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La Cathédrale de Nantes au XVIIIème siècle et sa restauration

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 Oeuvre du XVIIIème siècle

Le monument eut beaucoup à souffrir dans le courant du XVIIIème siècle. En 1733, le choeur fut remanié de fond en comble, au prix de la disparition des tombeaux les plus riches et les plus précieux. Le jubé fut enlevé, le maître-autel transporté du fond de l'abside jusque sous la vieille coupole du transept : les stalles des chanoines au contraire furent rejetées jusqu'au fond de l'abside. L'abaissement du pavé du choeur comporta la destruction des voûtes de la crypte. Une sorte de perron devança l'arc triomphal conservé et une grille de style Louis XV ferma ce prolongement du sanctuaire, qui s'étendait jusqu'à l'emplacement actuel de la chaire.

A l'extérieur, une modification importante fut encore apportée : ce qui restait du déambulatoire autour du choeur, fut démoli jusqu'au niveau du sol. C'est pourquoi les plans de la cathédrale romane, n'indiquent plus rien désormais au-delà de l'abside.

Il faut signaler pourtant deux initiatives qui sont dignes d'intérêt. L'autel à grand retable, de 1625, devait s'encadrer mal dans l'arc triomphal dont il avait été rapproché. Il fut remplacé, vers 1750, sous l'épiscopat de Pierre Mauclerc de la Muzanchère, par l'autel aux lignes sinueuses aux marbres vivement colorés, aux sculptures pleines de grâces et de sourires, que l'on conserve encore dans la cathédrale en qualité de maître-autel. Quel en fut le dessinateur ? Nul ne le sait. On l'avait accosté tout d'abord de deux anges en bois doré, restes de l'autel précédent. Ces anges furent remplacés, en 1779, par d'autres en marbre blanc, œuvre de Sébastien Leysner : ces derniers eurent la tête enlevée et les ailes brisées pendant la Révolution (Note : Leysner, né près de Wurtzbourg, en 1728, vint s'établir à Angers ; ce fut l'architecte nantais Ceineray qui le fit venir à Nantes).

Les grandes orgues placées dans leur tribune en 1619, furent réparées et augmentées par Lépine en 1768 ; c'est alors que furent ajoutées, au buffet du XVIIème siècle, les deux tourelles des côtés que portent de puissantes cariatides. En 1785, Clicquot les révisa et les reconstitua même entièrement. Elles reçurent encore des réparations nombreuses dans le cours du XIXème siècle, spécialement en 1866, de la part de la maison Merklin, de Paris. Elles viennent d'être de nouveau, au début du XXème siècle, l'objet d'un perfectionnement opéré par la maison Debierre-Gloton, de Nantes : elles contiennent vers 1933 cinquante-trois jeux, distribués sur un pédalier et sur quatre claviers manuels : Grand-Orgue, Positif, Bombarde et Récit (Note : Sur l'écusson d'un tuyau de façade, on peut lire le nom de Cliquot. Cf. M. l'abbé Marcel Courtonne : L'orgue de la cathédrale de Nantes, passim).

Dans les siècles passés, le puissant instrument eut souvent des organistes remarquables, comme Jean Walther, fils du grand Walther, collègue, émule et ami de Jean Sébastien Bach ; Denis Joubert, compositeur excellent, qui sauva l'orgue pendant la Révolution ; Aimée Goutel, qui fut nommée organiste dès l'âge de dix-neuf ans (Note : Une inscription gravée sur le mur, dans la tribune, rappelle cette nomination précoce qui fut faite en 1808). Les artistes du début du XXème siècle ne sont pas restés au-dessous de leur fonction ; tels sont, pour nommer seulement les morts, M. Legrand, vaste compositeur, et M. Albert Bélédin, dont la réputation s'étendit au loin (Note : Restaurées par les soins de M. l'abbé Courtonne, dotées vers 1933 de plus de 3.000 tuyaux, les orgues ont été solennellement bénites, le 19 février 1933, par Mgr Le Fer de la Motte, évêque de Nantes, et inaugurées, le même jour, par Louis Vierne, organiste titulaire de Notre-Dame de Paris).

