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L'ancien Couvent des Cordeliers à Nantes de 1791 à 1925 |
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LE SOUS-SOL DE L'EGLISE
Connaissant tout ce que la pioche des démolisseurs a fait réapparaître sans grand effort en abattant les vieux murs, suivons maintenant les travailleurs qui creusent le sol.
Quelques murs remontant à une époque plus ou moins incertaine ont apparu, notamment un pan de mur à l'emplacement de la paroi latérale de la chapelle au duc ou de N.-D. des Anges (côté de l'Evangile) ; un autre bout de mur à froid, en pierres blanches, à quelque distance de l'enfeu des Rieux ; un autre pan, plus bas dans l'église, près de l'ancienne entrée du choeur.
Ce sont
surtout les enfeux et le puits qui vont retenir assez longuement notre
attention.
A)
Les enfeux
Parlons tout d'abord des enfeux identifiés.
Un petit enfeu a été découvert, au dire du contremaître Réthoré, en août 1924, lors de la construction d'un mur à l'entrée de la chapelle au duc, dans le prolongement du mur romain. Cet enfeu, long de 2 mètres, large d'environ 1 m. 50 et qui paraissait de construction ancienne, contenait des débris d'un cercueil en bois et des os plutôt petits. Pour édifier le caveau, les maçons avaient été obligés de franger le mur romain. Cet enfeu fut-il celui qui abrita les cendres du prince Robert de Bretagne ? Nous hésitons à l'admettre, Dubuisson-Aubenay plaçant celui-ci au milieu du choeur de l'église, au-dessus de la sépulture des Rieux (Note : La description et une partie de l'épitaphe du tombeau de Robert de Bretagne ont été reproduites d'après Dubuisson-Aubenay, dans « Le Couvent des Cordeliers de Nantes », par M. l'abbé Brault).
L'enfeu de Jean II de Rieux, mis à jour partiellement par la longue fouille transversale révélatrice de l'empierrement rouge et par une fouille perpendiculaire au mur romain, est situé un peu plus haut dans le choeur que le figurent le plan Portail et celui dressé par M. de la Nicollière. Seule la partie inférieure du caveau a été fouillée par suite des menaces d'éboulement du sol. Un escalier de plusieurs marches (deux ont été déblayées) menait au bas de l'enfeu. De grosses pierres blanches rectangulaires et maçonnées en constituaient les côtés (trois rangs de pierres subsistaient). Le fond, gris foncé, se trouvait à environ 2 mètres du niveau actuel du sol. Deux trous se voyaient encore dans les deux parois latérales de l'enfeu. Ils attestaient l'existence autrefois de barres de fer sur lesquelles on posait les cercueils. On pouvait ainsi placer les cercueils sur deux étages (Note : Ce fait a été observé à propos du tombeau de Françoise de Dinan, découvert en 1904 dans l'église des Jacobins de Nantes). Il convient de remarquer que les bords des parois (à l'affleurement de la « cosse ») s'incurvaient légèrement, témoignant ainsi que l'enfeu était voûté depuis au moins les remaniements exécutés au XVIIème siècle (Cf. La Nicollière – Essai historique sur l'église des Cordeliers de Nantes) et devait avoir environ une hauteur de 1 m. 50. Il fallait sûrement se baisser pour descendre l'escalier d'accès.
Si l'on se reporte aux dessins de Gaignières, on voit que la partie supérieure de ce tombeau représente gravés sur une vaste dalle au-dessus du sol le sire de Rieux et sa femme Jeanne de Machecoul en costume du XIVème siècle. Une double arcature gothique enserre leur tête, tandis que leurs pieds s'appuient sur un petit chien. Une longue inscription, rapportée par Dubuisson-Aubenay, court autour des personnages et les armes de Rieux. Machecoul, figurent au pied de la « lame ».
A moins de 2 mètres de l'enfeu des Rieux, près du mur latéral du choeur, s'élevait le tombeau de René de Rieux, seigneur de Sourdéac, mort en 1628.
