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LES PRIEURS DE NOTRE-DAME DE LESNEVEN |
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En Juin 1638, la prieure Jeanne de Quatrebarbes expose que « le prêtre qu'elle commet au gouvernement de Notre-Dame, est amovible et destituable à volonté, comme étant le dit gouvernement une simple commission temporelle, et non un bénéfice distinct et séparé dudit prieuré. La provision n'en est pas réservée au Pape et à l'évêque, et celui qui en est pourvu ne pourrait à son gré le résigner en faveur de qui il voudrait ».
Quelques années plus tard, en 1681, Missire Jean Laoust demande que « lui et ses successeurs soient maintenus dans le droit, titre et qualité de Recteur de la ville et paroisse de Lesneven, car, dit-il, c'est par un abus et une erreur de fait que lui et ses prédécesseurs ont été qualifiés de vicaires perpétuels. On leur attribuait cette qualité dans la croyance que le prieuré de Lesneven était anciennement un prieuré cure, où les prédécesseurs du suppliant n'auraient été que les vicaires du prieur ». Il est vrai que les nominations, à la cure de Saint-Michel d'une part, et au gouvernement de Notre-Dame de l'autre, appartiennent à la seule Abbesse de Saint-Sulpice. Mais cela ne fait pas que le prieuré de Notre-Dame soit prieuré cure, car les deux bénéfices sont distincts, et « le prêtre en possession du bénéfice de la cure de Saint-Michel ne saurait donc par cela seul être dit le vicaire du prieur ou du prieuré, (en fût-il même par ailleurs aussi pourvu), encore moins de la prieure, puisque, de droit naturel et divin, une fille ne peut être curé primitif. D'où il suit que le bénéfice (de Saint-Michel) eo ipso est une cure et le bénéficier ne peut pas être qualifié de vicaire, étant véritablement curé » (ou recteur selon la dénomination commune en Bretagne) [Note : Archives Saint-Michel, Lesneven. Procès du logement du Recteur, Le 17 Novembre 1681, la Cour de Rennes reconnut à Miss. Jean Laoust cette qualité, qu'il revendiquait, de recteur de Lesneven].
Parfois transportés sur la même tête, les deux bénéfices semblent, en fait, avoir été le plus souvent accordés séparément à deux personnages distincts. L'un (le chargé de la paroisse) qualifié de vicaire perpétuel ou de recteur, l'autre de prieur et plus fréquemment, gouverneur de Notre-Dame.
Voici, pour ces derniers, quelques noms :
Guillaume : 1191.
Eudon de Chidillac : 1216.
Daniel : 1255.
Chrestien auquel succède en 1308 Hugolin (M. le chanoine Peyron : Actes du Saint-Siège).
Jehan Kergoanec : 1479.
Jean de Lescoet, prieur recteur : 1488.
Guillaume Asquit : 1537.
Olivier Quiniou : 1565-1595.
Alain Beligant : 1595.
François Riou : 1603.
Guillaume Luzinec : 1612-1632.
Alain Gourchant : 1632-1638.
Par la suite, il semble que ce soient toujours les recteurs de Saint-Michel qui aient fait les fruits de Notre-Dame. Par exemple, en 1690, le sieur recteur de Saint-Michel, sera dit fabrique et gouverneur de Notre-Dame (Archives de Saint-Michel).
LES PRIEURES. — Nous en empruntons la liste au Cartulaire de Dom Anger, en y ajoutant le nom de Marguerite de Morais.
Il importe de remarquer que la prieure de Lesneven n'est pas nécessairement l'Abbesse elle-même de Saint-Sulpice.
Marguerite Bourrichon : 1480.
Andrée de la Chapelle : 1489.
Henriette Hingant : 1517.
Françoise Landais : 1521-1562.
Françoise de Préauré : 1563-1575.
Jacqueline de la Tourneraye : 1575-1596.
Philippe de Cornulier : 1596.
Anne Bonnet : 1608.
Jeanne de Quatrebarbes : 1621-1638.
Gillette de Saint-Germain : 1643-1656.
Marguerite de Thierry : 1656.
Marie de Saint-Germain : 1662.
Françoise de Guerry : 1669.
Marguerite de Morais : 1680 (Archives de Saint-Michel, Lesneven).
Marie-Madeleine Bonnier de la Coquerie : 1694-1713.
LES RELIGIEUSES. — On aimerait à connaître quelque chose du monastère rattaché à Notre-Dame. Assez inexplicable est la réserve, à cet égard, et des documents, et des historiens, en ce sens qu'ils ne manifestent aucune curiosité. La question semble ne pas se poser pour eux.
