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LE PRIEURÉ DE SAINTE-CROIX DE NANTES

(possession de l'abbaye de Marmoutier)

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L'histoire des possessions de Marmoutier à Nantes est assez difficile à éclaircir : non pas faute de documents, mais parce que l'ordre chronologique des faits mentionnés par ces documents présente en plusieurs endroits de l'obscurité. D. Morice a encore augmenté l'embarras en imprimant dans son recueil plusieurs des pièces de Sainte-Croix en un rang qui ne leur appartient point. C'est donc à rétablir l'ordre chronologique que je m'attacherai, sans entrer dans les détails curieux que l'histoire de ce prieuré fournit avec abondance, mais qui m'entraîneraient beaucoup trop loin.

La première possession qu'ait eue à Nantes Marmoutier, est l'église Sainte-Radegonde avec les maisons et les terrains ou airaux qui l'entouraient (ecclesiam cum areis et domibus). Elle fut donnée aux moines par un personnage, laïque ou au moins prêtre marié, qui la tenait contre les canons, et le chapitre de Saint-Pierre de Nantes ratifia cette donation, sous certaines conditions expliquées dans un acte sans date qu'a publié D. Morice (Pr., I, 468), et qu'il a placé à tort vers l'an 1090. En effet, dans le N° 9 du fonds du prieuré de Donge, qui est daté de 1083, Coquin, l'un des fils du donateur, se désiste de l'opposition formée par lui contre le don de Sainte-Radegonde à Marmoutier, et Païen, frère de Coquin, déclare en public non-seulement que cette église avait été antérieurement donnée aux moines par son père et par ses frères, mais aussi que les chanoines de Nantes avaient déjà consenti cette donation. L'acte qui renferme ce consentement et les stipulations y relatives est donc antérieur à 1083 ; même, comme le chapitre agit et parle dans cet acte sans faire nulle mention de l'évêque, l'abbé Travers conjecture avec raison qu'il fut écrit pendant la vacance du siège, entre la mort de Quiriaque et l'avénement de Benoît, c'est-à-dire en 1078 ou 1079. Mais Travers élève contre ce même acte un singulier grief : Cette pièce, dit-il, met l'église Sainte-Radegonde « près de la porte de l'évêque, » où elle n'a jamais été ; ce qui, selon lui, rend l'acte fort suspect (Hist. de Nantes, I, 213 et 214). Si l'acte parlait de la porte de l'évêché, du manoir épiscopal, l'objection, sans être forte, se comprendrait : mais on dit seulement que Sainte-Radegonde est située juxta Portam Episcopi, près ou vis-à-vis la Porte-à-l'Evêque. Or, Sainte-Radegonde était fort rapprochée de la première enceinte murale de Nantes, de l'enceinte romaine, dont le périmètre n'était point encore changé au XIème siècle ; et comme le fief de l'évêque s'étendait de ce côté, rien d'étonnant qu'une porte, percée dans cette enceinte vis-à-vis Sainte-Radegonde, s'appelât la Porte-à-l'Evêque. Ce n'est point la seule réponse qu'on pourrait faire à Travers ; mais celle-là suffit.

En 1083, les moines avaient non-seulement la propriété, mais aussi la possession réelle de Sainte-Radegonde et de ses dépendances, puisque c'était là que résidait l'abbé de Marmoutier durant son séjour à Nantes (Fonds de Donge, n° 9). On a conservé les notices de quelques donations faites au nouveau prieuré sur la fin du XIème siècle ; telles sont celles d'Hildebert L'Echarceau et de Frioul, fils de Bugeaud, en 1095 (ci-dessous, Fonds de Sainte-Croix, liasse I, n° 1 ) ; celle de Lambert de Chassait, en 1096 (Ibid., n° 2), où se trouve mentionné Bernard, le plus ancien prieur connu de l'obédience ou prieuré de Nantes [Note : M. l'abbé Mergey, prieur commendataire de Sainte-Croix au dernier siècle, voulant prouver, dans divers factums contre le curé de Sainte-Croix, que les moines de Marmoutier avaient eu à Nantes une maison conventuelle ou prieuré avant 1101, s'appuie surtout de la présence à plusieurs donations en faveur des moines, d'un certain Herbertus prepositus dont il fait un prieur, vu que prepositus a eu effectivement ce sens assez souvent au XIème siècle. Par malheur, dans la notice de la donation de Lambert de Chassai! en 1096, cet Herbert est positivement classé parmi les témoins laïques (de laicis, Herbertus prepositus), et ne pouvait dès lors être prieur de Marmoutier ; c'était sans doute le prévôt, soit de l'évêque, soit du comte de Nantes, c'est-à-dire un officier dont les principales fonctions consistaient à faire rentrer les droits et rentes dus à la seigneurie. Un peu avant lui, parmi les témoins de l'ordre monastique, est nommé le vrai prieur : de monachis, Bernardus prior obedientiœ de Nanneto. La thèse de M. Mergey était donc Bonne, quoique soutenue d'un argument très-mauvais]. Mais ces libéralités ne nous donnent point encore l'origine de la maison de Sainte-Croix, où les moines se transportèrent de Sainte-Radegonde et où ils demeurèrent en dernier. Pour la découvrir, il faut, je crois, s'attacher à deux autres donations, dont la date précise n'est point marquée, mais qui semblent cependant contemporaines des deux précédentes.

L'une eut pour auteur un Nantais, appelé Raimbert, qui donna à Marmoutier un airail (aream) situé dans l'intérieur de la ville de Nantes (in civitate), près de la poterne Raimbert (ad posteram quœ dicitur Raimberti), et où les moines se bâtirent aussitôt une maison (supra quam œdificaverunt domum monachi S. Martini). M. l'abbé Mergey, dans ses mémoires, juge avec raison que cette maison devint celle du prieuré de Sainte-Croix. En effet, cet airail, puisqu'il était dons la ville et près d'une poterne, se trouvait aussi près des murs de l'ancienne enceinte ; situation qui convient à Sainte-Croix et à Sainte-Radegonde : mais Sainte-Radegonde n'était point près d'une poterne, elle était près d'une porte, la Porte-à-l'Evêque, comme on l'a vu plus haut. Et comme les moines de Marmoutier n'ont eu d'établissements dans la ville de Nantes qu'à Sainte-Croix et à Sainte-Radegonde, si cette maison qu'ils se bâtirent n'était point à Sainte-Radegonde, il faut qu'elle ait été à Sainte-Croix. Seulement, M. l'abbé Mergey, voulant apparemment donner plus de lustre à cette origine du prieuré de Sainte-Croix, a eu le tort de décerner au donateur Raimbert (qu'il nomme Raïabert par faute de lecture) la dignité de maire de Nantes : d'où quelques historiens de cette ville sont partis pour exalter l'antiquité de leurs institutions municipales. Le texte de la pièce, dont j'ai retrouvé une copie faite par les Bénédictins (Bl. Mx, XXXVI, p. 93), porte simplement : Vir quidam, Nannetensis municeps urbis, Raimbertus nomine, etc. Or, municeps n'est qu'un synonyme de civis ou de burgensis, et ni l'un ni l'autre de ces noms ne suffit à indiquer l'existence d'institutions municipales en un lieu donné [Note : Le nom de civis se donnait, du moins en Normandie et en Bretagne, aux habitants d’une civitas ou cité, c'est-à-dire d'une ville épiscopale]. Municeps urbis Nannetensis signifie seulement que Raimbert était citoyen, c'est-à-dire habitant de Nantes.