Pendant la Révolution la cathédrale subit des injures et des dépradations sans nombre. Les armoiries et les symboles religieux furent détruits, les bas-reliefs massacrés, les statues mutilées, les vitraux brisés, les peintures cachées sous un épais badigeon (Note : Un arrêté de la municipalité, du 19 juillet 1794, prescrivait de faire disparaître, dans la cathédrale, les représentations rappelant les idées anciennes, sous une teinte « rembrunie »). « En juillet et août 1793, il fallut soixante dix jours pour abattre et effacer les armoiries, les hermines et les fleurs de lis qui ornaient la voûte et les piliers » (Stéphane de la Nicollière : Armorial des Evêques de Nantes, p. 77).

Les sculptures des porches échappèrent en partie au marteau des démolisseurs grâce à l'intervention de quelques citoyens énergiques.

Bientôt la cathédrale fut transformée en arsenal et en écurie. Les pieds des chevaux et les roues des canons brisèrent les pierres tombales, défoncèrent les pavements, écornèrent les bases des piliers.

Cependant l'administration départementale s'émut de ces destructions, et pour préserver le monument d'une ruine complète, le 21 mai 1794, elle ordonnait que « la ci-devant cathédrale serait affectée à la célébration des fêtes publiques, et que le jeu d'orgue serait conservé pour servir à la même destination : qu'en conséquence la municipalité de Nantes était chargée de prendre des mesures pour l'évacuation des chevaux et autres objets appartenant à l'armée » (Mellinet : La commune et la milice de Nantes, t. IX, p. 38-39).

L'armée ne céda du reste qu'une partie de l'édifice pour les réunions décadaires.

Le 25 novembre 1793, avait été célébrée la fête de la déesse Raison. On brûla de l'encens devant la colonne de la liberté et l'on alluma un bûcher où furent jetés les livres liturgiques et les ornements sacrés arrachés aux caveaux funéraires.

Au printemps de l'année 1793, le génie militaire avait fait établir un poste d'observation sur la tour sud de la façade. Ce poste, qui ne fut pas sans utilité lors de l'attaque de Nantes par les Vendéens, le 29 Juin 1793, fut aménagé confortablement en octobre de la même année. Ayant été mis, dans la suite, à l'usage des étudiants, il subsista jusqu'en 1826. En 1796, sa présence aida beaucoup à sauver le monument de la destruction. Un fanatique, en effet, nominé Fleury, fétichiste de la ligne droite, avait proposé sérieusement de prolonger la rue du Département (actuellement rue du Roi Albert) jusqu'à la rue Brutus (maintenant rue Prémion) au travers de la cathédrale. Un homme intelligent et ferme, Julien Groleau, s'opposa résolument à l'exécution de ce projet, alléguant, entre autres arguments, l'utilité de l'observatoire placé sur les tours. Grâce à lui le projet du citoyen Fleury ne fut pas exécuté (Cf. M. du Plessis : Bulletin de la Société Archéologique, 1931 p. 113).

