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LES CHAPELLES DE LIGNÉ

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Chapelle Saint-Mathurin ; chapelles autour de l'église, de Saint-Blaise, de la Trinité, de Saint-Laurent, du Paradis ; chapelle de Saint-Philippe remplacée par celle de Notre-Dame des Champs ; chapelle de la Jaminière ; chapelle de Saint-Adrien ; chapelle de Saint-Philbert ; chapelle de Sainte-Madeleine ; chapelle « aux Biques ».

Autour de l'église construite au XIVème siècle, il y avait comme une couronne de petites chapelles appartenant à certaines familles notables du pays.

C'était d'abord la chapelle de la Rochefordière.

Elle était située au choeur de l'église du côté de l'Évangile. Son entrée n'était pas à l'extérieur ; on y avait accès par le chœur. Cette entrée se trouvait face au côté gauche de l'autel : les occupants pouvaient apercevoir la physionomie de l'officiant pendant tout le saint sacrifice de la messe. Elle était de très petites dimensions, puisque ne mesurant que 14 pieds de profondeur. De nombreuses armoiries la décoraient. On y voyait la devise des Maufrais : O l'aide Dieu. C'était cette famille qui l'avait fait construire quelque temps après l'érection de l'église. On y voyait aussi les armes des Labbé qui avant d'être possesseurs de la Rochefordière vivaient aux Yonnières en Saint-Mars-du-Désert. La chapelle devint la propriété des Devay venus à la Rochefordière en 1480. Elle appartenait à cette famille lorsqu'eut lieu, à cause d'elle, la querelle dont nous avons parlé. Hubert de Lasse en fut ensuite le possesseur. En 1648 il voulut y faire des réparations urgentes réclamées par l'évêque lors d'une visite. César de la Musse s'éleva contre ce projet ; finalement il y consentit, mais à de telles conditions que ces réparations ne furent faites qu'imparfaitement. A cause de toutes ces difficultés, la petite chapelle fut peu à peu négligée. En 1686, l'archidiacre Binet constate l'état d'abandon où elle se trouve : « l'autel qui n'est pas consacré, dit-il, n'a pour ornement qu'une vieille image de saint Blaise ». Elle connut encore deux autres propriétaires : François de la Moussay et la famille actuelle de la Rochefordière. Elle disparut en 1836 sacrifiée pour l'agrandissement du chœur de l'église.

Sur le même côté que la chapelle de la Rochefordière, un peu plus bas, s'en trouvait une autre, grande et belle, nous dit un vieux registre : c'était la chapelle Saint-Sauveur ou de la Sainte Trinité. Ceux qui l'avaient érigée et ceux qui la possédaient avaient leurs noms inscrits sur les pierres tombales ; « sur l'autel et dans le vitrage » on remarquait une couronne d'épines avec écusson à trois clous d'or, la pointe en bas.

Elle avait été construite par messire Jean Duvau en 1524. L'archidiacre Binet précise que messire Jean Duvau était recteur de Ligné. En même temps qu'il érigeait cette chapelle, le recteur établissait une fondation desservie à l'autel même de la chapelle.

Les curés de Ligné eurent de nombreux soucis relativement à cette chapelle et à cette fondation. L'un d'eux, messire Georges Moreau, d'accord avec le baron de la Musse, s'éleva contre les prétentions d'un membre de cette famille, Duvau de la Chauvelière, qui voulait que cette chapelle fût exclusivement privée.

Là étaient enterrés les membres de la famille Duvau et ses alliés : Guillaume Taon de Vieillevigne 1625 ; enfant Riallé, du bourg 1643 ; Marguerite Cosnier de la Clergerie 1630 ; H. Louise Baud, compagne de M. Claude Belorde de la Bérangerie 1645 ; Françoise Peigné 1635 ; G. Berthelot. Cette chapelle connut les mauvais jours de la Révolution ; elle servit de salle de délibérations au club jacobin ; elle entendit pérorer dans ses murs le fameux Lorette, commissaire révolutionnaire à Ligné.

Elle fut mise en vente comme bien national et achetée par un homme du pays, pilier de la Révolution. Celui-ci, en l'an XII, la renversa et en transporta les débris près de sa demeure. Mais hanté dans son travail par cette idée que cette terre et ces pierres étaient bénites par les restes de tant de chrétiens qui y avaient été ensevelis il ne voulut pas en laisser une seule miette. Il gratta si profondément qu'il fit une excavation et mit à nu les assises de l'église.

