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DE L'HÔTEL-DIEU DE NANTES

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On se représenterait le Moyen-Age sous des couleurs fausses si on s'imaginait qu'il n'a donné au monde d'autre spectacle que celui de la barbarie et de la grossièreté. A côté de la dureté de sa législation et des excès de son intolérance, on retrouve souvent dans les habitudes de la vie privée une délicatesse de mœurs qui étonnerait si on ne savait les prodigieuses transformations qu'opère le christianisme sur les sociétés vivant sous son influence. L'histoire de cette époque présente des traits de cruauté et de compassion qui forment les plus singuliers contrastes. Dans le même temps où l'on plaçait deux malades dans le même lit sans craindre de leur donner la mort à tous deux [Note : Voir le registre des délibérations de l'année 1748 du Bureau de l'Hôtel-Dieu], on poussait le respect de la dépouille des pauvres défunts jusqu'à ensevelir leur cadavre dans un linceul avant de l'inhumer [Note : Le compte de l'aumônerie de Saint-Clément de 1531 et d'autres antérieurs font toujours mention de linceuls]. Tandis que les prisonniers du Bouffay mouraient de froid et d'inanition sur leur paille infecte dans des cachots sans air et sans lumière, on voyait à l'aumônerie Saint-Clément les pauvres couchés sur des lits garnis, comme dans les meilleures maisons, d'une paillasse, d'une couette, de draps et de couvertures [Note : Voir le testament de Pierre Dorenge de 1394 dans les archives de l'aumônerie Saint-Clément et l'inventaire du mobilier de l'aumônerie de Savenay de 1460 (série H, Arch. départ.)].

On a longtemps toléré beaucoup d'abus dans les églises et ailleurs, mais il ne paraît pas qu'on ait jamais omis dans les aumôneries de prévenir les désordres que peut amener la promiscuité des sexes. Aussi loin qu'il est possible de remonter dans l'histoire des hôpitaux, on remarque toujours que les fondateurs d'établissements prennent soin de prescrire la séparation des sexes et de composer un personnel particulier pour chaque quartier. Dans le règlement fait en 1314 pour le gouvernement de l'aumônerie du Rozet fondée par le duc Arthur II [Note : En Plessé. Cet acte existe au Trésor des Chartes des ducs de Bretagne, E 78, cassette 29], les exécuteurs testamentaires ordonnèrent que les femmes fussent séparées des hommes. Il n'est pas vraisemblable que l'Hôtel-Dieu de Nantes ait été moins bien réglementé qu'une petite aumônerie placée sur une grande route.

Certains hôpitaux de France furent, au XIIIème siècle, desservis par des associations libres de frères et de sœurs qui se consacraient gratuitement au service des malheureux par esprit de charité, en vue de gagner le ciel [Note : Celui de Laval était de ce nombre]. De semblables dévouements ont pu se produire à Nantes, cependant il n'existe pas de documents qui me permette de rien avancer sur ce sujet. La pièce la plus ancienne où il soit question du personnel de service est de 1531 ; elle relate que celui de l'hôpital de l'ordre se composait de quatorze personnes qui toutes étaient des serviteurs ou servantes à gages.

Ces domestiques qui, pour la plupart, ne voyaient dans leur besogne journalière qu'un métier ordinaire, ne s'acquittaient pas toujours de leurs devoirs avec le soin, la douceur, la patience désirables ; leur dureté excitait parfois de vives réclamations dans le public. D'après les plaintes qui se renouvelèrent dans le cours du XVIIème siècle, il est aisé de voir qu'on aurait voulu trouver en eux plus d'affection pour les pauvres. Le Conseil de ville prit, en 1646, la résolution d'examiner s'il serait possible d'appeler à la place de ces mercenaires les filles de la charité dont la réputation commençait alors à s'étendre. Des conférences, auxquelles chaque corps constitué envoya un délégué, se tinrent à l'évêché sans résultat ; l'avis de la majorité des délibérants ne fut pas favorable au projet de changement.