Outre leur maison priorale dite de Sainte-Croix, les moines de Marmoutier en avaient encore, au XVIIème siècle, un grand nombre d'autres dans le voisinage, notamment tout ce qui composait l'îlot de constructions attenant à l'église Sainte-Croix, et que l'on appelait encore, en 1656, île Sainte-Croix ou île Saint-Martin, à cause de Saint-Martin de Marmoutier, d'où relevait le prieuré. On peut conjecturer avec un certain fondement que les terrains où furent bâties ces maisons provenaient en tout ou partie des airaux donnés à Marmoutier par Gautier, dont le frère Mainfinit sénéchal de Bretagne, après s'être opposé à la donation dudit Gautier, finit par la confirmer solennellement en 1096 (D. Mor., Pr. I, 484 et 491).

Les largesses des princes ne tardèrent pas à suivre celles des particuliers. A peine revenu de la première croisade, le duc Alain Fergent donna à Marmoutier la forêt du Puits-Arlèse (de Puteo Arlesii), sise à peu de distance de Nantes, paroisse de Carquefou. Ce domaine, après avoir formé dans le principe une obédience à part sous le titre de prieuré de la Forêt, fut plus tard réuni à l'obédience de Nantes, sous le nom de prieuré-annexe de la Magdeleine-en-Bois. Guérin, premier prieur connu de la Forêt, est témoin dans une charte d'Alain Fergent datée de la Saint-Denys (9 octobre) 1101 [Note : « Guarinus prior Forestis ». D. Morice, Pr. I, 505] : ce qui montre que la première donation du Puits-Arlèse doit être au moins de cette même année. Cette donation fut, depuis, confirmée deux fois par le Duc, en dernier lieu entre les mains de l'abbé Guillaume de Combour [Note : Je fixerais volontiers cette confirmation définitive à l'an 1106, puisque, d'après la pièce n° 13 du fonds de Donge, l'abbé Guillaume vint précisénient cette année-là visiter pour la première fois le prieuré de Donge, et sans doute aussi les autres prieurés de Marmoutier dans le diocèse de Nantes], qui prit le gouvernement de Marmoutier en 1104, après le 2 août (D. Mor. Pr., I, 523-524 ; et ci-dessous, Fonds de Sainte-Croix, liasse I, n° 3). Nous ferons connaître, en parlant du temporel de Sainte-Croix de Nantes, l'étendue présumée de la forêt du Puits-Arlèse.

En 1101 au plus tard, les moines de Marmoutier reçurent une autre donation, plus importante alors à certains égards, mais aussi plus sujette à débat : c'était l'église de Sainté-Croix de Nantes, avec tous les droits paroissiaux en dépendants. Elle fut donnée aux moines par un laïque, Papin, qui la tenait héréditairement de son père Aubin, contre les canons. Alain Fergent, sa femme Ermengarde, son fils Conan, et le prêtre séculier lui-même qui desservait Sainte-Croix (Garnerio capellano Sancte Crucis qui et ipse concessit) accordèrent à cette donation leur consentement, constaté par une charte ducale du 9 octobre 1101 (D. Mor. Pr. I, 504-505). Léon, fils d'Aubin, après s'être opposé à la libéralité de son frère Papin, se désista de son opposition entre les mains de l'abbé Guillaume, c'est-à-dire dans la seconde moitié de l'année 1104 tout au plus tôt (Ibid., 470); et ce désistement fut suivi d'un renouvellement de la donation de Papin (Ibid., 513), ainsi que d'une nouvelle confirmation par Ermengarde et Conan (Ibid., 512-513).

Malgré ces donations et ces confirmations répétées, les moines ne furent pas mis en possession réelle, de l'église Sainte-Croix ; ils n'avaient même pas encore le consentement de l'évêque de Nantes, qui était indispensable : ce qui étonne d'autant plus que l'évêque d'alors, Benoît, semble avoir eu pour Marmoutier une grande bienveillance, dont il donna, vers ce même temps, une marque assez évidente.

Sur la fin du XIème siècle, un seigneur du comté de Nantes, Harscoet de Saint-Père, possédait au mépris des saintes règles, comme tant d'autres laïques, une église paroissiale voisine de Nantes, celle de Doulon, placée dès lors sous le vocable de Saint-Médard. Pressé par sa conscience, il remit cette église à l'évêque de Nantes, en le priant d'y établir une communauté de chanoines réguliers de l'ordre de Saint-Augustin ; ce qui était accompli dès 1101, puisque, parmi les témoins de la première confirmation de l'église Sainte-Croix faite aux moines de Marmoutier par la duchesse Ermengarde, on trouve déjà un chanoine de Saint-Médard [Note : « Laurentio canonico Sancti Medardi » . D. Mor., Pr. I, 505. On retrouve dans d'autres actes du temps ce même Laurent avec le titre de chanoine et même de prieur des chanoines de Saint-Médard de Doulon. (Ibid., 510, 512, 518, 519)]. En 1105, dans une assemblée de prélats tenue à Nantes en l'église de Saint-Laurent, l'évêque Benoît manifesta solennellement la fondation des chanoines de Doulon et les donationsqui leur avaient été faites par lui-même et par Harscoet de Saint-Père (D. M. Pr. I, 509) : mais, à moins de prouver que la charte confirmative de Sainte-Croix est mal datée (ce dont je ne vois pas le moyen jusqu'à présent), il faut rapporter le premier établissement des chanoines de Doulon à 1101 au plus tard. Quoi qu'il en soit, cette communauté ne donna point à l'évêque Benoît la satisfaction qu'il avait lieu d'en attendre ; et, en 1109, il leur retira l'église de Doulon pour la donner aux moines de Marmoutier (Ibid. 517).

Mais ceux-ci, que l'abbé Travers, avec son fiel de pamphlétaire janséniste, s'est plu à nous représenter comme si rapaces, refusèrent d'abord de profiter de cette dépouille que l'évêque leur adjugeait sans condition ; et l'année suivante (1110), ils firent avec les chanoines un compromis d'après lequel ceux-ci devaient rester à Doulon et y garder leur règle, à condition que l'abbé de Marmoutier nommerait leur prieur et qu'ils ne pourraient recevoir aucun nouveau chanoine sans le consentement dudit abbé (Ibid., 518, 519). Ainsi l'église de Doulon et la dotation de ses chanoines ne revinrent à Marmoutier qu'après l'extinction naturelle de l'ancienne communauté, par la mort des membres qui la composaient.

