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LES ÉPIDÉMIES DE PESTE EN 583, 589 ET 1222 A NANTES.

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Epidémie. — Travaux hydrauliques de Saint-Félix, évêque. — Sa mort. — Peste. — Nonnichius, évêque de Nantes, ordonne des prières. — Cessation de la maladie. — Miracle de Nonnichius. — Famine. — Les mères égorgent leurs enfants. — On viole les tombeau. — Pierre de Dreux change le lit de l'Erdre. — Epidémie.— Les lépreux à Nantes.

III.

La première peste dont les annales de Nantes fassent mention est rapportée à l'an 583 de l’ère chrétienne... Mais, cette grande épidémie que mentionnent les historiens, était-elle bien la peste ? Ce qu'il y a de positif, c'est que Grégoire de Tours parle, dans son livre De Miraculis sancti Martini, livre IIIème, chapitre 34, d'une maladie qu'on apelait lues cùm vesicis, pusula, pusulœ ou pustulœ, qui régna en France, pour la première fois, en 580. Il résulte de la description qu'elle n'était autre chose que la petite vérole.

Grégoire de Tours perdit, par cette maladie, deux enfants qu'il chérissait ; il ajoute : « En ce même temps, Dagobert et Glodebert, fils de Chilpéric et de Frédégonde, en moururent aussi……………. Austregilde, surnommée Bobile, femme de Gontrand, roi de Bourgogne, en fut attaquée. Se voyant près de mourir, elle voulut entraîner après elle ses deux médecins, Nicolas et Donat, disant qu'elle aurait eu quelqu'espoir de vivre encore si ces deux médecins n'eussent pas abrégé ses jours par leurs médicaments, et qu'elle voulait qu'aussitôt après qu'elle aurait rendu le dernier soupir, ils eussent la tête tranchée. Le roi fit exécuter rigoureusement cet ordre barbare ».

Saint-Félix, évêque de Nantes, à qui on attribue le canal qui porte son nom et plusieurs autres travaux hydrauliques, fut attaqué de l'épidémie et mourut.... Les tertres qu'il fit faire le long de l'Erdre, les fossés qu'il fit combler pour détourner, resserrer, grossir les eaux, durent améliorer l'état hygiénique de Nantes ; et en rendant plus navigable l'Erdre, qui n'était alors qu'un marais et dont les eaux stagnantes chargeaient l'air d'effluves dangereuses, il a rendu, probablement sans le savoir, de grands et réels services à la santé publique.

IV.

En 589, à la suite de la guerre, la famine désola Nantes ; une grande sécheresse fit périr les bestiaux, et la peste se déclara... Travers ajoute que l'évêque Nonnichius ordonna des processions, enjoignit de ferventes prières, l'abstinence, le jeûne et l'aumône : Dieu écouta, dit-il, un peuple qui réclamait son assistance avec un cœur aussi contrit, et le mal contagieux cessa.

S'il faut en croire les chroniques de l'époque, Nonnichius faisait même des miracles, puisque l'an 591, où il alla à Tours pour la fête de la Saint-Martin, il obtint de Dieu, à l'intercession du saint, le parfait rétablissement d'un nommé Baudégésille, paralytique, qu'il avait amené avec lui... Quelques-uns, ajoute Travers, pensent qu'il était son fils, et d'autres, seulement son domestique.

V.

La famine, qui forçait les habitants à se nourrir de substances malsaines, était alors une cause fréquente d'épidémie...... Dans ces temps de luttes où les seigneurs, portant le fer et la flamme sur les terres de leurs voisins, arrachaient leurs sujets à l'agriculture, les champs restaient improductifs, et l'affreuse disette, prélude des grandes mortalités, ne tardait pas à se montrer... La Bretagne, en 1161, avait été réduite aux plus grandes privations... Les historiens rapportent que des mères égorgèrent leurs enfants, et que l'on viola des tombeaux pour se nourrir de cadavres nouvellement enterrés... Les guerres qui existaient à cette époque, la disette et l'ouverture des tombeaux suffisent, on le croira sans peine, pour rendre compte de l'apparition d'une maladie épidémique, surtout si l'on se représente Nantes, dans les temps anciens, avec toutes les conditions d'insalubrité qu'elle recelait dans son sein.

VI.