Lorsque le nouvel Hôtel-Dieu, élevé sur la prairie de la Madelaine, fut terminé, une amélioration inattendue se manifesta dans le personnel. Quelques pieuses servantes qui étaient entrées avec l'intention de mieux faire que les précédentes ayant témoigné le désir de rivaliser avec les filles de la charité et de pratiquer le même désintéressement, sous une règle austère, le bureau des pauvres donna son consentement à la formation de cette petite communauté. Le concordat qui fut passé à cette occasion par devant notaire, contient un règlement de vie si curieux que je crois indispensable d'en reproduire tous les termes, surtout pour les amateurs de couleur locale :

Par devant les notaires royaux de la Cour de Nantes soubs signés avecq submission et prorogation de juridiction etc. Ont comparu en leurs personnes : noble, vénérable et discret messire Julien Vallin, prestre chanoine de l'église cathédrale de Saint-Pierre de Nantes, escuyer Sébastien Viau, sieur de la Civellière, conseiller du Roy au siége présidial de Nantes et noble homme Gilles Mesnard, sieur des Clos, l'un des anciens conseillers et eschevins de cette ville et communauté de Nantes, à présent pères et gouverneurs des pauvres de l'Hôtel-Dieu de cette ville de Nantes d'une part, et Anne Belot, natifve du bourg de Brianne en Champagne, evesché de Troies, Marie Daille, natifve de Sainct-Germain-en-Laye, Françoise Rolland, natifve de la paroisse d'Anetz, Françoise Riveron, natifve de la paroisse de la Trinité d'Angers, Marguerite Clauseron, natifve du faubourg Sainct-Jacques d'Angers et Jeanne Bretonnelle, natifve de la paroisse de Thilliers, les touttes filles et à présent demeurantes en qualité de servantes audit Hostel-Dieu de Nantes, fors ladite Bretonnelle qui n'y doibt entrer qu'à la feste de Sainct-Jean-Baptiste prochaine venante ; entre lesquels sieurs, pères et gouverneurs des pauvres dudict Hôtel-Dieu de Nantes en ladite qualité et lesdites filles cy-devant nommées ont été faictes, arrestées et accordées les conditions et articles cy-après, lesquelles lesdites filles promettent punctuellement d'exécuter et inviolablement observer à l'advenir en ladite maison et hostel de Nantes pour l'assistance et traitement des pauvres malades dudit lieu ; la teneur desquels articles s'ensuit :

Les dites filles, en ce qui regarde le service des pauvres malades et gouvernement dudit hospital et Hostel-Dieu, seront entièrement soubs l'auctorité et en la despendance de Messieurs les pères des pauvres, feront la cuisine, les lessives et les autres charges ordinaires et accoustumées de la maison.

Ne rendront compte de leur service et administration qu'auxdits pères des pauvres, qui les maintiendront pour causes raisonnables tant envers les offciers et serviteurs de la maison que vers les pauvres à l'endroict desquels on les exhorte à se comporter le plus patiemment et charitablement qu'elles pourront.

Seront nourries et entretenues de toutes sortes d'habits de la couleur et forme qu'il plaira à MM. les pères des pauvres sans qu'elles pussent changer de couleur ou forme d'aucun sans leur consentement aux despens dudit hospital et traittées des médicaments et vivres, si elles tombent malades, pendant tout le temps de leurs maladies.

Pourront lesdits pères des pauvres mettre les dites filles hors le dit hospital en cas de malversation ou autres causes raisonnables en payant à celles qui auront servy plus de cinq ans audit hospital les cinq années dernières seulement à raison de vingt livres par chacun an et les autres qui auront servi moins dudit temps, à raison de quinze livres par chacun an [Note : Plus tard il fut convenu qu'on leur donnerait dix livres par an pour les dix dernières années, plus les frais de voyage].

Ne s'obligent les dites filles à servir et veiller les malades hors les salles et enclos dudit hospital, si ce n'estoit en temps de grande pauvreté et affluence de malades, auquel cas elles les veilleront hors ledit hospital, de l'ordre et commendement desdits pères des pauvres.

Le décèds desdites filles arrivant, mesdits sieurs pères des pauvres, en considération du service qu'elles auront rendu, permettront, s'il leur plaist, aux autres filles de les ensevelir décemment, relaissant le corps dans leur petite infirmerie jusques à ce qu'il soit levé pour estre porté en l'église suivi desdites filles immédiatement, ayant chacune une bougie ou petit cierge dans la main et là chanté une haulte messe après laquelle le corps de la deffuncte sera mis en terre dans le cimetière dudict hospital ; ou bien si le corps ne se peut garder sera porté dans l'église comme est dict cy-devant où seront dictes les vigilles des morts et de là porté et enterré audict cimetière et le lendemain sera dicte une messe à haulte voix et deux basses pour le repos de l'âme de ladicte deffuncte.

