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LES DÉBUTS ET ORIGINES DE LIGNÉ

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Les premiers habitants de la contrée, leur religion — Les Romains — Saint Clair — Une époque plus propice à l'extension de la religion — Apparition de la Sainte Vierge à saint Maurille — Les moines de Saint-Géréon — Les évêques de Nantes, seigneurs de Ligné — Les Normands.

I

LIGNÉ est situé sur une hauteur désignée communément plateau de Ligné. Ce plateau forme la ligne de partage des eaux, entre l'Erdre et la Loire. Orieux et Vincent, dans leur Histoire et Géographie de la Loire-Inférieure (t. II, 1895, p. 432), indiquent ceci : « La partie sud de la commune où plusieurs cours d'eau prennent naissance est vallonnée et atteint près de 70 m d'altitude ; au-delà, le sol est plat et varie de 30 à 40 m (au-dessus du niveau de la mer). Ligné est arrosé au nord et à l'ouest par la Guinetière, le Rateau et la Déchausserie, affluents de l'Erdre, et au sud-est par la Loge-au-Moine et le Beauchêne, tributaires du Hâvre ».

Les historiens nous disent que les premiers habitants de nos contrées furent les Ligures, venus d'Asie comme toutes les races du monde. Un millier d'années avant l'ère chrétienne, ceux-ci furent refoulés par les Gaëls ou Gaulois qui, après avoir traversé les plaines méridionales de la Russie, abordèrent le pays auquel ils donnèrent leur nom. Les Gaulois qui vivaient dans les vastes forêts furent aussi appelés Celtes — du mot Ceildach qui veut dire : vivre au milieu des bois. Une de leurs tribus s'était implantée à l'Ouest sur les rives de la Loire et forma la nation des Namnètes.

Ils avaient perdu la notion du vrai Dieu, et adoraient des dieux multiples : les éléments, les vents, les mers, les montagnes. Ils rendaient un culte spécial au soleil. Ils avaient imaginé des dieux qui présidaient aux divers événements de la vie, qui guidaient les cours des fleuves, des rivières : ils avaient inventé la déesse Erdra, qui plus tard donna son nom à la rivière voisine de notre territoire. Ils honoraient ces dieux divers par des sacrifices en plein air, sur le sommet des coteaux, dans le silence des forêts. Ils n'avaient point d'idoles, ni de temples ; mais un jour vint où ils changèrent leurs habitudes. Sous l'influence des navigateurs du Midi venus par la Loire et par la mer, à Nantes et à Ancenis, et un peu plus tard au contact des Romains, ils élevèrent des temples, ils statufièrent leurs divinités.

Longtemps ils vécurent du produit de la pêche et de la chasse, et aussi de quelques cultures opérées à l'orée des forêts, sur le bord des cours d'eau. Mais peu à peu le progrès pénétra dans leurs mœurs : ils élargirent le champ de leur activité en défrichant les bois, les forêts : ils perfectionnèrent leurs instruments de culture. Ils devinrent aussi d'habiles artisans : ils surent tisser et broder les étoffes, travailler le cuivre et le fer.

En l'an 52 avant l'ère chrétienne, nos ancêtres perdirent leur indépendance : ils devinrent sujets de l'empire romain, sujets qui eurent parfois à subir les vexations et les cruautés du vainqueur.

Les Romains vécurent nombreux dans notre contrée. A côté, à Petit-Mars, ils avaient une colonie florissante. La situation du lieu, près de Nantes, l'existence d'une grande forêt, les y avaient attirés. Cette forêt s'étendait du château actuel du Ponthux jusqu'à Sucé, entre l'Erdre et les hauteurs de Petit-Mars et Saint-Mars. Elle avait en certains endroits une largeur de 4 kilomètres. Sur la bordure de cette forêt, près de Coussol, les Romains avaient construit un théâtre dont les fondations furent découvertes par M. l'abbé Perray, curé de Petit-Mars (1728-1763), et étudiées par M. Léon Maître en 1885. Ce théâtre servait non pas aux acteurs dramatiques, mais aux athlètes dans des luttes et des exercices de force et d'adresse. A 500 mètres de cette construction, près du Breil, il en fut trouvé une autre : c'était un vaste hippodrome destiné aux courses de chevaux et de chars.

