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ENTERREMENT OU INHUMATION DES MORTS DANS LES EGLISES A NANTES.

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Nantes au XVème siècle. — Maladie épidémique. — On enterre les morts dans les églises et dans des cimetières placés dans l'intérieur de la ville. — Influence de cette coutume sur le développement des épidémies.

IX.

En commençant ce chapitre, nous avons jugé à propos de donner un aperçu topographique de Nantes, tel qu'on le trouve dans plusieurs passages de Travers et de Mellinet... Après avoir exposé l'état des lieux, il sera plus facile de se rendre compte des fréquentes épidémies qui ont décimé la population.

Nous sommes au XVème siècle.

Continuellement menacée, la ville de Nantes, pour se mettre à l'abri des attaques imprévues ou des coups de main qu'elle a sans cesse à redouter, est entourée de murailles et fortifiée d'un grand nombre de tours.

Les murs se prolongent au-dessus des douves Saint-Nicolas et continuent par le quartier Sainte-Catherine.

Les ponts, construits tous en bois, sont défendus par la tour de Pirmil. Elle renferme des prisonniers.

Le pont de la Poissonnerie s'appelle le Rote Chalandière : on y a établi des moulins à eau.

Le château du Bouffay présente un bâtiment quarré et flanqué de quatre tours. Devant se trouve une vaste place sur laquelle ont lieu les joutes et les tournois.

On n'arrive au port Maillard que par un pont couvert d'un ballet d'ardoises, qui joint les boulevards, d'où l'on se rend au château du duc. Entre ce port et la porte dite de Drouin-Lilliard, on voit l'hôpital du port Maillard, dit aussi hôpital de la ville. Son cimetière est placé entre la tour de la Loire et le haut de la chapelle, là où sont actuellement les fossés du château.

A l'entrée de Richebourg, où l'on voit beaucoup do vignes, est le château Gaillard.

La motte Saint-Pierre s'appelle place des Lices.

La motte Saint-André est couverte de maisons et de vignes ; un chemin qui règne entre la douve et ces vignes conduit à Saint André. Les murs se prolongent ensuite sur les bords de l'Erdre.

La place Saint-Pierre est un cimetière planté d'arbres.

On communique à la place du Change, où se tient le marché, par une porte qui est près de l'église Saint-Saturnin.

La rue de la Gasserie n'est qu'un simple pont en bois.

Un cimetière, dit de l’Érau, occupe le sommet d'un rocher situé entre la halle aux toiles et la rue de la Boucherie.

Une grève, appelée la grève de la Saulsaie, forme l'île Feydeau ; il en est de même de la prairie de l'hôpital et de l'île Gloriette, sur lesquelles il n'y a pas de maisons.

La Loire couvre toute l'étendue de Richebourg à Chésine.

On construit des navires sur le Port-au-vin.

La Fosse, habitée par des pêcheurs, n'est qu'un terrain fangeux.

La Loire arrive sur la place Royale actuelle par une vaste issue, souvent comblée par les vases, et qu'on appelle Fosse-Saint-Nicolas. Les quartiers de Sainte-Catherine et de Saint-Nicolas, par suite des eaux de l'Erdre et de la Loire amenées dans le fossé qui a pris le nom de Douves-Saint-Nicolas, forment une île que baignent les eaux de l'Erdre et de la Loire... Dans le quartier de Sainte-Catherine, fonds fangeux et exposé aux inondations, on voit un hôpital, un cimetière et un amphithéâtre d'anatomie.

Les environs de l'Entrepôt ne sont qu'un groupe de prairies coupées par la Chésine, ou plutôt n'offrent qu'un vaste marais qui s'étend au-delà de Gigant, d'une part, et jusqu'à la Loire de l'autre.

Une partie de la ville est entourée de fossés dans lesquels croupissent les eaux marécageuses de l'Erdre.

Les maisons, entassées les unes sur les autres, ne présentent que des ouvertures basses et retrécies. A peine l'air se renouvelle-t-il dans beaucoup de ces tristes demeures, ou de petits et sales carreaux laissent pénétrer quelque peu d'un jour sombre qui se glisse à travers les murs élevés d'une cour étroite, espèce de puits infect, où viennent se dégorger les tuyaux de décharge des toîts et des eaux ménagères, et dont les cuvettes, souvent encombrées d'ordures de toute espèce, rendent l'infection continuelle. La population se presse dans des rues étroites, obscures, sales et tortueuses... L'air y est difficilement renouvelé ; la lumière n'y pénètre pas, et le sol y est toujours humide. Les immondices et les cadavres d'animaux embarrassent la voie publique, infectent l'air et concourent à corrompre un atmosphère déjà altéré par l'agglomération des hommes et des animaux... Toutes ces causes, engendrées par l'insalubrité des rues et des habitations, sont permanentes ; elles préparent et rendent plus délétère l'action des influences transitoires qui viennent s'y ajouter.

