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Landerneau sous le 1er Empire.

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L'Empire est proclamé ; beau geste de l'abbé Le Gris-Duval — conscriptions militaires — couronnement d'une rosière. Pillet maintient le schisme ; Pillet et l'Evêque.

Le 18 mai 1804, Bonaparte était proclamé Empereur et prenait le nom de Napoléon Ier ; le 2 décembre suivant il se faisait sacrer par le Pape à Notre-Dame. La Constitution de l'an VIII n'eut que peu de retouches à subir pour devenir la Constitution impériale (Constitution de l'an XII) et la dictature continua.

Le soldat couronné voulut tout courber sous son joug, il rêva même de mettre la main sur le pouvoir spirituel. En mai 1809, à Schoenbrunn, il alla jusqu'à décréter la déchéance de la puissance temporelle du Pape et la réunion de ses Etats à l'Empire. « Successeur de Charlemagne, disait-il, je reprends au Saint-Siège la donation de mon ancêtre ». Pie VII répondit au décret de Schoenbrunn par une Bulle d'excommunication. Napoléon interdit la publication de cette Bulle. C'est alors que l'abbé Le Gris-Duval, de Landerneau, donna l'exemple d'un audacieux courage. Il alla afficher un exemplaire de la Bulle sur la porte même de l'église Notre-Dame, à Paris.

Tôt après, le despotique empereur brisait un mariage douteux sans en référer au Pape. Treize cardinaux s'abstinrent d'assister à la nouvelle union de Napoléon avec la fille de l'empereur d'Autriche. Furieux, l'empereur fit interner ces cardinaux, réduisit leur traitement et leur interdit de porter les insignes de leur dignité. L'abbé Le Gris-Duval se mit à quêter pour eux près des familles catholiques et c'est lui qui nourrit les « cardinaux noirs ».

Pendant ce temps, la vie à Landerneau s'écoule au bruit des batailles. Chaque victoire y est célébrée par un Te Deum et l'on sait quel fut le génie militaire de l'aigle impérial. De plus, à tout moment, ce sont des levées de troupes. C'est d'abord la conscription qui porte toujours sur quatre années, comme le montre l'arrêté suivant :

Le Préfet du Finistère, vu le Sénatus-consulte du 10 septembre qui met à la disposition du Gouvernement 80.000 conscrits, pris sur les classes 1806, 1807, 1808, 1809 ; vu le décret impérial du 12, contenant les dispositions, relatives à ces levées, arrête :

Art. 1. — Les conscrits dont las noms seront portés sur les listes se réuniront à Quimper ; les jours désignés sant :

Pour les conscrits de 1806, le 17 octobre.

Pour ceux de 1807, le 20 octobre.

Pour ceux de 1808, le 23 octobre.

Pour ceux de 1809, le 26 octobre.

Art. 2. — Le contingent du Département du Finistère, porté au tableau n° 1 annexé au décret impérial du 12 septembre est de 896 hommes ; savoir 196 pour la classe 1806.

233 pour la classe 1807.

259 pour la classe 1808.

208 pour la classe 1809.

Arrêté à Quimper le 29 septembre 1808.

MIOLLIS.

En 1811, le canton de Landerneau dut fournir 142 conscrits.

A la mairie de Landerneau on trouve de nombreuses formules imprimées et rédigées comme celle-ci :

Landerneau, le 23 août 1806.

Le Maire de la ville de Landerneau, en conformité de l'article VIII du Décret impérial du 8 fructidor an XIII, signifie au Sieur..., conscrit de la dite ville pour l'an 1806, qu'il ait à se trouver dimanche 31 août, à 6 heures précises du matin en la salle de l'Hôtel de ville pour concourir aux opérations de la conscription et à la désignation du contingent.