En cas qu'on leur donne de l'argent à faire l'achapt des choses nécessaires à l'hospital et pour faire les menues provisions à quoy elles s'obligent par ces présentes touttes fois et quantes que lesdits pères et gouverneurs des pauvres leur commanderont, rendront compte et relicats de tout ce qu'elles auront géré toutte la sepmaine tant en recepte qu'en despence et les dits comptes ainsy rendus seront chasque dimanche par l'un desdits pères, sy les autres ne s'y trouvent, calculés, arrestés et signés à l'heure qui sera précise et nommée pour cet effect et après lesdits pères ou l'un d'eux donnera ordre auxdites filles pour les menues provisions de la sepmaine suivante.

Les dictes filles rendront compte pareillement de l'argent et espèces trouvés aux habits des malades à leur arrivée audict hospital, lesquels y seront décédés et généralement de tous deniers et meubles qu'elles auront receu appartenant ou donnés audict hospital.

Elles se leveront précisément à quatre heures du matin. A six heures elles se rendront aux salles des malades et après la salutation angélique faicte, elles vuideront les pots, nettoieront les salles, donneront les médecines ; pourront prendre un peu de pain et un peu de vin, avant d'y aller. Et les jours de communion, elles prendront l'odeur d'un peu de vin aigre ou s'en frotteront les mains.

A sept heures elles feront desjeuner les malades les plus debilles d'un bouillon et d'un œuf frais ; les autres d'un peu de pain et de beurre ou de pommes cuittes. Après cela elles entendront la messe, celles qui ne l'auront entendue, et auront soing de faire prendre les bouillons aux malades qui auront pris médecine aux heures précises.

Celles qui auront besoing de prendre quelque chose, le feront après cela, puis entendront aux malades, advertiront de bonne heure MM. les aumôniers de donner l'extrême onction à ceux qu'elles remarqueront s'approcher de leur fin.

A dix heures que l'on sonnera la petite cloche en bransle pour advertir chaque serviteur de se trouver pour servir le disner, elles se rendront à l'infirmerie pour faire disner les malades et les servir et l'antienne desdictes filles, en l'absence de MM. les pères des pauvres, dira le Benedicite, les malades premièrement advertis de le dire en leur particulier et de mettre et étendre des serviettes sur leur lict, affin de ne le gâter et conserver la propreté ; puis les portions de pain seront distribuées à un chacun à sa suffisance, suivant l'ordre et la reigle du médecin, le vin pareillement sera porté à chacun demie grand mesure fors à ceux auxquels ledict médecin faisant sa visite l'aura deffendu. Lesquelles défenses seront inviolablement exécutées. Et après le potage versé dans les escuelles par une desdictes filles, sera porté à chacun des malades la viande pareillement couppée par une desdictes filles en plusieurs portions compétentes pour les malades, sera donné à chacun un petit plat.

Après le disner des malades, le serviteur commis à chaque chambre aura soing de rapporter a la cuisine les escuelles, les petits plats et les restes des portions et de lever les tables pliantes en leur lieu accoustumé, comme aussy les nappes et serviettes pliées mettre dans un coffre destiné en chaque chambre pour cet effect, après quoy on sonnera la petite cloche du degré de six appeaux pour advertir un chacun de dire ses grâces, remercier Dieu et le prier pour leurs bienfaiteurs, un de MM. les aumosniers les récitant tout hault ou bien l'antienne des dites filles en son absence.

Puis on servira le disner aux ausmoniers et officiers de la maison, honnesternent pour la viande, du pain à leur volonté et à chacun une grande mesure de vin si tant en ont besoing. Leur repas fini, la viande qui aura esté desservie de dessus leur table sera donnée aux serviteurs pour leur disner et davantage s'il est requis à ce que chacun desdits serviteurs aie pesant demie livre de viande au plus, du pain suffisamment et une chopine de vin, lesquels mangeront ensemble fors le portier auquel on donnera sa portion séparée affin qu'il ne quitte la porte et iceux serviteurs se comporteront modestement lors de leurs repas comme aussi en touttes leurs autres actions, agiront avec ordre et charité.

Et pour le regard desdites filles, elles prendront leur réfection en mesme temps que les aumosniers ou bien incontinant après qu'on les aura déservis et feront en sorte qu'il n'y aie confusion et qu'il y ait toujours une d'entre elles à l'entour des malades pour les assister au besoing, laquelle, à l'heure de midy, advertira un chacun de dire son angelus et saluer la Saincte Vierge, et dira son angelus tout haut afin que ceux qui ne le sçavent le puissent apprendre.