En 1222, une épidémie se déclara à Nantes. La famine qui régnait dans cette ville depuis deux années, et les travaux que fit exécuter Pierre de Dreux, duc de Bretagne, sont pour nous des causes auxquelles il faut rapporter la maladie qui sévit à cette époque... Par les ordres de ce prince, deux ports sont creusés sur la Loire, l'un auprès de l'église de Sainte-Radégonde, nommé le port de Pierre-de-France ; l'autre appelé Briand-Maillard, du nom de l'exécuteur de l'entreprise, subsiste encore sous le nom de Port-Maillard... Le lit de l'Erdre, qui coulait sur la place au Change et dans la rue de la Poissonnerie, est détourné par ordre de Pierre de Dreux. Il en fait faire un nouveau : c'est le même que l'on voit aujourd'hui. Il coupe les rues de la Boucherie et de la Casserie, et communique à la Loire, au quai de la Poterne ou quai Flesselles... Ces travaux durent nécessairement donner naissance à des fièvres intermittentes, et comme on appelait peste toute maladie qui sévissait sur un grand nombre de personnes, nous ne devons pas être étonnés de ce que les historiens aient donné cette dénomination à l'épidémie qui exerça ses ravages cotte année.

VII.

Quoique les chroniqueurs nantais lie mentionnent pas de maladie épidémique et contagieuse jusqu'au XIVème siècle, il est probable cependant que la ville de Nantes a été plusieurs fois décimée par elles... La petite vérole a dû y faire, comme dans toute la France, de grands ravages ; et le feu sacré ou mal des ardents, sorte d'érysipèle gangreneux, qui brûlait les membres ou le corps avec des douleurs intolérables, a régné aussi à Nantes, comme semble l'indiquer l'hôpital de Saint-Julien ou des ardents, situé près de la collégiale. Ogée nous apprend que ce fut Jeanne, dite la Petite Bourgeoise de Nantes, qui fonda cet hospice en 1330. C'était une communauté de quelques personnes qui mettaient tout en commun ; le prieur recevait cinq sous par chaque personne, malade ou non, qui y entrait.

La lèpre, la plus redoutable, dés affections de la peau, existait aussi dans notre pays.

Arrêtons-nous un instant à cette maladie repoussante, l'une des plus anciennes qui ait affligé le monde, et disons un mot de ce mal qui s'attaquait moins à l'existence de l'homme qu'à ses formes, et qui dégradait plus qu'il ne détruisait.

Née en Egypte et en Arabie, la lèpre, répandue en Europe par les romains vainqueurs de l'Orient, et par les Sarrazins, au VIIIème siècle, quand ils vinrent dans les Gaules, s'était presque éteinte lorsque les Croisées, à leur retourde la Terre-Sainte, vers l'an 1100, l'y rapportèrent.... Ses progrès furent rapides, alors que la plupart des hommes manquaient de linge, qu'ils vivaient dans la malpropreté, l'indigence et les privations ;

Alors que la superstition, l'ignorance et les préjugés interdisaient aux médecins le traitement de cette affection ;

Alors que le mal qui attaquait ces infortunés était regardé comme une punition du ciel, et que l'on se contentaint de solliciter des saints, par des prières et des dons, une guérison miraculeuse.

La peur de la contagion dicta partout des mesures sévères contre les lépreux. Traités comme des morts parmi les vivants, on les conduisait à la léproserie avec tout l'appareil usité dans les enterrements...

Ogée nous a fait connaître les cérémonies que l'on mettait en usage à Nantes pour séparer les lépreux que la société repoussait de son sein.

« Un prêtre, revêtu d'un surplis et d'une étole, allait avec la croix chez le lépreux, qui était préparé à cette cérémonie. Le ministre sacré commençait par l'exhorter à souffrir patiemment et on l'esprit de pénitence la plaie incurable dont Dieu l'avait frappé. Il l'arrosait ensuite d'eau bénite et le conduisait à l'église... Là, le lépreux quittait ses habits ordinaires, et prenait un vêtement noir préparé exprès, se mettait à genoux devant l'autel entre deux tréteaux, et entendait la messe, après laquelle on l'arrosait encore d'eau bénite. En conduisant le lépreux de sa maison à l'église, on chantait les mêmes versets qu'aux enterrements ; et après la messe, qui était aussi la même que celle qu'on célébrait pour les morts, on chantait le libéra, et on conduisait le malade à la maison qui lui était destinée. Lorsqu'il y était arrivé, le prêtre lui faisait encore une exhortation, le consolait, et lui jetait une pellée de terre sur les pieds.