Cette même année 1110, l'évêque Benoît, sur la prière de Gérard, évêque d'Angoulême et légat du Saint-Siége, confirma enfin ou plutôt concéda, de son droit épiscopal, à Marmoutier l'église paroissiale de Sainte-Croix (Bl. Mx, XXXVI, 93) ; mais, chose étrange (car on ne sait ce qui eût pu alors s'y opposer), les moines ainsi autorisés, ne voulurent ou ne purent pas encore se faire mettre en possession. Ils tentèrent enfin d'y entrer quelque temps après la mort d'Alain Fergent [Note : « Cum in ipsa ecclesia (Sanctœ Crucis) post obitum patris mei monachi habitare cepissent..., » dit le duc Conan III, fils d'Alain Fergent, dans une charte de 1138. Voy. D. Mor., Pr. I. 576], c'est-à-dire en 1119 ou 1120. Cette tentative tourna mal. Benoît n'était plus ; Brice, l'évêque d'alors, loin d'ajouter son consentement à celui de son prédécesseur, poursuivait l'annulation de tous les actes tendant à donner aux moines quelque droit sur les paroisses de Sainte-Croix, de Saint-Saturnin, et quelques autres. A ses instances, le duc Conan III s'était d'abord désisté entre ses mains des prétentions qu'il avait sur ces églises; mais bientôt se ravisant, le prince, en plein chapitre de Saint-Pierre, avait solennellement livré ces mêmes églises aux religieux de Marmoutier et les en avait mis en possession. Brice en appela alors au Saint-Siége ; et après une très-longue procédure, où les religieux firent défaut, le Pape Innocent II, par une sentence définitive du 22 avril 1135, débouta les moines ainsi que le Duc, et proclama le droit de l'évêque sur ces églises (D. Mor. Pr. I, 571-573). Cette sentence fut immédiatement obéie par les parties, comme on le voit par une charte de Conan III du 2 novembre suivant (Ibid., 571), et les moines perdirent ainsi le fruit des dispositions prises en leur faveur par Papin, Alain Fergent, le Duc Conan III et l'évêque Benoit.

Mais l'abbaye de Marmoutier, tout en obéissant à la sentence du Saint-Père, ne s'y soumit qu'en réservant encore certaines prétentions. Pour mettre fin à ce long et difficile procès, un accord fut ménagé, sous l'arbitrage des archevêques de Tours, de Bourges, de Bordeaux, et de l'évêque de Chartres, légat du Saint-Siége. Aux termes de cette transaction, l'évêque et le chapitre de Nantes cédèrent aux moines la moitié de tous les droits qu'ils avaient eux-mêmes dans l'église et dans la paroisse de Sainte-Croix ; le curé ou prêtre séculier chargé de desservir cette église dut être choisi à l'avenir concurremment par le chapitre et les moines, et présenté à l'évêque qui conférait la cure ; les moines purent avoir pour eux et pour les gens de leur maison un cimetière particulier, etc. En retour, l'abbaye de Marmoutier abandonna au chapitre l'église de la Chapelle-Basse-Mer et tout ce qu'elle avait en cette paroisse [Note : Cet acte, avec la charte de l'évêque Brice de l'an 1115 qui forme le n° 8 de la liasse I du fonds de Béré, est l'une des plus anciennes pièces où soit nommée la Chapelle-Bassemer, dite dans ces deux actes Capella Bassameri et Batsameri. Ce nom de Batsamer, Bathsemer ou Bassemer a un certain air breton et pourrait bien être un nom d'homme ; en tous les cas, cette orthographe, la plus ancienne qu'on trouve, détruit l'étymologie qu'on a voulu tirer quelquefois du prétendu nom de Capella Beatœ Mariœ, que je n'ai trouvé dans aucun titre un peu ancien. La Chapelle-Bassemer avait dû, je pense, faire partie, dans l'origine, des biens de la communauté des chanoines de Doulon et arriver par cette voie aux moines de Marmoutier], ainsi que la moitié de tout ce qui lui appartenait en celle de Doulon (D. Mor. Pr. I, 577-578). Cet accord, qui ne porte point de date, doit être de 1136 ou de 1137. Le duc Conan III, charmé de voir enfin ce différend terminé à la satisfaction des parties, renouvela et confirma aux moines de Marmoutier les donations et concessions qu'il leur avait antérieurement faites, par une charte du 8 des ides de décembre (6 décembre) 1138, que D. Morice a imprimée au t. Ier de ses Preuves, col. 576-577. Quelques difficultés qui s'élevèrent sous l'épiscopat de Robert II, évêque de Nantes, c'est- à-dire de 1170 à 1184, entre le curé de Sainte-Croix, les chanoines et les moines, donnèrent lieu à des accords ou règlements dont on trouvera ci-dessous la mention dans notre inventaire (liasse I, nos 4 et 5). Des actes du même genre, dont le texte ne nous a pas été conservé, furent encore passés entre les religieux de Marmoutier et le recteur de Sainte-Croix en 1260 et 1279 (Anc. inventaire des titres de Sainte-Croix).

Enfin nous devons mentionner, d'après 'l'ancien inventaire qui vient d'être cité, que Bernard, évêque de Nantes de 1147 à 1170, donna aux moines du prieuré de Sainte-Croix « la chapelle et dixme de la Vallette, » c'est-à-dire de Vallet.

J'ai cru devoir insister sur les origines du prieuré de Marmoutier à Nantes et de ses diverses possessions, parce que c'est l'un des points les moins clairs de l'histoire ecclésiastique du diocèse de Nantes, et sur lequel le mauvais classement chronologique des actes publiés par D. Morice a multiplié en quelque sorte les ténèbres et les embarras. Si je n'ai pu faire la critique complète de ces actes, j'en ai du moins assez dit, je le crois, pour en redresser la chronologie. D'ailleurs, on n'oubliera point que ces titres, ainsi que les faits qu'ils relatent, nous offrent quantité de renseignements précieux pour l'histoire de la ville de Nantes au moyen-âge.

D'après le livre des bénéfices de Marmoutier de 1587, le prieuré de Nantes était pour trois moines, le prieur compris ; il devait annuellement 110 s. à la mense abbatiale, 4 l. à la mense conventuelle, 21 s. 10 d. aux offices claustraux. La cure de Sainte-Croix était alors présentée alternativement par le prieur et par le théologal du chapitre de Nantes.

Nous allons maintenant indiquer la composition du temporel du prieuré de Sainte-Croix et de la Magdeleine-en-Bois, d'après les déclarations rendues au roi par le prieur commendataire, en 1678 et 1679 (ci-dessous, liasse I, n° 91).

