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LA SEIGNEURIE DE LA CROCHAIS (arrière fief du Plessis-Balisson). |
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I- La Crochais vers 1913.
Le château de la Crochais avec ses dépendances, est sans contredit la plus belle propriété de Ploubalay. Ses superbes étangs encaissés au milieu d'une vallée profonde qu'ombragent des arbres centenaires aux magnifiques ramures, forment tout auprès de cette vieille demeure un site admirable qui ne cesse d'attirer visiteurs et touristes [Note : Le Château et les étangs de la Crochais ne sont qu'à une demi-lieue de la gare de Pleurtuit].
Cependant la maison de la Crochais construite, semble-t-il au cours du XVIIIème siècle, ne présente rien de particulièrement remarquable dans son architecture ; mais ses vastes jardins conservent toujours leur enceinte de douves profondes qui rappellent le système de défense des temps passés.
Non loin de ces bâtiments relativement modernes, s'élève le vieux manoir primitif, aux murs tout recouverts de lierre et menaçant ruines. Les fenêtres de son unique étage présentent à l'archéologue des meneaux en croix du XVème siècle. De même sa porte d'entrée principale demeure comme un bel échantillon de ce style ogival un peu maniéré qui précéda immédiatement l'époque de la Renaissance et mériterait à ce titre d'être conservé.
Avant la Révolution, la terre de la Crochais était un fief du Plessis-Balisson (Archives des Côtes-d'Armor, E 493 et E 1423), ce qui n'empêchait pas ses seigneurs de jouir d'une jolie fortune assise tant à Ploubalay, qu'à Pleurtuit et Saint-Enogat. Ils possédaient même en terre bretonnante d'assez vastes propriétés.
Maintenant la vieille race des Ladvocat dont nous allons raconter la succession comme seigneurs de la Crochais, durant près de quatre siècles, est depuis longtemps éteinte. La dernière descendante de ce nom, issue d'une branche cadette, Eulalie-Marie-Olive-Armande Ladvocat, épouse de Victor de Courville, est décédée à Nazareth, dans le vieux manoir du Dôme, dans les années 1880.
II- La terre de la Crochais en 1712 (Archives des Côtes-d'Armor, E 167).
Nous n'avons pu nous procurer de description du fief de la Crochais avant l'année 1712. Encore s'agit-il d'un travail de seconde main, puisque c'est un extrait de l'aveu rendu le 25 mars 1712 par Guillaume-Dinan du Breil, comte de Rays, pour sa châtellenie du Plessis-Balisson.
D'après cette pièce, « Jean Ladvocat, chevalier, seigneur de la Crochais, tenait alors prochement et noblement sous le seigneur du Plessis, pour les second, tiers et quart bailliages et sous le bailliage des Nobles qui fut du Bois de la Motte, à devoir de foy, hommage, chambelnage et autres droits seigneuriaux, suivant la coutume et usement des dits fiefs, les maisons, terres, métairies, moulins, bois taillis, fiefs et dixmes ci-après ; partie sans rachapt, partie à rachapt... savoir :
La maison principale et retenue du dit lieu de la Crochais, bâtiments, cours, avant-cour, chapelle [Note : Cette chapelle qui existe toujours est maintenant désaffectée], colombier, deux grands jardins séparés par une muraille contenant ensemble deux journaux 40 cordes de terre.
L'enclos de derrière la maison, bois de décoration et chesnaie, deux moulins à eau avec leurs étangs et la Chesnaie du Moulin contenant 15 journaux 5 cordes.
Les mails, rabines et avenues, y compris le petit domaine au-devant de la maison contenant 3 journaux et demi.
Le bois de Taléboinet comprenant 15 journaux et demi.
La maison et métairie de la Grande-Lande [Note : C'est la ferme de la Lande-Crochais] avec fuye, refuge à pigeons et des murailles et emplacement de maison au bout de la dite métairie.
Les métairies de la Ville-Barbou, du Pont-Aven (ou Pont-Even) et de l'Effendais.
La maison et métairie de la Ville-Goujeon, avec le clos de la Chapelle.
La métairie de Lanrodel, avec le Clos du Colombier.
Enfin le sieur de la Crochais relève aussi de la dite seigneurie du Plessis-Balisson pour la dîme de Lanrodel située en Ploubalay et qui s'y lève, cueillie à la 12ème gerbe, tant sur les blés blancs que noirs. La dite dîme s'étendant sur les terres de la Crochais et celles qui sont circonvoisines ».
Ainsi sept métairies, si l'on y joint celle de la Crochais [Note : La Métairie de la Crochais était affermée à Julien Martin, par Bail du 8 mars 1784, consenti par Jean-Marie-Louis Ladvocat de la Crochais, faisant tant pour lui que pour ses frères et soeurs, pour une durée de neuf ans à commencer du 29 décembre 1785. Le bail comprend tous les logements de la basse cour à l'exception de l'écurie qui est réservée. Il comprend aussi la Métairie de l'Effendais, à charge de fournir par an 40 livres de beurre et de planter six pommiers par an, (les quelles charges estimées 40 livres) et payer chaque année 1.450 livres en deux paiements égaux. (Extraits des Registres du séquestre)], une trentaine de journaux de terre plantés en bois, deux moulins placés sur des étangs magnifiques, telle était vers la fin de l'ancien régime le domaine de la Crochais. Laissons s'écouler moins d'un siècle et nous verrons ses propriétaires en exil et cette terre vendue el morcellée pour le plus grand profit des spéculateurs de la compagnie Rochefort.
III- Succession des seigneurs de la Crochais.
Si loin que nous puissions remonter dans l'histoire, nous trouvons la terre et fief de la Crochais aux mains de la famille LADVOCAT qui s'armait « d'azur à la bande dentelée d'argent accostée de trois coquilles d'or 2 et 1 ».
