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LE PRIEURÉ NOTRE-DAME DE HÉDÉ.

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L'Abbaye de Saint-Melaine, fondée vers le milieu du VIème siècle, après de nombreuses péripéties et des fortunes diverses, s'était relevée des ruines que lui avaient causées les invasions normandes au Xème siècle et avait, depuis, atteint à une grande prospérité.

Les populations des campagnes, peu denses et disséminées dans les bois et les landes, trouvaient quelquefois auprès d'elles petit oratoire consacré à un saint patron, pour y prier. Dans les agglomérations qui se formaient généralement autour des châteaux sous la protection de leurs murailles, s'élevaient, sans doute, souvent une chapelle pour les besoins spirituels du possesseur et de sa famille, mais les prêtres séculiers pour les desservir étaient rares. Heureusement que les moines ne manquaient pas et les seigneurs désireux de s'assurer les secours de la religion pour eux et pour leurs vassaux pouvaient faire appel à ceux-ci et demander aux Abbayes et aux Couvents voisins des prêtres pour l'exercice du culte.

C'est ainsi qu'il en fut pour Hédé où les Religieux de Saint-Melaine devenus assez nombreux, vinrent s'établir, non seulement dans la ville, mais dans tous les environs immédiats et occuper ou fonder des églises. On les trouve, en effet, dans l'évêché de Rennes, à Bazouges, à Saint-Symphorien, Montreuille-Gast, Vignoc, Melesse, et, dans l'évêché d'Aleth et de Saint-Malo, à Pleumeleuc, Saint-Brieuc des Iffs, etc... [Note : « In episcopatu Redonensis : Ecclesiam de Bazogetis, eccl. Sancti Symphoriani ; eccl. d'Yvignouc ;… ecclesiam de Monsterol ; eccl. de Mellece ;... et, in episcopatu Aletensi : eccl. de Ploumelouc ;... eccl. de Sancto Briocio, etc. » (Cartulaire de Saint-Melaine). Monsieur le Chanoine Guillotin de Corson, dans son Pouillé historique de l'archevêché de Rennes, t. II, p. 96, a écrit une Notice sur le Prieuré de Hédé. Une partie des sources où nous avons puisé nous a été commune. Nous tâcherons d'y ajouter quelques renseignements complémentaires]. Au milieu du XIIème siècle, leur présence est constatée à l'église de Hédé (in ecclesiam), par Alain et Etienne de Fougères, évêques de Rennes.

Les moines en arrivant à Hédé trouvèrent-ils une église prête à les recevoir ? Cela ne fait pas de doute, car les habitants et les possesseurs du château étaient trop bons chrétiens pour n'avoir pas élevé une demeure à Dieu à côté de la leur.

Nous en trouvons encore la confirmation dans le fait de la mention « ecclesiam de Hedeyo », au singulier, dans les actes des Evêques Alain et Etienne de Fougères au XIIème siècle, alors que soixante ans environ plus tard, en 1213, le Chapitre de Rennes, confirmant l'Abbaye de Saint-Melaine dans ses possessions porte « ecclesias de Hedeyo » au pluriel. Il y a donc au moins deux églises à Hédé à cette époque, savoir l'antique sanctuaire, sans doute délabré et en mauvais état, mais, en tout cas, insuffisant, et l'église actuelle que les nouveaux venus avaient édifiée pour le remplacer et qui présente, en effet, tous les caractères de l'architecture du XIIème siècle.

Il est bien évident que ce ne fut pas sans compensation que les Moines de Saint-Melaine vinrent s'installer à Hédé. Il fallut leur fournir un état, une situation, leur constituer des revenus afin de leur permettre de vivre et remplir les obligations de leur ministère.

Les Seigneurs de Hédé trouvèrent cette compensation en détachant de leur terre une petite parcelle autour de l'église et du cimetière, assez grande toutefois pour qu'ils pussent y bâtir leur demeure avec toutes les dépendances qui leur seraient nécessaires, en y joignant même les quelques maisons qui pourraient s'y trouver.

Telle fut l'origine du Prieuré de Notre-Dame de Hédé, bénéfice simple et régulier de l'Ordre de Saint-Benoît, dépendant de l'Abbaye de Saint-Melaine [Note : Déclaration faite en 1750 par Dom Nicolas Aubert, Prieur de Hédé].

Mais ce ne fut pas tout et, les maisons concédées contenant des habitants, les donateurs jugèrent bon de reporter aux donataires leurs droits sur ces hommes en faisant du Prieuré un Fief et Bailliage relevant de leur domaine avec les droits seigneuriaux, justice, colombier et autres, ainsi que nous le verrons.

En outre de ce don du Bailliage, il convient d'ajouter les revenus pour l'entretien du Prieur qui consistaient principalement en dîmes qui se levaient dans les paroisses environnantes.

Un Aveu rendu au Roi le 4 May 1683 a nous faire connaître d'une façon précise les droits du Prieur et les obligations qui lui, sont imposées.

« Adveu et Dénombrement des Maisons, terres seigneuryes, droicts, dixmes et autres apartenances du prieuré de Notre Dame de Hédé que tient noblement du roy, notre Sire et Souverain, soubz la Sennechaussée et Siège présidial de Rennes, noble personne Dom Claude Du Fresne, prestre religieux proffeix de l'Ordre de Saint Benoist, Prieur dudit Prieuré de Hédé, dudit Ordre, diocèse de Rennes et Procureur général de tout l'Ordre de Cluny, lequel, noble homme Sebastien Hervoches, sieur du Petitbourg, présente au roi et à nos Seigneurs de la Chambre de ses com(p)tes en Bretagne, aux fins de la procuration luy en adressée par ledit sieur Prieur passée le 3 mars 1683 par..... de Launay et Dorinier, Conseillers du Roy, nottaires gardenottes au Chastellet de Paris, pour obéir à l’arrest du 15 décembre 1682 et dont la teneur desdites choses en suit par détail.

A scavoir :

Les maisons dudit prieuré, cours et déports, coullombier à pied viff et vollant et jardin, le tout en un pourpris clos et fermé de murs de pierre massonail qui peuvent contenir un journal et demy de terre ou environ, lesdittes maisons consistantes en Basse salle, cuisine au costé, office, chambre et greniers au-dessus, celier, escuryes et galleryes au bout de laquelle il y a une porte à entrer dans la chapelle Saint Sebastien, ou est à présent le Rosaire, qui compose l'une des chapelles de l'Eglise dudit Hédé, couverte de tuilles rouges et une grange à ramasser les dixmes à costé de l'occident du portail et entrée de la cour dudit prieuré, le tout s'entrejoignant et, vers le midi, joignant l'église dudit lieu et, du septentrion aux terres et vallons à l'endroit et garennes prohibitives dudit prieuré qui contiennent environ trois journaulx de terres.