Le conseil municipal et le juge de paix le condamnèrent à remettre la terre prise en trop et à payer douze livres au curé M. Thoret.

Autour de l'église il y avait encore d'autres chapelles. L'auteur du livre État du diocèse de Nantes en 1789 consacrant quelques lignes à Ligné s'exprime ainsi : « Dans l'ancienne église il y avait deux chapelles en appentis dédiées à saint Blaise et à saint Laurent. Maintenant il y en a une autre en l'honneur du Saint-Sauveur. La chapelle saint Blaise, c'était celle de la Rochefordière ; la chapelle Saint Sauveur, celle de la Trinité. Mais quelle était cette autre dédiée à saint Laurent ? ». Nos registres de sépultures aux premiers feuillets font mention d'une autre chapelle : celle du Paradis : « 1583, fut enterrée en la chapelle du Paradis Marguerite Veillard fille de Jean Veillard et de... illisible » ; « 1586 fut enterré en la chapelle du Paradis Alain Bergnac ». Quelques mois plus tard c'était Pierre Viau. Très vieille, cette chapelle dut disparaître à la fin du XVIème siècle ; car il n'en est plus fait mention par la suite.

Tel était l'aspect de l'église du XIVème siècle qui devait disparaître quelques années avant la Révolution : sans style, pauvre, mais rendue originale par ses multiples chapelles appuyées sur elle comme des enfants sur leur mère.

En plus de ces édifices religieux situés dans le bourg il y avait quelques chapelles desservant certains châteaux, ou dépendant de quelques fondations. Voici la chapelle du Fayau, près du manoir de ce nom. Elle était sous le vocable de saint Philippe et de saint René. Là, le chapelain disait les messes de la fondation Philippe Thimon et Renée Niot [Note : Il existe à la Cure de Ligné un volumineux dossier concernant cette fondation. Elle date du 21 juillet 1639. Les fondateurs demandaient « pour toujours et à jamais deux messes chaque mois, spécialement le 1er mai (saint Philippe) et le 12 novembre (saint René) »]. Pour remplacer cette chapelle tombant en ruines, la famille Jourdon-Ouary en érigea une autre à quelque distance en bordure de la grande route de Nort à Ancenis [Note : L'Évêché de Nantes temporisa ne voyant pas la nécessité de cette reconstruction. M. Jean Jourdon et Marie Ouairy son épouse ayant commencé leurs démarches en 1878 en virent l'heureuse issue, comme il est dit ci-dessus]. Elle fut bénite en 1886 par M. Brunet curé. Il la plaça sous le vocable de N.-D. des Champs. Mgr l'évêque de Nantes, le 28 juillet de cette même année, accorda une indulgence de 40 jours à ceux qui visiteraient la chapelle, y récitant dévotement un Pater et un Ave. Il était de tradition immémoriale de célébrer une messe en la vieille chapelle, au jour de la fête de saint Marc. La tradition se perpétue [Note : Elle s'est poursuivie jusqu'au 25 avril 1968. En 1970, le réforme liturgique du Concile de Vatican II supprimait « la procession de la saint Marc »].

Vers la même époque en 1874 une autre chapelle fut érigée à la Jaminière. Cette propriété avait été achetée en 1814 par M. Louis Peigné, arrière grand-père de M. le docteur Bécigneul. La chapelle n'apparut que 60 ans plus tard, élevée par le R. P. Peigné, missionnaire de l'Immaculée Conception, fondateur de N.-D. de Toutes-Joies [Note : Cette propriété, depuis le décès de Mme Bécigneul, appartient à la famille Jean Tirot de Nantes, son neveu].

Vieilles chapelles, ce sont encore les chapelles domestiques de la Bouvetière et de la Rochefordière [Note : Celle de la Bouvetière a disparu, celle de la Rochefordière a été restaurée].

Et on en apercevait d'autres, çà et là, dans la campagne.

C'est la chapelle Saint-Adrien. Elle était lieu de pèlerinage, comme la chapelle Saint-Mathurin, mais de moins grande renommée.