Note : Cathédrale de Nantes (2 juillet 1796). Quelques explications préliminaires nous semblent nécessaires au sujet du paragraphe qui précède. Il en existe une copie au bas d'un pastel qui fut donné par M. Buron, architecte, au musée archéologique de Nantes. Ce pastel représente le portrait du sieur M. Julien Groleau, auteur de la lettre qu'on va lire. Un document de cette importance, placé ainsi au bas d'un portrait appendu à une muraille où la lecture devient impossible, nous a paru devoir exiger les honneurs de l'impression dans nos archives. M. Julien Groleau fut d'abord ingénieur ordinaire à Nantes ; puis, au moment de l'effondrement politique général, il se trouva promu au grade d'Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées, et c'est en cette qualité qu'il s'adresse aux administrateurs du département de la Loire-inférieure. Le bon sens qui règne dans cette lettre n'échappera point à nos lecteurs. La ville de Nantes était sortie de la Terreur en juin 1796 ; mais la guerre civile n'était pas éteinte : les idées révolutionnaires demeuraient éveillées, et, pour beaucoup de gens de cette époque agitée, la pétition du citoyen Fleury aîné devait satisfaire bien des haines, bien des passions ! M. Groleau, avec un tact admirable, évite de se placer sur ce terrain dangereux : il n'oppose à cette hideuse pétition du 9 messidor an IV que des raisons d'ingénieur ; il plaide uniquement pour la beauté du monument, pour les services qu'il a rendus comme observatoire pendant les guerres de la Vendée, et pour ceux qu'il est appelé à rendre encore sous le rapport d'intérêts purement matériels. Homme aussi sage que réservé, M. Groleau se garde bien de laisser tomber la moindre goutte d'huile sur le feu révolutionnaire, et c'est ainsi qu'il parvient à sauver de la destruction cette cathédrale, qui demeurera le plus beau type d'architecture de la cité nantaise et l'un des plus remarquables de la France [Note : Au mois d'avril 1434, le duc Jean V jeta les fondements de cette magnifique cathédrale, que nous sommes en train d'achever en 1879. Jean V posa la première pierre du portail ; l'évêque Jean de Malestroit, la deuxième ; le prince François, la troisième ; le chapitre, la quatrième ; le prince Pierre, la cinquième ; la ville, par ses députés, la sixième] (Auguste Laurant). Nantes, 14 messidor, an 4 de la République Française. L'ingénieur en chef des ponts et chaussées du département de la Loire-Inférieure aux administrateurs du même département. Citoyens administrateurs, Le C. Fleury aîné expose par sa pétition du 9 de ce mois, pour lui et ses associés, le désir d'enquérir l'église de la ci-devant Cathédrale de Nantes pour la démolir, étant disposé à faire les sacrifices nécessaires pour la régularité de la rue projetée du département au château. L'édifice de la ci-devant Cathédrale ayant toujours été regardé comme le principal monument de décoration de la ville, qu'il annonce de très-loin, tous les projets de passage environnants ont été dirigés d'après sa position et de manière à en faire le principal point de vue ; en conséquence il ne peut gêner les communications projetées qui sont les seules nécessaires ; car celle annoncée dans la pétition du citoyen Fleury, pour la continuation de la rue du département jusqu'au château, ne serait d'aucune utilité, n'ayant point d'issue, soit pour se rendre à la rivière, soit pour entrer au château, puisqu'elle arriverait au milieu de la rue Brutus (plus tard, nommée rue Prémion) devant le fossé du château, entre ses deux entrées, et à peu de distance du la rue Haute du château, qui a son issue à la rivière et à l'entrée principale du château. L'édifice de la ci-devant Cathédrale étant un monument qui ne peut qu'embellir la ville de Nantes sans nuire à ses communications ; n'étant point caduc, ayant des tours assez élevées pour procurer la vue entière de l'horizon et conséquemment les moyens de faire des observations astronomiques et planisphères que l'École centrale exigera pour l'instruction ; un observatoire dont l'utilité dans cette guerre a été reconnue étant déjà fait sur l'une ses dites tours, ce que l'on ne pourrait faire ailleurs qu'au moyen de dépenses énormes : l'administration jugera sans doute qu'il doit être conservé. D'ailleurs en démolissant cet édifice on détruirait une partie des bâtiments du ci-devant évêché, destiné pour l'administration du département, et il faudrait beaucoup de temps pour la réparer, attendu que la dite démolition serait longue à faire. Ne pourrait-on pas tirer parti de l'intérieur soit pour casernes, manufactures, ateliers, ou autre objet public ? D'après toutes ces considérations, je crois que la destruction de cet édifice serait plus préjudiciable qu'avantageuse à la Nation, et que dans le cas où l'administration pour se décharger des frais de réparation se porterait à l'aliéner, ce ne devrait être qu'à la condition que l'acquéreur ne pourrait faire aucun changement à l'extérieur, dont il entretiendrait la couverture et la charpente, et de laisser la libre jouissance de l'observatoire qui existe et la faculté d'aller sur l'autre tour, où il n'y en a pas, pour y faire toutes les observations qui seraient jugées à propos. Salut et respect. Groleau.