Les conscrits même ne suffisant pas, on fait appel aux hommes plus âgés. On lit dans le Cahier des Délibérations du Conseil :

18 mai 1809. Arrêté du Préfet qui ordonne la levée et la formation de 20 compagnies d'élite dans le Département du Finistère pour subvenir en cas de besoin à la défense des côtes ; le Sous-Préfet a fixé à 55 hommes le contingent à fournir par la commune de Landerneau. On fera appel à tous les hommes retraités ou non et si possible sans enfants.

Dans la commune de Landerneau, l'appel ayant été fait, on a trouvé 91 veufs sans enfants, on a tiré au sort 55 parmi eux et on les a prévenus qu'ils seront incessamment appelés à Brest pour l'organisation des compagnies.

Cela ne suffisant pas encore, les familles aisées sont invitées à former des gardes d'honneur, c'est-à-dire, à donner de leurs enfants qu'elles équiperont et armeront à leurs frais ; trois familles de Landerneau acceptèrent, en maugréant un peu, de concourir à la formation de ces gardes.

Enfin, vers la fin de l'Empire, le besoin de soldats fit lever des jeunes gens de 19 ans, les « Marie-Louise » comme le peuple les appela.

La gloire militaire de Napoléon a donc coûté cher au pays.

Le blocus continental, en ruinant le commerce, ajouta la misère à tous ces maux. On lit dans le Cahier des Délibérations à la date du 2 novembre 1809 :

La ville de Landerneau a perdu tous les établissements publics qui augmentaient sa population et ses ressources. Le commerce qui faisait toute son aisance, qui autrefois était, même pendant la guerre, alimenté par les mouvements du port de Brest, est maintenant à peu près nul depuis le blocus et la cessation des armements. Dans cet état de choses, l'agriculture est négligée, ses produits sont sans valeur, les propriétaires sans moyens, les ouvriers sans travail. Sur une population de près de 4.000 âmes ; l'indigence est telle qu'il s'est présenté 800 aux distributions de pain aux fêtes publiques ; la liste en est conservée à la mairie...

On dut taxer les comestibles ; c'est ainsi qu'on établit le tableau suivant :

Pain mollet et de fine fleur : 0 fr. 33 le kilo.

Pain de froment avec sa fleur : 0 fr. 22 le kilo.

Pain gris ouhlanc, dit bon et mauvais : 0 fr. 18 le kilo.

Pain méteil : 0 fr. 16 le kilo.

Boeuf : 0 fr. 70 le kilo.

Veau : 0 fr. 65 le kilo.

Mouton : 0 fr. 60 le kilo.

Vache et génisse : 0 fr. 45 le kilo.

Le sucre provenant des colonies, où l'on cultivait la canne à sucre, n'arrivant plus dans nos ports par suite du blocus, on songea à utiliser la recette jadis donnée par Olivier de Serre, à tirer le sucre de la betterave. Napoléon ordonna que 100.000 arpents de terre fussent, en France, livrés à la culture de la betterave. Le maire de Landerneau réunit à la mairie 18 cultivateurs ou propriétaires et leur communiqua l'ordre de l'empereur. Ceux-ci acceptèrent à condition que dans le pays on établisse une fabrique de sucre assurant des débouchés. Cette assurance ne pouvant leur être donnée, un seul propriétaire accepta l'essai de cette culture, M. Améline de Cadeville, qui reçut du gouvernement une once et demie de graines.

Malgré toutes ces levées de troupes et toute cette misère, le sentiment patriotique ne s'affaiblit pas dans la population de Landerneau. Quand la nouvelle de la défection du général Yorck, lors de la retraite de Russie, fut connue dans la ville, ce fut une protestation dont le maire fut l'interprète au Conseil municipal.

26 janvier 1813. Messieurs, un cri d'indignation est sorti de la capitale à la nouvelle de la défection du général Yorck, vous l'avez entendu et dès lors vous avez pensé que dans cette circonstance tout bon Français devait signaler son profond dévouement pour notre auguste souverain et déjà un de vous, Messieurs, à fait hommage à Sa Majesté l'Empereur et Roi, d'un de ses fils qu'il a offert d'habiller et d'équiper à ses frais. Nous partageons tous ses sentiments et c'est pour remplir vos vœux que je me suis empressé d'obtenir l'autorisation nécessaire pour vous assembler légalement.