Cela faict, deux d'entr'elles iront relever celle qui sera restée auprès des malades laquelle ira disner avecq la lectrice, si tant est qu'elles veullent pratiquer la lecture de table parmy elles, et elles tascheront de recréer les malades gardans la modestie et l'honnesteté des paroles.

A deux heures elles se rendront à l'infirmerie pour donner-quelques petites douceurs aux malades comme sont des poires et pommes cuites et des confitures aux plus débilles. Celles qui ne seront point en garde auprès des malades s'en retourneront à leurs emplois ou, si elles n'ont rien qui presse, s'occuperont à la lecture de bons livres et entretiens ou bien à filer ou coudre le linge des pauvres dudit hôpital.

A trois heures elles donneront les lavements, changeront de draps ceux qui seront gastés, vuideront les pots, racommoderont un peu les licts des malades sans qu'ils se lèvent.

A quatre heures toutes les dites filles se rendront à l'infirmerie pour faire soupper les malades et les servir ainsy qu'au disner ; puis feront servir MM. les aumosniers et soupperont ensuite, puis diront grâce et feront comme au disner.

A six heures celle qui sera à l'entour des malades récitera la salutation angélique ainsy qu'au matin et à midy.

A six heures et demie, elles se rendront à l'infirmerie, releveront la garde, laquelle ira soupper avec la lectrice tandis que les autres feront coucher les malades avant sept heures que seront debout, pourvoiront à ce qu'il faudra pour subvenir au besoing des plus malades pendant la nuict.

A sept heures et demie toutes lesdites filles se rendront à l'infirmerie, feront faire la prière aux malades ensemble l'examen de leur conscience, taschant de se resouvenir des péchés qu'ils pourraient avoir commis pendant tout le jour jusques à cette heure, en demander pardon à Dieu, avec la grâce de s'en confesser dignement au plustôt, puis diront les litanies de la Vierge avecq l'oraison et l'antienne desdites filles donnera de l'eaue béniste à tous les malades et aux filles.

A huit heures elle se retireront, laisseront l'une d'entre elles dans l'infirmerie pour veiller et assister les plus malades et aider les moribonds à bien mourir, s'occupera à dire son chapelet ou autres prières au premier somme des malades. Elle passera la nuict en veillant, lisant et sommeillant parfois, tandis que les pauvres reposeront, les autres se retireront à leurs offices pour aprester ce qu'il faudra pour le lendemain matin et se coucheront précisément à neuf heures.

A quatre heures la veilleresse ira les éveiller, prendra quelque chose si elle a besoing et s'ira coucher jusqu'à neuf heures qu'elle se lèvera pour entendre la messe et l'ancienne des filles envoiera un autre en sa place pour avoir soing des malades et feront le reste du jour en la manière qu'il est cy-devant dict.

Auront grand soin que les pauvres malades ayent ce qui leur sera nécessaire, leur repas aux heures et donné à boire quand ils auront besoing et parfoy quelque petitte douceur à la bouche, mais pour ceux qu'il n'est pas expédient qu'ils mangent de la viande solide, il leur sera donné des bouillons et des œufs frais alternativement de trois heures en trois heures en sorte qu'ils ayent quatre bouillons et trois oeufs par jour.

Et pour ne rien obmettre de ce qui peut servir à leur instruction concernant le service desdits pauvres et leur conduite particulière en icelluy, on leur a marqué par ces présentes les differents offices et fonctions auxquelles chacunes d'elles doibt estre appliquée en son tour et rang.

La sœur servante ou l'ancienne.

Celle que mes dits sieurs les pères des pauvres auront choisie et nommée pour diriger les autres soubs le nom d'ancienne ou de sœur servante, aura grand soing qu'elles s'acquittent bien de leurs charges, veillant sur leurs actions en grand douceur et charité, les advertira de leurs manquements concernant le service et gouvernement desdits pauvres et si elles ne s'en corrigent, elle en donnera advis auxdits pères des pauvres à ce qu'ils y apportent l'ordre requis et nécessaire.

Fera registre des pauvres qui seront admis audict hospital, auquel nul ne sera receu ny chassé que après mandement desdicts pères, du nom, surnom, âage, vocation et estat d'iceux et des pays de leur naissance, et seront leurs habits et argent inventoriés et au sortir, après la guérison, tout leur sera rendu et s'ils meurent demeureront lesdites hardes et argent an profict dudit hospital.

Elle sera soigneuse de s'abstenir de ce qui seroit à mauvais exemple à ses soeurs quoy que ce ne fust pas grande faulte.

Elle dira le Benedicite et grâces des sœurs comme celuy des malades avec l'oraison Retribuere.