Le 25 mai 1800, l'explosion de l'une des poudrières du château ébranla tout l'édifice, enleva la toiture, renversa les meneaux des fenêtres du côté sud, détruisit les derniers vitraux que les Vandales n'avaient pu atteindre. L'état de dégradation de la cathédrale était tel, à cette époque, que les propriétaires voisins menacés dans leur sécurité, adressèrent des plaintes au préfet. Le préfet s'en prit à la Commune qui déclina toute responsabilité : « C'est illusoire, répondit-elle au préfet, qu'on regarde ce vaste monument comme étant aux charges de la Commune. Cet édifice fut bien accordé à la Commune pour y célébrer les fêtes décadaires et nationales ; mais elle n'en a jamais eu la jouissance pleine et entière ; seulement par tolérance la direction de l'artillerie et du génie la rétrocédèrent pour y célébrer les pompes funèbres des députés de Rastadt et celles en l'honneur du général Joubert ; depuis elle n'en a pas eu la jouissance. Les fêtes décadaires sont devenues nulles, les fêtes nationales sont supprimées ; les deux seules qui sont conservées ont un mode de célébration qui n'exige pas un pareil édifice, dont le gouvernement a besoin et qui est tout entier à sa disposition. Le service de l'artillerie jouit de la nef, des bas-côtés, des chapelles latérales. Le génie occupe la chapelle dite de Saint-Clair. Des propriétés domaniales encombrent la sacristie. Le bâtiment est tellement en désordre qu'il ne peut servir à rien à la Commune. C'est au domaine de prendre tous les moyens pour prévenir de plus grandes dégradations, et dans tous les cas, pour prévenir les accidents » (Mellinet. La commune et la milice de Nantes, t. XI, p.80. — Bulletin de la Société Archéologique, 1888).

Personne ne voulant se charger des réparations, le ministre de la guerre décida que l'église Saint-Pierre et l'évêché resteraient affectés au service de l'armée.

Cependant, la cathédrale servait aux usages les plus étranges et les plus inattendus. Le Publicateur de Nantes, à la date du 28 Nivose, an VIII (1800) publiait cette annonce stupéfiante : « Expérience aéronautique dans la cathédrale. — Avis aux souscripteurs pour la 51ème ascension de l'aéronaute Blanchard. — Les citoyens souscripteurs sont informés que depuis le 27 nivôse jusqu'au 30 inclusivement, à midi très précis, dans l'église Saint-Pierre, il y aura diverses expériences intéressantes, comme ballon captif rempli de gaz, expérience de parachute sur un quadrupède qui tombera du haut de la voûte sans se blesser, et un aérostat qui, d'un coup d'électricité, détonnera du haut de l'édifice. La descente accélérée de la galerie et de la Mongolfière qui y seront appendus représentera la chute du célèbre et malheureux Pilastre de Roziers à Boulogne-sur-Mer. On verra aussi, dans cette église, une partie de la flotte aérienne qu'on prépare avec célérité pour le voyage prochain. Les non-souscripteurs pourront aussi voir ces expériences moyennant 60 centimes » (Communication de M. Dortel à la Société d'Archéologie de Nantes).

Tant d'erreurs et de mauvais traitements, accumulés tout le long du XVIIIème siècle, surtout pendant la Révolution, laissaient la cathédrale lamentablement détériorée : mutilée sans pitié, dépouillée de ses ornements, ouverte à tous les vents, exposée aux méfaits des pluies, elle était vouée à la ruine si l'on ne s'empressait de panser ses plaies béantes et de consolider ses membrures ébranlées.