Aux XVème et XVIème siècles, les pèlerinages étaient fréquents et imposants. L'on voyait à certains jours, toute une paroisse s'ébranler vers quelque lieu vénéré, croix levée et bannières déployées. Inspirés par leur foi profonde, par le désir d'obtenir une grâce importante, souvent la cessation de quelques épidémies alors très nombreuses, les chrétiens de ce temps s'en allaient bravant la pluie, la chaleur, la fatigue, par des chemins impraticables, à des distances très éloignées. Les pèlerins partaient souvent le dimanche et revenaient le lendemain.

Ligné devait ainsi organiser des pèlerinages vers Saint-Mandèze, chapelle très fréquentée en Trans ; vers Saint-Symphorien en Couffé, et vers d'autres lieux plus lointains.

On venait prier saint Adrien pour obtenir la guérison de la fièvre ; mais pour être exaucé on devait se présenter avant le lever du soleil — superstition de nos pères dont saint Adrien ne devait pas trop leur tenir rigueur. Cette chapelle devait être du XVème siècle. C'est en effet au cours de ce siècle, au moment où le fléau de la mort noire (la peste) ravageait la Bretagne, que se répandit le culte de saint Adrien. Elle fut bâtie sur la propriété des seigneurs de la Rochefordière et dépendait de cette maison, lit-on dans le compte rendu de la visite de l'archidiacre Binet en 1685. Mais alors comment expliquer que 34 ans plus tôt elle faisait partie de la vente du domaine du Ponceau. A moins que le Ponceau eut sa chapelle privée de Saint-Adrien. En 1685 elle n'était plus qu'une vieille chose, avec sa porte disjointe, avec son autel délabré sur lequel était une vieille image de Saint-Adrien. Elle était située sur la bordure du chemin de Ligné, à Saint-Mars, près du village de la Belle-Étoile, à droite touchant le petit ruisseau. Plus tard, en 1888, pour en perpétuer le souvenir à proximité, une croix fut érigée qui porta le nom de Saint-Adrien.

A l'autre extrémité de la paroisse, sur les confins de Couffé, une chapelle avait été élevée dédiée à saint Philbert. M. Léon Maître la désigne comme étant aussi vieille que celle de sainte Madeleine, dont il sera parlé. Les bâtisseurs en avaient été les moines de saint Hermeland entre 700 et 800. Ceux-ci étaient venus de leur prieuré de Saint-Géréon, sur le territoire de Ligné, probablement sur l'invitation de quelque seigneur qui leur avait concédé des terres pour bâtir et pour vivre. Cette chapelle primitive avait dû disparaître de vieillesse ou être renversée par les Normands. Une autre l'avait remplacée. Il en est fait mention en 1679. A cette date, elle est signalée comme faisant partie de la seigneurie du prieuré de Saint-Géréon ; car le prieuré était devenu une seigneurie. Son avoir féodal en Ligné consistait en une rente annuelle sur la terre de l'Ouche-Richard ; en plus « le tiers des dîmes de la Cudonnière et de Saint-Philbert, est à partager entre le curé du dit Ligné et le chapelain de notre dépendance ».

Voici une autre chapelle érigée dans un but très spécial, pour le service des lépreux.

Il y eut des lépreux aux premiers siècles de l'ère chrétienne. Les annales ecclésiastiques nous mentionnent leur existence dès 460. Mais les croisades accrurent considérablement le mal. La Bretagne ne fut pas épargnée ; le cas de la duchesse Constance qui mourut atteinte de la lèpre, nous est un exemple des ravages causés par le fléau... horrible fléau qui inspirait une universelle répulsion. On connaît la réponse de Joinville à son roi qui lui demandait ce qu'il choisirait entre ces deux maux : le péché ou la lèpre : « Sire, j'aimerais mieux avoir trente péchés mortels plutôt que d'être couvert de la lèpre » [Note : Mais le roi lui répliqua : « Vous avez parlé en étourdi et en fou. Car il n'y a pas de lèpre aussi laide que d'être en péché mortel. Quand l'homme meurt, il est guèri de la lèpre du corps, mais quand l'homme qui a fait le péché mortel meurt, il n'est pas certain d'avoir eu tel repentir que Dieu lui ait pardonné ». H. WALLON, saint Louis, p. 420].

De bonne heure l'Église lutta contre le mal dans ses conciles, dans ses synodes. A ceux qui en étaient atteints, tous les lieux publics étaient interdits, églises, hôtelleries, fontaines, marchés ; ils portaient sur eux un signe visible distinctif ; ils devaient avoir la barbe et les cheveux rasés ; ils étaient autorisés à se promener, mais quand ils voyaient quelqu'un ils devaient agiter leurs cliquettes pour annoncer leur présence. L'isolement était le grand moyen d'éviter la contagion. Ils vivaient dans des masures entourées de murs, sous la direction spirituelle d'un prêtre qui toujours trouvait là une chapelle pour célébrer les saints offices.