Un jour, cette forêt, appelée forêt de Mars, disparut avec ce qui restait des monuments. Ce ne fut point sous l'effet d'un cataclysme ou d'un affaissement du sol : tout simplement par la volonté d'un homme. Saint Félix, au VIème siècle, possesseur des rives de l'Erdre jusqu'à Nort, éleva à Barbin une chaussée haute de plusieurs mètres ; alors, les eaux refoulées vers leur source, se répandirent dans cette forêt, et peu à peu y firent disparaître la vie (Léon Maître). Plus tard, un ouragan renversa les arbres, faisant de ce terrain un immense marais.

Mais un changement se fit à une époque inconnue : le marais redevint forêt, du moins en partie. La digue de Barbin avait dû s'écrouler partiellement, ou elle avait été diminuée de hauteur. Cette forêt nouvelle devint la propriété du seigneur de La Musse en Ligné qui, à proximité, vers l'an 1150, avait fait construire un château appelé le Ponthux. Un aveu de 1542 nous dit que, dans cette forêt nouvelle, le seigneur de La Musse avait coutume de couper « mairains à faire vigne, buchage d'aulnes et de saulzs et rouches ». Un autre aveu de 1642 nous la présente bien près de disparaître, et cette fois pour toujours : « Item une forêt forestable, assise en marais qui est d'une grande étendue, tant en marais, écluses ou bois, taillis et de revenu, appelée la forêt de Mars, qu'en eau de la rivière de l'Erdre, contenant le tout ensemble de longueur une lieue et demie, et de largeur, trois quarts de lieue par plusieurs endroits ».

Les Romains laissèrent d'autres traces de leur passage. Ils travaillaient le fer. A cette époque, le minerai n'était pas rare, et les éléments nécessaires pour le travailler étaient à proximité.

L'eau pour le lavage du minerai, pour la forge, on la trouvait dans les étangs, les ruisseaux, les sources inépuisables comme à la Soudairie. Le bois était en abondance, il ne pouvait manquer, bien qu'il en fallut prodigieusement pour opérer la fonte en plein air, dans des creusets rudimentaires faits de gros cailloux et de terre glaise. Quand vous verrez sur les bords d'une source, d'un ruisseau, des scories, du machefer ainsi que de petits monticules, restes de creusets renfermant des pierres brûlées ; quand aux alentours vous apercevrez des vestiges de douves (destinées à la défense de l'atelier placé au milieu), dites-vous que là on travaillait le fer. Les Gaulois connaissaient cette industrie. Les Romains venant après eux la perfectionnèrent. Les morceaux de tuiles à rebord sont tout particulièrement les indices de leur présence dans une contrée.

Il n'est pas téméraire de prétendre que le village des Mineries fut ainsi appelé en souvenir d'un de ces anciens ateliers qui se trouvait dans son voisinage. De même, le terrain nommé le Roti situé vers la Roiserie, reçut cette appellation, bien probablement parce qu'il était brûlé par le travail des forgerons.