Le premier en date des Ladvocat que nous connaissions est ALAIN, qui lors de la Réformation de 1448, possédait en Ploubalay la Crochais et l'Effendais. En 1454 [Note : Réformations de l'ancien diocèse de Saint-Malo, édition des Salles. Avant Alain, nous trouvons Jean et Eon LADVOCAT qui faisaient partie le 1er septembre 1421 de la Compagnie du seigneur de la Hunaudais reçue à Montoire (Morice. Preuves II col 1088). De même en 1477, un autre Jean LADVOCAT servait dans la Compagnie de Maurice du Mené en qualité d'homme d'armes. (Morice, Preuves III col. 352). Mais malgré la similitude de nom nous ne savons si ces Ladvocat sont les mêmes que ceux de la Crochais], GUILLAUME, fils d'Alain et seigneur de la Crochais, produisit une déclaration à la Chambre des Comptes de Nantes pour divers héritages situés en Pleurtuit (Archives de Loire-Inférieure, B 1274).
En 1474, un autre GUILLAUME, probablement fils du précédent et de Mathurine Bernier, de la maison de la Chapelle (Courcy), fournit à son tour une déclaration à la Chambre des Comptes (Archives de Loire-Inférieure, B 1274). Vers la même date, le fils de ce Guillaume, « armé à blancs, page ô lance », comparaissait pour son père à Dinan à la montre des Nobles de cet archidiaconé (Des Salles, ouvrage cité).
Lors de la Réformation de 1513, BERTHELOT, fils de FRANÇOIS Ladvocat, écuyer, (Archives de Loire-Inférieure, B. 1274), tenait à Ploubalay les deux maisons nobles de la Crochais et de la Fardelais [Note : Lors de cette même réformation Berthelot possédait à Plouër un lieu noble appelé Pignehel, ainsi que la Baronnais en Saint-Enogat (Des Salles, op. cité)]. L'abbé Mathurin dans son ouvrage sur « Dinard à travers les Ages » dit que Berthelot avait un frère appelé Marc, lequel fonda le rameau des Ladvocat de la Baronnais, qui s'éteignit en 1757. Les biens de cette branche passèrent alors à François-Claude Collas de la Baronnais, époux de Renée de Kergu, que nous retrouverons à la fin du XVIIIème siècle possédant à Ploubalay la propriété de la Rivière.
Berthelot Ladvocat se maria avec demoiselle Marie Taillard qui lui donna au moins un fils appelé Yves, baptisé à Ploubalay le 7 octobre 1521 [Note : Registres paroissiaux de Ploubalay édités par M. du Guerny, recueil qui nous a été fort précieux pour notre travail].
Après Berthelot que nous trouvons encore vivant le 17 juin 1556. (Archives des Côtes-d'Armor, B. 884), nous éprouvons de la difficulté pour établir la succession des seigneurs de la Crochais. Si nous voyons l'an 1565, GUILLAUME LADVOCAT présenter aveu au Roi, pour divers fiefs qu'il possédait alors dans les paroisses de Saint-Lunaire et de Pleurtuit. (Archives de Loire-Inférieure, B 1274), nous rencontrons trois ans plus tard ALAIN Ladvocat, sieur de la Crochais, passant un contrat à Ploubalay. (Archives des Côtes-d'Armor, B 884. Inventaire de titres).
Quoiqu'il en soit ALAIN dut bientôt disparaître puisqu'en 1571, Guillaume L. partageait noblement sa soeur Hélène, dame douairière de la Pyrie. Trois ans plus tard il épousait Françoise du Breil. Leur contrat de mariage est du 8 novembre 1574 (Archives des Côtes-d'Armor, B 884). Nous ne connaissons pas la date exacte de leur décès, mais le 3 février 1588, ils n'étaient plus ni l'un ni l'autre et l'on faisait l'inventaire « pour la préservation des droictz de nobles personnes Julien, François et Anthoine leurs fils mineurs » [Note : Cet inventaire conservé aux Archives des Côtes-d'Armor sous la côte B 884 contient une forte curieuse descripton d'une maison noble au XVIème siècle. Nous en donnerons les parties essentielles aux pièces justificatives à la suite du présent paragraphe].
Note : Inventaire de la succession mobilière DE
GUILLAUME LADVOCAT ET DE FRANÇOISE DU BREIL, SON ÉPOUSE L'AN 1588 (Archives des
Côtes-d'Armor, série B 884).
Inventaire des biens meubles de deffunctz nobles
home GUILLAUME LADVOCAT et damoyselle FRANSOYSE DU BREIL, vivantz sieurs et dame
de la Crochaye, la Teffandaye, La Bonnaye, et pour la préservation des droictz
de nobles personnes Jullien, Fransoys et Antoyne Les Advocatz, enfans myneurs et
héritiers desdictz deffunctz leurs père et mère en leur dict mariayge ; fait
d'autorytè de la Cour et Chastelenye du Plesseix-Ballyson, instant le procureur
fisecal d'icelle, à la solicitation, poursuilte et diligeanse de noble homme
Guillaume Ladvocat, sieur de la Jehannye, tuteur et garde desdictz enfans
myneurs, soubz âge de quatorze ans, iceulx biens exhibez et appareuz par ledict
tuteur et prisez par noble gens Christophle Chastel, sieur de la Rouaudaye, et
Jullien d'Ivignac, sieur du Closneuff, et mestre Jehan Dudouect, sergent pour
ladicte court du Plesseix-Ballyson, asistant pour le dit procureur les jours,
moys et an sy apprès en la présente et pardavant maistre Jehan Le Dehan,
lieutenant et juge ordinayre de la dicte court ; et n'ont esté nullement les
huys et fermeures de ladite meson qui par sy davant avoyent esté scellez,
nullement ouvertz, ny levé, ny osté les sceaulz de desur icelles fermeures ains
sont encores demeurez fermez avecques les cleffz et sceaulz.