Elle se rendra à toutes les heures à l'hospital avecq les autres filles et s'informera d'elles à quelque heure, de l'estat des malades pour sçavoir comme elle leur parlera et recognoistre leurs besoins.

Elle veillera les malades à son tour, elle assistera tant qu'elle pourra à la sortie des pauvres guaris après l'advis du médecin et cela avecq grande douceur, les faisant souvenir de reduire et mettre en pratique les bonnes résolutions qu'ils ont prises en leurs maladies.

Elle consolera ceux qui en sortent avecq regret, leur donnant asssurance que pourveu qu'ils ayent l'amour et la crainte de Dieu qu'il ne les abandonnera pas.

Elle aura soing qu'il y ait toujours une sœur à l'hospital aux heures que toutes n'y sont pas et ce sera toujours une qui ne soit ni lectrice ni veilleresse, elle aura grand soing de tenir les malades blanchement tant de drap que chemises.

Elle aura soing de fermer les portes de l'hospital le soir et les ouvrir le matin à l'heure accoustumée.

Fera en sorte que personne n'entre ni sorte dudit hospital sans sa cognoissance affin de pouvoir rendre compte auxdits pères des pauvres de tout ce qui s'y passe.

Elle aura soing de faire raccommoder l'église et les deux chapelles de l'hospital, les faisant nettoyer souvent et ne souffrant point qu'il se tienne dedans linge salle ou autre chose indécente.

Avertira les pères des pauvres de faire reveue et inventaire de tous les meubles et actes de l'hospital le lendemain de Sainct Jean par les pères des pauvres affin de voir ce qu'il y a eu de changement, perte, diminution, ou augmentation affin d'y remédier.

Aura soing que lesdits pauvres soient visités une fois le jour par le médecin apoticaire et chirurgien ; lesquels s'ils ne font leur debvoir envers les pauvres en advertira lesdits pères. Demeurera en cette charge tant et si longtemps qu'il plaira auxdicts pères des pauvres.

La charge de celle qui recevra les malades.

Celle qui sera en charge de coucher les malades aura soing de les recepvoir après qu'ils auront esté veus du prestre et les doibt recepvoir dans la pensée qu'elle est leur servante et qu'ils sont ses seigneurs et niaistres [Note : L'aumônier devait sans doute s'informer si le malade voulait se confesser. Il fut arrêté par le bureau, en 1760, que les malades se confesseraient dans les trois jours après leur entrée et que ceux qui refuseraient par entêtement sortiraient de la maison sans pouvoir y rentrer. L'avis fut affiché dans les salles ; mais je doute qu'il ait été mis rigoureusement en pratique]. Et il se tiendra en la cuisine de l'eau chaude dont elle leur lavera les jambes, les changera de chemise, donnera des bonnets quand il y en aura à l'hospital.

Elle aura soing, quand ils seront couchés, de serrer leurs habits et argent, s'ils en ont, au lieu destiné pour cela affin de leur rendre quand ils s'en iront.

Elle aura soing de rapporter leurs chemises qu'elles soient avecq habits quand elles auront esté blanchies affin de retirer celles qu'ils auront de l'hospital lorsqu'ils en sortiront.

Elle aura soing aussitost qu'ils seront couchés de leur faire bailler un bouillon.

La charge de celles qui doivent donuer le pain et le vin.

Elle seront deux qui seront à l'hospital sitost que la cloche les advertira pour distribuer le pain et le vin aux malades.

Donneront à chacun pauvre le pain dont il aura besoin suivant l'ordre et la règle, du médecin et le vin à chacun demie grand mesure fors à ceux auxquels le médecin l'aura deffendu, lesquelles deffenses elles ne doibvent outre passer soubs quelque prétexte que ce soit.

Elles auront soing d'avertir leur ancienne lorsque l'on aportera le bouillon et le disner des malades.

La charge de celle qui aura soing de servir les débilles.

Elle prendra soigneusement garde à ceux qui véritablement ont besoing que l'on leur donne leur apétit et essaiera doucement et charitablement de dissuader ceux qui demanderont ce qui leur seroit préjudiciable.

La charge de celle qui fera la cuisine.

Prendra garde que la bouchère donne de bonne viande et que le poids n'en soit point altéré, de n'en prendre, dans l'esté principalement, que ce qu'il en faudra pour le jour. Aura un papier relié, chiffré et millésimé des pères des pauvres, pour servir de contrôle à celuy du boucher, dans lequel elle marquera le nombre de viande que l'on prendra chaque jour et si elle ne sçait écrire aura soin d'avertir l'ancienne desdites filles de marquer sur ledit papier le nombre et le poids de ladite viande.