Un tel silence conduirait à penser que ces religieuses, dont l'existence demeure si voilée, n'étaient plus qu'à l'état de souvenir très simplifié, dès le XVIème siècle.
Les passages où nous en avons trouvé mention se réduisent à ceci :
1° La pièce de 1191 citée plus haut ;
2° Lors d'un procès, sur la fin du XVIIème siècle, il est dit que « la chapelle de Notre-Dame ayant, 460 ans auparavant, passé dans la possession des Religieuses de l'Ordre de Saint-Benoît, ces religieuses, qui furent établies sous la dépendance de l'abbaye de Saint-Sulpice, mirent au haut de la principale vitre, la représentation de saint Benoît » (Archives départementales E. 471) ;
3° Dans la délibération de la communauté du 25 Avril 1703, Claude Gellart, sieur de Menhoignon, ancien syndic, et substitut du procureur du roi, parle des « Dames Bénédictines lors (en 1216) établies en celle ville de Lesneven » (Archives municipales de Lesneven) ;
4° Un témoignage plus expressif sera fourni par l'affaire de 1479 que nous relaterons un peu plus bas, en reprenant les faits dans l'ordre de leur date.
13 Novembre 1371. — Indulgences d'un an et 40 jours, pendant 20 ans, à ceux qui visiteront l'église de Notre-Dame, aux jours de fêtes, et cent jours lors des octaves, pourvu qu'ils aident à la construction (M. le chanoine Peyron, Actes du Saint-Siège).
1417. — Passage de saint Vincent Ferrier à Lesneven. Il convenait de relever l'événement en son cinquième centenaire. Le célèbre thaumaturge ne fut pas sans visiter Notre-Dame. Peut-être même y prêcha-t-il, cette église « étant plus grande que l'église paroissiale ».
14 Novembre 1479. — A cette date, nous trouvons une décision assez curieuse de la chancellerie ducale, décision qui, deux siècles plus tard, constituera un argument imposant dans une affaire des plus litigieuses.
14 Novembre 1479. — « François, par la grâce de Dieu, duc de Bretagne, comte de Montfort, de Richemond, d'Estampes et de Vertuz, à nos Sénéchal et Bailli de Léon [Note : Guillaume de Kersauzon, sénéchal en 1474 (Kerdanet), maître Auffroy Derrien, bailli] et à Méryen le Furic, procureur de Tréguier, salut. Nos bien aimés et féaulx écuyers. Olivier Le Moyne, l'aîné, sieur de Kerespern [Note : Paroisse de Guissény. En 1624, Jacquette de Brézal, veuve de Hamon de Kergadiou, fournit aveu au roi pour ce domaine] et autre Olivier Le Moyne [sieur de Trévigner], son fils [aîné], notre maréchal des logis, nous ayant exposé que, de temps immémorial, ils sont, eux et leurs prédécesseurs, en possession d'avoir et tenir en la grande vitre de Notre-Dame de Lesneven, leurs armes tant en haut de ladite vitre que en autres lieux et endroits d'icelle, et que depuis deux ans, un prêtre nommé Jehan Kergoanec [gouverneur de Notre-Dame], et un peintre nommé Guillaume de Lisle [Note : De Saint-Paul, est-il dit plus loin], ont, clandestinement et au descu [à l'insu] des dits exposants, rompu et dilacéré. l'écusson [des dits Lemoyne], et au lieu où il était, ont mis et assis un écusson de nos armes [ducales]. Nous voulons que les dits exposants demeurent en leur dite possession, justice leur faire, et leurs armes réintégrer ».
7 Décembre 1479. — Devant le procureur de Léon, Jehan Keraldanet, comparaissent les témoins des Le Moyne, lesquels furent :
Jehan Meleneuc [Note : Sans doute le greffier de Lesneven], Alain Kerguen, maitre Guy Gouzillon, Guillaume le Roux, Dame marquise de Bourrichon, prieure de Lesneven, dame Catherine Pie de Lou [Note : Agée de 25 ans ou environ. Habitait à Lesneven depuis six ans ; armes : « D'or à trois pieds de loup de sable »], Jehan Le Gluidic [Note : Marchand de draps à Lesneven], Jehan Cimelen, Guillaume Gouzillon, et autre Guillaume Gouzillon, Guyon Guiomarch, et Yvon Goff.