Je sais que nos moyens ne sont plus ce qu'ils furent dans des temps déjà éloignés, nos établissements publics ont été transférés dans des cités plus heureuses ; notre commerce se porte ailleurs. Mais notre zèle est sans borne et c'est avec confiance que je vous propose d'offrir à Sa majesté 2 cavaliers montés, habillés et équipés aux frais de la commune pour entrer dans les nombreux escadrons que tout l'Empire va s'empresser d'organiser.

On choisit pour rédiger une adresse à Sa Majesté MM, Goury, Lacaze et de Crésolles.

Deux événements seuls vinrent à Landerneau pendant toute la durée de l'Empire rompre la monotonie de ces dispositions militaires et économiques.

C'est d'abord le couronnement d'une rosière.

« Assemblée du Conseil du 10 décembre 1807.

Le Conseil municipal assemblé sous la présidence de M. le Maire et composé avec lui de MM. Bourhis, Gineste, Le Roux, Mazurié, Keroualen fils, Renault, Taylor, Cruzel, 0llivier père, La Caze, Le Bègue, Le Gualès, de Réals, Le Guen, Goury consultés sur le choix et l'élection d'une rosière en exécution de l'arrêté de M. le Préfet du Finistère du 1er de ce mois.

Lecture a été faite du dit arrêté et, avant de passer outre, considérant que le choix d'une Rosière est un acte qui sort de la classe ordinaire des affaires administratives, et qu'il est convenable d'y appeler les personnes qui par leurs places et par les fonctions qu'elles remplissent peuvent donner des renseignements utiles.

Le Conseil a émis le voeu de s'adjoindre M. le Juge de Paix, les deux principaux ministres du culte et MM. les adjoints-maire.

M. le Juge s'est fait excuser, M. Bodros prêtre desservant provisoirement la cure, MM. Jacob, prêtre, Cœuret de Jecqueville et Le Bourg fils, adjoints-maire, se sont rendus à l'Assemblée et réunis au Conseil.

M. le Maire a présenté une liste de jeunes personnes de cette commune de l'âge de 18 à 28 ans, parmi lesquelles le choix de la Rosière pouvait avoir lieu et il a invité les membres de l'Assemblée à y ajouter toutes celles qu'ils jugeraient à propos. Ce qui a été fait. La liste ainsi formée, elle a été épurée et réduite à 6 au scrutin secret et à la majorité relative. Les six qui ont obtenu la majorité des suffrages sont : Marie-Jeanne Le Moal. Marie-Yvonne Chapalen, Angélique Lazennec, Yvonne Hélouet, Augustine Lazennec et Marie-Anne Le Saout.

Procédant ensuite à l'élection de la Rosière sur cette liste de six à la majorité absolue des suffrages, un premier scrutin n'ayant pas atteint le but, l'on est passé à un deuxième, par le résultat duquel, le nombre des votants étant de 19, Angélique Lazennec, fille de Hervé et de défunte Isabelle Cessou, a obtenu 13 voix, et en conséquence a été proclamée rosière.

Il a été arrêté que dimanche prochain 13 de ce mois, jour auquel est fixée la fête du Couronnement de S. M. l'Empereur et Roi, le maire, les adjoints et le Conseil municipal, après avoir assisté au Te Deum qui sera chanté dans l'église paroissiale, se réuniront dans la salle de la Mairie, qu'une députation de six membres, accompagnée d'un détachement de la garde nationale et de la musique, ira inviter la dite Angélique Lazennec à s'y rendre avec sa famille et ses amies ; qu'à son arrivée, il sera fait une décharge de boîtes sur le quai et que, rendue dans la salle, elle sera complimentée par M. le Maire qui lui présentera une rose et lui remettra une expédition de la présente délibération pour assurance de la dot de 600 francs qui lui sera payée par la Commune lors de son mariage...