C'est aussi aux Romains que nous devons ces grandes voies de communications qui rayonnaient dans le pays. Une de ces voies sortait de Nantes, passait à Petit-Mars, les Touches, Trans. Une autre sortait de Blain, se divisait à Bout-de-Bois en deux tronçons : l'un s'en allait à Mauves par la forêt de Mars, l'autre à Ancenis par Nort, les Touches, Mouzeil, la Chapelle Breton, la Chapelle Sainte-Émérance. Aucune grande voie ne traversait Ligné. Notre pays, au IIème siècle, était couvert de bois, dont les restes forment aujourd'hui la forêt du Cellier. C'est cet aspect boisé qui poussa certains érudits à prétendre que le nom de Ligné devait venir de lignum, bois. Ce n'est pas à dire que Ligné, en ces temps, était inhabité. Un riche Romain, nous dit M. Léon Maître, nommé Linius ou Licinius, venu probablement de la colonie de Petit-Mars, y avait acheté du gouvernement romain une grande terre à laquelle il avait donné son nom et qu'il faisait travailler par ses serviteurs. Le nom subit bien des transformations au cours des siècles. Il devint Liniacum, Lingiacum en 1123 (charte de Louis le Gros). Ligneium en 1277 (livre de la Savate). Ce lieu habité primitivement peut-être par les Gaulois était relié à Couffé, à Saint-Mars, à Petit-Mars par des voies secondaires tracées par les Gaulois et par les Romains. Sur le bord de ces voies, des villages s'étaient élevés : le Mourmas, la Soudairie, la Roche, le Plessis, le Laca, et d'autres dont on ignore l'emplacement et le nom.

II.

Au temps où la puissance romaine régnait sur notre contrée, un maître plus puissant, mais pacifique, Dieu même, en prenait possession par sa doctrine.

De qui Dieu se servit-il pour son œuvre divine ? Un grand nombre de paroisses situées entre la Loire et l'Erdre, entre autres Varades, Ancenis, Belligné, Mésanger, Teillé, Mouzeil, Trans, Saffré, Petit-Mars, Ligné, ont saint Pierre comme patron. Pourquoi a-t-on mis ces paroisses sous la protection du prince des apôtres ? Parce qu'on a trouvé en ces lieux une dévotion spéciale à ce saint. Cette dévotion, c'est l'opinion d'un grand nombre, fut apportée par saint Clair, premier évêque de Nantes. Celui-ci avait été envoyé de Rome pour évangéliser la Bretagne. Il vint par la Loire qui était alors le grand moyen de communication entre la Méditerranée et l'Océan. Il était naturel qu'il commençât à évangéliser les Nantais avant de s'enfoncer au cœur de la Bretagne. L'on sait qu'il vint au pays de Vannes, et c'est là même qu'il mourut. Il dut traverser notre contrée, aborder les centres les plus peuplés comme Blain, Nort, Petit-Mars. S'il ne vint pas jusqu'à Ligné, ses habitants ne furent pas sans recevoir l'écho de sa prédication. Or, rempli de vénération pour saint Pierre, apportant pieusement le clou qui avait fixé sa main droite à la croix, saint Clair dut faire pénétrer dans les âmes qu'il évangélisait les sentiments de piété qu'il avait pour le chef des apôtres.

Mais la bonne semence, la foi jetée dans les âmes par saint Clair grandit-elle comme le grain de sénevé, au point de s'étendre sur tout le pays ?

Peut-être dans nos campagnes produisit-elle des fruits nombreux de salut, moins entravée là qu'à Nantes où était le siège de l'administration romaine. A Nantes peu nombreux durent être les convertis de saint Clair, puisque, quelques années plus tard, l'exécuteur des ordres de Dioclétien et de Maximien trouva peu de fidèles sur lesquels il put assouvir sa haine antichrétienne : dans les annales il n'est fait mention que de saint Donatien et saint Rogatien et d'un autre, évêque ou prêtre (sacerdos). Les années qui suivirent furent peu propices à la pénétration de l'Évangile. Les persécutions continuèrent à désoler l'Église jusqu'en 314, année où Constantin établit la paix religieuse. Et c'était l'époque où les Gaulois étaient souvent en lutte contre la tyrannie des gouverneurs de provinces qui les accablaient d'impôts, allaient jusqu'à les jeter hors de leurs maisons, à s'emparer de leurs animaux quand ils ne pouvaient payer. L'histoire nous rapporte la révolte des paysans appelés Bagaudes qui se répandit partout et fut noyée dans le sang. Puis survinrent les premières invasions des barbares (407) : Suèves, Alains, Vandales, sortis d'Autriche et d'Allemagne, se ruèrent sur la Gaule comme un tourbillon de mort. Cependant ils ne firent que passer dans nos contrées ; ils traversèrent la Loire et s'en allèrent dévaster l'Aquitaine.