Les premières pierres de taille jaunes qui formaient les bords de la fosse, profonde de 40 à 60 cm. environ, longue de 2 mètres et large de 1 m. 50 environ, apparaissaient lors des fouilles récentes, à plus de 1 mètre au-dessous du sol de l'église. Sept trous (cinq sur les côtés et deux sur les faces) indiquaient l'emplacement des barres de fer identiques à celles mentionnées plus haut. Cet enfeu, de même que celui des Rieux, avait été rasé presque jusqu'à ses fondations et rempli de délivres et de pierres, ainsi que l'intervalle qui les séparait.
Le tombeau de Sourdéac, décrit d'une façon confuse par Dubuisson-Aubenay, se compose, d'après Gaignières, d'un sarcophage en marbre noir dont les bords ont la forme d'une quille de navire et sont entourés de quatre colonnes en marbre blanc surmontées chacune d'une urne funéraire en bronze. Ces colonnes supportent une large table servant elle-même d'appui à une pyramide en marbre noir avec arêtes et armoiries en marbre blanc.
Dans la cour de l'ancien cloître du couvent, une médiocre ouverture presque rectangulaire se distingue au bas du mur romain. En s'engageant dans cette ouverture on pénètre à l'intérieur d'un caveau dont la voûte surbaissée et obstruée par un mur assez récent devait se poursuivre sous le dallage de l'église dans le bas de la grande nef. C'était l'enfeu des Mosnier de Thouaré et des la Roche-Macé, situé sous la chapelle Sainte-Emerance. De nos jours, plusieurs châsses de plomb entières ou fragmentées, tordues par leur propre poids et recouvertes d'un crèment blanc, voisinent avec des ossements très variés, provenant sans doute des tombeaux violés sous la Révolution.
Si d'autres enfeux ont été encore mis à jour en 1924, du moins n'ont-ils pu recevoir d'attribution, faute de renseignements suffisants.
Dans l'axe de l'enfeu des Sourdéac, un enfeu inconnu a été découvert à 1 m. 50 du puits. Cet enfeu, très ancien selon M. Evellin présent lors de sa réapparition, et large de 1 m. 10, avait encore trois rangs de briques et un rang de pierres alternées. Un dallage régulier de schiste en formait le fond. Trois marches pour y descendre subsistaient.
A l'extrémité de l'aire rouge dont il a été déjà question plus haut, les travaux ont révélé un autre enfeu remontant à une époque indéterminée malgré ses murs édifiés à froid.
Des fragments de murette en pierres blanches ont décelé, en outre, à divers endroits, la présence probable d'autres enfeux, mais l'absence de fouilles méthodiques ne nous permet pas d'en dire davantage à leur sujet. Il en est de même pour les quelques ossements ou le squelette de femme exhumé au bas de l'église des Cordeliers, près du mur romain. On doit regretter aussi que des fouilles n'aient pas été effectuées dans la rue actuelle des Cordeliers, à l'emplacement de la chapelle d'Espagne, où reposaient tant de gens de qualité, non loin du charnier ou cimetière situé dans la cour de l'école paroissiale de filles, à l'Est de la chapelle de Ruiz, charnier révélé par la présence de nombreux ossements mis à jour il y a quelques années par les dames de l'école, en plantant des arbres.
Mais nous ne serions pas complet si nous arrêtions ici la liste des enfeux que renfermait l'église des Cordeliers. On connaît, d'après Dubuisson-Aubenay et Gaignières surtout, l'emplacement d'un certain nombre d'autres tombeaux non retrouvés (mais mentionnés par M. l'abbé Brault).
Le premier en date de ces tombeaux est celui de Jean l'Epervier, seigneur de la Fosse, mort en 1297, et Perrot l'Epervier, seigneur de Saint-Thomas, mort en 1233, situé « à gauche en entrant dans la nef ». Il se composait d'une voûte creusée dans le mur latéral de l'église et d'un gisant reposant sur un cénotaphe peu élevé, décoré d'arcades gothiques. Au-dessus du gisant se tenaient quatre anges et les armes des l'Epervier.