Ce temporel, tant en fief qu'en domaine, s'étendait par endroits dans la ville de Nantes et l'un de ses faubourgs, dans les paroisses de Chantenai, de la Haie-Fouacière, de Carquefou et de Sainte-Luce. Il comprenait en outre plusieurs dîmes assez considérables en Doulon, Vallet, Vigneu Nort Carquefou et Sainte-Luce. Les possessions, dîmes, fiefs et domaines compris dans ces deux dernières paroisses paraissent avoir composé la dotation spéciale du prieuré de la Forêt ou de la Magdeleine-en-Bois, réuni d'ailleurs fort anciennement à celui de Sainte-Croix.

Le fief du prieuré dans la ville de Nantes comprenait d'abord tout l'îlot de maisons attenant à l'église Sainte-Croix, dit île Sainte-Croix ou Saint-Martin, et borné à l'est par la rue de la Bâclerie, au sud par la place du Bouffai, à l'ouest par les rues dites aujourd'hui du Bouffai et de la Belle-Image, au nord, dit l'aveu de 1678, « par le chemin qui conduit de l'église Sainte-Croix à aller en l'église des Jacobins, » aujourd'hui la rue Sainte-Croix.

Dans cet îlot se trouvaient les maisons et bâtiment du prieuré, avec le cloître et la chapelle priorale dite de Saint-Martin, le tout situé au sud de l'église Sainte-Croix, entre cette église, la rue de la Bâclerie et la place du Bouffai. En 1656, la chapelle Saint-Martin fut cédée aux paroissiens pour accroître leur église (ci-dessous, liasse III, art. 20), et c'est pourquoi, en 1678, le prieur déclare être « seigneur primitif et non fondateur de l'église parrochialle de Sainte-Croix, comme ayant esté depuis peu bastie de neuf à l'endroit où estoit autrefoys la chapelle appartenante audit prieuré, pour marque de quoy ledit seigneur (prieur) a une chapelle privative dans ladite église de Sainte-Croix, à costé du maistre autel, bastie sur son fonds, fermée de muraille basse, sur laquelle il y a balustre à grands et hauts barreaux de bois, dans laquelle chapelle est construite une porte pour entrer dans lesdites maisons priorales ; au derrière desquelles est le cimetière de ladite église de Sainte-Croix, cy-devant appelé le clouastre de Saint-Martin, dépendant dudit prieuré ». — Dans cette même île de Sainte-Croix se trouvaient encore les maisons dites du Bon-Conseil, de l'Épée-Royal, de la Bastille, de la Jaille [Note : Cette dernière est aujourd'hui le presbytère de la paroisse Sainte-Croix, suivant M. l'abbé Lagrange, dans sa curieuse Notice historique sur l'église de Sainte-Croix, imprimée à la fin du Manuel pour la neuvaine de Notre-Dame de Bon-Secours, p. 226], etc.

En dehors de l'île Sainte-Croix, le fief du prieuré comprenait six maisons contiguës, bordant la rue de la Bâclerie du côté est, bornées, par conséquent, à l'ouest par cette rue, à l'est par « une ancienne maison appelée la Cour du Branday » et par « le presbitaire de Sainte-Croix, » au sud par « la rue de la Germonde, par où l'on vat audit presbitaire de Sainte-Croix et en la rue du port Briand Maillard, » au nord enfin par « la maison aux héritiers du sieur Bruneau, une venelle ou allée entre deux ». La rue de la Germonde, ici mentionnée, est évidemment la rue, dite aujourd'hui du Petit-Bacchus.

Du prieuré dépendaient encore quatre maisons s'entrejoigilant, dont l'une appelée le logis de la Table-Ronde, sises toutes quatre dans la rue des Jacobins (aujourd'hui de l’Emeri), vers l'angle formé par cette rue et celle (dite aujourd'hui rue de Jussieu) qui va de la rue Basse-du-Château à l'ancienne, église des Dominicains.

Dans le faubourg de Richebourg dépendaient du prieuré sept maisons, jardins ou pièces de terre, dont l'une était « la maison et terre de Bellevue, à présent enfermée, dit l'aveu de 1678, par les dames religieuses Ursulines ».

Sur les immeubles indiqués jusqu'à présent le prieuré avait des rentes, et la juridiction sur presque tous ; mais il n'avait que des rentes sur ceux qui suivent, savoir : deux maisons aux Changes, une autre vis-à-vis l'église Saint-Saturnin, une dans la rue de la Poissonnerie, une près l'église de Saint-Léonard, une près la porte Sauvetout, une en Grande-Biesse ; plus quatre petites rentes sur les Carmes de Nantes, sur l'aumônerie de Toussaints, sur l'aumônerie de Saint-Clément et sur la prévôté de Nantes.

Le domaine du prieuré comprenait encore « douze journeaux de pré situés dans la prée de la Petite Hanne, entre les prés de Jeuset et ceux de la chapelle de la Magdeleine de sur les ponts de Nantes ; item la prée de la Vieille-Justice en la prée de Biesse nommée la Motte, le pré de la Magdeleine nommé Leard, et une autre pointe de pré située en ladite prée ». Une partie de ces prés était de l'ancien domaine du prieuré (voy. D. Mor., Pr. I, 577) ; une autre, et la plus considérable, avait été cédée au prieur par les paroissiens de Sainte-Croix, en échange de la chapelle et du cloître Saint-Martin, dont on a parlé plus haut.

« Item à iceluy prieur un devoir appelé méaige, qu'il prend et lève au tablier de la prévosté de Nantes, qui est par chacun vaisseau (chargé de sel) venant des pays bas (c'est-à-dire du bas de la rivière de Loire), deux deniers et une mine de sel ».

Le prieur de Sainte-Croix avait aussi droit de quintaine.

C'est là tout ce qui dépendait du prieuré dans la ville de Nantes et dans ses faubourgs en 1678 ; on voit qu'il ne lui restait plus absolument rien en l'église Sainte-Radegonde ni aux alentours ; j'ignore quand il avait perdu cette possession, la plus ancienne de l'abbaye de Marmoutier à Nantes.

Avant de passer à l'annexe de la Magdeleine-en-Bois, notons encore pour mémoire trois petites rentes, deux, en Chantenai et l'autre en la Haie-Fouacière.