De plus une pièce de terre nommée le Clos au Prieur à présent divisé en quattre, contenant dix journaux, quattorze ceillons ; autre pièce au dessous, en jannaies, contenant trois journaux et joignant les Landes de la Magdelainne, comme aussi autre pièce de terre en paturail au Vallon, appellée la Garenne, où il y a quelques pommiers, cy-devant nommée le Clos au Prieur, contenant un journal de terre et touttes lesquelles joignant le chemin conduisant des quattre Croix de Hédé auxdittes Landes de la Magdelainne dé Hédé.

Déclare que pour parvenir aux subventions dudit prieuré, il a eu avis que la Prée et Vivier dudit lieu entre laditte pièce de dix journaux, quattorze seillons et laditte garenne est au côté vers Ouest desdittes terres; et en a été aliéné outre du domaine dudit Prieuré, environ dix ou douze journaux dont les engagistes et acquéreurs jouissent actuellement.

De plus tient et possède ledit sieur Prieur au Fieff et Bailliage qui s'estand tant en la Ville de Hédé et environs d'icelle qu'au bourg de la paroisse de Pleumeleucq et environ d'iceluy, auxquels il y a homme et estaigers sujets qui tiennent maisons et terres et doivent par chaque an six livres neuf sols sept deniers monnoie, deux bouessiaux et demy, demy godet et quart de godet de froment, mesure de Hédé ; trois bouessiaux et demy et demy-quart de godet, mesure de Tinteniac et mesure de Montfort; huit bouessiaux, deux corvées et demy, quart de corvée d'Aoust à seyer ou battre, une poulle et quattre poullets et demy, à cause duquel fieff il a droit à présent de Basse justice seullement, bien que cy-devant exercée en Moyenne.

Item apartient et est deub audit sieur Prieur une Chanson apellée Chant nuptial qui se dit par les mariées le dimanche prochain après les nopces à l'issue des Grandes messes de Hédé et Bazouges-sous-Hédé devant le simettière des dittes Eglises et en deffaut de se faire doivent soixante sols d'amande audit sieur Prieur.

Plus lui apartient la direction des Escolles dudit Hédé, Bazouges et Pleumeleuq, comme aussy lui apartient et lever de tous et chacuns les cabarettiers vendeurs et débittans vin et cildre et autres breuvages en détail en ladite Fille de Hédé et mettes dudit Hédé deux pots desd. breuvages par chacusne pipe de vente nommé Boutailiage, ou argent provenant de chasque espèce ou prix qu'il se vend au choix ou obtion dudit Sieur prieur ou son fermier.

Et dans l'ésglise Notre Dame prieuralle de Hédé touttes les prééminences, banc et enfeus dans le Chanceau et cour de laditte Esglise rétably par son prédécesseur en 1672, mesme laditte Chapelle Saint-Sébastien prohibitive, pour en laquelle entrer est une porte, sortant de laditte Chapelle dans une petite chapelle (?), grange et cour dudit prieuré et a les droicts dans laditte Esglise des oblations et offrandes qui y sont présentées, tant torches, flambeaux qu'autres offrandes et présentations, fors et réservé celles qu'on présente sur le tronc de laditte Esglise et aussy les deux tierces partyes des deniers des parroissiens qu'ils doivent aux festes sollennelles.

Item tient et jouit en laditte paroisse de Hédé et Bazouges-sous-Hédé des deux tierces partyes des dixmes et bleds de quelques espèces qu'ils soient et de la moitié des dixmes, des filasses et... aignaux et oysons et la moitié du droit de Neûme [Note : Neufme ou Neûme. — Droit que les Curés prenaient sur les biens des personnes décédées ; anciennement, c'était la neuvième partie des meubles, mais, en 1559, ce droit fut réduit à la neuvième partie du tiers des meubles. (Dictionnaire de Trévoux)] et la dixième partie du revenu des moulins de Hédé.

Et aussy en laditte paroisse de Vignoc une Dixme nommée le Grand Trait de Maigné dans l'estandue duquel il lève et jouist des deux tierces partyes de dixme de bled de touttes espèces qui y croissent par chacun an. (Grosses dixmes qui se prélèvent à la 13ème gerbe, affermées en 1762 par Dom Jan-Baptiste Giron, Prieur titulaire du Prieuré de Hédé au prix. de 150 l. au 1er janvier et 150 l. au 1er juillet de chaque année à Missire Jan Piguel, prêtre recteur de Vignoc.

Item, en laditte paroisse de Vignoc, jouist des deux tierces partyes des dixmes de bled qui croissent chacun an dans l'estandue du Dixmereau nommé la Dixme de Vaugru, qui, toutefois, en 1706, s'en trouve distrait et laissé au Sr Recteur de Vignoc pour supplément de portion congrue [Note : Ferme du Prieuré de Hédé du 12 septembre 1706, par Maître Nicolas Agnan, Prieur. Minutes de Boursin, Notaire Royal].

De plus jouist en laditte qualitté des deux tierces partyes des dixmes de touttes les espèces de bled qui se cueillissent par chascun an en la paroisse de Saint-Brieuc sous les Iffs et des deux tierces partyes du dixmereau du Trait du Bourg.

Il semble, cependant, que toutes ces dîmes n'aient pas été levées exclusivement au profit du Prieuré, mais qu'une partie en était réservée à l'Abbaye elle-même, puisque nous voyons en 1761 l'obligation de « vingt mines d'avoine moitié grosse et moitié menue, mesure de Rennes, rendues et mesurées dans les greniers de l'Abbaye à Rennes... fournissables au temps de Pâques, les droits d'entrée de ville acquittés » [Note : Ferme des Dîmes de Saint-Brieuc en 1761 pour la somme de 330 l. par Dom Jan-Baptiste Giron, Prieur. Minutes de me Cochery, Nr R1].

Plus jouist en la paroisse de Pleumeleuq de la tierce partye de touttes les dixmes qui se cueillissent en icelle et encore du Tiers sur l'un des deux Tiers appelé le Tiercelet de Bedescq [Note : Bédée] dont jouit le Prieur de Bedescq et a droict de Nopsailles, dixmes de vins, etc... sa part des Offertes qui sont présentées, en laditte Esglise et autres debvoirs ès dittes paroissses et chascunnes d'icelles à cause de sondit Prieuré, et, en outre, des droits de Neûme et de nopçailles.

Item jouist d'un Dixmereau en la paroisse de Tinteniac et aux environs de la ville, tirant sur la maison de Lamboul.

Jouist encore du Dixmereau nommé le Dixmerel du Prieuré de Hédé en la paroisse de la Chapelle Chaussée auquel il a les deux parts des Dixmes de bled seullement.