X.

L'année 1401 vient de commencer... Les Anglais sont en Bretagne ; la guerre se fait pour ainsi dire aux portes de Nantes, et les habitants de la campagne, dépourvus de moyens de défense, affluent dans la ville pour y chercher un asile contre la dévastation et la mort... L'entassement d'un si grand nombre de personnes fait naître le typhus.

XI.

En 1403, les Anglais détruisent les vaisseaux de la Bretagne et ravagent ses plus belles campagnes... L'année suivante, la province, et principalement le comté de Nantes, est affligé d'une grande mortalité.

« Mais, dit l'historien Le Baud, le jour de la translation de Saint-Martin, qui est le quart de jour du mois de juillet, s'assembla le clergé de Nantes, moult solennelle et dévote, car clercs et laiz étaient tous nus pieds et confez, et portaient les reliques des saincts par toutes les églises de la cité ; après laquelle procession cessa le mal sur terre et au pais ».

XII.

A cette époque, on enterrait les morts dans les églises, et les habitants qui n'avaient pas les moyens de payer leur place étaient inhumés dans les cimetières qui entouraient les temples … Les paroissiens de Sainte-Croix n'avaient point de cimetière extérieur ; ils obtinrent du duc un lieu adjacent à l'église pour servir à la sépulture des pauvres...

Ce cimetière existait encore en 1700, et on n'y enterrait guère que ceux qui n'avaient pas laissé de quoi payer à la fabrique l'ouverture d'une fosse à l’église... En 1836, lorsqu'on démolissait une ancienne maison de la Basse-Grande-Rue, pour y construire celle qui porte vers 1852 le numéro 25, nous avons vu plusieurs ossements humains qui nous rappelèrent qu'en effet un cimetière avait existé dans cet endroit... M. le docteur Mareschal, dans un travail remarquable sur les anciens établissements hospitaliers de Nantes, nous à fait connaître qu'en remuant, vers 1830, le sol où était placé l'hôpital de Toussaint, situé sur les Ponts, on le trouva rempli d'ossements humains. Cette position, comme le dit notre savant confrère, ne pouvait être plus mal choisie pour un cimetière, non seulement à cause des habitations qui l'entouraient, mais aussi à raison des inondations auxquelles ce lieu était exposé.... Arrêtons-nous ici, et recherchons les motifs qui ont amené l'usage d'inhumer les corps dans les églises et dans les cimetières renfermés dans l'intérieur de la ville... Cette funeste coutume remonte seulement à l'établissement de la religion chrétienne ; les peuples anciens eurent toujours, loin des habitations, des lieux consacrés aux sépultures... A Rome, il est vrai, on enterrait d'abord chacun chez soi ; mais bientôt des règlements proscrivirent cet usage, pour garantir les vivants de l'infection des morts. La loi des Douze-Table porta les précautions plus loin : elle défendit d'enterrer ou de brûler aucun cadavre dans l'enceinte de Rome. Dès lors, les tombeaux romains furent indifféremment répandus, tantôt dans les campagnes, et particulièrement sur le bord des chemins, tantôt dans un jardin qui avait appartenu au défunt. Mais, lorsque le christianisme eut remplacé tout-à-fait le paganisme, la mesure hygiénique que l'on suivait avant la nouvelle religion ne fut plus observée…. Alors, dans toute l'Europe, l'usage s'établit de placer des cimetières près des églises, et insensiblement on accorda à quelques personnes le privilège d'être inhumées dans l'intérieur même des temples. On y enterra d'abord des hommes que l'on voulait honorer après leur mort, et l'empereur Constantin fut le premier qui reçut cette marque de distinction.

« L'usage d'enterrer les morts dans les églises, dit Quatremère de Quincy, dut avoir plus d'une raison : la première, inspirée si l'on veut par la dévotion, avait pour objet la pieuse croyance que la vertu des prières et celle du saint sacrifice de l'autel avait de plus près une action plus puissante ; la seconde, que le respect attaché aux saints lieux était une sauvegarde de plus contre les profanations ; la troisième dut avoir pour objet d'être séparé après la mort, comme on l'avait été pendant la vie, de la société idolâtre et païenne.

Bientôt l'empressement assez naturel de tous ceux qui voulaient être enterrés dans les églises, et le peu d'espace du local, durent faire mettre à cette faveur un prix qui variait suivant que l’on était placé plus ou moins près de l'autel.