Qui put maintenir la foi dans ces temps si troublés ? Les prêtres étaient rares. Quelques-uns, comme les missionnaires de nos jours dans les pays infidèles, devaient traverser notre contrée et faire entendre la parole de Dieu.

Mais survint une époque plus paisible, plus propice à l'extension de la religion. En 409, les cités armoricaines, devançant la grande révolte de la Gaule (440), se séparèrent de l'empire romain et formèrent une confédération indépendante et puissante. Quelques années plus tard, voyant le danger qui les menaçait, elles firent alliance avec leurs anciens maîtres, les Romains, contre ces nations barbares et ariennes qui s'étendaient de plus en plus sur la Gaule. Par cités armoricaines, il faut comprendre, nous dit M. de la Borderie, ce vaste territoire situé entre la Seine, la Loire et l'Océan, répondant à la Normandie actuelle, la Touraine, l'Anjou, le Maine, la Bretagne. A la faveur de cette tranquillité, la religion put se répandre et s'implanter plus profondément dans les âmes. Un récit de Procope nous montre ce progrès religieux en Armorique. Quand Clovis (487-511), voulant étendre ses conquêtes, s'attaqua aux cités armoricaines, il ne put les réduire par les armes ; alors, il leur offrit une alliance qui fut acceptée, nous dit Procope, parce que les deux peuples étaient chrétiens.

Un fait qui se passa à quelques lieues d'ici, dut contribuer à affermir les principes chrétiens. En 430, au Marillais, la Sainte Vierge apparut à saint Maurille, évêque d'Angers, lui demandant d'établir une fête en l'honneur de sa naissance. Cette fête, qui se célèbre le 8 septembre, s'appela Notre-Dame l'Angevine. Elle fut très populaire en notre pays. Son nom, sa date furent chers au cœur de nos ancêtres. C'était à l'Angevine qu'ils versaient la dîme à leurs seigneurs ; c'était à l'Angevine que les fermiers payaient leurs maîtres, et que les serviteurs recevaient leurs gages.

Et voici le VIème siècle, l'époque où saint Félix gouvernait l'Église de Nantes. Les prêtres séculiers étaient plus nombreux. Le grand évêque put plus facilement travailler à étendre la religion. Il fonda un grand nombre de paroisses, parmi lesquelles la paroisse de Ligné qui déjà avait son centre religieux. Saint Félix ne pouvait rester indifférent aux besoins spirituels de Ligné : n'en était-il pas le suzerain ?

Cette suzeraineté datait de bien des années.

Aux derniers jours de la décadence romaine, le pouvoir civil montrait la plus grande incapacité ; et il était méprisé pour ses exactions. Une autorité existait alors, celle des évêques près desquels le peuple était venu se réfugier. Les derniers empereurs avaient reconnu cette autorité, ils avaient même cédé aux évêques de grand biens pour accroître leur prestige et aussi pour subvenir aux besoins de leurs églises. L'évêque de Nantes était ainsi regardé comme chef de la cité, et il avait été mis en possession de vastes domaines.

Quand les Francs firent la conquête du pays, ils maintinrent l'évêque dans ses pouvoirs et dans ses biens.

Clovis, qui régnait de 487 à 511, voulut même s'en faire un allié contre les ennemis du dehors, particulièrement contre les Bretons entreprenants et pillards.

Clotaire Ier (511-562) suivit la conduite de son père. Après la victoire sur son fils révolté Chram, près du Croisic, il augmenta le domaine de saint Félix à qui il donna le titre de gouverneur.

Clotaire II, roi de Neustrie (584-628), confirma ce qu'avait fait son père.