I- Deu tiers
jour de febvrier, mil cinq centz quatre vingtz et huict. PREMIER.
A la meson de la Bonnaye, ausditz feuz sieur et
dame appartenante, située en la parouesse de Pleurtuit et y est demeurant
0llivier Guillaume mestayer.
Saizes vaches et bestes à cornes, ensemble ung
toreau, tant vieilles que jeunes, toutes asemblement prysés, l'ungne aydant a
l'aultre, chaichune prisée seix livrés dix soulz ; qui est somme en grand :
trante-seix escuz deux tyers, dix soulz, dont n'en revyent à tuteur que la
moyttié qui est dix-huict escuz tiers et cinq soulz.
Pour ce .... XVIII escuz
trente-cinq soulz.
Item troys petitz veaulx d'envyron ung an, prisez
asemblement ung escu, de quoy n'en revyent au tuteur que demy escu. Pour ce ...
XXX s. t.
Plus ungne truye et quatre pourseaulx, asemblement prisez deux
escuz et tiers, de quoy n'en appartient audict tuteur que ung escu et dix soulz
et pour ce ... LXX s. t.
Item vingctz berbys et moutons, asemblement prisez
les ungnes aydantes les aultres, dix soulz tournois, de quoy n'en revyent au
tuteur que ung escu deux tiers.
Pour ce ... Ung escu deux tiers.
Plus
douze bouseaulx de froument, tout au tuteur ; chainchun bouseau, mesure de
Dinan, prisé chainchun bouseau ung escu, qui est somme douze escuz. Pour ce ....
XII escuz.
Item, quatre bouseaulx de saigle, à la dite mesure, chaincun
bouseau prisé cinquante soulz, qui est somme troys escuzs et tiers ; pour ce ...
III escuz et tiers.
Item, cinq bouseaulx de blé noyr prysé trante soulz le
bouseau, qui est somme deux escuz et demye et pour ce ... VII# 10 s.
Plus
vingt bouseaulx d'avoyne grosse, à ladite mesure, prysé chascun bouseaux vingtz
soulz, qui est somme vingt livres, et pour ce ... XX l.
II-
En la meson de la Crochaye.
Premier en
la salle basse.
Ungne petite table sur carée, prysée trente-cinq soulz,
pour ce ... XXXV s.
Ungne paire de vieulx somyes hastier (?) de fer prysez
centz soulz t. pour ce .... C s. t.
Ung grand vieulx dresouer garny de deux
tirouers, et deux armares prysez centz souiz ; par ce ... C s.
Ung vieulx
banc en fason d'une fromme et ungne vieille chayere prysez ensamble trente soulz
et pour ce... XXX s. t.
Deux chaires et ung petit escabeau long, tout
ensemble prisé cinquante et seix soulz, pour ce ... LVI soulz. t.
En la
chambre basse.
Ungne table à case fermant à cleff et garnye de sa
clavenre avecques deux petits escabeaulx longs et deux chayeres, l'une plaine et
l'aultre à jour, le tout asemblement prysé deulx escuz et pour ce .... VI l. t.
Plus une petite chayère de fason de Flandres et deux petitz taboureaulx de
vielle trype de velours vert, le tout prysé cinquante soulz, pour ce ... L s. t.
Ung petit vielx dresouer avecques deux aremares non fermantes et ung petict
varier et ung petit das prisé ung escu, pour ce ... LX s.
Item deulx vieulx
chartictz et quenouilles prysez ensemble troys escuz, pour ce ... IX l.
Ung
coffre garny de cleff et claveure et garny d'afiches de fer, prisé soixante-dix
soulz et pour ce LXX soulz.... LXX s.
Ungne table ronde à case effonsée
prysée vingct sous et pour ce ... XX s. t.
Un viel banc a deux estrés, garny
de claveures et sans cleff ny afiches, pryse trente soulz et pour ce ... XXX s.
En la cuysine.
Ungne table à case sans cleff ny claveure, prysée
quarante soulz et pour ce ... XL s.
Ungne mé de boays a paisteryr a deulx
estres, prysée deux escuz et pour ce ... VI s. t.
Deulx estactz servantz pour
la cuysyne et deulx bruchetz a laysive avecques ung escabeau, prysé ung escuz et
pour ce ... LX l.
Ungne chayre a plaine ouvre et un escabeau prysè vingct
soulz et pour ce .... XX s. t.
Item ung van, ung cruble, deulx saye a saser
faryne, ung cart a mesurer blé avecques ungne pype servante a charnyer, ungne
planche, le tout pryse asamblement vingtz soulz et pour ce ... XX s. t.
En la despanse.
Ung garde mangyer de bouays de fresne avecques quatre
aremares a plain ouvre. Deux vieulx charnyers prisez ensamble ung escu pour ce
.... LX s. t.
Ung petict coffre prisé dix soulz, et pour ce ... X s. t.
Ungne toure pour mettre vraiges (?) effonsée de ung boult et presque en ruyne,
prysée cenctz soulz tournois et pour ce .. C s. t.
Ungne pype et ungne
barycque prisés ensemble vingct soulz et pour ce ... XX s.
Ung viel das sur
lequel il y a deulx poctz a vuen, le tout prysé trante soulz. Pour ce ... XXX s.
t.
Deux couvertures de lict, l'une de drap, ... neuf et l'aultre de berlyge
..., plus que my usée prysée ung escu et pour ce ... LX s. t.