Le fief de la Magdeleine, en la paroisse de Carquefou, devait représenter, à peu de chose près, l'étendue de l'antique forêt du Puits-Arlèse, telle qu'elle était au XIIème siècle, quand le duc Alain Fergent en fit don à Marmoutier. Et comme il peut être utile de connaître l'étendue de cette forêt, je reproduirai ici le débornement du fief, comme le donne la déclaration de 1679 :

« C'est à sçavoir, à prendre depuis la croix de la Laddrerye joignant le village de la Chohonnière qui est des depandances du lieu de la Cadrannière, tirant à une petite borne de pierre pointue estante au milieu de l'entrée de la lande dudict lieu de la Magdelainne, à aller se rendre près le moullin de la Haye, et de là prendre l'antien grand chemin de Nantes, qui entre dans le bois de la Garenne, tirant au chesne de la Contesse au bout dudict bois de la Garenne, et traversant le chemin Nantois, tirant le long des terres du Prouseau et celles de la Salle, tournant par derrière la pièce de la Ronde plantée en chesnes, allant au landreau qui faict separation des terres de la Salle, allant au puy de la mestairye de la Potterie, lequel débournement continue par la pièce des Tramblais, entrant dans le clos de vigne despandant de la mestairye du Bout des Bois, par le millieu d'unne allée quy est plantée d'arbres poumiers allant le long des maisons et mestairye dudict lieu du Bout des Bois au puy de la Vieille-Ville ; traversant les prés de la Grinionnais à se rendre à la mace du Moulin Boisseau et delà au pré Neuff, le long de la Minguais, près le parc du lieu de l'Espinay, allant aux terres des Ramogères, passant au travers dudit parc qui conduit à la Veillardrye et au châtaignier Hervé, au travers des bois du Belle et se randant à la Noë Blanche et de là à ladicte croix de la Ladrye ».

Depuis la donation d'Alain Fergent, l'état des lieux était bien changé ; il ne restait plus que quelques petits bouquets de bois très-espacés. Là, comme ailleurs, les moines avaient défriché, substitué aux arbres les moissons, et sur ce sol fécondé s'étaient élevés des villages dont les terres avaient passé aux vassaux en toute propriété, sous la réserve de quelques rentes. Toutefois le prieur avait gardé dans son domaine propre « la maison et manoir du lieu noble de la Magdeleine-en-Bois, » avec sa chapelle priorale de la Magdeleine, les logements « des métaiers et bourdiers, » les terres par eux cultivées, quelques bois, et en général d'assez grandes dépendances où se trouvaient assis, entre autres, un moulin à vent pour les hommes du prieuré et un champ de foire pour la foire de la Magdeleine, dont le prieur avait les coutumes. Parmi les autres villages et manoirs qui s'élevaient en 1679 sur le sol défriché de l'antique forêt, je nommerai, d'après l’aveu : la maison de la Pecaudière ou Picaudière ; celle de la Cadrannière, autrefois nommée la Bezardière, et plus anciennement Maupas [Note : Je pense qu'elle prit le nom de la Cadrannière par contraction du nom de la famille de Cadaran, qui la posséda au XVIème siècle], ayant dans ses dépendances le village de la Chohonnière ; la maison du Housseau, « avec ses metairies, bourderies et dépendances ; » la Vincendière et le village de la Grande-Close [Note : Peut-être « la Grande-Otose ; » la lettre initiale du dernier mot est mal formée], en dépendant ; la maison noble de Haute-Forêt ; « les métairies de la Potterie, de la Vieille-Ville et du Bout des Bois, ou aultresfois estoient les landes de Coupegorge ; » la borderie du Moulin-Boisseau et les Minguais ; la maison et les terres de la Veillarderie.

Le prieuré de la Magdeleine-en-Bois avait encore quelques rentes en Carquefou sur le lieu et bois du Bel ou Belle, sur la Grignonnaie, et anciennement sur le Puy-André, dont il n'est plus question cependant dans la déclaration de 1679.

En Sainte-Luce, le prieuré de la Magdeleine ou peut-être celui de Sainte-Croix (car il n'est point sûr que les biens de Sainte-Luce dépendissent originairement de l'annexe) avait deux petits fiefs peu considérables, dont l'aveu donne un débornement que je ne reproduirai pas : l'un consistait principalement dans la métairie du Linot, l'autre touchait le bourg même de Sainte-Luce. Dans cette même paroisse le prieur avait en domaine propre 19 journaux de pré.

D'après un état écrit au XVIIIème siècle ou à la fin du siècle précédent, le revenu du prieuré de Sainte-Croix et de son annexe s'élevait alors à 2847 l. 10 s. ; dans cette somme, les profits de fief et les rentes comptent seulement pour 458 l. (voir ci-dessous, liasse I, n° 11). Ce document ne nous donne qu'un état fort incomplet des charges. Suivant M. l'abbé Lagrange, elles se seraient élevées, vers 1720, à un peu plus de 1600 l. [Note : Voici le détail exact de cette somme : pour les décimes et impositions ecclésiastiques, 500 l. ; pour la pension du curé et du vicaire de Sainte-Croix, 450 l. ; pour faire desservir le prieuré. (où il n'y avait plus de religieux et où le commendataire ne résidait point), 70 l. ; à l'abbaye de Marmoutier, 250 l. 11 s. 6 d. ; pour les réparations des biens du prieuré, année commune, 350 l., somme, 1620 l. 11 s. 6 d.], y compris 250 l. payées par le prieur commendataire à l'abbaye de Marmoutier en représentation de la mense conventuelle du prieuré et des pensions que cette obédience devait à l'abbaye. Ce bénéfice eût donc produit au commendataire un revenu net de 1225 à 1250 liv. environ.

Je n'ai dû m'occuper ici que du prieuré de Sainte-Croix. Ceux qui voudront connaître l'histoire de la paroisse devront lire la notice si intéressante qu'y a consacrée M. l'Abbé Lagrange dans son Manuel pour la neuvaine de N.-D. de Bon-Secours, (pp. 219- 253), sans oublier l'historique de la chapelle de N.-D. de Bon-Secours elle-même (pp. 25-78) qui était sur cette paroisse.

 

TITRES DU PRIEURÉ DE SAINTE-CROIX.

Le fonds du prieuré de Sainte-Croix se compose de cinq liasses et d'un ancien inventaire. En l'état actuel, les pièces portées à cet inventaire correspondent presque uniquement à celles qui sont aujourd'hui comprises dans les liasses II et III ; je ne m'occuperai donc de l'inventaire qu'en parlant de la liasse II.

Liasse I.

Elle contient les pièces les plus anciennes et les titres généraux, dont l'analyse suit :

1.

1095. — Notice. Hildebert L'Echarceau (Hildebertus ..... Escharcellus), citoyen de Nantes, avait deux moulins sur des étiers de mer (in exteriis marinis), aux environs de cette ville. Il donna l'un de ces moulins, avec la main de sa fille Déliée ou Délicate (Delicata), à Frioul, fils de Bugeaud (Frioldo filio Bugaldi), et l'autre à Marmoutier en se faisant moine. Quelque temps après, un chevalier nantais, Raimbert Rabeau (Raimbertus nomine, cognomento autem Rabellus), homme de ce Frioul, voulant aussi embrasser l'état monastique et n'ayant point de quoi faire, en entrant, un présent convenable au monastère, pria Frioul de lui céder le moulin, dot de sa femme, afin qu'il le donnât à Marmoutier. Ce qui eut lieu, du consentement de Frioul et de Déliée. — Orig. parch. Impr. D. Mor. Pr. I, 487.

2.