Le clergé, sans payer, s'arrogea le droit d'être inhumé dans les temples et en fit un de ses privilèges... Plusieurs conciles reconnurent ce droit et d'autres le contestèrent : celui qui se tint à Nantes, vers la fin du IXème siècle, permit d'élever des tombeaux dans les vestibules et dans les portiques ; mais il défendit formellement d'en construire dans les églises.... Voici, d'après Vicq d'Azir, l'origine des vestibules et des portiques : les tombeaux étaient rangés le long des murs, auprès et hors des églises. Comme on y accourait pour satisfaire aux devoirs de la religion, bientôt il fut nécessaire de mettre les fidèles à l'abri des injures de la saison. C'est pour cela que l'on construisît les vestibules et les portiques, et voilà pourquoi les cimetières furent toujours voisins des églises paroissiales. Nous avons encore des vestiges de ce point d'antiquité. L'on voit dans quelques vestibules ou portiques les petites chambres souterraines, et les arcades qui se pratiquaient au dehors et le long des murs des temples ; elles sont connues sous le nom d'exèdres. Telle fut l'origine des chapelles. Les fidèles s'y retiraient lorsqu'ils voulaient se recueillir, méditer ou prier sur les tombeaux. D'abord ces petits édifices furent séparés de l'église ; dans la suite, ils y furent unis par le moyen des portiques et des arcades qui sont usités particulièrement pour la construction des basiliques, et y formèrent les bas côtés, qui indiquent encore aujourd'hui l'importance et l'ancienneté d'une église ; enfin on les ferma de tous côtés, et ils firent corps avec le reste du bâtiment… Les tombeaux et les caisses qui y avaient été placés devinrent les autels ; et, sous le pontificat de Grégoire-le-Grand, le nombre en était considérablement augmenté ».

Les inhumations dans les églises et dans les villes, devaient compromettre gravement la salubrité publique, et donner, par les miasmes qui se dégageaient des sépultures, plus d'intensité aux maladies régnantes.... Il n'est pas possible d'en douter, lorsque l'on considère, que les fosses avaient à peine deux pieds de profondeur ; lorsque l'on songe que , sans ces temples où l'air était à peine renouvelé, on se trouvait souvent dans la nécessité, pendant les épidémies, d'ouvrir les tombeaux pour y mettre de nouveaux corps ou pour on retirer des cadavres à peine décomposés, quand le terrain consacré aux sépultures n'était plus suffisant.... On lit dans la Gazette de santé du 10 février 1774, que le seigneur d'un village à deux lieues de Nantes étant mort, on crut, pour placer son cercueil plus honorablement, devoir en déranger plusieurs, entre autres celui d'un de ses parents décédé trois mois auparavant. Une odeur des plus fétides se répandit dans l'église ; quinze des assistants moururent peu de temps après : les quatre personnes qui avaient remue les cercueils succombèrent les premières, et six curés présents à cette cérémonie manquèrent de périr.

On peut trouver, dans les effets de ces exhalaisons délétères, l'explication de certains phénomènes que des historiens ont regardé comme miraculeux.... Grégoire de Tours rapporte qu'un voleur ayant osé entrer dans le tombeau de Saint-Hélius, ce prélat le retint et l'empêcha d'en sortir... Le même auteur nous apprend qu'un pauvre habitant de la Touraine n'ayant point de pierre pour couvrir le lieu où un de ses enfants avait été inhumé, enleva celle qui fermait l'ouverture d'un ancien tombeau où reposaient sans doute, dit Grégoire de Tours, les cendres de quelque saint perssonnage .... Ce malheureux père fut frappé sur-le-champ et tout à la fois de mutisme, de cécité et de surdité.

Joseph, dans ses Antiquités judaïques, dit qu'Hérode ayant ordonné que le tombeau du roi David fût ouvert, pour en retirer les richesses qui y étaient renfermées, deux satellites employés à cet ouvrage en périrent.

Aux influences délétères que faisait naître le pernicieux mode d'enterrer les corps morts que l'on suivait depuis des siècles, venaient encore se joindre celles que devait produire, dans les familles, l'usage de les garder pendant plusieurs jours... Il paraît, nous apprend F.-J. Verger, dans les archives curieuses de Nantes, que cela arrivait fréquemment, afin de n'enterrer les morts que le dimanche après la grand'messe. On trouvait apparemment ce jour plus commode pour réunir les parents du défunt. On apportait le corps à l'église avant l'office, et souvent la corruption du cadavre était telle que le public en était incommodé....

Les médecins appelèrent, à différentes époques, l'attention de l'autorité sur les dangers des inhumations dans l'intérieur des villes et des églises ; mais ce ne fut qu'en 1765 qu'un arrêt du parlement de Paris défendit d'enterrer les morts dans les villes, et que le procureur-général présenta un réquisitoire pour faire proscrire les abus qui existaient dans cette partie importante de la police.

(Gabriel Le Borgne).

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