Deux couettes
de pleume encouetillés de doublier, pesantes poys de couecte, seix vingctz
livres, presque my usés, la livre prysè quatre soulz qui est somme en grant
vingt-quatre livres tournoys. Et pour ce ... XXIV l. t.
Les deulx lictz
garnys de deulx sielz et tours de lyct de sarge, prysez asamblement centz soulz
tournoys et pour ce ... C s. t.
En la chambre de desur la cuysine.
Deux vieulx charlitz prysez quatre lyvres tournoys et pour ce ... IV l.
Ung
petict bufect a deux aremares et ung tirouez prysé vingt soulzt et pour ce ...
XX s.t.
En boeays pour servyr de hourdays de moullin a vaut et plancher, le
tout prysé ung escu pour ce ... LX s. t.
Ungne vielle couecte de plume de
poullayt pryse quatre lyvres pour ce ... IV l.
En etain estant en ladicte
maison cinquante lyvres, la lyvre prysé quatre soulz deulx deniers qui est somme
onze livres cinq soulz et pour ce ... XI l. V s.
Plus sept livres prysè
comme d'avant et pour ce ... XXX s VI d.
En aren, (airain) seize livres
presque my uséez, chaschune livre prysée seize soulz qui est somme dix lyvres
saize soulz. Et pour ce ... X l. XVI s.
Un plact d'aren a lavez la men et ung
autre plact à lavez d'esten prisez ung escu. Et pour ce ... LX s. t.
Ung
vieulx flascon d'esten persé pesant troys lyvres prysé dix soulz, pour ce ... X
s. t.
Deulx petitz landiès, deulx trépiès, deux broches, le tout de fer
pesant ensamble, poys de croct à Dinan, cinquante livres le tout prysè soixante
et quinze soulz et pour ce ... LXXV s. t.
Plus en la chambre basse deux
couettes en couetillés de doublyer, l'une neuffve et l'aultre presque neuffve,
avecques troys orilliés pesantes, poys de croct a Dinan, vingct douze livres,
chainchune livre prysée quatre soulz, l'une aydante a l'aultre, qui est somme
seix escuz et huit soulz, et pour ce ... XVI escuz. VIII s.
Ung petict gallyse
(calice) et patesne d'argent doré avecques la chappelle garnye pour fayre le
divin servyse qui est demeurée non prysée.
Plus vingct-cinq linseulx bons à
réparation, prysez l'ung aydant l'aultre à vingct soulz pyese, qui est somme en
grant vingt-cinq lyvres, pour ce ... XXV l.
Ung aulte linseul de toille de
brin de troys toilles envyron, my ussé prysé ung escu et pour ce ... LX s. t.
Ungne touaille de toille de doublyer de trois verges de longueur prysée ung escu
pour ce ... LX s.
Deulx travers de table de doublyer, priser asamblement demy
escu, pour ce ... LX s. t.
Plus deulx linseulz de toille de brin de deux
toilles prisez asamblement ung escu. Pour ce ... LX s. t.
Dix touailles de
brin à réparation prysés asamblement ung cart d'escu, qui est somme en grant
deux escuz et demy et pour ce ... VII# 10 s. t.
En serviettes de brin de lin,
deux douzaines prisés deux escuz et pour ce ... VI l.
Item, deux douzaines
de grosses serviettes, la douzaine prysée demy escu, qui est somme ung escu,
pour ce ... LV s. t.
Item, huict rideaulx servantz pour lictz prisez vingct
soulz pyese, qui est somme huict lyvres et pour ce ... VIII l.
Quatre vieulx
tours de lict de lige prisez ung escu, pour ce ... LX s. t.
En la chemynée de
la chambre basse ungne vielle... ? ung galtouer, ung trepyet, ungne pelle de fer
et la palecte de fer, le tout asemblement prysé demy escu et pour ce.... XXX s.
t.
Le tout de ce que desur faict les dicts jour et an que d'avant et esdictz
lieulx et lesdicts biens nous appareuz par ledict tuteur et ont lesdictz
Ladvocat tuteur et Yves Ladvocat son frère et ledict Chastel et d'Esvignac
presantz pryseurs signé avec moy de Launay greffe.
Et aussi present a esté
Jehan Dudouet, sergent général de ladicte court du Plesseix-Ballyson qui a signé
et lesquelz biens ont demeurez entre les mains dudict tuteur qui a promys en
respondre desdictz biens ou des sommes sy dessur déclarés, ainsin signé : Y.
Ledean, G. Ladvocat, Y. Ladvocat, Chri. Chastel, Ju. d'Evignac, J. Dudouect.
Faict cemme davant lesdicts jour et an par moy de Launay predict greffe se que
desur audit tuteur luy delivré par luy servyr
Signé : De Launay.
Du lundy quart jour d'apvril mil cinq centz quattre vingtz ouict, à
la maison de la Crochaye en la chambre blanche sur la basse chambre.
Unne
table a case qui se plye a figures pour servir a jouer au tablier, prisée troys
escuz et pour ce ... III#.
Plus ung banc et une chairre et ung petit escabeau
et deux petitz taboureanlx prisez ensemble ung escu, pour ce ... 1#.
Item
une petite chairre prisée six soulz et pour ce.... VI s.
Plus ung buffect,
sans casse ny fermetture, de bouais de chesne prisé quattre livres et pour ce
... IV#.
Item ung grand coffre faict a drapperye, de fresne garny de sa
ferreure et fermant à cleff, prisé quattre livres et pour ce ... IV#.
Plus
ung petit moyen coffre fermant à cleff et claveure prisé ung escu, pour ce ...
1#.
Aultre moyen coffre viel, garny de cleff et claveure, prisé vingt soulz,
pour ce ... XX s. t.