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Restauration et achèvement

Dès l'an 1800, à la faveur de l'apaisement qui se fait sous le Consulat, des pétitions nombreuses arrivent de tous les côtés au préfet de Nantes, réclamant le retour des prêtres déportés et la réouverture des églises. Le 25 avril (3 floréal) 1802, au milieu d'un cérémonial imposant, fut proclamée la loi sur l'organisation des cultes. Après les églises de Sainte-Croix et Saint-Nicolas, la cathédrale fut rouverte au culte catholique. Le 14 août, à 7 heures du soir, au bruit du canon et au son des cloches, elle était réconciliée par l'abbé Gély assisté de l'abbé Garnier. Le lendemain M. Leflo de Trémolo, vicaire général, y célébrait une messe solennelle. On chanta le Te Deum et un prédicateur fit entendre dans la chaire l'éloge du premier consul. Le 10 octobre, Mgr Duvoisin prenait enfin possession de sa cathédrale, entouré d'un clergé nombreux et de toutes les autorités militaires, judiciaires et civiles. Quelques jours après, le 18 octobre, il posait la première pierre du grand autel, qui fut monté en moins de trois jours, puisqu'il fut consacré le 21 octobre.

Dès le mois de mai 1802, on s'était préoccupé des réparations urgentes. Cette même année, un rapport sur l'état des autels avait été dressé par les architectes Ogée, Praud et l'architecte-voyer Peccot qui s'exprimait ainsi : « Le maître-autel, ainsi que tous les autels de la cathédrale d'ailleurs, avait été complètement démoli ; son revêtement de marbre était écorné, on le retrouva complet. Les anges adorateurs pouvaient être aussi réparés. Pour les autels acolytes, situés au pied des montants du grand portique Louis XIII, les matériaux conservés en permettaient le rétablissement ».

Le sculpteur Robinot-Bertrand prêta son concours pour ces restaurations diverses, et, en 1803, cinq autels des chapelles latérales, sur huit, étaient relevés. En 1806, fut établie la chapelle de Saint-Jean-Baptiste, dont les ornements dorés sont bien de style empire ; sur la grille se remarquent les initiales de Mgr Jean-Baptiste Duvoisin.

Dans le même temps, les architectes Séheult, Alloneau et Nau signalaient le mauvais état de la charpente et de plusieurs chapelles latérales. Il y fut remédié sans retard.

La même année encore, Mgr Duvoisin obtenait le bronze nécessaire à la fonte d'une deuxième cloche : car il ne subsistait qu'une seule cloche fêlée qui servait de timbre à l'horloge. Ce bronze provenait des débris de l'ancien carillon et des portes de la cathédrale qui avaient été conservées dans l'ancien couvent des Ursulines (qui servait de lycée vers 1933). Mais il ne fut pas donné de suite à ce projet de fonte.

Vers 1813, les fonts baptismaux furent restaurés et décorés d'une ordonnance classique ; on regratta aussi, d'une façon bien maladroite, l'ornementation des deux tours rongées par le salpêtre : les portails, spécialement, virent disparaître ce qui restait des bas-reliefs sur leurs pieds-droits.

Ce fut alors aussi que fut effacée la devise « Liberté, Egalité, Fraternité » que l'on avait inscrite, un quart de siècle plus tôt, sur le tympan du grand portail. Celui-ci fut gratifié de la géométrique rosace qui subsiste encore. Plus tard, Grootaërs dressa contre le trumeau, sous un dais démesuré, la statue de saint Pierre qu'on y voit en 1933.