Charles le Chauve rendit tous ces fiefs héréditaires par l'édit de 877.

Quels étaient ces biens concédés aux évêques de Nantes ? Une charte de Louis le Gros de 1123 nous les indique.

Cette charte nous rappelle le voyage de l'évêque de Nantes, Brice, à la cour du roi pour réclamer le patrimoine de son Église dont il avait été spolié. « L'homme vénérable, Brice, est venu en notre présence malgré la grande fatigue du voyage. Il nous a montré les écrits les plus anciens, et des plus vénérables rois de France, Charles, Clovis, et les enseignements de son fils Clotaire. Il a prouvé avec soin que les biens accordés à la Sainte Église des Apôtres, Pierre et Paul, pour nourrir et entretenir les prêtres serviteurs de Dieu, avaient été possédés dès longtemps par ses prédécesseurs. Nous confirmons l'évêque de Nantes dans la possession des biens qui avaient été donnés par les rois et possédés par les prédécesseurs de Brice, Félix, Pasquier » [Note : Cf. Léon MAÎTRE, Situation du diocèse de Nantes au XIème et XIIème s., p. 39 sq.].

Le document fait ensuite connaitre les biens de l'Église de Nantes.

Or, à côté de Varades, Belligné, Teillé, Nozay, Saffré, Abbaretz, Saint-Mars et d'autres, est cité Ligné.

Il est à remarquer que la plupart des biens possédés par l'évêque de Nantes sont situés au nord de la Loire et formés particulièrement par les paroisses entre l'Erdre et la Loire. Devons-nous y voir l'effet d'un pur hasard ? C'est le territoire qui, le premier, reçut la lumière de la foi et qui, pour cela, fut appelé le climat de la chrétienté. L'évêque de Nantes le revendiqua parce qu'il était plus cher, fécondé par les sueurs de saint Clair, sanctifié par les vertus des premiers chrétiens.

Elle est longue la liste des évêques de Nantes, seigneurs de Ligné. Citons Léon, dont la prière protégea Nantes assiégée par les Huns (453). Épiphane, qui fut le témoin de la défaite des Saxons du Croisic. Saint Félix, déjà nommé, un de nos plus illustres évêques (550-583). Saint Pasquier (675). La grande œuvre de son épiscopat, nous dit le cardinal Richard, fut la fondation du monastère d'Indre. Il envoya chercher celui qui devait en être l'abbé — saint Hermeland (647-720) — à la grande abbaye de Fontenelle, au diocèse de Rouen. Il dota le monastère de divers biens, et s'étant rendu à la cour de Childebert, il le plaça sous la protection royale.

Les moines d'Indre vinrent s'établir à Saint-Géréon qu'ils desservirent de 695 à 843. Il n'est pas douteux qu'ils se répandirent aux environs. Mésanger, Couffé, Ligné, durent recevoir le bienfait de leur parole et de leurs saints exemples.

Évêque, seigneur de Ligné, nommons saint Gohard. Ce fut sous son épiscopat, en 843, qu'eut lieu à Blain un fait d'armes important. Le comte Renaud, établi chef du comté Nantais, y fut tué avec un grand nombre de ses soldats par Lambert, à qui Charles le Chauve avait enlevé le gouvernement de la ville et qui, par vengeance, avait fait alliance avec Nominoé, roi de Bretagne. Et une fois de plus la contrée nantaise avait été envahie et pillée par les Bretons. Car depuis longtemps déjà les Bretons faisaient chez nous des incursions, depuis longtemps ils étaient regardés comme des ennemis à redouter. Dès 578, ils viennent au pays. A trois fois différentes, leur chef Waroch les conduit au pillage. En 635, Dagobert essaie d'arrêter leur envahissement ; las de la lutte, il leur abandonne Nantes. En 753, Pépin les arrête. De 811 à 827, sous Charles le Débonnaire, ils sont vaincus deux fois, mais quatre fois vainqueurs. En 845, par leur roi Nominoé, Charles le Chauve est mis en complète déroute près de Redon. Erispoé, en 851, s'empare de Nantes. Trop souvent ces luttes avaient lieu dans notre contrée, parce que, à ce moment, elle formait les marches, elle était aux limites des états rivaux. Il y avait aussi une autre raison à ces invasions. Les Bretons connaissaient la richesse du sol, les produits variés qui en sortaient. La vigne venue du Midi, et qui, en l'an 500, était cultivée, avait sur eux une attirance extraordinaire. L'historien Dareste nous dit qu'ils venaient la vendanger annuellement à grands coups d'épée. Et après avoir mis la contrée à feu et à sang, ils s'en retournaient chez eux, leurs tonneaux remplis.