Aux jours maigres [Note : Au XVIème siècle ou observait trois jours maigres par semaine. En carême point de viande], quand il n'y aura point de poisson elle sera soigneuse de faire cuire des pruneaux de bonne heure le matin, de faire cuire la bouillie avant que l'on apporte le pain, casser et battre les œufs dans chacun les plats et que tout cela soit faict au mesme temps que l'on porte le bouillon. Le soir se doibt faire la bouillie avant que l'on serve le pain et cuire les œufs mollets, et quelque fois elle fera quelques platées d'œufs au verjus au lieu de mollets.

La charge de celle qui aura soing de la vaisselle des pauvres.

Elle contera tous les soirs, aura soin de les tenir nettement et serrer soubs la clef et les mettre tous les repas sur la table, mettre aussi les aix et avoir soing que tous les jours il y ait une nappe sur la table.

Elle sera soigneuse de tenir les lampes et chandeliers en estat et les allumer aux heures sçavoir : les lampes qui sont en chasque chambre pour éclairer toute la nuit, en hiver depuis six heures du soir jusques au lendemain pareille heure et en esté depuis neuf heures du soir jusques au point du jour du lendemain et de mettre une chandelle de suif allumée dans la lanterne du degré pour durer depuis six heures du soir jusques à neuf, et ce en hiver seulement [Note : Les deux salles de l'hôpital d'Erdre étaient aussi éclairées de lampes et chauffées en 1557 au moyen de charriots de fer qu'on promenait pour porter la chaleur partout].

La charge de la veilleresse.

Aura soing, dès le soir, de tenir prest tout ce qu'elle aura besoing pour les debilles.

Que s'il fault avertir les prestres pour donner les sacrements à quelque malade qui presse qu'elle en avertisse l'ancienne des filles aussitost qu'elle aura éveillé celui qui doibt appeler les prestres et qu'ensemblement elles y assistent.

Elle doibt veiller les malades avecq le souvenir des veilles de Notre-Seigneur estant sur terre, comme celles du jardin et plusieurs autres pour enseigner autry, que cette pensée la tienne toute la nuict en grande modestie, sans retenir personne pour s'entretenir, soit homme ou femme malades ou officiers de la maison. Que si quelqu'un y voulloit demeurer malgré elle, qu'elle aille aussitost avertir son ancienne.

Elle n'entrera point dans la salle des hommes que sur le minuict et à l'heure que les officiers de la maison seront couchés.

La charge de celle qui ira à l'hospital lorsque la veilleresse s'en ira coucher.

Elle s'informera de sa sœur de l'estat auquel elle laisse les malades pour sçavoir leurs besoings, que si elle n'a rien affaire pour leur service, elle s'occupera à faire ses prières paisiblement dans les salles des femmes malades. Ce sera elle qui será la garde toute la journée, qui nettoiera les salles après le disner des malades.

La charge de la buandière.

Elle aura soing d'amasser le linge le jour auparavant qu'il le faille compter à celle de dehors, prendra garde qu'il ne soit, mis à la buée du linge de dehors, recepvra par compte tout ce qu'elle aura baillé et aura soin de plier le linge après celle qui luy sera donné pour aider.

Elle aura encores soing de faire laver tous les jours les draps pour changer les malades, lesquels draps lesdites filles laveront chacune à leur tour par sepmaine.

La charge de celle qui aura soing des habits des morts.

Si tost qu'elle sçaura un malade mort, elle ira à celle qui a soing de serrer les habits, les retirer et mettre au lieu destiné pour cela. Quand il faudra vendre les habits des deffuncts, ne pourra vendre aucuns habits sans l'advis ni la permission des pères des pauvres.

La charge de l'ensevelisseuse.

Elle aura soing de ne point ensevelir les morts au moins de douze heures après leur trépas, les ensevelira avecq une grande modestie et dévotion se souvenant que le fils de Dieu a voulu estre en cet estat.

Elle aura soing de tirer les corps des lits incontinant après leur mort et qu'ils ne demeurent trop longtemps à enterrer, quand bien il y auroit apparence que d'autres deussent mourir bientost. Quand il sera besoing que lesdites filles aident à porter en terre les deffuncts qu'elle en advertisse la supérieure afin qu'elle y envoie celle qu'elle jugera à propos.