Avant de le quitter, le prêtre lui défendait de paraître en public sans son habit de lépreux et les pieds nus ;

D'entrer dans les églises, dans les moulins, dans les lieux où cuisait le pain ;

De laver ses mains ou ce qui lui était nécessaire dans les fontaines et dans les ruisseaux ;

De toucher aux denrées qu'il voudrait acheter aux marchés, autrement qu'avec une baguette, pour faire connaître ce qu'il marchandait ;

D'entrer dans les maisons ni dans les cabarets, pour y acheter du vin, ayant seulement la liberté de rester à la porte, de demander ce qu'il voulait et de le faire mettre dans son baril ;

De ne puiser de l'eau qu'avec un vase propre ;

De ne point répondre à ceux qui l'interrogeraient dans le chemin et les rues, s'il n'était sous le vent, afin qu'ils ne fussent pas incommodés de son haleine et de l'odeur infecte qui s'exhalait de son corps ;

De ne point s'engager dans les chemins étroits ;

De ne point toucher aux enfants, et de rien leur donner de ce qu'il aurait touché ;

De ne point paraître dans les assemblées ;

De ne manger et boire qu'après les lépreux ».

Séparé du monde par la loi, le lépreux ne pouvait rien aliéner, ni donner ; on lui laissait l'usufruit de ses biens, s'il en possédait ; mais il ne pouvait ni vendre, ni contracter d'engagements, ni tester, ni hériter.

Ses enfants n'étaient point baptisés sur les fonts, et l'eau qui servait à leur baptême était jetée dans des lieux retirés...

Assujéti à porter des marques particulières capables de le faire reconnaître en tous temps, l'accoutrement qui lui était imposé avertissait au loin les passants qu'il fallait fuir le lépreux qui s'avançait...

S'il allait à la campagne ou en ville pendant la nuit, il était obligé de faire jouer ses cliquettes, instrument composé de deux morceaux de bois qu'il se mettait entre les doigts, et desquels il tirait quelques sons mesurés, pour qu'on s'éloignât de lui. Quand il se rendait en pèlerinage au tombeau de Saint-Mein, il devait porter deux mains en laine, l'une sur la poitrine et l'autre sur la tête, afin qu'on pût l'apercevoir de loin.

Et cependant, pour une maladie qui inspirait, comme nous venons de le voir, tant d'effroi, on avait créé un ordre : les chevaliers de Saint-Lazare... Ils se consacraient au service des malheureux qui étaient atteints de ce mal ; et chose étrange, leur grand maître devait toujours être un lépreux... Messire Gérard Mellier, un des maires de Nantes, était chevalier de l'ordre de Saint-Lazare.

En entourant de soins et de tant de distinctions les lépreux, on voulait sans doute honorer ceux qui, n'écoutant que les inspirations d'une foi vive et sincère, étaient partis pour l'Orient combattre les infidèles, et en rapportèrent la lèpre...

« En 1439, on voyait encore, dit Travers, les lépreux à Nantes, et quand, on les doutait, le général de la paroisse sur laquelle ils se trouvaient, les déférait à Mgr l'official ; le promoteur intervenait, et sur la contestation de la personne présumée infectée, qu'elle serait vue par des médecins et chirurgiens, et, sur leur rapport, la renvoyait ou ordonnait qu'elle serait renfermée à la léprosérie de Saint-Lazare, où la paroisse qui y avait intérêt la fesait conduire ».

Cet hospice était situé sur les Hauts-Pavés, dans l'enclos qui longe aujourd'hui le côté ouest de la rue Noire, maison n° 44 ; il se trouvait fort éloigné de la ville et presque isolé au milieu des bois qui formaient le prolongement de la forêt de Sautron. (Dr Mareschal).

Peu à peu, la maladie diminua, et vers le milieu du XVIème siècle, il n'y avait plus de lépreux à Nantes... Les divers soins de propreté, le fréquent usage du linge ont beaucoup contribué à éteindre ce mal terrible et qui réveille de si tristes souvenirs !

(Gabriel Le Borgne).

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