En outre, le droit d'usage au Prieur « ès forêts de Tanouarn et Hédé pour son chauffage, panage et oultre pour bastir et entretenir la maison priorale » et quelques rentes foncières dues par le Prieur de Romillé, les recteurs de Vignoc, Montreuil-le-Gast et Parthenay, le seigneur de Beauvais, en Gévezé, etc. [Note : Chanoine Guillotin de Corson. Pouillé historique de l'archevêché de Rennes, t II, p. 98].

A cause des quelles choses ledit Sieur Prieur doit à son Seigneur Roy serment de fidellitté, prières et oraisons pour la conservation de sa personne, avec Obéisance et de dire, ou faire célébrer par chascun an en basses voix trois messes annuelles qui sont trois messes en chasque semaine en laditte Esglise de Hédé pour les âmes des deffunts ducs et princes et princesses de ce pays et duché de Bretagne et, outre, dire ou faire dire la Grand-Messe ès jour de Noël et Pasques, avêq Tenèbres par trois jours de la semainne Sainte, savoir le mercredy, jeudy et vendredy.

Lequel présent aveu lesdits Hervoches audict nom fournist devant Nous, Nottaires royaux à Hédé aux fins de laditte procuration et au payement et continuation desdits debvoirs et au nom dudit Sieur Dufresne affecté et spéciallement hypotequé à sa Majesté les fruits et revenus desdittes choses pour y estre procédé suivant la Coustume et Ordonnances qu'il a ainsy voulu et consanty, partant ly avons condemné aveq sumission à notre Court de Hédé et audit Siège présidial de Rennes.....

Fait et passé en la maison dudit Hervoches audit Hédé sous son seing et les nôtres cy-mis, le quattriesme jour du mois de May mil six cent quattre vingt trois avant midy. Ainsy signé. Hervoches, Bodin et Breillu, nottaires royaux.

Jan Gautier, receveur du Dommaine, qui a eu communication du présant Adveu declare n’avoir moiens d'empescher la publication et réception du present Adveu attendu qu'il est conforme au jugement de la Réformation. Fait à Hédé, le dernier Aoust mil six cent quattre vingt trois.

Ainsy signé : Gautier ».

Le Bailliage du Prieuré avait cours « en la ville et environs de Hédé » et en la paroisse de Pleumeleuc [Note : Archives départementales d'Ille-et-Vilaine. 1 H. 30] dans laquelle il possédait aussi quelques vassaux « tant étagiers que non étagiers ».

A Hédé, il était situé dans la ville, à l'extrémité N. O. sur le plateau qui domine la vallée vers Tinténiac, borné au Nord depuis les douves de la ville jusqu'au chemin des quatre Croix [Note : Les quatre Croix s'élevaient au carrefour formé par un sentier venant du Château, en face de la ruelle du Bas-Manoir, près la Fontaine, rejoindre le pavé et la route de Rennes, à l'endroit où commençait le chemin descendant vers la Couasplaie et Tinténiac, au lieu dit anciennement « Le Chat troussé »] par l'escarpement et les rochers descendant vers la vallée sur la pente desquels se trouvait sa garenne et dont la ligne de faite était couronnée par les murs d'enclos de ses jardins et dépendances ; à l'Est par la Maison noble de Brénazé [Note : Dite « prés la ville de Hédé, c'est-à-dire en dehors des douves qui l'enceignaient ». (Aveu par me Jan des Fougerais, 1658, Reg. du greffe de la sénéch. de Hédé, n° 62)] ou Bas Manoir et ses jardins, la ruelle qui conduit des quatre Croix à l'église et les quelques maisons et jardins bordant le cimetière, relevant, en partie, tant de Saint-Melaine que du domaine royal ; au Sud, par la rue vers les douves et la porte Combourgeoise sur le chemin de Combourg et de Dol ; enfin, à l'Est, par les douves de la Ville qui le séparaient du petit bailliage des Guibarets et du faubourg de la Motte Jouhan dont il avait remplacé peut-être une ancienne chapelle.

Son étendue dans la ville était très minime ; et, y compris l'église et le cimetière, à peine d'un hectare. Mais si on y ajoutait tout ce qu'il possédait en dehors, dans les paroisses de Bazouges et de Tinténiac : Clos au Prieur, Prées, Garennes, etc., le tout pouvait représenter environ quinze à seize hectares.

Le Prieuré, compris dans le Décanat d'Aubigné, était un Bénéfice simple et régulier de l'Abbaye royale de Saint-Melaine, à la présentation de l'Abbé et des Religieux du Monastère, assujetti pour son Fief au Devoir de fidélité et d'obéissance seulement, envers le Roi.

Parmi les droits seigneuriaux appartenant au fief du Prieuré, droits de garenne, de colombier et autres dont nous avons constaté l'existence, le premier et le plus important de tous était celui de la juridiction et, par conséquent, de la nomination des officiers pour en remplir les fonctions.

Si, comme nous le dit Oger, dans son Dictionnaire de Bretagne, le Prieuré avait primitivement droit de Haute justice, celle-ci fut réduite plus tard à moyenne et même si, dans sa déclareion au Bureau du Diocèse de Rennes, le Prieur Dom Nicolas Aubert, en 1751, la qualifie encore ainsi, un autre Prieur, bien auparavant, dans son aveu du 4 mai 1683, Dom Claude du Fresne, ne l'avouait plus, comme nous l'avons vu, que « à présent Basse justice seulement, bien que cy-devant exercée en moyenne ». Les très rares actes de la juridiction du Prieuré que nous connaissons ne s'occupent que de présentations d'aveus, de ventes, de décrets de mariage... et il nous est difficile de résoudre la question.

C'était dans une maison proche le Cimetière qu'était le siège de la juridiction prieurale et que se tenaient les audiences quand il y avait lieu, et les Officiers, Sénéchal, Procureur fiscal, Notaires... étaient pris, en général, parmi les officiers de la juridiction royale qui cumulaient les fonctions.

Les obligations religieuses qui incombaient au Prieur et que l'Aveu de Dom Claude Du Fresne nous a fait connaître : messes anniversaires pour le salut des âmes des seigneurs de Hédé qui avaient fondé le Prieuré pour eux et sous leur suzeraineté, puis des ducs de Bretagne et après eux les rois de France, leurs successeurs, et c'est à ce titre que en 1462 le duc François II refuse d'agréer la nomination d'un Prieur à Hédé, quoique régulièrement pourvu par le Pape, étaient célébrées régulièrement comme aussi les messes basses et les grand'messes les jours de dimanches et fêtes ; la direction et la surveillance des écoles dont le Prieur avait la responsabilité n'étaient point oubliées et missire Jan Olivier, recteur de Bazouges, son suppléant, pouvait répondre à l'évêque de Rennes, en 1678, « qu’il y avait un Maître d'école de bonne vie et mœurs pour les garçons et que les filles allaient aux Religieuses » [Note : Archives départementales d'Ille-et-Vilaine. G. 490].