D'une façon à peu près uniforme, ces témoins déposent que, de temps immémorial, se trouvaient dans ladite vitre les armes de ceux du Moyne : « 3 coquilles de gueules en champ d'argent », et pour différence y avoir « bordure de gueules et un timbre dessus (appelé depuis cimier) en manière d'un moine noir ».
« Le nommé Cimelen déclare, en outre, qu'il a communément ouy dire que ceux de Lesnedearn, auxquels les dits Le Moyne Kerespern succèdent, avaient [pour entretenir la dite vitre] fondé en ladite église un obit avec 2 ou 3 messes par an, et pour faire ladite fondation, avaient baillé un pré situé en cette paroisse de Lesneven, près l'hôtel du Bourchis, et que le vicaire de Lesneven jouit du dit pré ».
Quant à la dame marquise de Bourrichon, « Prieuresse », elle déclare être âgée de 50 ans ou environ et être demeurante en sa prieuré de Lesneven depuis les quatorze dernières années.
10 Janvier 1480.— A la suite de cette enquête, le 10 Janvier suivant, en présence de Alain Le Mescam, substitut de Jehan de Keraldanet, de Olivier Le Moyne, sieur de Trévigner, Jehan de Tromelin, dom Jehan Kergoanec, Jehan Ynisan, Guillaume Le Roux, Hervé Delille (notaire à Lesneven), etc..., les armes des Le Moyne furent remises en la susaine rose de la grande fenêtre du pignon d'icelle église de Notre-Dame, au lieu où on avait placé les armes du Seigneur Duc, et défense fut faite, à peine de 1.000 livres d'amende, de les ôter ou déplacer (Archives départementales E. 471 et 473).
28 Janvier 1480. — En ce jour, ès-pieds généraux de Lesneven a été ledit mandement lu et publié en jugement, et commandé à tous les sujets y obéir (Archives départementales E. 471).
25 Septembre 1480. — Lettres de François, duc de Bretagne, en faveur de dame Marguerite Bourrichon, lors prieure [Archives de Saint-Michel, Lesneven (Procès Gourchant)].
18 Février 1498. — Transaction entre haut et puissant seigneur Tanguy, seigneur du Chastel, Poulmic, Leslem, Kersaliou, et noble et puissant sieur Henry, seigneur de Penmarch et de Coetlestremeur.
Ce dernier reprochait au seigneur du Chastel d'avoir fait effacer et ôter les armes de feu Allain, sieur de Penmarch, son père, qui « par le trépas d'icelui advenu depuis naguère, auraient été mises et peintes en lisière et ceinture entour de l'église Notre-Dame, où ledit défunt aurait été enseveli, ainsi que ses ancêtres étaient en possession de le faire chaque fois que décès leur advenait » [Note : Armes de Penmarch : « De gueules à une tête de cheval d'argent bridée d'or, le col et le crin aussi d'argent » ; des Duchastel : « Fasce d'or et de gueules de six pièces ». Ce Tanguy Duchastel avait épousé en premières noces, le 21 Octobre 1492, Louise du Pont, fille de Pierre, seigneur du Pont-Labbé, et d'Hélène de Rohan ; puis, en secondes noces, en 1501, Marie, dame du Juch. Du premier mariage naquit le Jean Duchastel, occasion involontaire du litige rapporté ici. L'enfant mourut en bas âge ; ce qui explique qu'il ne soit pas porté sur les listes généalogiques publiées par M. Le Jannic de Kervisal (Histoire de Tanguy Duchastel, p. 28), et par M. Allain Ferrand].
Le sieur Duchastel défendait sa façon d'agir en alléguant le décès de son fils aîné, Jan Duchastel, décès survenu depuis le trépas du dit sieur de Penmarch [Note : Allain de Penmarch, IIIème du nom, marié le 3 Janvier (alias Octobre) 1482, à Anne du Juch, fille d'Hamon du Juch, chevalier, seigneur de Pratanroux, chambellan de la Duchesse Anne, laquelle, le 12 Décembre 1497, reconnut le seigneur de Penmarch comme ancien banneret (Kerdanet : Vie des Saints, et De L'Estourbeillon : la Noblesse bretonne)].