Ung coffre de bahut, garny de fer blanc fermant a clef
et claveure, prisé quatre livres, pour ce ... IV l.
Deulx charlictz a
quenouilles prisez ensemble l'un aydant a l'aultre a troys escuz, pour ce ...
III#.
Item deux tours de lict de toille commune prisez XX soulz, pour ce ...
XX s. t.
Ung tapictz de drap vert qui est demeuré a Monsieur du Closneuff a
ung escu, pour ce ... LX s.
Une couverture de lict blanche de drap de pays,
prisée soixante soulz, pour ce ... LX s.
Plus aultre couverture de lict de
Cathalonne blanc, prissée cinquante soulz, pour ce ... XL s.
Ung chapperon
presque neuff et deux aultres vieulx plusque my usséz, le tout de velloux, avecq
ung cotillon de taffetas changant avecques deux petites bandes de guinganbal,
ensemble ung vielx cotillon de damas tanné, le tout de cesdits articles releissé
pour l'ussage de damoiselle Maure Lavocat, fille desdictz deffunctz.
Item
troys chandelliers de cuyvre garnis d'une parure et ung plus moyen prisez
ensemble soixante soulz, pour ce ... LX s.
Plus une couette de pleume
encouetillée de toille de melesse, pesante cinquante livres, prisée chacune
livrey comprisse le couetil seix soulz qui est somme quinze livres, pour ce XV
l.
Aultre couette encouetillée de doublyer pesante trante livres le couetil,
my ussé, chaicunne livre prisée quattre soulz qui est somme seix livres
tournois, pour ce ... VI l.
Ung petit orillez de plume pesant troys livres
prissé vingt soulz, pour ce ... XX s.
Plus douze linceulx comprins ung viel
qui sert de siel de lict a ung des lictz, prisez l'ung aydant a l'aultre a cing
escuz, pour ce ... XV#.
Item quattre nappes et une plus petitte avecques
deulx serviettes prisés les ungnes aydans a l'aultre cenct soulz, pour ce ... C
s.
Deux desabiliers l'un faict a ouvrages de soye noire et l'aultre de soye
jaulne qui n'est parfaict avecques ung creu blanc le tout prissé asamblement
trante soulz et pour ce .... XXX s..
Une petite corne de serpt garnye de sa
chaygne prissé douze soulz. Pour ce ... XII s.
Pour le regard des bestiaulx
dudit bien et maison de la Crochaye et aultres mestaryes en despendantes, sont
comprins en la ferme des fermiers dudict lieu ; lesdictz bestiaulx ne sont
comprins au présent inventaire et ont esté relassez ausdicts fermiers par
certiffication et prisaige pour les randre à l'issue de leur dite ferme et dont
il y a acte all pied du contract de ferme dont le curateur est saessy, comme
aussy ne sont comprins certains meubles estans encores du logeix dudict lieu de
la Crochaye dont lesdictz fermiers sont jouissantz desdictz meubles, en pareil
cas y a inventaire, de quoy ledict curateur en est, pareil saessy.
Signé : LE
FERRON, DE LAUNAY.
Le 2 juin 1634, FRANÇOIS LADVOCAT, seigneur de la Crochais fils de
Guillaume, sieur de la Crochais, l'Effendaye et la Bonnaye, acquit d'avec Jean
d'Avaugour et Marguerite d'Illiers son épouse, seigneur et dame du Bois de la
Motte, la seigneurie de Saint-Enogat [Note : Vers 1520, la châtellenie de Saint
Enogat fut démembrée de celle de Plancoët et fut elle-même divisée. Le grand
bailliage qui ne comprenait pas moins de 12 fiefs fut acquis par les du Breil de
Rays, de Ploubalay. Quand au reste de la seigneurie on lui conserva le titre de
châtellenie parce qu'il contenait l'emplacement de l'ancien château. (G. de
Corson, Grandes seigneuries de Haute Bretagne)], avec emplacement de
château, droit de châtellenie, colombier, garennes et Haute Justice. (Archives
des Côtes-d'Armor, E 348), François mourut le 5 décembre 1640, et fut inhumé le
7 à Saint-Enogat. Son épouse, dame Françoise du Breil de Rays [Note : Leur
contrat de mariage est du 3 février 1602. (Bibl. Nle,. Col. Duchesne, Ms 70]
l'avait précédé de quelques années dans la tombe, puisque d'après le vicomte P.
de Pontbriand, elle était morte le 16 mars 1636. Des dix enfants nés de leur
mariage, nous citerons seulement François, qui suit.
Mathurin, né le 30 août
1611, sieur de la Lande-Crochais, inhumé à Saint-Enogat, le 17 janvier 1662
[Note : Registres paroissiaux de Saint-Enogat].
Claude, sieur du
Pont-Crochais, qui fonda la branche dite du Pont-Crochais de l'Orme.
Pierre,
né le 14 mai 1619, décédé le 26 mai 1692.
Jean, né le 13 novembre 1621 qui
fut seigneur du Pival et de la Commerière.
Enfin Guillaume, né le 18 mars
1623, sieur de Lanrodel.
FRANÇOIS, héritier principal, épousa à Saint-Loup, damoiselle Perronnelle du Dresnay. Ce mariage valut à ses descendants de recueillir de riches héritages dans le pays breton. Après avoir fait reconnaître le 22 novembre 1668 comme d'ancienne extraction la noblesse de sa famille [Note : De Pontbriand : Un Armorial Breton du XVIIème siècle. Nantes 1881], François Ladvocat, mourut le 20 mai 1673 et fut inhumé le surlendemain dans l'église de Saint-Enogat, dont il était seigneur fondateur. On lui donnait quatre enfants, dont :
JEAN son héritier principal, naquit à Ploubalay, le 8 mai 1647 et fut nommé le 15 septembre 1658, par hauts et puissants Jean d'Acigné et Marguerite Fleuriot de Carnavalet, seigneurs et dame de la Touche à la Vache, en Créhen. Le 28 juillet 1672, il épousa dans la chapelle du château de la Mallerie, sa cousine-germaine Claude du Breil de Rays. Dix enfants au moins naquirent de leur union [Note : Registres paroissiaux de Ploubalay].