Pendant cette cérémonie, les cloches sonneront aux trois églises, et ensuite la dite Lazennec sera reconduite chez elle de la même manière qu'elle aura été conduite à la Mairie. Des danses termineront la fête... ».

Le 21 mai 1811, ce fut la célébration de la fête de la naissance de S. M. le roi de Rome. La veille on fit une distribution de pain et de viande aux pauvres, il y eut illuminations et le lendemain il y eut danses et jeux.

Au point de vue religieux, fort de l'appui du Préfet, fort surtout de sa qualité de fonctionnaire, Pillet entretient la division. Les anciennes religieuses de l'hospice, ayant jadis prêté serment, ne veulent d'autre directeur que Pillet. De plus, il est le conseiller et le chef de tous les ecclésiastiques qui ont juré. « Malgré ce qui a été convenu, M. Pillet dit sa messe à Saint Julien et affecte de ne la dire que là, écrit M. Jannou à l'évêque ; il y a un confessionnal et, par les personnes qui le fréquentent, on devine que c'est M. Pillet qui est l'obstacle à la pacification religieuse ». Mais Pillet a l'assentiment du Gouvernement, et l'évêque est réduit à répondre au curé dans cette lettre conservée dans les papiers de la Fabrique, et datée du 27 février 1807 :

« Laissez M. Pillet manquer à ses engagements et n'entamez aucune discussion avec lui. Le moment viendra où je lui prouverai que s'il veut être un ecclésiastique indépendant, je saurai être un évêque ferme. De la patience, Monsieur le curé, Dieu nous en donne l'exemple. Croyez que j'observe tout, que je marche avec fermeté à mon but qui est celui de l'ordre et de la paix dans mon diocèse... ».

L'évêque, en effet, travaillait tout doucement à écarter l'obstacle qu'était Pillet à la paix religieuse de Landerneau. Le moment devint propice, quand le préfet, M. Rudler, grand ami de Pillet, fut remplacé par M. Miollis, qui était chrétien pratiquant et devait faire élever ses fils au collège de Saint-Pol. Pillet lui-même sentit le danger, car il éprouva le besoin d'écrire à l'évêque, non pas pour se disculper, mais pour se vanter ; nous nous excusons de donner ce long factum, mais il peint si bien le bonhomme !

« Monseigneur, A l'âge de 23 ans et demi, je fus nommé à la succursale de Saint-Julien et j'y ai exercé le ministère pendant 9 ans et tout le monde sait la considération dont je jouissais. Je fus élu à la cure de Landerneau sans aucune participation de ma part et bien à mon insu ; les larmes, les prières des habitants ne me laissèrent pas la liberté de refuser et, malgré le dessein que j'avais formé à la vue des troubles naissants de me retirer du ministère, je me vis forcé d'accepter. Aussitôt se manifesta une allégresse générale. J'ai exercé jusqu'à mon remplacement mon ministère avec toute la dignité qu'il comportait. Les églises que je servais étaient très fréquentées, la pratique des sacrements éprouva peu de diminution. Aidé d'un clergé assez nombreux, nous pouvions faire face à tout. Je me suis opposé avec fermeté à l'avilissement du ministère sacré.