Mais, en plus de ces obligations morales, si l'on peut dire, il y en avait d'autres, de nature différente, d'ordre financier, auxquelles il avait à répondre au moyen des revenus du Prieuré.

Les Dîmes et redevances appartenant au Prieur n'étaient pas directement perçues par lui, comme nous avons eu l'occasion de le voir précédemment. Elles étaient affermées pour des temps et des prix variables suivant les circonstances, à des adjudicataires qui se chargeaient de la cueillette.

En 1751, Dom Nicolas Aubert, Prieur titulaire, affermait « les biens dud. Prieuré consistant en une maison Prieurale, grange, écurie, étable et autres bâtiments, Colombier, cour close de murs de même que les jardins, plusieurs pièces de terre arables et non arables, prés, fief et bailliage Hédé et à Pleumeleuc, plusieurs sujets tant étagiers que non étagiers [Note : Etagiers, Etagers : Domiciliés], plusieurs rentes, tant en deniers que grains, vollailles et corvées, moyenne et basse justice et plusieurs droits comme Bouteillage et autres ; en plusieurs traits de dixmes en différentes paroisses sur toutes sortes de grains, filasses, agneaux, etc... ; le tout affermé ainsi qu'il s'en suit :

La Maison Prieurale [Note : Depuis que le Prieuré était tombé en Commande et que le Prieur n'y résidait plus, c'est-à-dire depuis le commencement du XVIème siècle, la maison était mise en location et occupée par des étrangers], terres, fief, cour, jardins, colombier, mouvance et autres droits seigneuriaux, terres labourables et non labourables, prés, les dixmes de Bazouges-sous-Hédé et les deux dimereaux de la Chapelle-Chaussée et de Tinténiac sont affermés, pour, neuf ans qui ont commencé à la Saint Jan Baptiste 1749, à M. de la Mare Ville Allée, Recteur de Bazouges-sous Hédé, par bail passé le 6 février devant .... pour en payer par an la somme de 663 l. 12 s. et a donné 24 l. de denier d'entrée qui font, pour la neuvième partie la somme de 2 l. 11 s. ; le tout faisant 666 l. 3 s. 1 d.

Item, les grosses dixmes de la paroisse de saint-Brieuc sont affermées à Pierre Couapel, sr de la Chapaudais, pour neuf ans, à commencer par la récolte de 1743, par bail passé devant Morin, Notaire Royal à Rennes le 1er juillet. 1743, pour en payer par an 460 l.

Item, le tiers des dixmes qui se lèvent dans la paroisse de Pleumeleuc sur les trois tiers, et ce, à l'alternative, les Prieurs de Bédée et de Hédé choisissant sur chaque tiers et qui, pour cette raison, sont affermées à différents fermiers qui les lèvent, ainsi sont affermés : l'un à Joachim Chenard pour neuf ans par bail passé devant Tumoine, Notaire Royal à Rennes, le 14 septembre 1748, pour en payer 540 l. dont la moitié appartient au Prieur de Hédé ; l'autre tiers affermé à Joseph Legendre par bail, passé devant Tumoine le 16 juillet 1746, pour six ans à commencer à la récolte et en payer par an 250 l. pour la moitié appartenant au Prieur de Hédé et autant à celui de Bédée.

Le Trait de Maigné, en la paroisse de Vignoc, affermé à M. Biguel, prêtre, recteur de Vignoc, et à Julien Lebrun pour six ans, qui ont commencé à la récolte de 1747... pour en payer par an 240 l.

Total du revenu du Prieuré de Hédé, charges non déduites, 1.886 l. 3 s. 1 d. ».

Les mêmes biens, affermés, le 12 décembre 1706, à Monsieur Sébastien Hervoches, Sr de la Ville-Allée, n'avaient produit que 1.700 l.

En regard de ces recettes il faut placer les charges et dépenses. Celles-ci en 1751 montent à 1.089 l. 1. s. 9 d., se décomposant ainsi :

« Les réparations de la maison Prieurale et ses dépendances et clotures, depuis et compris 1741 jusqu'en 1770 suivant les extraits collationnés des comptes-rendus, se montent à la somme de 800 l., ce qui revient pour année commune… 80 l.

Plus est chargé de payer à M. le recteur de Bazouges pour la desserte de l'Eglise de Hédée la somme, par an., de ....... 200 l.

Plus est chargé de payer pour l'honoraire de trois messes par semaine en l'église de Hédé ..... 93 l. 12 s.

Plus le Prieur est chargé de payer les droits synodaux qui se montent par an .... 6 l. 19 s. 3 d.

Plus au Chapitre de Saint Melaine, de redevance ........ 7 l. 10 s.

Plus le Prieur paie par an, aux décimes du Roi 409 l.

Le revenu net du Prieuré en 1751 est donc de 1.886 l. 3 s. 1 d. — 797 l. 1 s. 4 d. = 1.089 l. 1 s. 9 d. » [Note : Déclaration par D. Nicolas Aubert, Prieur titulaire].

Aux charges qui incombaient normalement au Prieur de Hédé, il y en eut une qui ne fut, sans doute, que passagère, mais que celui-ci, Olivier de Lespinay, eut à payer, au moins une fois vers 1403, aux Papes résidant à Avignon [Note : « In decanatu de Albigneyo (Aubigné ), De prioratu de Hedeyo fuit provisum auctoritate ordinaria fratri… de Espineto (Olivier de Lespinay) et restant XX franchi ; taxatur XL ; restat residuum.. Item tenetur pro procuratione annorum nonagesimi septimi et octavi in summa XXXV gr. Ecclesia de Basougiis subtus Hédé vacavit nuper et fuit provisum fratri .... Piedevache qui non composuit et est in curia, litigans. »Annales de Bretagne, t. XVIII, p. 198. — Mesures fiscales exercées en Bretagne par les papes d'Avignon].

Ce budget du Prieuré n'était pas absolument fixe. En ce qui concernait les recettes, il dépendait de l'empressement que les adjudicataires mettaient à enchérir. D'autre part, si les dépenses obligatoires se payaient exactement parce qu'il y avait là des créanciers qui n'étaient pas disposés à attendre, il en était une, celle de l'entretien des bâtiments, dont le règlement était quelquefois beaucoup plus difficile parce qu'elle était essentiellement variable selon les temps et les circonstances, passant, ainsi que nous venons de le voir dans le compte de Dom Aubert, de-la somme. de 800 l. pour dix années (1741 à 1750) ; c'est-à-dire 80 l. en moyenne, au chiffre considérable de 432 l. 4 s. 1 d. pour la seule année 1777. Cette différence tenait à plusieurs causes dont la principale était le changement qui s'était produit dans la nature du Prieuré devenu Commandataire.