Le tombeau de Blanche de Boville, femme d'Olivier de Clisson était, dit Gaignières, « à droite du grand autel dans le sanctuaire de l'église des Cordeliers ». Il représentait une femme, gisante, la tête couronnée reposant sur un coussin et les pieds appuyés sur une plaque supportée par l'échine de deux animaux assis. Une inscription courait autour de la statue roide, reposant sur une dalle soutenue par deux piles de maçonnerie. Seule, la tête sciée du gisant, avec ses yeux ouverts, avec son bandeau de veuve cachant le menton et les joues, est parvenue jusqu'à nous (dixit l'abbé Brault). En grattant avec un canif la pierre salpêtrée qui compose cette tête, nous avons pu reconnaître dans celle-ci du marbre.
L'enfeu d'Aubigné, situé près de la chapelle Sainte-Emerance, et que nous mentionnons ici pour mémoire, représentait une voussures surbaissée à cannelures. Sur un coussin reposait la tête d'un guerrier allongé, sur le ventre duquel était posé un « escu à un lyon lampassé et coronné », selon Dubuisson-Aubenay. Un animal servait de dossier aux pieds de l'image du défunt.
Le tombeau de Dom Bernard Abral de Catalogne, ancien chanoine de Burgos, qui était au milieu de la chapelle de N.-D. d'Espagne, se composait d'une pierre jaune reposant sur des piliers en bois. Un personnage en habit canonial avec légende y était gravé.
La présence de l'enfeu de Charles de Ploueër, seigneur du Boisrouaut, mort le 7 janvier 1601, n'était révélée que par une épitaphe manuscrite en vers sur parchemin.
Quant au tombeau de François Jaillard placé entre la chapelle de Saint Martin d'Aranda et celle de Compludo-Miranda, il formait une longue inscription à l'intérieur d'un coeur évidé, entre deux anges blancs tenant une palme. Des armoiries casquées et deux urnes surmontaient les anges. Des têtes d'angelots apparaissaient en dessous du coeur. Le monument était en marbre noir et blanc.
Il
existait en outre d'autres enfeux dont le seul nom pour ainsi dire nous est
parvenu, grâce à Dubuisson-Aubenay, que nous avons mis tant à contribution au
cours de la présente étude. Nous allons nous contenter presque de les énumérer.
Ce sont : le tombeau
des Montafilant et Chateaubriant
(du moins d'après les armoiries), représentant une gisante gravée sur une
dalle ; l'enfeu de la
famille d'Elbiest
avec l'image d'une femme gravée sur une lame de cuivre ; l'épitaphe
de Bernardin d'Espinose
placée peut-être dans la chapelle dite à tort de Mercoeur ; le caveau
prohibitif de Pierre Davy,
sieur de la Botardière, sous un autel, et l'enfeu
de Messire de Kermoisan
et son épouse (Note : il s'agit de dame Marie-Renée de la Grue de la Guerche),
de 1734, près des orgues, etc... Après cette longue et incomplète
nomenclature des enfeux ou tombeaux, nous pouvons passer à l'étude du puits.
B) Le Puits et divers vestiges.
Le puits creusé à 2 mètres environ du mur longeant la rue des Cordeliers, entre les stalles de l'ancien choeur, avait un orifice à peu près circulaire en pierres schisteuses plates rempli de « délivres » diverses. La Société Archéologique ayant bien voulu affecter un crédit au sondage du puits, notre collègue M. Evellin qui a suivi les travaux en notre absence s'exprime ainsi à leur sujet : « Le puits est fait à même dans le roc et a été exécuté d'une façon remarquable, il va en s'élargissant plus on descend... ». L'arrivée abondante de l'eau à 6 mètres de profondeur arrêta la fouille demeurée d'ailleurs infructueuse.
Le sol de l'église des Cordeliers nous a encore livré quelques secrets, en particulier à l'emplacement de la chapelle au duc, au ras de la terre vierge, du sable fin, des escarbilles et un morceau de plomb fondu, témoins de la fonte à cet endroit des cercueils violés par les révolutionnaires.