Voilà le crime qui m'a attiré la haine de certains personnages en place qui, profitant des malheureuses circonstances de ces temps désastreux, ont travaillé avec fureur et sans déguisement au dépouillement total des églises, à la ruine entière de Saint-Houardon pour en faire un temple de la Raison. Les registres de la Commune attesteraient au besoin ce que j'avance et feraient connaître leurs noms. Je les vois aujourd'hui ces hommes, et ils savent que je les connais bien, s'efforcer de réparer cette église qu'ils ont fait vendre avec le presbytère contre le voeu de la loi et malgré les réclamations du Corps municipal, pour favoriser l'acquéreur et supprimer le culte. S'ils l'ont fait racheter, toute mauvaise qu'elle est, c'est pour faire annuler Saint-Julien que j'ai fait rouvrir en l'an 3 et où s'est opérée la réunion, malgré de fortes oppositions. Aussi que de procès-verbaux contre cette dernière et dont je démontrerais victorieusement le faux, si j'y avais le plus léger intérêt. Ces hommes veulent un triomphe, peu importe quelles en seront les suites. Ce très petit nombre qui dirige cette intrigue fait murmurer tout le monde. Ces êtres menaçants veulent deux choses : fermer et vendre Saint-Julien (il doit y avoir des soumissions à cet effet au département) et m'exclure de la ville comme étant pour eux un objet de trouble, ma présence leur pèse, et par conséquent faire tomber mon établissement qu'ils voient avec peine prospère et y placer des religieuses.

J'ai travaillé en chef jusqu'à l'arrivée du pasteur actuel, au risque de me faire mettre au Château de Brest, je l'ai échappé quatre fois. J'ai assisté, au grand étonnement de mes adversaires, à l'installation de notre curé, avec ce dévouement qui caractérise un ecclésiastique qui n'a d'autre intérêt que celui de la Religion et pour donner l'exemple de la soumission au pasteur que la Providence nous envoyait. Depuis ce jour, mes collègues et moi, nous cessâmes d'avoir part aux rétributions. Nous étions quatre et nous eûmes le désagrément d'être regardés comme non existants. La distribution de deux clergés parut dans une malheureuse évidence ; seulement on ne nous interdit pas.

M. le Curé ne tarda pas à faire une visite générale et il vit comme on l'avait trompé à mon sujet. Aussi fut-il forcé d'avouer qu'il ne trouvait ou que des personnes en pleurs ou que des portes fermées et que pas une âme n'avait témoigné qu'on fût aise de l'avoir pour pasteur. J'ai travaillé à le faire respecter. J'ai forcé nombre de personnes exaspérées à se présenter à la Pâque et à suivre Saint-Hauardon, ce qui me donne la consolation de voir que les fidèles que j'administre sont les plus assidus aux offices de la paroisse ; on l'a fait remarquer à notre pasteur. Plusieurs personnes sont mortes de douleur de me voir frustré d'une place à laquelle j'avais été désigné de l'accord de deux puissances : que de peine à remettre les têtes qui furent dérangées ; ce sont ici des faits publics.

Si j'ai obtenu beaucoup de confiance malgré toutes les menées, c'est que je n'ai point témoigné de ressentiment contre ceux qui m'ont fait le plus grand mal. Je n'en ai jamais voulu à ceux qui pensaient différemment que moi ; jamais, pendant la Révolution, je n'ai ni approuvé ni désapprouvé ceux de mes collègues qui ont rétracté leur serment ; si je ne les ai pas vus aussi fréquemment après, c'est qu'on leur défendait expressément de me voir. Au tribunal (de la Pénitence) j'ai suivi exactement les règles prescrites, quoiqu'on ait voulu donner à entendre que j'étais trop facile. J'aurais été un ecclésiastique sans égal dans le pays, si j'avais voulu rétracter mon serment. Ce système règne encore. Deux ecclésiastiques et un laïque ont été récemment à la Roche trouver le desservant qui y est sur un lit de douleur pour l'engager à cette démarche, lui donnant à penser que vous eussiez quelque doute sur notre orthodoxie.

Dès que M. le Curé me témoigna qu'il désirait que j'allasse confesser à Saint-Houardon, aussitôt j'y fis mettre un confessionnal à mes frais et au plus bas de l'église ; ce fut à la première Pâque qu'il donna à Landerneau. Le samedi après la dernière conférence que j'eus l'honneur d'avoir avec Votre Grandeur, je me suis rendu pour dire la messe tous les jours à Saint-Houardon à 8 heures, suivant que j'en suis convenu avec notre pasteur, j'y fais venir mes élèves.