A la fondation du Prieuré, les Prieurs furent naturellement des moines de l'Abbaye à qui furent confiés l'exercice des fonctions sacerdotales et l'exécution des charges et obligations religieuses qui y étaient attachées. Ils résidaient à Hédé et habitaient le Manoir prieural. Il était donc d'un grand intérêt pour eux et, du reste, l'Abbaye y veillait, de prendre soin de la demeure qui les abritait et de pourvoir à son bon entretien.

Au XVème siècle, il n'en fut plus ainsi. Pour une raison que nous ne connaissons point, l'Abbaye renonça à fournir des prêtres à ses prieurés qu'elle mit en Commande.

« La Commande en France était un vrai titre de Bénéfice que le Pape donne à un ecclésiastique nommé par le Roi pour un bénéfice régulier avec permission de disposer des fruits. (droits honorifiques, etc...) pendant sa vie » [Note : Dictionnaire de Trévoux].

C'était un don gracieux, soit pour récompenser un service rendu, soit pour favoriser un ami en lui fournissant des moyens d'existence, ou même, simplement, en augmentant ses revenus.

La plus grande partie des Prieurs Commandataires nommés à Hédé furent des Moines Bénédictins, appartenant non seulement à Saint-Melaine, mais à d'autres Abbayes. Cependant, ce n'était point une règle absolue et nous verrons quelquefois, à côté d'eux, des Religieux d'autres Congrégations et même un évêque, h. et p. Messire Guillaume. Le Prestre, évêque et comte de Cornouailles, qui ne dédaignait pas d'ajouter à ses revenus le maigre produit de Hédé.

Toutefois, même après l'établissement de la Commande, les nouveaux Prieurs n'abandonnèrent pas immédiatement, semble-t-il, le manoir prieural et continuèrent à vivre, pendant de longues années encore, à Hédé et à administrer leur église.

Si nous ne pouvons rien dire de ceux qui vécurent au XVème siècle, parce que les documents nous manquent, nous pouvons, du moins, citer à la fin du XVIème, parce que nous les trouvons dans les registres de la paroisse, Messire Charles de Tournemine, vivant en 1560 et 1565 et deux fois parrain, puis Dom Jehan de Brénoguen, Sr du Prix (?), demeurant à Hédé, avec la demoiselle Marie de Brénoguen, sa sœur. A diverses reprises, en 1572, 1576, 1577, 1587, celui-ci tient des enfants sur les fonts baptismaux jusqu'en 1606 qu'il mourut et fut inhumé le 30 juillet, dans son église, à vis le grand autel.

Nous en voyons même un troisième, Dom Bernardin Solfy, peut-être simplement de passage, qui n'apparaît qu'une seule fois, en 1642, comme parrain.

On admettrait difficilement que Messire Charles de Tournemine qui avait des attaches à Hédé, puisqu'il était le beau-frère de René, dernier des Bintin, seigneurs de Bazouges, et surtout Dom Jean de Brénoguen qui y avait vécu plus de trente-cinq ans, n'aient pas accompli à l'église toutes les fonctions et obligations de Prieur, sinon seuls, du moins avec l'aide d'un Sub-Curé.

Mais plus tard, tous ces bénéficiaires venus de tous les points de la France : Quimper, Paris, Metz... complètement étrangers à Hédé, où ils n'avaient jamais paru, qui n'avaient jamais mis les pieds dans leur Prieuré inconnu pour eux, qu'ils n'appréciaient qu'au point de vue du produit, n'ayant qu'un seul but, celui de tirer du bénéfice qu'on leur avait donné tout ce qu'il pourrait rendre, croyaient avoir suffisamment fait en subventionnant le Recteur de Bazouges pour les remplacer dans le service de leur église et étaient, par conséquent, peu disposés à faire, pour l'entretien de maisons et de bâtiments qu'ils ne connaissaient point, et qui ne les intéressaient pas davantage, des dépenses, même les plus indispensables, mais qui auraient pu diminuer leur revenu.

Un procès-verbal fait en 1646 va nous montrer en quel état épouvantable de ruines l'incurie et la rapacité de l'Evêque de Cornouailles, si puissamment riche, cependant, qu'à sa mort il laissait à ses frères et sœurs la somme considérable de 100.000 écus, avait laissé tomber le Prieuré de Hédé et les frais énormes qu'il allait en coûter pour le relever de ses ruines et contre lesquels protestaient ses successeurs en s'adressant aux héritiers.

Le Procès-Verbal [Note : 13 novembre 1646. — « A la demande de Missire Jérôme de Laubrière, prêtre, docteur en théolologie, Abbé, chanoine de la Sainte Chapelle du Roi à Paris, Prieur commandataire du Prieuré de Notre-Dame de Hédé, sont assignés à comparaître pour l'établissement d'un procès-verbal de l'état des maisons, fuyes, clos..., cours et jardins du Prieuré, dame Renée Le Prestre, dame du Fretay, veuve de deffunt Messire Jean Piron, Vt seigneur de Maleguen (?) héritière de feu Messire Guillaume Le Prestre, évesque de Cornouailles, dernier paisible tittulaire du prieuré, écuyer Jacques Grignart, seigneur de la Jehardière, héritier de dlle Madeleine Grignart, sa sœur, dame de la Mordelière, compagne de Messire Charles Gouyon, assisté de Messire François Grignart, seigneur de Pont-Harouart, Conseiller au Présidial de Rennes, écuyer Pierre Broc, sr de la Tuvelière, les tous cy-dessus jouissant de la dite maison du Prieuré, a comparu pour assister au procès-verbal. Messire Jérôme de Laubrière, par arrêt du 27 janvier dernier (1646) a obtenu la pleine maintenue du prieuré de Hédé, sous le nom de h. et p. seigneur, Messire Scipion Dielette de Aquaviva, duc d'Atrye ...., prieur titulaire s'en résignant ..... restitution de fruicts vers tous ceux qui ont joui ..... Sont appelés pour assister au procès-verbal, led. sieur de la Tuvelière, les héritiers dud. feu Sgr Evêque de Cornouailles, dernier titulaire paisible dud. prieuré, lequel a vacqué par son décès arrivé le 8 novembre 1640, après avoir joui paisiblement plus de 12 ans dud. prieuré, pour être obligés à mettre (?) les réparations et ruines dud. prieuré, arrivés depuis l'année 1627 que led. Sgr de Cornouailles a pris possession... »] constate que « au grand portal et portillon de lad. maison et entrée du Prieuré, depuis le sommier de la voûte est en quelque façon dégradé pour êtré renversé et penchant sur la cour et être nécessaire de le redresser avec chaux et sable et pierres de taille... le chappeau dud. portal parut vide et caduc ; il en est besoin d'un neuf. Le portail n'a aucune porte, quoiqu'il paraisse y en avoir eu cy-devant, dont l'ouverture est vers la cour...

Entré dans la cour, avons trouvé les ruines d'une grange ou écurie contenant 41 pieds de long en dehors et 22 pieds de large, dont les murailles entièrement ruinées sauf le pignon donnant sur la rue...