Alors, pour éviter tout procès, se sont présentés en personne, devant la cour de Lesneven, deux des frères du Révérend Père en Dieu, messire Christophe de Penmarch, évêque de Saint-Brieuc [Note : Evêque de Dol en 1474, transféré à Saint-Brieuc, en 1478, mort en 1505, et enterré dans la chapelle de la Trinité, dite aussi de Saint-Christophe qu'il avait fondée en la cathédrale de la dite ville (Dubuisson-Aubenay : Itinéraire de Bretagne, en 1636). Voici des extraits de son testament : « A Henry de Penmarch, mon principal héritier, je donne la maison de Quicangrogne, avec ses appartenances, et pour prier Dieu pour moi, cent francs, une fois payés ; et mes deux grandes coupes d'argent, pour commencer son ménage ; item, le harnais blanc, les haches rouges, les hallebardes que mon frère et moi avions, avec deux douzaines d'arbalètes. J'ordonne qu'il soit pris sur mes biens 400 francs, pour fonder des messes à Notre-Dame de Lesvern, où sont enterrés Henry de Penmarch et Alloz de Cottivy, mes père et mère et autres prédécesseurs. Item qu'en la messe que j'ai ordonné être dite chacun jour en l'église de Saint-Brieuc, il soit prié aussi pour messire Louis de Penmarch, mon frère, en son temps archidiacre de Marseille, scholastique et chanoine de Saint-Brieuc, et pour feu de bonne mémoire, Allain de Cottivy, cardinal d'Avignon » (Geslin de Bourgogne : Les Evêchés de Bretagne, Evêché de Saint-Brieuc, t. I, p. 385). Cet Henri de Penmarch, premier baron de Penmarch, qui à peine âgé de 14 ans, mettait déjà en mouvement procureurs et juges, devait avoir un jour l'existence bien tragiquement assombrie. Marié d'abord à Jacquette le Forestier, il épousa en secondes noces, le 26 Janvier 1521, Guillemette de Kerloaguen, dame de Rozampoul. Comme plus proche voisin il avait Jean Marc'hec, seigneur de Guicquelleau. Celui-ci, après avoir d'abord servi avec distinction sous le sire de Rieux, mena à son retour au manoir paternel une vie de désordres dont le dernier crime fut une tentative d'assassinat sur Henry de Penmarch, traitreusement invité à souper, le 23 Octobre 1523, à Guicquelleau. Si la victime ne succomba pas sous le coup, son sort n'en valut guère mieux. Devenu imbécile, au point qu'on dut l'interdire, il traîna sa pénible existence jusqu'en 1542. Quant à Jean Marc'hec, après une procédure dont la relation se trouve encore, manuscrite, dans la bibliothèque de feu M. de Kerdanet, il fut décapité sur la place de la Cohue à Lesneven, en 1527. Son corps fut attaché devant son château, à un chêne que ses héritiers avaient l'obligation de conserver et de remplacer (De Courcy : Itinéraire de Saint-Pol à Brest ; Lycée armoricain, t. 1 ; De Kerdanet : Revue de Bretagne et de Vendée, t. V, et De L’Estourbeillon : La Noblesse de Bretagne, t. II, p. 245 et 246). La chapelle de Lesvern dont parle Mgr. Christophe de Penmarch, en son testament, se trouvait au château de Lesvern ou Lesguern, en Saint-Frégant. Le Vénérable Michel le Nobletz habita quelque temps ce manoir seigneurial où une chambre porte encore le nom de « kambr an Aotrou ». Une mesure malencontreuse qui ne put être arrêtée à temps, a amené la démolition de cette chapelle doublement historique (qui ne doit pas être confondue avec les deux autres chapelles de Sainte-Anastasie et de la Trinité, en la même paroisse, et où Michel le Nobletz a également prié. Voir sa vie par le vicomte Le Gouvello, p. 6). Ajoutons que M. l'abbé 0llivier, recteur actuel de Saint-Frégant, qui nous a aimablement fourni les renseignements qui précèdent, vient de faire rétablir dans son église, entre autres écussons, celui des Penmarch, et de nos jours encore, on continue à prier au prône de la grand'messe « evid tud chentil Penmarch »], et missire Louis de Penmarch, protonotaire du Saint-Siège et archidiacre de Marseille, tuteur et faisant pour le sieur Henry de Penmarch, leur neveu encore mineur.
Lesquels veulent faire un service en ladite église Notre-Dame, et les armes du sieur défunt de Penmarch seront remises en lisière par dedans et dehors, et demeureront pendant un an, et passé icelui temps, le sieur du Chastel, s'il lui advient à plaisir, pourra les remplacer par les siennes.
Et de même quand décès surviendra dans la maison du Chastel.
A charge pour l'une et l'autre partie, en cas d'inexécution du présent contrat, de payer 500 écus d'or (Archives départementales, E 471).
(Archives de l'Evêché).
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