Et ont lesdits sieurs pères et gouverneurs desdicts pauvres demeuré d'accord que lesdictes filles servantes cy-devant nommées sont demeurantes et venues audict hospital et Hôtel-Dieu de Nantes, fors ladite Janne Bretonnelle qui n'y doibt entrer comme dict est qu'à la feste de saint Jean-Baptiste prochaine. Sçavoir : lesdictes Janne Belot, etc.......................... ladicte Marie Daillé, le 15 jour de may 1664, ladicte Françoise Rolland, le 20 janvier audict an, ladicte Françoise Riveron, le 7 septembre audict an 1664 et ladicte Marguerite Clauseron, le 30 may dernier.

Tous lesquels articles cy-devant ont esté ainsi et de la manière accordés et arrestés entre lesdits sieurs pères et gouverneurs des pauvres dudict Hostel-Dieu de Nantes et en ladicte qualité et lesdites filles servantes cy-devant nommées pour estre exécutées et accomplies selon leur forme et teneur, renonçant lesdites parties chacun pour leur respec à jamais y contrevenir en aucune façon et partant nousdicts notaires les y avons de leur consentement et requeste jugées et condamnées par le jugement et auctorité de nostre dicte Cour de Nantes. Faict et consenti en la maison duclict hospital et Hostel-Dieu, le 18e jour de juin 1665 avant midi (Minute déposée à la Chambre des notaires. Liasse de Me Charrier).

Si les articles de ce concordat avaient été observés par les nouvelles sœurs gardes-malades, l'Hôtel-Dieu de Nantes n'aurait eu rien à envier aux hôpitaux les mieux gouvernés ; mais on acquit bientôt la preuve qu'il est difficile de maintenir l'harmonie dans une communauté dont les membres ne sont pas liés par des vœux formels d'obéissance. Pour mettre fin aux embarras qui lui venaient de ce côté, le bureau revint au projet déjà discuté en 1646, d'appeler à Nantes des soeurs hospitalières appartenant à un institut régulier et soumit la question à la Mairie dans les termes suivants :

SŒURS HOSPITALIÈRES.

A MESSIEURS LES MAIRE, ESCHEVINS DE LA VILLE ET COMMUNAUTÉ DE NANTES.

Vous remontrent humblement les pères et gouverneurs des pauvres de l'Hôtel-Dieu de Nantes exposans

Que selon le devoir de leur charge, s'étant appliqués à examiner avec soin l'état où se trouve depuis longtemps ledit Hôtel-Dieu, ils ont reconnu que les sœurs servantes qui y sont n'ont entre elles aucune union, elles n'ont pour leur supérieure que peu ou point de dépendance, elles manquent souvent de respect et d'obéissance aux pères des pauvres et ne s'acquittent de leurs devoirs qu'avec beaucoup d'indifférence. De là, vient l'extrême dissipation du bien des pauvres, de là naissent les grandes plaintes des malades qui manquent souvent des secours les plus nécessaires et les plus pressants.

Pour remédier à tous ces maux et en prévenir de plus graves, les exposants croient qu'il n'y a point d'autre moyen que celui d'établir dans ledit Hôtel-Dieu une communauté de religieuses hospitalières, lesquelles s'étant formées pendant plusieurs années d'un rigoureux noviciat à tout ce qui regarde le service des malades, seront à l'avenir le sujet de la consolation des pauvres, de l'édification et de la joie du public.

A ces causes, les exposans vous prient, Messieurs, que suivant l'exemple du grand monarque que Dieu a donné à ce royaume, lequel a cru ne pouvoir mieux confier le gouvernement des magnifiques hôpitaux que sa piété a fondés qu'à des communautés régulières et à l'imitation encore des principales villes de France et de cette province même, il vous plaise avoir égard à la présente requête et aux mémoires que nous avons déjà pris la liberté de vous présenter et en conséquence consentir à l'établissement des religieuses hospitalières dans l'Hôtel-Dieu de cette ville.

Ce sera le moyen de contribuer au soulagement des pauvres, à l'augmentation de la gloire de Dieu et d'attirer sur votre illustre communauté ses plus singulières bénédictions (Séance du 7 février 1704). FOURÉ. LAURENCIN.

