 1777). Enfin, fidèles au parti que nous avons embrassé, nous combattons pour l'Amérique sur terre et sur mer jusqu'à ce que la paix de 1783 (traité de Paris) garantisse aux Etats-Unis l'indépendance reconnue par le traité de 1778.
Chronologie
des événements de la Guerre d'Indépendance des Etats-Unis d'Amérique
en 1775 :
- le 7 juin :
La Bataille de Bunker Hill est la première véritable bataille de la guerre
d'Indépendance. Si les insurgés connurent la défaite, leur défense héroïque
et les pertes limitées qu' ils connurent contribuèrent à renforcer leur
moral.
en
1776 :
- le 8 juin :
Bataille des Trois-Rivières (Québec), opposant les insurgés des Treize
colonies aux troupes du roi d'Angleterre.
- le 4 juillet :
Déclaration d'Indépendance des Etats-Unis d'Amérique, rédigée par Thomas
Jefferson.
- le 27 août :
Les anglais sont victorieux à la Bataille de Brooklyn.
- le 16 septembre :
Les anglais débarquent à Kip's Bay, et dans les jours qui suivent et
remportent la bataille des Hauts de Harlem (Morningside Heights).
- le 21 septembre :
Un incendie détruit le quart de New-York.
- le 16 novembre :
Les anglais prennent le fort de Washington (Washington Heights), ce qui leur
assure le contrôle de New York.
- le 26 décembre :
Défaite britannique à Trenton (Delaware).
30 000 soldats allemands sont loués par leurs princes aux anglais pour
combattre l'indépendance américaine. Défaite britannique dans le Delaware à
Princeton.
A la fin de l'année, la situation militaire est très défavorable aux
insurgés.
·
en
1777 :
Le Marquis de La Fayette offre ses services de soldat au congrès
américain. Victoire de Georges Washington à Princeton.
En juin 1777, la bannière étoilée sert d'emblème aux armées américaines.
Le général anglais Howe s'empare de Philadelphie.
En octobre, la défaite des Britanniques à Saratoga encourage les français
à déclarer la guerre à l'Angleterre au début de l'année suivante.
·
en
1778 :
- le 6 février : signature d'un traité d'amitié, d'alliance et de commerce entre les français et les américains ; ces derniers peuvent alors compter sur des renforts terrestres et surtout sur la flotte de guerre française.
·
en
1780 :
La
Hollande entre en guerre contre le Royaume-Uni. Un corps expéditionnaire dirigé
par le français Rochambeau débarque à Newport.
En mai 1780, les anglais prennent Charleston et font capituler 5 000
soldats américains à Camden.
·
en 1781 :
- le 19
octobre : défaite
anglaise de York-Town. La Grande-Bretagne s'épuise dans une guerre maritime.
·
en 1782 :
Les préliminaires de paix s'engagent et aboutissent le 5 septembre 1783 au Traité de Paris qui met un terme à la guerre d'Indépendance américaine.
(avec l'autorisation de l'Association d'Histoire et d'Archéologie de la région de Bourbriac, Hyacinthe des Jars de Keranrouë, 1998).
Note 1 : Franklin (Benjamin), né à Boston en 1706 et décédé à Philadelphie en 1790. C'est un homme politique, physicien et publiciste américain. Partisan des Lumières et député au premier Congrès américain (en 1774), il rédigea avec Jefferson et John Adams la Déclaration d'indépendance (en 1776) et vint à Versailles négocier l'alliance française, effective en 1778.
Note 2 : Le marquis Joseph Motier (ou Mottier) de la Fayette descendait directement de Marguerite Eder de la Fontenelle, soeur de La Fontenelle, et il possédait en Bretagne, du chef de sa mère Marie-Louise de la Rivière, plusieurs terres et seigneuries. Il semble qu'il songea un moment à jouer un rôle politique en Bretagne. En 1700, les Montigny étaient seigneurs du Vieux-Marché (Côtes-d'Armor). Cette famille ne garda pas longtemps cette terre, car, en 1749, elle la vendit aux La Rivière dont l’héritière la transmit, en 1754, aux La Fayette, en épousant le sire de ce nom. A Saint-Michel (en Guingamp - Côtes-d'Armor) habitait, aussi Marie Louise de La Rivière, dame du Vieux-Marché et de Saint-Quiouët (en Plaintel), qui épousa Louis de La Fayette et donna le jour à Gilbert de La Fayette, héros de la guerre d'indépendance en Amérique. Rattrapé par la révolution française à laquelle il avait activement participé, ce dernier sera contraint d'émigrer en août 1792. Fait prisonnier par les autrichiens, il sera enfermé à Olmuz jusqu'en 1799. Il perdra l'ensemble de ses biens qui furent déclarés " biens nationaux " et vendus comme tels. Madame de La Fayette fut incarcérée à plusieurs reprises, elle fut libérée en janvier 1795 après avoir été sauvée de la guillotine par les interventions du gouverneur américain Morris. Sa grand-mère la maréchale de Noailles, sa mère la duchesse d'Ayen et sa soeur la vicomtesse de Noailles avaient été guillotinées ensemble en 1794. Avec ses filles, elle rejoignit son époux en prison à Olmuz et y resta deux ans jusqu'à sa libération en septembre 1797. A son retour en France, après la fin du Directoire (18-19 brumaire an VIII), c'est son épouse fidèle et énergique qui, munie de procurations, procédera méticuleusement à la reconstitution du patrimoine familial en Bretagne et en Touraine. La Fayette meurt à Paris le 20 mai 1834. Il est enterré au cimetière de Picpus, à Paris.
Note 3 : Le rôle du Marquis de La Fayette, dans l'histoire de l'indépendance américaine est consacré de longue date à Washington par un square à son nom, avec au centre sa statue équestre, devant la Maison Blanche. De plus, le 8 août 2002, le Marquis de La Fayette est élevé au titre posthume de citoyen d'honneur des Etats Unis d'Amérique.
(par L. Michelant)
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