Des carrelages divers ont été exhumés des différents remblayages du sol effectués au XIXème siècle. Nous ne parlerons ici que des « azuleros » à raison de leur beauté artistique. Ces carreaux, d'origine espagnole d'après leur nom « azulero » et remontant probablement au XVIème siècle, sont, au dire de certains, de facture italienne. Nous en doutons fort, le bleu (azul) étant la couleur prédominante des carreaux dont nous nous occupons (Note : Nous ne devons pas nous étonner de rencontrer ici des carreaux espagnols, à cause de la confrérie de la Contratatio qui siégeait dans la chapelle dite de N.-D. d'Espagne). Il y en a plusieurs variétés qu'une sèche énumération ne saurait décrire complètement : - 1° « azulero » carré de 13 cm. de côté, 2 cm. d'épaisseur, à décor floral et géométrique bleu, jaune, rouge pâle, vert bouteille et sertissage brun violacé ; - 2° « azulero » analogue, mais avec décor bleu, jaune et ocre ; - 3° « azulero » carré, de même dimension que les précédents, à échiquier bleu, blanc, noir et ocre foncé avec rayures de séparation en relief. A ces variétés d' « azuleros » il convient d'ajouter quelques autres types de carreaux en terre rouge, contemporains sans doute, mais de provenance différente ; - 4° carreau carré rouge, à décor semi-circulaire blanc, mesurant 12 cm. 5 de côté ; - 5° carreau rectangle rouge, de 16 cm. de long sur 10 cm. de large, orné de lys blanc inscrits dans un cœur évidé semblable ; - 6° carreau triangulaire rouge, de 9 cm. 5 de côté, avec décor triangulaire. Si, profitant des investigations que nous venons de retracer, nous quittons l'église des Cordeliers et cédons à la curiosité de jeter un regard au delà du rempart gallo-romain sur les vestiges du couvent proprement dit, une assez ample moisson archéologique nous attend. Elle nous permettra de compléter certaines de nos connaissances sur l'ensemble du couvent et l'église elle-même.
LE COUVENT PROPREMENT DIT.
Le premier endroit où nous portons tout naturellement nos pas est la cour actuelle des Dames de la Retraite, qui fut jadis l'aire du Cloître.
§ I. - LE CLOITRE ET L'EXTERIEUR DES BATIMENTS CONVENTUELS
A) La cour du Cloître
De l'ancienne cour du Cloître, deux côtés subsistent plus ou moins mutilés : le mur romain si connu et la façade ouest du grand bâtiment à clocheton, perpendiculaire à l'église. Ce dernier bâtiment est percé au rez-de-chaussée de deux fenêtres rectangles sises à 2 mètres au-dessus du sol et de six fenêtres vraisemblablement du XIXème siècle, à sommet arrondi (la deuxième fenêtre est transformée en porte). Le premier étage extérieur comporte neuf fenêtres rectangles datant sans doute du XVIIème ou XVIIIème siècle et dont le sommet se trouve presque au ras de la toiture. Le mur est construit en pierres meulières avec par endroit du tuffeau et parfois quelques briques.
Les premiers vestiges anciens que l'on remarque à l'extrême gauche au rez-de-chaussée sont une arche en tuffeau coupée à sa partie supérieure par une fenêtre, puis un jambage en pierre blanche entre la deuxième et la troisième fenêtre (à partir de la gauche de la façade) ; viennent ensuite un jambage de granit et la naissance d'une voûte en pierres meulières que brise la porte pratiquée dans la quatrième fenêtre. Ce n'est qu'entre la cinquième et la sixième fenêtre qui frange une autre arche que se distingue très nettement un pilier carré en granit avec la naissance de deux voûtes et une petite tablette faisant saillie entre celles-ci. Il faut enfin passer à la neuvième et dernière fenêtre (au ras du mur romain) pour discerner encore les traces d'un autre pilier de granit et l'amorce d'une voûte.
Après une inspection attentive de ces vestiges et un examen du plan Portail de 1739, on est forcé de conclure que le cloître avait sept arcades internes sensiblement de même dimension, et comme ce dernier, selon Dubuisson-Aubenay, était « bien quarré », les autres faces devaient comprendre également sept arcades, mais la face Sud-Ouest devait former, à cause du mur romain si solide, une simple galerie abritée par une toiture. Les arcades externes commençaient donc en ce qui concerne la façade que nous étudions, au jambage situé après la deuxième fenêtre du rez-de-chaussée, d'où partait un bâtiment de refend attesté par le plan Portail précité et le plan des experts Douillard et Scheult de 1790.