Mais comment reconnaître un lieu, perdu dans la campagne, centre autrefois d'une léproserie ? Par des écrits qui sont devenus rares, par certaines dénominations que les cultivateurs ont données à leurs terres (maladrie, ladrerie, malabrie, malpaudrie) par le vocable sous lequel était placé l'établissement, la chapelle... Le vocable le plus fréquent était sans contredit celui de la Madeleine. On regardait cette sainte comme spécialement chargée de veiller sur les pauvres lépreux ; à ce point nous dit M. Léon Maître, que le vocable de la Madeleine est constamment pris pour l'équivalent de maladrerie. Or, Ligné possédait une chapelle sous le vocable de sainte Madeleine. M. L. Maître, sur sa carte des voies romaines et des grands chemins de la baronnie d'Ancenis, la situe aux alentours du Laca, à moitié chemin entre Ligné et Couffé.

Cette situation peut être déterminée avec plus de précision. L'on sait qu'aux environs il y avait un fief appelé la Mussaudière, nom qui annonce une léproserie. Or la Mussaudière d'autrefois, c'est la Cuetterie d'aujourd'hui. C'est donc là qu'était l'établissement des lépreux, avec ses masures, son cimetière, sa chapelle. Il en reste le vieux puits, au milieu d'une prairie. Entre ce puits et la maison actuelle d'habitation, on trouvait, un temps, des pierres de fondations.

La tradition a perpétué le souvenir de cet établissement placé sous le vocable de sainte Madeleine. A quelque distance, il y a le chemin de la Madeleine, appelé ainsi parce qu'il pouvait conduire à la léproserie, mais plus vraisemblablement parce qu'il était réservé à l'usage des lépreux. Plus proche, il y a un pré de 5 cordes dénommé la Madeleine.

En 1524, la léproserie n'existait plus. A cette date, les terres qui en composaient le temporel avaient perdu leur destination première. Sous le nom de ferme de la Mussaudière (plus tard de la Cuetterie), et ferme de la Pichonnière, elles devenaient les terres d'une chapellenie, dite de la Trinité, fondée en 1524 par messire Jean Duvau, recteur de Ligné. Aujourd'hui, une partie de ces terres porte le nom de Bénéfice.

Avant que disparut cette léproserie, la Mussaudière-Cuetterie, on pouvait en apercevoir une autre à quelque distance, à la Lande-Gilles. Et quoi, dira-ton, deux léproseries au même temps ? M. Léon Maître, très compétent en cette matière, répond : « Pour moi, il est indubitable que chacune des 210 paroisses du Comté Nantais possédait au moins deux léproseries ». Mais où se trouvait exactement cet établissement ? Prenez, à la Contrie, la route du Puits-Salé. Le premier chemin que vous rencontrez à droite après le pont du chemin de fer, se nomme le chemin du Purgatoire. Après un parcours de 300 mètres, il se jette dans le chemin de l'Enfer. Celui-ci se termine près d'une fontaine, sur un pâtis dénommé Pâtis de la Croix. Depuis longtemps, la croix n'existe plus. Si on avait planté une croix en pleine campagne déserte, ce n'était pas sans motif raisonnable. Cette croix rappelait un souvenir. Quel souvenir ? Ce lieu avait été habité : la fontaine l'indique, des pierres de bâtisses trouvées ça et là le certifient. Mais qui pouvait habiter ce lieu d'aspect si sauvage, sinon des gens qui devaient se cacher, fuir la rencontre des hommes ? La croix rappelait la chapelle et l'établissement des lépreux..., lieu de répulsion, d'enfer, qui a donné son nom au chemin qui y conduisait.

Si rien ne nous indique de quel ordre étaient les moines qui desservaient l'établissement de la Cuetterie, il est à présumer que l'établissement de la Lande-Gilles était une fondation des Templiers qui se dévouaient au service des malades, des voyageurs. Très souvent leurs maisons étaient sous la protection de saint Gilles. Ne serait-ce pas en souvenir de ce patronage, que l'on dénomma la croix : Croix Saint-Gilles, et les terres environnantes : Lande-Gilles, bois de la Lande-Gilles, pré-Gilles ?