La vigne existait-elle à Ligné en ces temps lointains ? Les moines bénédictins durent l'implanter de très bonne heure au pays. En 1380, les seigneurs la faisaient cultiver à Rochefordière. En 1390, les côteaux de la Martinière possédaient de grandes vignes : ici 40 hommées [Note : Hommée : étendue de terre qu'un seul ouvrier peut labourer dans sa journée] ; là 18 hommées ; au clos de la Couture, 80 hommées ; au Petit-Gousnil, 60 hommées. Nos pères n'étaient point d'une intelligence inférieure à la nôtre ; ils savaient reconnaître les terres possédant les qualités voulues pour la culture de la vigne. Ils l'avaient plantée aux Jauneaux, dans le terrain entre le Poirier-Rouge et la route de Petit-Mars — aux Boucquelières — à la Clergerie. Le nom de Vieillevigne donné à un clos situé devant l'école des garçons, est l'indice d'une date très ancienne. Le clos de vigne le plus vieux est peut-être celui qui existait entre le Ponceau et le château de la Musse, le plus ancien château de la contrée.

Les Nantais ne pardonnaient pas aux Bretons leurs rapines et leurs violences plus fréquentes que celles des Francs. Ils auraient voulu être indépendants ; ne pouvant l'être, ils préféraient la domination des Francs.

Saint Gohard fut témoin de ces luttes entre Francs et Bretons, particulièrement entre Charles le Chauve et Nominoé. Il connut aussi des ennemis plus redoutables que les Bretons, venus des pays scandinaves, et qui avaient déjà ravagé le nord de la France : les Normands. Ceux-ci se présentèrent devant la ville de Nantes au mois de juin 843, le jour de la fête de saint Jean-Baptiste. Le pontife célébrait le saint Sacrifice de la messe devant une nombreuse assistance de fidèles. Les Normands firent irruption dans le lieu saint, tuèrent saint Gohard et massacrèrent son peuple.

Dix ans après, les mêmes barbares remontèrent de nouveau la Loire, et cette fois incendièrent la ville. Pendant près de cent ans, retranchés dans quelques îles de la Loire, ils ne cessèrent de dévaster le pays. Ils étaient un fléau si redoutable que l'Église de Nantes avait ajouté dans les litanies : « De la fureur des Normands, délivrez-nous Seigneur ». Ce ne fut qu'en 939, que le glaive victorieux d'Alain Barbe-Torte [Note : Alain IV Barbe-Torte, duc de Bretagne + 952] les chassa définitivement du pays et ramena la paix dans les villes et les campagnes.

Les successeurs de saint Gohard qui vécurent sous la terreur des Normands, Actard, Hermangaire, Landramne, Foucher, Isaias, virent leur domaine dévasté et ne régnèrent que sur des ruines. Le pays de Ligné ne dut pas être épargné. Comme ailleurs, les habitants, les prêtres, qui ne purent fuir, furent passés au fil de l'épée ; les villages, le bourg, l'église, durent être brûlés, anéantis.

Heureusement vont bientôt s'élever, ça et là, de puissants châteaux forts où pourront se réfugier les populations : ce sera l'œuvre de la féodalité du Haut Moyen-Age.

(abbé Eugène Durand).

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