Un aveu du 9 juillet 1683 que nous avons entre les mains énumère quelques-unes des terres que ce seigneur possédait dans notre pays : c'était la Crochais, Lanrodel, l'Effendais, La Lande et Pival. Nous savons par ailleurs que les Ladvocat ont possédé à diverses époques à Saint-Lunaire, Saint-Briac et Pleurtuit les fiefs et bailliages des Salines, de Livaudais, des Frétaies, de la Fouaie, de la Ville ès-Brefs, du Violet, de l'hébergement du Grand-Hôtel, de la maison du Val, ainsi que ceux de la Jehannaie, et de la Ville-Pinole (Archives de Loire-Inférieure, B 1274).
Enfin l'abbé Mathurin dans son travail déjà cité sur Dinard, écrit que dès 1676 et sans doute auparavant, les seigneurs de la Crochais étaient en possession comme châtelains de Saint-Enogat du privilège du passage de Dinard. Il ajoute qu'ils y exerçaient en cette qualité tant les droits de haute justice que ceux de trépaz ; (droit sur le passage des personnes), de bouteillage (droits sur le passage et la vente des boissons), et de coutume (droit sur le passage et la vente des marchandises).
Jean Ladvocat de la Crochais jouit de ces privilèges jusqu'en 1679, époque à laquelle Louis XIV, à la suite de nombreux procès et réclamations supprima le droit prohibitif de passage, lequel se trouvait converti en 1707 en une rente de 60 sous payée au seigneur de la Crochais. (Archives des Côtes-d'Armor, E 166).
Jean Ladvocat trouva aussi moyen d'augmenter ses titres honorifiques par suite du contrat d'aliénation partielle à lui consenti par écuyer Pierre Girault, d'une terre sise en Pleurtuit à laquelle était attaché le titre de vicomte de Dinan. La dite terre acquise par Pierre Girault d'avec Hercule François de Boiséon (Archives des Côtes-d'Armor, B 96).
Messire Jean Ladvocat mourut à Dinan le 17 septembre 1714 [Note : Les Archives des Côtes-d'Armor, E 115, possèdent le Minu que rendit son fils à cette occasion]. (Registres paroissiaux de Dinan). Nous possédons un acte du 17 septembre 1728 par lequel RENEE, l'aîné de ses fils, partage noblement ses frères et soeurs : Claude [Note : Claude épousa Marguerite Huet, demoiselle de la Hydrouais et fonda la branche cadette des L. de la Prévôtais, en Corseul, éteinte au milieu du XIXème siècle en la personne d'Eulalie L. (Registres paroissiaux de Dinan)], sieur de la Villeneuve-Crochais ; Jean Guillaume, chevalier de la Crochais ; Jeanne, demoiselle de la Crochais et Marie-Anne, épouse de Julien de la Bouëxière, laquelle décéda âgée de 89 ans le 31 avril 1771. Chacun d'eux reçut une somme de 1.600 livres pour sa part d'héritage, tant du côté paternel que du côté maternel.
Dans un aveu du 7 décembre 1731, messire René Ladvocat s'intitulait chevalier seigneur de la Crochais, la Roche-Huon en Trezelan, vicomte de Dinan et subdélégué de nos seigneurs les Maréchaux de France dans le ressort de Châteaulin. Il mourut le 8 mai 1743 âgé de 68 ans et fut inhumé le 9 dans le choeur de l'église de Saint-Malo. (Registres paroissiaux de Dinan). Guillotin de Corson écrit qu'il était chevalier de Saint-Lazare. (Revue Bretagne et Vendée, fév. 1899).
Du mariage qu'il contracta le 11 mars 1704 avec Jeanne Vincent, lui naquirent au moins quinze enfants (Registres paroissiaux de Ploubalay), dont l'aîné JEAN-CLAUDE-MARIE LADVOCAT, né le 6 décembre 1704, épousa le 29 novembre 1729, Jeanne-Marie Durand de la Penezais, fille du sénéchal de Dinan, Jean-Claude ne jouit pas longtemps de l'héritage paternel, car il mourut sans postérité à la Crochais, le 16 mai 1748 et fut inhumé le surlendemain suivant son désir au portail de l'église de Saint-Enogat. (Registres paroissiaux de Saint-Enogat).
Son second frère FRANÇOIS-XAVIER LADVOCAT, né le 2 février 1711, hérita de tous ses biens [Note : Dans plusieurs actes en notre possession, François-Xavier prend le titre de comte de la Crochais]. Dans un aveu du 20 juillet 1760, il énumère ainsi ses terres du pays breton : seigneur de Trobescont, du Kosquer, de Kerourguy, de la Roche-Huon et de Trevodan-Saliou. L'année d'avant sa mort, François-Xavier figure à Saint-Enogat comme parrain d'une des deux cloches qui furent bénies dans cette paroisse le 9 septembre 1765 (Registres paroissiaux de Saint-Enogat). Quatorze mois après, le 26 décembre 1769, il mourait à Saint-Brieuc laissant cinq enfants encore jeunes, nés du mariage qu'il avait contracté en 1752 avec Marie-Rose Chrétien de Tréveneuc.
IV- Les Ladvocat de la Crochais et la Révolution.