Les pères des pauvres ne s'en tinrent pas à ces remontrances : ils multiplièrent pendant six années les démarches, les sollicitations et les instances près des compagnies de la ville et firent même écrire à M. de Torcy pour obtenir son appui. Leurs efforts auraient sans doute été couronnés de succès s'ils avaient trouvé les moyens de parer aux dépenses d'installation et d'entretien des sœurs ; c'était la seule objection qui leur fut opposée par leurs adversaires, mais cette difficulté n'ayant pu être résolue l'affaire resta sans suite. Ils se croyaient cependant sûrs du succès, car ils avaient préparé, de concert avec la Mairie, un projet de traité. Quelques auteurs qui ont vu cette pièce l'ont prise pour la minute d'un acte définitif approuvé par les deux parties et ont écrit que l'Hôtel-Dieu de Nantes avait traité avec les hospitalières de Vannes. C'est une erreur complète, aucun des hôpitaux de Nantes n'a été desservi par des religieuses quelconques sous l'ancien régime. Lorsqu'en 1710, les officiers du Présidial furent invités à donner leur avis sur Je projet de changement de personnel, ils adressèrent un mémoire à l'intendant de la province pour s'opposer à cette innovation qui, disaient-ils, était inopportune. Leurs remontrances alléguaient que l'Hôtel-Dieu était obéré par les emprunts et que pour loger les religieuses il faudrait cesser de louer beaucoup de bâtiments dont le loyer procurait un revenu précieux. Le Présidial prenait la défense des filles gardes-malades qu'il regardait comme des personnes éprouvées et demandait que le projet de traiter avec les hospitalières fût ajourné à une époque plus prospère. Ce temps ne vint jamais. Les remontrances des gens de justice l'emportèrent sur les désirs de la Mairie et l'Hôtel-Dieu conserva le même personnel jusqu'à la Révolution.

Lorsque le bureau vit qu'il lui fallait renoncer au concours des Filles de la charité, il prit le parti de se montrer plus sévère dans le choix des servantes et d'astreindre toutes les filles qui venaient offrir leurs services à un temps de noviciat, afin d'éprouver leur vocation. Tous les mois il se faisait rendre compte de la conduite de chaque novice. Quand après deux années d'épreuves la maîtresse des novices attestait qu'une postulante avait bien rempli ses devoirs, on réunissait les soeurs de la maison pour voter au scrutin sur ses mérites, et si les suffrages étaient favorables le bureau prononçait l'admission. Ces formalités ne dispensaient pas les nouvelles sœurs de déclarer qu'elles adhéraient au traité passé en 1665 et qu'elles s'engageaient à l'observer de point en point. Dans tous les procès-verbaux de réception on les voit répéter que leur vœu est de servir les pauvres malades toute leur vie, dans tous les emplois, en suivant les ordres des directeurs et ceux-ci promettre en retour de les nourrir « saines et malades » sans les renvoyer si ce n'est pour motif « grave, comme malversation, larcin, ivrognerie ou commerce infâme ».

Après quarante ans de service, elles étaient dispensées de veiller la nuit. Quand elles étaient en convalescence, ou quand elles témoignaient le désir de faire une retraite, elles avaient la liberté de se retirer dans la maison de la Fradière, en Saint-Donatien. Afin de les maintenir toujours dans un certain esprit de dépendance, le bureau avait soin de distribuer lui-même chaque année les emplois et de marquer à chaque sœur ses attributions. Dans la plupart des cas elles obéissaient à leur supérieure qui le plus ordinairement était, suivant l'expression du temps « une personne de naissance ». Quand les administrateurs doutaient de la capacité des sujets que la ville pouvait lui fournir pour cet emploi important, il n'hésitait pas à se mettre en relation avec les hôpitaux des autres provinces pour se procurer une supérieure expérimentée.

En 1771, on remarque pour la première fois dans la liste du personnel un économe. A cette même date, les sœurs étaient au nombre de vingt-quatre et gouvernaient l'Hôtel-Dieu avec huit valets, quatre servantes, un portier et deux garçons bouchers.

Le traité de 1665 resta en vigueur jusqu'en 1792.

Personnel de l'Hôtel-Dieu
EN L'AN IV DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE.

1 médecin.
2 aides-major.
2 pharmaciens.
10 élèves externes.
1 directeur.
1 secrétaire.
1 infirmier chargé des approvisionnements.
2 boulangers.
2 bouchers.
1 menuisier.
1 portier.
1 commissionnaire.
1 roulier.
2 jardiniers.
3 cuisiniers et 2 aides.
2 aspirants pharmaciens.
9 infirmiers.
8 infirmières.
1 lingère.
1 tailleuse.
16 hospitalières.
11 servantes.

Les sœurs de la Sagesse, qui dirigent actuellement les services intérieurs de l'Hôtel-Dieu avec tant de dévouement, y sont installées depuis le 19 germinal an XII.

(Léon Maître).

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