Dans la muraille faisant closture et ayant cours vers les doulves de Hédé, avons vu une brèche proche la porte qui répond sur lesd, doulves contenant de largeur 7 pieds et 7 p. 1/2 de hauteur, même être besoin de relever de 20 pieds et mesme lad. muraille surplombe sur lesd. douves de 30 p. ou environ, comme aussi, à la porte de la muraille proche la brèche, la Chapelère de bois estre entièrement pourrye... Il y faudra une porte de bois.

A la muraille faisant closture du jardin dud. prieuré il y a 20 pieds vers septentrion caducs à refaire, et, vers le pignon de la maison de Jan Du Bois, une brèche de 42 pieds... etc.

La porte de la cour du jardin sans clef ni clavure ..... ; comme aussi la porte de la fuye batte de pierre de taille laquelle, par le dehors, il reste refaire à 4 pieds de hault et raccommoder, comme aussi la charpente de lad. fuye, la plus grande partie des sablaires (sablières) d’icelle pourrye et gastée..., et croit qu'il sera nécessaire de descendre toute la charpente de lad. fuye pour y assoir esd. sablaires..... et, la couverture de lad. fuye estant d'ardoises et de tuilles rouges et de bois presque ruinée, faudra bien quatre milliers d'ardoises, 800 de lattes, 20 milliers de clous... par suite du mauvais entretien de la couverture...... ; qu'il n'y a plus aucun pigeon dans cette fuye dont on s'est servi pour loger des fagots, tandis que, lors de la prise de possession par ledit Evêque de Cornouailles elle était en bon état, remplie de nombre de pigeons qui pouvaient donner un revenu de 25 escus de rente ».

Le lendemain, on visite la maison. On trouve d'abord « une étable ruinée, sans portes, entièrement à refaire ; une petite maison adjacente au grand corps de logis à son pignon où est la cheminée aussi entièrement à refaire, il n'y a plus aucun plancher ni poutres pour les deux étages, ni couvertures.

Le Grand logix principal dud. Prieuré advisagé à soleil couchant, contenant de longueur quarante et cinq piedz et vingt quatre de large, joignant la porte par laquelle on entre est ancien et fendu depuis le haut jusques en bas et la haute voulte de la porte foullée, en sorte qu'il y en a quelques pierres cassées ; ladite ruisne provenant du manque de recharges de taille, comme aussi les deux grandes lucarnes de pierres de taille estantes au hault du grand logix vers la cour sont penchantes et menacent ruisnes ainsi que celles qui répond sur le jardin au bout septentrional qu'il est besoin de rassoir, auxquelles il est besoin de meptre des contrevens et aulx fenestres du logix et, avons vu les costières dud. logix vers le jardin entre les quatre croizées fait ventre et menace ruine ainsi que la chausse (?) de la garde robe qu'il est nécessaire d'en faire les murailles et des trois tuiaux de cheminée, celui au pignon vers l'église est aussi à refaire.

En entrant dans le logix, on trouve la porte respondante en la cour estre toutte pourrye par en bas, n'ayant plus de penture en bas... et ne valoir rien.

Dans la salle basse, il n'y a à la porte ni clef ni clavure, mais un simple loquet avec lequel elle ferme seulement en dedans... ; la croizée de la fenestre de lad. salle répondante sur la cour est pourrye et n'a aucune vitre à présent quoiqu'il paraisse qu'il y en ait eu auxdits huissets de lad. fenestre ; lad. croizée à refaire, à vitrer et le mur en dessous. Ladite salle n'est plus pavée d'aucun carreau.

En passant de lad. salle dans la cuisine on voit que la porte de communication ne tient que par la panture d'en haut et n'a plus ni clef ni claveure comme à aucune autre porte dud. logix sauf à celle de la chambre haulte. La carrée de la fenêtre de la cuisine ne vaut rien.

L'escalier pour monter dans la chambre haulte est en entier nécessaire de refaire.

Dans la salle haulte avons veu les fenestres et croizées d'icelle respondantes sur la cour et jardin pourryes et uzées, spécialement celle respondante sur la cour, laquelle ne ferme que par le haut, où les viltres sont presque en entier rompues et brisées et à celle correspondante sur le jardin y avait trois panneaux de viltres seins et antiers ; à l'aultre panneau il manque dix lozanges... et à la chambre estant à costé de lad. salle haulte, à la porte par laquelle on entre de l'une dans l'autre, il n'y a de ferrure et, aux fenêtres de lad. Chambre correspondante sur la cour et jardin, avons veu le bas de la carrée de celle sur la cour ostée et les deux bas huissetz de lad. fenestre à refaire à neuf... et aux autres fenêtres savons celle correspondante sur le jardin que trois panneaux de vitre auxquels il manque trois losanges et y manque un panneau entier et à celle correspondante sur la cour manque trois panneaux de vitres et y en a un rompu par moitié.

Il n'y a plus aucun contrevent de ceux qu'y avait mis à toutes les fenestres des chambres haultes le Sieur de la Roue, alors Prieur.

Avons trouvé qu'aux quatre chambres dud. logix les planchers sont pourris, qu'il fauldra les refaire et mettre une poultre neufve, au moins vingt soliveaux, comme aussi quatre coinsons des fenêtres de la salle haulte sont fendus depuis le plancher d'en bas jusqu'au plancher d'en haut, ce qui provient de la charge des lucarnes.

Et, en hault de la montée par laquelle on va au grenier, avons trouvé une porte sans clef ni claveure et, aux quatre lucarnes servant de fenêtres aud. grenier, n'y avons veu aucune fenestre de bois...... ; que la charpente est à enlever en entier pour réparer et refaire la couverture » [Note : Archives départementales d'Ille-et-Vilaine. Registres du greffe de la sénéchaussée de Hédé].

En somme maison entièrement à refaire et l'on ne comprend pas bien comment les seigneurs de la Jéhardière et de la Tuvelière peu habitués, sans doute, au confortable dont le nom n'existait même pas à cette époque, et si peu difficiles qu'on fut alors clans la recherche des commodités de la vie, avaient cependant accepté de loger dans un semblable taudis.

Maintenant que nous connaissons l’origine du Prieuré, se pose la question de savoir dans quelle catégorie il faut placer son église de Notre-Dame de Hédé, église paroissiale ou chapelle, et quels services elle était appelée à rendre à la population.

Le Prieuré et son église furent-ils dès l'origine érigés en paroisse ? Il est difficile de se prononcer, nous dit M. le Chanoine Guillotin de Corson [Note : Pouillé historique de l'archevêché de Rennes, t. IV, p. 709]. Il ajoute que la tradition s'emble dire qu'il y eut, d'abord, deux paroisses, la première à Bazouges, administrée par le Recteur, l'autre à Hédé par le Prieur, et que la reunion se fit après la sécularisation du Prieuré.