Une voussure en pierre blanche, haute de 2m. 40, large de 2 m. 50 environ et épaisse de 60 cm, qui se trouve à l'intérieur du bâtiment et sert présentement d'entrée à un escalier de bois, nous semble être la seule voûte interne subsistant du cloître. Celle-ci devait constituer un appui aux poutres du plancher de l'étage supérieur. Les piliers en granit, d'après ce qui précède, étaient carrés. Les cintres de pierres meulières formaient les arcs externes du Cloître, entre lesquels une petite tablette de granit faisait saillie.
En s'appuyant sur tous ces vestiges du cloître, il ne nous paraît pas trop téméraire de dater de la fin du XIIIème ou du commencement du XIVème siècle ces arcs en plein cintre très surbaissés et ornés d'une moulure formant baguette.
Entre les fenêtres du premier étage extérieur, apparaissent encore des restes importants de petites fenêtres rectangles avec un encadrement à baguette. Ces fenêtres devaient être au nombre de sept ou huit. Presque en dessous et juste au ras de celles-ci se voient d'autres tuffeaux qui par leur disposition indiquent une deuxième rangée de fenêtres plus larges que les précédentes. Elles servaient à éclairer le premier étage du bâtiment car elles correspondaient à cet étage actuel.
Que signifie l'arcade unique en tuffeau, visible également au premier étage extérieur, sous la troisième fenêtre ? Elle témoigne sans doute de l'existence d'un couloir dans le bâtiment perpendiculaire au bâtiment à clocheton dont nous avons parlé jusqu'à présent.
Lorsque l'on jette un regard circulaire sur le reste de l'ancienne cour du cloître, on est attiré par le bel appareil du rempart gallo-romain. A l'angle de ce dernier et du bâtiment à clocheton on distingue une colonnette ronde tronquée, flanquée d'un pied-droit ogival. A quelques centimètres de là se voit l'un des deux pilastres ornés de motifs renaissance, témoins de l'ancienne arcade qui servit au passage du cloître dans l'église des Cordeliers et fut bouché au XVIème siècle pour l'aménagement de la chapelle dite de Mercœur. Quant au passage percé au XVIème siècle, on en retrouve la trace dans la cavité voûtée sise entre la chapelle et le passage pratiqué au XIXème siècle, voisin lui-même de l'entrée fort basse du caveau des la Roche-Macé.
Les deux autres côtés de la cour des Dames de la Retraite sont constitués maintenant par deux bâtiments mesquins et un bâtiment neuf datant de 1869.
Avant de
pénétrer à l'intérieur des anciens bâtiments conventuels, il nous reste
plusieurs autres façades à voir.
B)
Extérieur des Bâtiments conventuels autres que le Cloître.
Le bâtiment à clocheton possède une façade parallèle à celle du cloître, mais aspectant vers la rue du Refuge.
Cinq fenêtres carrées identiques à celles de l'autre façade existent au premier étage extérieur où se distinguent deux petites fenêtres gothiques : l'une à gauche de la troisième fenêtre (à partir de la gauche), l'autre un peu à droite de cette fenêtre. Entre ces fenêtres et les fenêtres à sommet arrondi du rez-de-chaussée apparaissent quatre baies rectangulaires. Une ouverture ogivale assez étroite et de dimension moyenne se signale aux regards le long de la quatrième baie. Mentionnons enfin l'apparition d'un bloc en appareil semblable à l'appareil romain sous la première fenêtre du rez-de-chaussée, près du demi-pilier de la chapelle au duc, qui cachait le commencement d'un arc roman en tuffeau analogue aux arches du Cloître.
Quant au bâtiment transversal perpendiculaire au bâtiment clocheton précité, il a été coupé en deux par le percement de la rue du Refuge. Il ne présente aucun intérêt archéologique en ce qui concerne la portion principale, malgré son double étage de sept fenêtres et la différence de niveau avec le bâtiment à clocheton auquel celle-ci est accolée. Toute autre est la partie sise de l'autre côté de la rue et qui a gardé presque totalement son caractère ancien. Outre de petites baies de dimensions diverses pratiquées entre les longues pierres meulières, il y a lieu de noter, pour ne pas y revenir, un escalier à noyau vraisemblablement du XVIème siècle, sans parler de la porte d'entrée avec ses jambages de granit en biseau. Cette porte fait face au chevet de l'église et témoigne que le bâtiment formait une aile en retour.