Nous avons vainement essayé de retrouver la destinée de tous les descendants de François-Xavier de la Crochais [Note : Les enfants de François-Xavier ont tous été baptisés à Ploubalay, voici leurs noms : René-Jean, 9 juin 1754, baptisé le 11, mort le 12. - Yves-Jean-Marie, 22 mai 1755. - Françoise-Renée-Céleste, 19 février 1757. - Jean-Marie-Louis, 22 juin 1759. - Charles-René, 16 mai 1762. - Pierre-Marie, 2 juillet 1765]. Dans un opuscule de L. La Roque et d'Ed. de Barthélemy intitulé Catalogue des Gentilshommes de Bretagne qui ont pris part aux Assemblées de la Noblesse de cette province au cours du XVIIIème siècle, nous voyons Jean-Marie Ladvocat ainsi que son frère Charles-René, s'associer à la manifestation de la noblesse bretonne qui refusa d'élire des députés aux Etats Généraux de 1789 pour protester contre les atteintes portées par le pouvoir royal aux libertés et franchises de la province.
La famille de la Crochais émigra un peu plus tard au cours de la Révolution. Elle ne fut cependant pas des premières à franchir la frontière. C'est ainsi qu'une pièce des registres du séquestre dont nous devons la communication à M. Dubois, ancien notaire à Plancoët, établit que Jean-Marie-Louis Ladvocat séjournait encore à Paris, le 26 juillet 1792.
Quelques années plus tard, un acte relevé sur les registres de Jersey par M. de l'Estourbeillon, mentionne la signature de Charles de la Crochais sur un ondoiement en date du 18 février 1797. Nous voyons aussi sa soeur Françoise-Renée-Céleste signer sur un baptême à Jersey, le 15 juillet 1800.
Mais les Ladvocat ne demeurèrent pas toute la Révolution inactifs sur une terre étrangère, ils se mêlèrent de leur mieux à toutes les insurrections de la chouannerie et payèrent largement de leur personne.
C'est ainsi qu'Armand de Châteaubriand signale dans son journal [Note : Armand de Châteaubriand, par M. Herpin, p. 145, Paris, Perrin, 1910] avoir débarqué sur la côte de France, le 22 août 1796, un détachement de treize personnes placées sous le commandement du chevalier de la Crochais.
Un peu auparavant un autre chevalier de la Crochais avait trouvé une fin tragique au service du Roi. Le colonel Toussaint de Pontbriand raconte en effet dans ses Mémoires, que cet officier lieutenant-colonel en même temps que chef de canton et membre du conseil dans la division de Mordelles, se trouvait vers le mois de janvier 1796, au château de Bréquigny, près de Rennes, avec Puisaye et d'autres chefs royalistes, quand le château fut cerné. Puisaye put se sauver, mais la Crochais, de Mouillemuse et Applagniat, furent découverts cachés sous le pont du château et conduits à Rennes où Hoche les fit fusiller.
M. de Pontbriant cite encore à la page 504 de ses Mémoires un autre chevalier de la Crochais qu'il donne comme Colonel d'Etat-Major et membre du Conseil des Divisions de Rennes et de Fougères. Malheureusement M. de Pontbriand ayant négligé de donner les prénoms de tous ces la Crochais, nous ne savons trop avec qui les identifier. Nous serions cependant tentés de prendre le dernier pour Charles-René Ladvocat de la Crochais, que nous retrouverons à Ploubalay sous l'Empire et qui sous la Restauration, prenait le titre de colonel et de chevalier de Saint-Louis.
V- La Crochais vendue comme bien national.
L'émigration des Ladvocat de la Crochais eut pour leurs biens les plus désastreuses conséquences. Il est vrai que s'ils étaient demeurés en France leur vie eut sans doute couru des risques plus redoutables encore. Quoiqu'il en soit, les la Crochais virent leurs propriétés presque entièrement confisquées par les Révolutionnaires. Quelques mots sur la législation alors en vigueur contre les émigrés nous aideront à mieux comprendre la spoliation dont les derniers Ladvocat furent les victimes [Note : Nous avons extrait ces renseignements d'une étude de M. Marion parue dans la Revue des Questions Historiques, tome 86].
Une première loi rendue le 30 mars 1792 frappa de séquestre les biens des Français sortis de leur patrie s'ils n'y étaient rentrés à la date du 9 mai 1792. Cette loi cependant laissait aux femmes et enfants d'émigrés la jouissance provisoire de leurs logements et de leurs meubles. Puis un nouveau décret vint aggraver cette situation en prescrivant que les pères et mères, femmes et enfants d'émigrés seraient consignés dans leurs municipalités respectives dont ils ne pourraient sortir sous peine d'arrestation. Enfin un autre décret du 12 septembre obligea les parents d'émigrés à fournir pour chacun de leurs enfants émigrés l'habillement et la solde de deux hommes, soit une contribution supplémentaire de 916 fr. 60.
Avec le temps la législation devint encore plus draconienne. Une loi du 28 mars 1793 enleva aux ascendants d'émigré toute faculté de disposer de leurs biens, soit en les vendant, soit en les donnant, soit en les hypothéquant. De plus, elle attribua à la République les parts d'héritage qui pouvaient revenir aux émigrés et cela durant une période de cinquante années. Bientôt un décret du 17 frimaire an II, vint frapper de séquestre les biens des parents d'émigrés mineurs et même ceux des parents d'émigrés majeurs, s'ils ne prouvaient qu'ils avaient usé de tout leur pouvoir pour empêcher l'émigration de leurs fils. Puis devant le résultat désastreux de ces diverses mesures pour la fortune publique, le gouvernement se décida le 9 floréal an III (28 Avril 1795) à régler avec les parents d'émigrés la part qu'il s'attribuait dans le partage de leurs biens. On devait ensuite lever le séquestre sur le reste et en laisser la libre jouissance aux propriétaires légitimes. Cette loi fut suspendue le 11 messidor an III, au grand dommage des ascendants d'émigrés contre lesquels elle faisait revivre toutes les dispositions de la loi du 28 mars 1793.