En 1817, la cathédrale s'enrichit d'un inestimable trésor : le tombeau du duc François II, élevé jadis dans La chapelle des Carmes, lui fut confié par M. de Saint-Aignan, maire de Nantes. Ce « royal et magnifique tombeau » fut placé dans ce qu'on appelait la chapelle Saint-Clair, c'est-à-dire dans le bras sud du transept, lequel était alors fermé par une cloison.

Une inscription fut placée sur la grille de clôture « Tombeau de François deux dernier duc de Bretagne, mort à Coueron, le neuf septembre 1488, de Marguerite de Bretagne, sa première femme et de Marguerite de Foix, sa seconde femme. 

Les restes d'Arthur III, duc de Bretagne, comte de Richemont, Connétable de France mort à Nantes, le 26 décembre 1458, y ont été déposés le 28 août 1817 ».

Il convient de dire ici que la dernière partie de cette inscription constitue une erreur, comme l'a démontré le chanoine Durville : ce ne sont pas les ossements d'Arthur III qu'on y a placés, mais probablement ceux de quelque obscur religieux de la chartreuse de Nantes [Note : Le corps d'Arthur III, en effet, avait reçu sa sépulture dans l'église des Chartreux de Nantes (rue actuelle du Maréchal-Joffre). Ses restes en furent retirés le 1er juin 1872 et déposés dans la cathédrale avec ceux de François II qu'on y avait apportés le 17 février précédent. Le 21 mars de l'année suivante, les cercueils princiers furent violemment ouverts et les ossements répandus sur le sol. Postérieurement au 1er juin 1792, l'église des Chartreux fut démolie : c'est alors qu'une personne zélée y pénétra et déroba aux démolisseurs des ossements qu'elle crut être ceux d'Arthur III ; elle les garda précieusement jusqu'en 1802, époque où elle les confia à l'abbé Gély. Celui-ci les fit enfouir dans le cimetière Saint-Jean, près de la cathédrale, après les avoir renfermés dans une boîte solide portant le nom d'Arthur III. Ce furent ces ossements que l'on transféra solennellement à la Cathédrale, en 1817, et que l'on déposa dans le tombeau de François II. Cf. Chanoine Durville : Vieux Nantes, t. II, p. 380-410].

En 1825 Mgr Micolon de Guérines fit fondre deux cloches qui ne furent d'ailleurs utilisées que pendant 15 années. Dès 1840, en effet, le chapitre de la cathédrale et une commission de notables nantais se mirent à l'oeuvre pour obtenir une sonnerie digne du monument. Huit cloches furent alors fondues par Guillaume Besson, d'Angers, sur la terrasse de l'abattoir ; les deux cloches de 1825 avaient été jetées dans la coulée de bronze. Mgr de Hercé bénit cette nouvelle sonnerie le 7 décembre 1840, en présence du préfet, du maire et du lieutenant-général.

Entre temps, à la grande satisfaction des Nantais et des amis de l'art, on parlait de reprendre les travaux d'achèvement de la cathédrale, travaux interrompus depuis près de deux cents ans. 

En 1834, en effet, le bras nord du vieux transept roman, réservé aux hommes, était devenu notoirement insuffisant. On songea seulement tout d'abord à son agrandissement en prenant sur l'ancien cimetière Saint-Jean contigu à cette partie de l'édifice. Le projet parut bientôt difficilement réalisable. Mais il suggéra l'idée d'entreprendre la construction de ce bras du transept et, peut-être, celle de l'abside elle-même. Sous l'épiscopat de Mgr de Guérines, des plans et devis furent dressés par M. Seheult, architecte du département, pour le transept et les trois premières travées du déambulatoire. Le gouvernement donna son approbation pour le transept et les deux premières travées correspondant à celles qui existaient déjà au sud il promit des subsides et les travaux commencèrent. Mgr de Hercé en bénit solennellement la première pierre, le 3 septembre 1840.

A un moment l'on projeta de terminer rapidement le choeur par un chevet plat. M. Vrignaud, vicaire général, dut aller à Paris pour obtenir qu'on renonçât à ce projet. En 1844, le duc de Nemours, de passage à Nantes, s'intéressa vivement à la construction : grâce à son appui, les plans pour la continuation de l'abside étaient adoptés.