Quant à nous, nous croyons fermement à l'exactitude de la tradition, mais, à défaut des preuves authentiques qui nous manquent pour l'affirmer, nous allons pouvoir, j'espère, réussir à réunir un certain nombre d'éléments suffisants pour en démontrer tout au moins la grande probabilité.

Il est certain, tout d'abord, que, dans les derniers siècles avant la Révolution, l'église du Prieuré n'était plus considérée comme paroissiale et qu'elle dépendait alors, au spirituel, de Bazouges-sous-Hédé qui avait le titre de paroisse ; c'est donc à une époque plus ancienne, celle des premiers temps après la fondation, qu'il nous faut chercher.

D'autre part, nous savons que, lorsque on choisissait sur le territoire d'une paroisse, à cause des avantages de sa position défensive, un emplacement pour y élever une place forte ou un château, celui-ci, qu'il restât isolé ou qu'il se formât autour une agglomération, bourg ou petite ville, relevait toujours de la paroisse, et son église, si le seigneur croyait devoir en bâtir une à l'intérieur de ses murailles, n'était considérée généralement que comme une chapelle particulière.

C'est ainsi que pour la petite ville de Bécherel, la paroisse est Plouasne; pour La Guerche, Rannée ; pour Matignon, Ploubalay ; pour Quintin, Saint-Thuriau ; pour Chateaubriand, Saint-Jean de Beré... ; etc., etc.

En fût-il de même pour Hédé ? Nous ne le pensons pas et nous allons dire pour quelles raisons.

Certes, l'église de Hédé était située dans cette partie de la ville entourée de douves qui formaient comme le baile extérieur du château et ses auteurs étaient les seigneurs de Hédé, mais c'est tout.

Elle n'avait point été bâtie sur le territoire de Bazouges. Hédé et Bazouges avaient une existence entièrement distincte. Si on cite en 1162 parmi les terres des Templiers l'étang et les Moulins de Hédé, si on parle constamment au XIIème siècle du Château de Hédé pris, repris et fortifié ; si, dès le XIème siècle, la rencontre, en 1085, du duc Alain Fergent et de Geoffroy de Dinan n'est pas dite avoir eu lieu à Bazouges, mais « sur la chaussée de l'étang qui conduit au château », c'est que Hédé était tout alors et que Bazouges, avec ses trois ou quatre maisons, à peine, groupées autour de son clocher, pays de landes et de bois, n'avait aucune importance.

En ce qui concerne l'administration, la séparation est encore plus complète. Hédé est une petite ville qui a ses institutions propres, ses franchises, dont les Bourgeois réunis en Communauté gèrent leurs affaires directement sans que, alors même qu'elle dépendait de Bazouges au point de vue spirituel, le Général de cette paroisse ait eu à s'en mêler.

Il en était de même pour les églises. Elles ne furent jamais confondues. Nous touverons « ecclesiam ou ecclesias ou ecclesie de Hadeio, de Hedeio, de Hedey, de Hédé » dans les mêmes actes et simultanément avec « ecclesiam de Basogetis, Basogiis, Basogetarum » [Note : Voir Cartulaire de Saint-Melaine] et même vers 1400 à côté du Prieuré (Prioratu de Hedeyo), ecclesia de Basougiis-subtus-Hédé [Note : Annales de Bretagne, t. XVIII, p. 198]. Toutes ces églises sont coexistantes, mais entièrement indépendantes et égales en droits sans que rien indique la supériorité de l'une sur l'autre.

L'église Notre-Dame de Hédé possédait tous les droits qui constituaient la paroisse.

Elle avait ses fonts baptismaux pour recevoir l'enfant à sa naissance, son cimetière pour ceux que Dieu rappelait à lui, l'autel où se bénissait l'union des époux, le confessionnal où l'on venait chercher le pardon de ses fautes et, en conséquence, ses registres de baptêmes, de décès et de mariages. En outre, chaque dimanche, en plus des messes matinales, on y célébrait les grands-messes dominicales, comme aussi les jours de fêtes et, tout particulièrement et, plus solennellement, à Pâques et Noël.

Tous ces droits et privilèges, elle les conserva jusqu'à la fin, même alors qu'elle avait perdu son titre de paroisse.

Comment se fait-il donc que cette église qui avait joui pendant plus de quatre cents ans de ses droits paroissiaux en ait été, tout d'un coup, réduite à la position amoindrie de Trêve de Bazouges.

Cela cependant peut s'expliquer. Aussi longtemps que le Prieuré fut occupé par les moines de Saint-Melaine, ceux-ci habitant la maison prieurale, jouissant de tous les revenus qui y étaient attachés, n'ayant d'autres soucis que l'accomplissement de leur ministère, remplissaient exactement les fonctions dont ils étaient chargés, mais lorsque le Prieuré devint Commandataire vers le milieu du XVème siècle, la situation changea complètement et voici comment le fait dût se produire.

Le Prieuré mis en Commande n'était plus alors considéré par le nouveau titulaire, ainsi que nous l'avons dit précédemment, qu'au point de vue du revenu à en tirer ; mais, comme à ce revenu étaient inhérentes des obligations sacerdotales et qu'il n'y avait plus de religieux attitrés pour les remplir ; que le nouveau Prieur, étranger, vivant loin de son église, ne pouvait y satisfaire, il s'agit de trouver un prêtre pour les remplir à sa place.

Deux conditions étaient nécessaires : la residence d'abord, ou, tout au moins, un voisinage proche, puis un prix le plus modéré possible pour ne pas trop diminuer le profit.

La recherche ne fut pas longue. Il y avait tout auprès de Hédé et dépendant, comme le Prieuré lui-même, de l'Abbaye de Saint-Melaine, le Recteur de Bazouges qui, peu chargé de besogne et pouvant facilement, avec l'aide de quelques curés ou Sub-Curés payés soit par des fondations, soit par les aumônes des habitants, suffire à tous les besoins, présentait toutes les qualités requises. Il accepta, en effet, au prix, comme nous l'avons vu, plus haut, de 200 l. par an, d'assurer le service dans l'église Notre-Dame.

Seulement, il arriva que, étant déjà Recteur d'une paroisse et ne pouvant l'être de deux en même temps, l'une dût céder à l'autre, et ce fut Hédé, qui, comme nouvelle venue, fut sacrifiée pour devenir simple fillette ou Trève de Bazouges.

Toutefois, nous verrons que si l'église de Hédé était, en droit, soumise à Bazouges, sa situation, en réalité, resta particulière et souvent prépondérante sur celle de la paroisse et que le Recteur de Bazouges, s'il portait le titre, n'était, par le fait, qu'un vicaire ou Sub-Curé de Notre-Dame de Hédé, salarié par le Prieur pour le suppléer en l'église paroissiale « ecclesia parochialli ».