1096. — Notice. Lambert de Chassail (de Chassalliaco) donne à Marmoutier une charruée de terre pour une charrue à quatre bœufs, avec une quantité de pré capable de nourrir lesdits bœufs : terram ad unam carrucam quatuor boum omni tempore, cum pratis ipsis bobus sufficientibus. En retour de ce don, l'abbé Bernard, qui était alors à Nantes, admit Lambert au bénéfice de la fraternité spirituelle de Marmoutier, et s'engagea à le faire moine quand il le voudrait, sans qu'il eût besoin de rien apporter avec lui. Il s'engagea de même à vêtir et nourrir, sa vie durant, un frère de Lambert, nommé Ivon, après qu'il serait revenu de pèlerinage [Note : « Quando Ivo, frater ejus, redierit a peregrinatione ubi tunc erat »], et à lui donner l'habit monastique sur son lit de mort. Parmi les témoins de ces conventions on doit noter Bernard, prieur de Marmoutier à Nantes (Bernardus prior obedientiœ de Nanneto). — Orig. parch.

3.

XIIème S., avant 1112. — Notice relatant qu'Alain Fergent, duc de Bretagne, et Ermengarde sa femme, du consentement de leur fils Conan, donnèrent à Marmoutier la forêt de Puzarlès ou du Puits-Arlèse (de Puteo Arlesii), située aux environs de Nantes. Cette première donation, faite à Aurai (apud Elradium castrum, et non Eladium, comme l'a imprimé D. Morice), ne peut être postérieure au mois d'octobre 1101. Peu de temps après, Alain renouvela cette donation à Nantes, en présence de ses barons, invitant les opposants, s'il s'en trouvait, à produire sur-le-champ leurs réclamations, auxquelles il promettait de faire justice. Nul ne réclama. Enfin Guillaume, abbé de Marmoutier, étant venu à Nantes (il prit l'abbatiat en 1104), le duc Alain, pour rendre sa donation définitive, alla lui-même montrer à l'abbé les limites de la forêt et l'en mit en possession. Alors seulement Alain de Moidon (Alanus de Maidon) et Harscoet de Saint-Père (Harchoitus de Sancto Petro), qui, lors de l'interpellation précédemment faite par le duc Alain, avaient gardé le silence quoique présents, protestèrent contre la donation de la forêt, s'en disant lésés. Main Fergent leur offrit de juger sur-le-champ leur réclamation; mais ils refusèrent de recevoir son jugement. Le duc ayant ainsi satisfait à ce qu'il leur devait, confirma aux moines la donation de la forêt. Et quelques temps après, Gérard, évêque d'Angoulême, légat du Saint-Siége, étant venu présider un concile à Nantes, Harscoet de Saint-Père et Alain de Moidon se désistèrent de toute prétention et renoncèrent à leur plainte. — Orig. parch. ; semble avoir été sc.
Impr. D. Mor., Pr. I, 523.

4.

XIIème S., 1170-1178. — Charte de Robert, évêque de Nantes (de 1170 à 1184), contenant un accord conclu par-devant Étienne, évêque de Rennes (de 1168 à 1178), entre les chanoines de Nantes, les moines de Marmoutier et le curé de Sainte-Croix. Cet accord porte, entre autres choses, sur le partage des offrandes faites au jour Sainte-Croix (super oblationibus pro capite in festivitate Sancte Crucis oblatis), sur celles du jour des Morts, sur le nombre de messes que pourra dire le curé de Sainte-Croix , sur les processions, sur le partage du cierge de saint Barthélémi, etc. On remarque que le curé est constamment appelé dans cette pièce, ainsi que dans la suivante, presbyter ou sacerdos, et son vicaire capellanus ; ce qui tendrait à faire croire que les moines n'étaient point regardés comme curés primitifs, parce que, dans ce cas, le prêtre séculier qui desservait la paroisse était le plus souvent appelé du simple, nom de vicaire (capellanus) ; il est vrai toutefois que ce titre de capellanus se donnait aussi quelquefois à de véritables curés. Cette pièce montre encore que les prêtres pouvaient, à cette époque, dire plus d'une messe par jour, puisqu'on, stipule que le curé de Sainte-Croix ne devra dire que deux messes chaque jour par soi ou par son vicaire : Presbiter per se, vel per se et capellanum, singulis diebus duas tantum missas celebret hora statuta, sicut et alii viciai sacerdotes. — Cop. en pap. du XVIIIème s.

Nota. Ce n° 4 ne reproduit point en entier la charte de Robert ; c'est simplement une copie de l'extrait de cette charte imprimée par D. Lobineau, Hist. de Bret. II, 348, et réimprimée par D. Morice, Pr. I, 680.

5.

XIIème S., 1170-1184. — Chirographe. Charte de Robert, évêque de Nantes de 1170 à 1184. David, curé de Sainte-Croix, ayant refusé d'observer certains articles de l'accord arrêté par-devant Étienne, évêque de Rennes, et dont on a parlé au n° précédent, un nouveau règlement devint nécessaire ; il est contenu dans la charte de Robert [Note : M. l'abbé Lagrange a donné une analyse assez développée de cette charte dans sa notice sur Sainte-Croix, Manuel pour la neuvaine de N.-D. de Bon-Secours, pp. 230, 231]. Cette transaction porte à peu près sur les mêmes points que la précédente, mais est bien plus détaillée que l'extrait imprimé par D. Morice. Elle fournit à cet extrait une variante que je signalerai, parce qu'elle tombe sur un mot dont l'interprétation n'est pas facile. Le n° 4 porte : De oblationibus et confessionibus a COMMARIS post Pascha habitis presbyter IVtam partem habebit, canonici et monachi tres (D. Mor. Pr. I, 680). Dans le n° 5 cette disposition est ainsi reproduite : De COMAEIS, de quibus post Pascha sacerdos oblationes et confessiones sibi soli solebat retinere, canonici et monachi tres partes habebunt et presbyter IIIItam. La lecture comaeis n'est pas douteuse, et comme l'original du n° 4 n'existe plus, on ne peut vérifier s'il n'y a point une faute de lecture, ou d'impression dans commaris. L'abbé Travers avait traduit commaris par le français commères ; mais comaeis semble déranger cette traduction. — Orig. parch. était sc. de deux sceaux, ceux de l'évéque et du chapitre de Nantes ; il ne reste rien du second, et du premier seulement un fragment très-fruste, en cire blanche, sur lacs de cire blanche.

6.

1635, 4 septembre. — Aveu du temporel du prieuré de Sainte-Croix de Nantes, rendu au roi par le procureur de François de Gerard, prieur commendataire dudit prieuré. — Orig. parch.

7.

1656, 30 mai. — Autre aveu du temporel du prieuré de Sainte- Croix, rendu au roi par Jean Régnier, prieur commendataire. — Orig. parch., à laquelle est attachée la sentence de réception dudit aveu en parch., du 6 juillet 1656.

8.

1674, 17 août. — Procès-verbal de l'état des bâtiments du prieuré de Sainte-Croix de Nantes. — Grosse orig. en pap.

9.