L'extrémité du bâtiment à clocheton, opposée à l'église des Cordeliers, a été certainement rognée lors des travaux de construction du bâtiment neuf en 1869. Une moulure fait fortement saillie à plusieurs mètres du sol, flanquée à quelque distance à gauche d'une porte à ogive très surbaissée ouvrant maintenant sur le vide. Une fenêtre dont les bords sont en biseau se présente un peu plus haut.
En résumé, une assez grande confusion règne sur les murs extérieurs du couvent proprement dit, en particulier sur ceux du bâtiment à clocheton, attestant des remaniements successifs. Que va nous réserver la visite de l'intérieur ? C'est ce que nous allons étudier maintenant.
§ II. — INTERIEUR DES BATIMENTS CONVENTUELS
La hauteur du rez-de-chaussée, dont le niveau est un peu plus élevé que celui de la cour, devait être de 6 mètres, semble-t-il, ainsi qu'en témoigne un gros corbeau de granit visible dans l'une des salles actuelles.
L'emplacement de l'ancienne sacristie a été tellement remanié qu'il est impossible de trouver un vestige susceptible de nous guider si ce n'est l'ancienne porte ogivale qui menait dans la chapelle au duc.
Dans une petite pièce contiguë à l'ex-sacristie prennent naissance deux colonnettes avec pied-droit du XVème siècle à l'angle d'un renflement rectangulaire du mur. Le plafond actuel a coupé ces colonnettes qui se poursuivent au premier étage sous la forme d'un grand arc naissant. Sont-ce les traces de hautes voûtes qui auraient existé dans la salle dite de l'Université à l'emplacement de laquelle nous sommes ? Pour notre part nous serions assez porté à le croire, mais le manque de plus amples vestiges et le doute causé par la hauteur des poutres du premier étage et par la présence du corbeau mentionné ci-dessus ne nous permettent pas de nous prononcer avec certitude, d'autant plus que la cuisine, qui est voisine, possède encore ses poutres apparentes s'appuyant sur une hotte droite à bords arrondis, entièrement en tuffeau. Une double moulure court le long de celle-ci, tandis que les bords de la cheminée sont taillés en biseau. A droite apparaît une porte très surbaissée et masquant une autre porte identique sise perpendiculairement, à gauche une sorte de fenêtre avec crédence en pierre blanche.
Au premier étage actuel, presque à l'angle du bâtiment à clocheton et du bâtiment perpendiculaire à celui-ci, nous remarquons un passage surbaissé avec voûte ronde inclinée, menant à une porte perpendiculaire au passage, ornée de moulures du XVème siècle. Dans un couloir formant angle droit avec cette dernière porte, il existe des petits corbeaux de granit supportant une poutrelle longitudinale au ras du plafond.
De notre visite au deuxième étage actuel, éclairé par les fenêtres rectangulaires du premier étage extérieur, nous ne retiendrons que la présence d'une poutre décorée de rainures arrondies, sur laquelle reposent d'autres poutres, au ras du plafond.
La charpente semble avoir été refaite au cours du XIXème siècle, mais le clocheton, s'il ne provient pas avec certitude de la toiture de la grande nef de l'église, du moins son armature de poutres, semblable à une boîte, présente-t-elle un caractère ancien.
Les caves sont très curieuses, car non seulement les pierres ont le roc pour base, mais elles se poursuivent sous le bâtiment neuf de la Retraite jusqu'en son milieu, ce qui concorde avec les démolitions effectuées par les Cordeliers eux-mêmes avant 1789.
En terminant cette trop longue étude, nous espérons avoir suffisamment démontré l'importance et le caractère artistique des intéressants vestiges soit de l'église soit du couvent proprement dit des Cordeliers de Nantes qui ont réapparu principalement au cours des travaux de démolition en 1924 ou bien qui se discernent encore malgré les destructions successives du temps et des hommes.
Paul Jeulin - 1927
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