Que devinrent plus tard les terres du domaine ? Elles durent tomber dans la maison des Duvau (sans preuve certaine) et devenir en partie, quelque temps après, terres d'une fondation sise au Puits-Salé.

Il a dû se passer en ces lieux, au temps des lépreux, certains faits extraordinaires : querelles avec blessures mortelles peut-être entre eux et les passants. Ignorant la présence des lépreux au pays, on a brodé des légendes ; on a inventé un animal fantastique, auteur de tous les méfaits : la bigaine, une chèvre blanche possédée du malin. Malheur à ceux qui la rencontraient la nuit dans le chemin qu'elle fréquentait : car elle avait son chemin préféré que l'on nomme aujourd'hui chemin de la bique. C'est là qu'elle attendait ses victimes.

Il y a 80 ans, 100 ans peut-être, pendant la nuit s'élevèrent du chemin des appels désespérés ; on les entendait des villages environnants ; ils faisaient frémir. « Grand'mère, disait-on tout bas, cachez-vous au plus profond de votre lit. — Enfants, ne bougez pas : c'est la bigaine ! » Et personne n'osait porter secours à l'âme en détresse. Et le lendemain, on trouva dans le chemin, le corps d'un étranger, la gorge entrouverte. Évidemment, c'était l'œuvre de la bigaine.

Elle faisait parfois, pour se distraire, des tours pendables. Elle poursuivait, bêlant, bondissant, ceux qui revenaient des noces, tard dans la nuit noire. Les pauvres, ils couraient comme si le feu était à leur derrière, ils couraient à en perdre haleine, pour échapper à son étreinte.

Que ne faisait-elle pas, la bigaine ! Elle était allée jusqu'à se glisser sous un déguisement dans le groupe des danseurs et des danseuses, au bas du village de la Cuetterie. Un beau monsieur, ganté, barbe en pointe, haut-de-forme sur le chef, avait paru au milieu de la danse ; et ç'avait été une ronde effrénée où l'on sautait, virevoltait, sans pouvoir s'arrêter. Mais soudain des cris d'effroi s'étaient élevés de l'assemblée : le beau monsieur s'enfuyait dans un tourbillon de poussière, montrant à tous des pieds fourchus...

Dans le rond des danseurs, depuis lors, jamais l'herbe n'a repoussé.

La pensée de la chèvre blanche hantait tellement les esprits que l'on donna à une chapelle le nom de chapelle aux biques.

Elle était située dans le prolongement du chemin de la bique, en direction de Tienbon.

Ce chemin commence sur le côté droit de la route de Couffé, un peu avant le bois de la Lande-Gilles. Après 300 mètres, il passe au pied d'une Croix. Cette croix fut érigée pour remplacer celle « qu'une main inconnue avait élevée et qu'une autre main, criminelle peut-être, avait abattue » (Paroles de M. Brunet).

A 200 mètres plus loin, ce chemin est traversé par la ligne de chemin de fer, puis par la route du Cellier, et il continue vers Tienbon.

A 100 mètres environ avant d'arriver à ce village, il est bordé par un champ planté en vigne, dénommé la chapelle aux biques.

A quelle fin cette chapelle fut-elle érigée ? Elle pouvait être une dépendance de l'établissement des lépreux de la Lande-Gilles.

Peut-être fut-elle simplement la manifestation de la reconnaissance d'un habitant du voisinage qui avait cru échapper au danger de la bigaine.

A moins qu'elle n'ait été érigée pour desservir un établissement hospitalier. Ces sortes d'établissements disséminés ça et là dans la campagne n'étaient pas rares aux XIVème s. et XVème siècles. Non seulement ils recevaient les malades des environs, mais, situés souvent au carrefour de grands chemins aux endroits fréquentés, ils abritaient les voyageurs.

Enfin certains prétendent qu'à Tienbon, il y avait une maison noble, tout au moins une maison bourgeoise importante. Une allée plantée d'arbres partait de la maison et se terminait à cette chapelle appelée chapelle aux biques, parce qu'elle était située sur le bord du chemin de ce nom. Elle aurait été une chapelle domestique.

Nombreuses étaient les chapelles disséminées sur le territoire de Ligné.

Nombreux aussi, furent un temps, les lieux de sépultures.

(abbé Eugène Durand).

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