On m'a soupçonné d'avoir soustrait les effets de Saint-Julien. On me l'a dit en face, on a été jusqu'à faire fouiller les registres à Quimper pour voir si mon nom y était employé pour l'achat des ornements que je possède. Mais on aurait dû penser que j'avais été assez adroit d'en faire acheter pour moi sans que mon nom parût, afin de n'être pas soupçonné.

Voilà, Monseigneur, un abrégé de ma conduite, puisse-t-elle ne pas vous déplaire. Je ne veux nullement m'en faire un mérite, je n'ai point le but d'avoir de place. Si vous agréez, comme vous avez bien voulu le dire vous-même, que je continue à travailler, veuillez être bien persuadé que j'agirai toujours en digne ecclésiastique et que je ferai mon possible pour être utile aux fidèles sans leur être à charge.

J'aurais été bien aise d'avoir des élèves à vous présenter pour la prêtrise ; j'en avais quelques-uns qui m'auraient fait honneur et dont la conduite répondait aux talents, mais on leur a fait entendre et je savais bien qui, qu'ils n'eussent pas été reçus venant de chez moi ; aussi je me décidai à ne plus recevoir aucun qui prétendît à la prêtrise ; mon projet est toutefois de reprendre cette partie. J'ai l'honneur Pillet, 7 août 1806 ».

L'église Saint-Houardon, ayant besoin de réparations, l'évêque ordonna à M. Jannou de se servir provisoirement non pas de l'église Saint-Thomas, mais de l'église Saint-Julien ; la situation de Pillet devint gênée ; il demanda l'autorisation de dire la messe dans son collège, en mettant comme raison l'éloignement de Saint-Julien incommode pour les élèves. L'évêque donna l'autorisation avec empressement.

M. Jannou mourut le 10 mai 1807 et le 12 avril 1808, M. Goulven Le Fur fut nommé curé. Celui-ci, les réparations faites, réintégra le service paroissial dans l'église St-Houardon ; l'évêque profita de l'occasion pour ouvrir l'église Saint-Thomas comme succursale et interdire l'église Saint-Julien, sous prétexte d'insalubrité ; en 1810 cette église même sera louée à un sieur Bouroullec. Pillet avait été délogé de Saint-Julien, c'était un point important. Bien plus en 1807, l'abbé Le Gris-Duval fit un long séjour à Landerneau et réussit à ramener à l'unité les religieuses de l'hospice. qui acceptèrent M. Le Fur comme directeur de conscience.

Pillet n'avait plus d'église, il n'avait plus que la chapelle de son collège ; son action était moins publique, le cercle schismatique se rétrécissait. L'évêque ne pouvait faire plus ; une censure de sa part eut occasionné la désertion du collège de Pillet, et le gouvernement et la ville tenaient à cet établissement. Tous les ans Pillet invitait les municipaux à assister la distribution des prix. Le Maire lui répondait en mettant à sa disposition douze prix payés par la ville. De la part du Sous-Préfet, le Maire écrivait tous les ans au Curé pour lui demander de réserver une place dans la procession du 15 août à M. Pillet et à ses élèves.

Pillet sentait le danger, car il faisait intervenir en sa faveur tous ceux qui pouvaient approcher l'évêque. Mgr Dombidau avait été vicaire général de Tours, avant d'être élevé au siège de Quimper. Des négociants de cette localité lui faisaient leurs offres de service et dans une lettre d'un nommé Baudry, négociant à Tours, écrite à l'évêque pour lui recommander des couvertures de laine pour ses séminaires et hôpitaux, ce brave homme écrivait :

« J'ai le plus grand désir, Monseigneur, que vous reveniez sur le compte de mon parent M. Pillet de Landerneau ; il peut avoir eu des torts, mais où il y a de l'esprit, il y a de la ressource ».

Mais l'empire s'effondre et avec lui va s'effondrer toute l'influence du pauvre obstiné qu'est Pillet. (L. Saluden).

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