Aux temps des Prieurs de Tournemine et Dom Jehan de Brénoguen, en effet, lorsque les évêques de Rennes, par exemple, faisaient leur tournée épiscopale pour s'informer de la bonne administration du culte, procéder à l'examen des ecclésiastiques, de leurs mérites et de leurs capacités, et donner le sacrement de Confirmation aux enfants et aux adultes qui ne l'auraient point encore reçu, ce n'était point à Bazouges qu'ils s'arrêtaient, mais à Hédé où nous les voyons en 1573, 1585, 1598, 1602. C'est là qu'ils appelaient les paroisses circonvoisines ; c'est là qu'en 1719 Mgr Christophe-Louis Turpin de Crissé recevait Montreuil-sur-Ille, Guipel, Vignoc, etc. [Note : Nous ne citons que les noms des paroisses dans les registres desquelles existe une mention de ces visites] ; qu'en 1753 se présentaient à l'appel de Monseigneur Louis-Guy de Guérapin de Vauréal, le 17 juillet, la paroisse de Saint-Symphorien ; le 8 août, Aubigné ; le 9, Guipel ; le samedi 11, Saint-Germain et Montreuil-sur-Ille, à l'occasion desquelles fut dressé le procès-verbal suivant :

« Le samedi 11 août 1753, en exécution de notre Mandement du 17 juillet dernier duement publié et certifié,..... avons fait la visite de la paroisse de Montreuil-sur-Ille duement convocquée en l'église de Hédé et y avons administré le sacrement de Confirmation aux personnes qui nous ont été présentées par le sieur Recteur, entendu les témoins synodaux dans leurs dépositions, vacqué à l'examen des comptes et capacités des messieurs ecclésiastiques, en conséquence de quoi nous avons fait rapporter le présent et signé + Louis-Guy, Ev. de Rennes » [Note : Registres paroissiaux de Montreuil-sur-Ille].

Les évêques n'étaient pas les seuls, du reste, à apprécier l'importance de l'église de Hédé et certains recteurs des environs, qui y avaient comparu la reconnaissaient aussi et c'est ainsi que le Recteur de Guipel, Missire Jan Rubin, n'hésitait pas, en rappelant son ancien titre, à écrire, en 1602, dans ses registres : « Visitatio facta fuit in parochiali ecclesia de Hedeo, die tertia mensis septembris, 1602 » [Note : Registres paroissiaux de Guipel. (Décès)].

La Cour de Hédé nous apporte elle-même son témoignage en signalant le don fait, le 9 juillet 1563, par Messire Pierre du Fournet, à sa sœur Julienne, de prééminences en l'église parochiale de Notre-Dame de Hédé [Note : Registres du Greffe de la Sénéchaussée de Hédé, n° 62. (Archives départementales d'Ille-et-Vilaine)].

Mais ce n'est pas tout ; il y a mieux encore et ce sont les habitants de Bazouges eux-mêmes qui, conscients de l'infériorité de leur église et n'osant dénier à leur fillette sa qualité, nous apportent leur témoignage en laissant inscrire dans les registres de Notre-Dame de Hédé par leur Recteur ou, tout au moins, sous ses yeux et avec son autorisation, ces mentions si précises : « 1585, la visitation de Monseigneur de Rennes a été faite en l'église parrochialle de Hédé par Monsieur Cadul (?) son grand Vicaire le sixième jour de Aoust 1585 » [Note : Registres de l'église Notre-Dame de Hédé. (Décès)] ; et encore en 1598 : « Visitatio Venerandi Redonis Episcopi facta fuit in Ecclesia parochialli de Hedeio die nono mensis septembris Dni Millesimo quingen..mo nonag..mo octavo » [Note : Registres de l'église Notre-Dame de Hédé. (Décès)].

Nous ne pensons pas qu'il soit possible d'apporter une preuve plus convaincante et meilleure de l'antiquité d'une paroisse en l'église Notre-Dame que celle que nous fournissent ici les intéressés mêmes.

D'autre, part, ce ne fut pas tout de suite après l'érection du Prieuré en commande que le Recteur de Bazouges s'intitule Recteur de Hédé. Si l'arrangement conclu entre les commandataires et lui remonte au XVème siècle, tant que ceux-ci, au moins, continuèrent à résider à Hédé, il ne porte que le nom de Vicaire ou Subcuré.

En 1560, lors de la nomination de la Grosse-Cloche de Bazouges faite en l'église de Hédé, en grande solennité et à laquelle assistent neuf prêtres et tous les Bourgeois notables de la Ville au nombre de vingt-sept, ce n'est pas le Recteur de Bazouges qui préside à la cérémonie. Il n'y paraît même pas, et c'est Dom Claude Bidoche, sub-curé de Hédé, qui procède à la bénédiction.

En 1580, nous voyons Dom Bonabes Thébault, Curé de Hédé, officiant au baptême de Gilles Beziel ; en 1590, Julien Le Tournoux prend possession de la Cure de Hédé et Bazouges. Tous les trois d'anciennes familles de Hédé.

Ce n'est qu'au XVIIème siècle que les recteurs de Bazouges qui, ainsi que nous le voyons, s'étaient tout d'abord contentés, comme simples aides des Prieurs, du titre de Sub-Curé, lorsque les Commandataires délaissèrent complètement Hédé, se décidèrent à réunir les noms des deux paroisses ; encore, firent-ils comme Missire François Valliguet en 1569, le premier qui nous soit connu, qui donnait la priorité à Hédé, ou comme Missire Michel Cornée, qui se dit une seule fois Recteur de Hédé seulement et non de Bazouges et partout ailleurs Sub-Curé et, ne semble-t-il pas maintenant, avec la connaissance que nous avons de tous ces faits (sans parler de beaucoup d'autres que nous pourrions rapporter encore, s'il ne fallait s'arrêter), que nous soyons en droit, en confirmation de l'hypothèse de M. le Chanoine Guillotin de Corson et de la tradition, de dire, jusqu'à preuve contraire, au moins, que l'église de Hédé ne fut point une simple chapelle, ducale et royale pour le service du château et du seigneur auquel, il est vrai, elle devait, à titre de suzeraineté, prières et messes, mais pendant plus de quatre siècles la véritable église paroissiale de Hédé et que si, par suite de circonstances imprévues, elle avait été obligée d'accepter au point de vue religieux la situation inférieure de Trève de la petite paroisse rurale de Bazouges, elle avait gardé sa suprématie de fait et que les Bourgeois de Hédé, lorsqu'au XVIIIème siècle ils réclamaient à cor et à cris le rétablissement de leur église en paroisse, qu'ils allaient obtenir, du reste, quand survint la Révolution, ne réclamaient que ce qui leur appartenait.

voir Ville de Hédé (Bretagne) Les Prieurs du Prieuré Notre-Dame de Hédé.

(Anne du Portal).

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