1678, 8 août. — Déclaration du temporel du prieuré de Sainte-Croix de Nantes, fournie au roi pour la réformation de son domaine de Nantes par Jean Régnier, prieur commendataire dudit prieuré. Ensemble, deux additions à cette déclaration, la première, du 26 novembre 1678, concernant des biens situés en la ville de Nantes ; la seconde, du 30 juillet 1679, pour le prieuré-annexe de la Magdeleine-en-Bois. — Orig. en pap.

10.

1745, 3 mai. — Procès-verbal des réparations qu'il est requis de faire aux bâtiments du prieuré de Sainte-Croix de Nantes. — Orig. pap.

11.

XVIIème ou XVIIIème S. — « État du revenu du prieuré de Sainte-Croix de Nantes, » non signé ni daté. — Pap.

Comme cet état complète ce que j'ai dit des biens du prieuré dans la notice préliminaire, je vais le reproduire ici :

« La grande dixme dans la paroisse de Vallet, affermée 650 l. ; quand le bail sera fini, on offre 150 l. de rehaut ; cy : 650 l.

La métairie de la Magdeleine-en-Bois, affermée 265 l. ; on augmentera cette ferme du tiers en renouvelant le bail ; cy : 265 l.

Les dixmes dans la paroisse de Doulon, affermées 22 l. 10 s.

Les dixmes dans la paroisse de Nort, affermées 29 l.

Les dixmes de Vigneu, appellées de la Magdeleine, affermées 50 l.

Le moulin à vent près la Magdeleine, affermé 110 l.

Le droit de sel (ou méage), affermé 30 l.

Le droit de neusme, qui consiste en la 27ème partie des meubles de ceux qui meurent en la paroisse de Sainte-Croix, vaut, bon an mal an 100 l.

La grande maison prioralle située dans la rue de la Basclerie près Sainte-Croix, affermée 300 l.

Le petit logis joignant le portal de la maison priorale, affermé 50 l.

(Suit le détail de cinq boutiques, — deux maisons, une petite et une grande, — un celier, — un magasin, — deux chambres, — un grenier, dont les prix de fermage s'élèvent en somme à) 683 l.

Sur, une maison située à la Saulsaie, 30 l. de rente ; cy : 30 l.

Les dames Ursulines doivent 28 l. de rente ; cy : 28 l.

Les menues rentes du fief : 100 l.

Les profits de fief : 300 l.

Quatorze arpents de bois taillis valent, année commune : 100 l.

Somme totale du revenu : 2847 l. 10 s.

Il dépend dudit prieuré 28 arpents de bois de haute fustaie ; si l'on avait permission de les vendre, on en aurait plus de 20,000 l.

L'indemnité qu'on prétend estre due par la fabrice, au sujet de laquelle il y a procès, n'est comprise dans le présent estat laquelle sera de 48 l. ».

12.

XVIIème ou XVIIIème S. — Analyse des titres de l'abbaye de Marmoutier concernant la propriété de la forêt du Puits-Arlèse. — Pap.

 

******

La plupart des anciens titres de Marmoutier sont aujourd'hui perdus ; heureusement D. Morice en avait imprimé un assez grand nombre, que j'ai indiqués dans la notice préliminaire, et l'on en trouve encore quelques autres, quoique en petit nombre, dans le volume XXXVI de la collection des Blancs-Manteaux.

A la fin de l'ancien inventaire des titres de Sainte-Croix se trouve un état très-succinct des chartes et pièces anciennes, où je crois devoir recueillir les mentions suivantes :

(1147-1170). — « Donation par Bernard [Note : Il ne peut s'agir ici que de Bernard, qui fut évêque de Nantes de 1147 à 1170] de la chapelle et dixme de la Vallette (Vallet), aux religieux de Sainte-Croix.

1260, novembre. — Accord entre les religieux et le recteur de Sainte-Croix au sujet des oblations, dont une partie est donnée au chapitre de Saint-Pierre.

1268. — Titre de 10 s. de rente due par le prieuré de Piremil au prieur de Sainte-Croix. En marge est écrit : « Nota. On dit que cette rente a été remise à l'occasion d'une écluse ».

1270. — Baillée de la métairie de Chessal et prés, par le prieur de Sainte-Croix, à charge de payer la moitié des bleds y croissants, et 3 s. de rente pour les prés.

1279. — Accord entre les religieux de Marmoutier et le recteur de Sainte-Croix au sujet du service divin. Enfin, dans l'analyse des titres pour la forêt du Puits-Arlèse, on trouve les deux mentions qui suivent :

1267. — Acte passé devant l'archidiacre de Nantes après la Saint-Philippe et la Saint-Jacques de l'an 1267, par lequel le prieur de Sainte-Croix de Nantes a acquis les droits et possessions qu'avoient Godefroy Erraut et Marguerite sa femme près la forest des Moines dans le fief du prieur, moyennant 60 s.

1270, novembre. — Autre acte passé devant l'official archidiacre [Note : Sic ; je pense qu'il faut lire « l'official de l'archidiacre, »] de Nantes, en 1270, par lequel le même prieur acquit d'Olivier des Mais et de Théophille sa femme, le droit et possession qui lui appartenoit près la forest des Moines, consistant en cens, dixmes et autres droits ».

Liasse II.

Cette liasse et la suivante contiennent les pièces, ou du moins ce qui reste des pièces portées à l'ancien inventaire, consistant principalement en titres de rente, aveux, reconnaissances, transactions et sentences concernant les divers biens du prieuré.

L'ancien inventaire, qui forme; un cahier in-folio, se subdivise en 38 liasses, composées chacune d'un petit nombre de pièces numérotées. Dans la composition des nouvelles liasses, chacune des liasses anciennes forme un article contenant un ou plusieurs numéros. — Une bonne partie des titres portés à l'ancien inventaire n'existe plus, ou du moins n'est pas venue aux Archives départementales. On a indiqué en marge les articles et les pièces en déficit par la lettre, M. Voici d'ailleurs la mention sommaire de chacune des liasses ou articles de l'ancien inventaire, dont les seize premiers forment aujourd'hui la liasse II de notre fonds de Sainte-Croix :

Art. 1. Maison de la Jaille. Était composé de 18 n°s, de 1430 à 1704, dont 16 manquent.

Art. 2. Maison de l'Épée Royale ; 12 n°s, de 1437 à 1681, dont 11 manquent.

Art. 3. Pros l'Épée Royale ; 11 n°s, de 1423 à 1689 ; 8 n°s manquent.

Art. 4. Rue de la Bâcleric et Juiverie ; 14 n°s, de 1395 à 1682.

Art. 5. Rue de la Baclerie ; 8 n°s, de 1470 à 1663.

Art. 6. Idem ; 8 n°s, de 1594 à 1725.

Art. 7. Idem ; 16 n°s, de 1483 à 1683.

Art. 8. Petites boutiques proche Sainte-Croix ; 6 n°s, de 1657 à 1676.