La construction fut poussée d'abord avec assez d'activité ; les murs sortaient de terre et, dans certaines parties, atteignaient la hauteur du glacis des fenêtres, quand tout fut arrêté, au cours de l'année 1849, par suite de difficultés qui aboutirent à la destitution de l'architecte. 

La portion du transept nord bâtie par M. Seheult est facilement reconnaissable : les murs pleins offrent de vastes surfaces qu'on ne trouve pas ailleurs dans le monument. Le dessin de l'imposte ajourée qui surmonte la porte est d'une élégance remarquable, mais un peu tourmenté. Les bases de piliers donnent, en plan par terre, un polygone d'une grande complication. A l'extérieur, enfin, le remplage de l'appui-mains du premier étage est le seul, au dehors, qui dessine des flammes inclinées et serrées.

Le 30 octobre 1849, M. Théodore Nau, qui venait d'édifier le choeur de l'église Sainte-Croix, devint architecte diocésain : il remania les plans de son prédécesseur et reprit l'oeuvre de la cathédrale. Sous l'abside, il construisit ces vastes cryptes qui servent, celle du centre, d'enfeu pour les évêques de Nantes, celles du pourtour, de réserves pour les sacristies.

L'abside s'élevait à quelques dix mètres au-dessus du sol, quand en 1865, M. Nau vint à mourir. M. Eugène Boismen, qui lui succéda, acheva cette abside et construisit la sacristie qui lui est voisine. Les évêques de Nantes, Mgr Jaquemet et surtout Mgr Fournier, avaient su donner un élan vigoureux aux travaux d'achèvement (Note : Les armoiries de Mgr Fournier, ornent l'une des clefs de voûte de la chapelle actuelle du Saint-Sacrement : elles sont « de gueules à une église d'or, au chef d'argent chargé de cinq hermines de sable ». C'est avec justice que ces armoiries paraissent dans la cathédrale, car Mgr Fournier fut l'animateur principal des travaux d'achèvement de cet édifice : il fit de nombreux voyages à Paris pour y intéresser le gouvernement ; il s'ingénia pour trouver les ressources nécessaires. Il tint à placer lui-même le bouquet sur la toiture achevée et reçut, en cette occasion, le personnel du chantier dans son évêché pour un vin d'honneur). 

Sous l'épiscopat de Mgr Le Coq, l'oeuvre put être terminée. En 1866, M. Boismen s'étant retiré, l'architecte diocésain de Rouen, M. Louis Sauvageot lui succéda. Il restait alors à relier l'abside neuve à la vieille nef : travail délicat où l'on aurait à faire disparaître la tour romane pour établir la croisée du transept. A l'encontre de l'idée de M. Boismen, M. Sauvageot détruisit les piles qui avaient soutenu la coupole du XIIème siècle ; il les remplaça par les puissants piliers qui supportent actuellement la maîtresse voûte, centre de l'édifice.

C'est alors que la crypte du XIème siècle fut déblayée et couverte d'un plafond de briques.

Et le jour de Noël de l'an 1891, Mgr Le Coq put inaugurer le nouvel édifice désormais achevé. Il y avait quatre cent cinquante sept ans que la première pierre en avait été posée. Une première campagne de construction d'une durée de deux siècles en avait élevé la façade, la nef et le bras méridional du transept. Les travaux avaient sommeillé durant les deux siècles suivants, qui furent, à bien des égards, funestes à l'édifice. Pendant le demi-siècle, enfin, qui suivit la reprise des travaux entre 1838 et 1891, on avait vu sortir de terre et grandir jusqu'à leur complet développement, le bras nord et la croisée du transept, et surtout la profonde abside qui fait le plus grand honneur aux architectes du XIXème siècle.

(J.B. Russon et D. Duret - 1933) 

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