Art. 9. Rue de la Poulaillerie [Note : La rue de la Poulaillerie est celle qu'on nomme aujourd'hui rue du Bouffai] ; 10 n°s, de 1490 à 1670.

Art. 10. Rue des Jacobins ; 2 n°s, de 1628 et 1686.

Art. 11. Maison du Bon-Conseil ; 6 n°s, de 1575 à 1683. Cet article manque.

Art. 12. Maison de la Bastille ; 6 n°s, de 1490 à 1675.

Art. 13. Maison au bourg de Biesse ; 4 n°s, de 1410 à 1450.

Art. 14. Maison et jardin en la paroisse Saint-Léonard ; 6 n°s, de 1414 à 1524.

Art. 15. Maison proche la closture du prieuré de Sainte-Croix ; 2 n°s, de 1397 et 1512.

Art. 16. Maison en la rue qui descend de Saint-Pierre de Nantes aux Changes, joignant la rue qui va du Pilory aux Frères Mineurs ; 12 n°s, de 1368 à 1673 ; 1 n° manque.

Liasse III.

Elle répond à la fin de l'ancien inventaire, depuis l'art. 17 jus, qu'à la fin.

Art. 17. Rente sur l'aumônerie de Saint-Clément; 2 n°s, de 1472 et 1490.

Art. 18. Rente sur l'aumônerie de Toussaints; 4 n°s, de 1364 à 1683. Le n° 1er est ainsi analysé dans l'ancien inventaire :

« 1364. — Traité entre le prieur de Sainte-Croix de Nantes et le prestre de l'Hôtel-Dieu (de Toussaints) dudit Nantes, pour les oblations qui se font dans ledit Hôtel-Dieu ; par lequel le prestre s'oblige de donner tous les ans 30 s. audit prieur pour sa part desdites oblations ».

Art. 19. Rente sur la cure de Sainte-Croix ; 1 n°, de 1661.

Art. 20. Rente sur la fabrique de Sainte- Croix ; 5 n°s, de 1656 à 1704. — Suit l'analyse des deux premiers n°s :

« 1656, 3 juin. — Transaction entre le prieur du prieuré de Sainte-Croix et les curé et paroissiens de la paroisse de Sainte-Croix ; par laquelle ledit prieur cede, auxdits habitans les droits qu'il avoit dans une allée et espace entre l'église de Sainte-Croix et la chapelle (priorale) de Saint-Martin avec la tourelle et espace qui est proche et au niveau des murailles de ladite tourelle ; et pour évaluation desdites choses lesdits habitans s'obligent de faire construire une chapelle dans une des aisles de ladite église du côté du prieuré ; et ont lesdits habitans cedé les prez dépendans de ladite fabrique situés en la prée de la Magdelaine, et s'obligent en outre faire audit prieur 15 l. de rente foncière, payable sur le revenu de la fabrique. Cotte 1e ».

« 1670, 2 avril. — Transaction entre le prieur de Sainte-Croix et les fabriciers paroissiens de ladite fabrique de Sainte-Croix, par laquelle ledit prieur abandonne auxdits paroissiens une boutique dépendante du prieuré, située proche la vieille porte de l'église de Sainte-Croix, pour faciliter l'architecture et alignernent de ladite église ; et en récompense les fabriciers s'obligent de payer au prieur la somme de 15 l. de rente foncière et perpétuelle, qu'ils lui assignent sur une rente de 40 l. due à la fabrique sur un logis situé au faubourg de la Saussaie, appartenant au sieur René Bruneau, ensemble une autre rente de 15 l. due par ladite fabrique audit prieur par transaction du 3 juin 1656, qu'ils assignent pareillement sur ladite rente de 40 l. Cotte 2e. ».

Art. 21. Rente sur les religieuses Ursulines; 12 n°s, de 1506 à 1678. Le lieu sur lequel se payait cette rente fut acquis par les dames Ursulines le 8 mai 1627, en vertu d'un contrat de cette date qui forme le n° 7 de cet article ; et sous le n° 9 sont des « lettres d'amortissenient, accordées par le Roy aux Ursulines de Nantes, des fonds par elles acquis pour la fondation et construction de leur couvent, » en date du mois de septembre 1629.

Art. 22. Rentes au faubourg de Richebourg ; 4 n°s, de 1483 à 1502.

Art. 23. Idem; 4 n°s, de 1472 à 1497.

Art. 24. Idem ; 17 n°s, de 1425 à 1685.

Les articles suivants regardent les dépendances du prieuré-annexe de la Magdeleine.

Art. 25. Paroisse de Carquefou, Haute-Forêt; 11 n°s, de 1500 à 1685.

Art. 26. Même paroisse, la Piceaudière ; 4 n°s, de 1523 à 1659 ; 1 n° manque.

Art. 27. Même paroisse, la Cadrannière ; 3 n°s, de 1521 à 1678.

Art. 28. Même paroisse, le Housseau ; 5 n°s, de 1470 à 1676.

Art. 29. Même paroisse, la Poterie ; 3 n°s de 1540 à 1590.

Art. 30. Même paroisse, le Puy-André; 12 n°s, de 1445 à 1522.

Art. 31. Même paroisse, les landes du Billon; 6 n°s ; de 1522 à 1660. L'article entier manque.

Art. 32. Même paroisse, métairie du Bel ; 10 n°s, de 1623 à 1669. L'article entier manque. L'ancien inventaire mentionne ainsi le n° 1. « 1263. — Contrat d'atournance de 40 s. de rente, qui étaient dus pour un anniversaire sur une maison située près Nantes, qui fut jadis à Thierry de Corvert (sic), possédée par un nommé Rivière, sénéchal de Nantes ; remise ladite rente sur la métairie du Bel, appartenant lors à Briand de Silvan (sic), comme héritier dudit Rivière ; payable au prieur de Sainte-Croix aux termes de Noël et de Saint-Jean-Baptiste par moitié ; icelle rente due à cause de ladite métairie du Bel baillée et concédée auxdits Rivière et sa femme pour ladite rente de 40 s. ».

Art. 33, 34 et 35. Titres concernant les biens du prieuré en la paroisse de Sainte-Luce. — Ces trois articles, qui manquent aujourd'hui, contenaient ensemble 83 n°s, de 1423 à 1671.

Art. 36. Rente en la paroisse de Notre-Dame de la Haie ; 2 n°s, de 1454 et 1528.

Art. 37. Rente en la paroisse de Saint-Martin de Chantenai ; 3 n°s, de 1454 à 1524. L'article entier manque.

Art. 38. Cet article, qui manque, semble s'être seulement, composé de deux états de titres envoyés de Marmoutier au procureur fiscal du prieuré de Sainte-Croix de Nantes en 1734 et en 1736 ; ces deux états sont transcris dans l'ancien inventaire.

Liasse IV.

Baux à ferme, de 1540 à 1790.

Liasse V.

Procédures de 1636 à 1737 ; et pièces diverses de 1433 à 1775.

(M. A. de la Borderie).

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