Pour mettre un terme à cette situation intolérable, on vota le 20 floréal an IV, une nouvelle loi qui autorisait à revenir aux dispositions de la loi du 9 floréal an III. Le ministre Ramel avait même recommandé qu'on laissa les ascendants d'émigrés jouir provisoirement d'une portion de leurs revenus égale à celle que le partage semblait leur attribuer. Mais le 18 fructidor mit fin à toutes ces tolérances et les parents d'émigrés n'eurent d'autres alternatives que le partage ou le séquestre ; alors même que le partage fut impossible pour eux par suite de causes indépendantes de leur volonté.
Pour éviter un séquestre qui les réduisait à la misère, les ascendants d'émigrés demandèrent alors avec instance le partage de leurs biens avec la nation.
Une circulaire du ministre Ramel en date du 13 nivôse an VI (2 janvier 1798), vint d'ailleurs faciliter cette opération. Dans les nombreux partages qui suivirent, on observa exactement les prescriptions de la loi du 9 floréal an III. Les parts attribuées aux enfants émigrés étaient désignées par l'administration départementale et réunies au domaine national pour être vendues au profit de l'état.
Marie-Rose Chrétien, la veuve de François-Xavier de la Crochais, n'attendit pas cette dernière circulaire pour demander à liquider sa situation. Nous rapportons ici la réponse qui fut faite par l'administration centrale du département des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor), à ses tentatives pour sauver du naufrage quelques bribes de sa fortune. Cet arrêté est daté du 18 prairial an V (6 juin 1797).
« Vu notre arrêté du 9 pluviôse dernier, portant nomination
d'experts pour asseoir le douaire et les reprises de Marie-Rose Chrétien, veuve
la Crochais, tant sur les acquêts de la communauté que sur les biens invendus de
son mari, en remplacement de ses biens propres aliénés.
Vu le procès-verbal
de prisage et assiette des dits douaires et reprises rapporté les 5-16 germinal
(25 mars au 5 avril) dernier par Jean Briot et Le Cour, experts convenus.
Considérant que la somme de 18.000 livres mentionnée au contrat de mariage de la
pétitionnaire ne doit lui être restituée conformément à notre susdit arrêté du 9
pluviôse, qu'en reconnaissance des liquidations admissibles en paiement de
domaines nationaux.
Que son douaire fixé à 3.000 livres par notre susdit
arrêté, peut être assis sur la terre de la Crochais, en extrayant d'icelle, la
métairie de la Denislais [Note : La Denislais était une maison
noble que l'on trouve possédée en 1476 par noble homme Bertrand Hamon, puis en
1583 par Brillant. Elle fut acquise en 1668 par Guillaume Ladvocat, prêtre, sur
Jean Brillaut, fils François, époux de Louise des Noës. (Archives des
Côtes-d'Armor, E 333)] estimée 840 livres, laquelle appartient en toute
propriété à la République.
Que la reprise de 16.700 livres sur ses propres
biens aliénés peut être assise sur les métairies de la Ville-Gougeon et du
Pontevers [Note : Il faut lire Pont-Aven], en Ploubalay, estimées en
capital la dite somme de 16.700 livres.
L'Administration arrête :
1° Qu'il
sera délivré à Marie-Rose Chrétien, veuve Ladvocat - La Crochais, des
reconnaissances de liquidations admissibles en paiement de domaines nationaux,
pour la somme de 18.000 livres portée en son contrat de mariage ;
2° Que la
terre de la Crochais, à l'exception de la ferme de la Denislais qui appartiendra
à la République, est affectée pour douaire à la dite veuve, à charge de n'en
jouir que comme usurfruitière ;
3° Que les métairies de la Ville-Goujeon et
de Pontaven, en Ploubalay, appartiendront en toute propriété à la citoyenne
veuve la Crochais, pour remplacer la somme de 16.700 livres provenant de la
vente de ses biens propres durant la communauté ».
Malheureusement les industries de Mme de la Crochais demeurèrent finalement inutiles. A sa mort, on vendit comme biens nationaux toutes les propriétés de son mari aussi bien que les siennes propres. Rien n'échappa à la rapacité des hommes de la Révolution. La belle terre de la Crochais fut démembrée et la majeure partie acquise par le représentant d'une compagnie de spéculateurs. Il fallut que les derniers la Crochais rachetassent les propriétés de leurs ancêtres à leur retour de l'émigration l'an 1801.
Ils n'étaient alors plus que deux, une fille Françoise-Céleste dont nous ne savons ce qu'il advint et un garçon Charles-René, né le 16 mai 1762.
Charles-René, colonel en retraite et chevalier de Saint-Louis, veuf de Marie-Anne Beker, mourut à Ploubalay le 27 juin 1822, ne laissant pour tout héritier qu'un fils naturel reconnu, Charles-Marie-Ferdinand Ladvocat [Note : Charles-René Ladvocat n'avait plus au moment de sa mort ni ascendant ni descendant légitime, ni soeur, ni neveu. Il put donc laisser les trois quarts de ses biens à son fils naturel et l'autre quart à sa mère Marie-Hélène Michel, sa femme de confiance, épouse de Vincent Leclerc et autorisée par celui-ci], sous la tutelle de Casimir Colas de La Baronnais et dont nous ignorons les destinées. En tout cas, il ne dut pas hériter de toutes les propriétés de son père, car dès le 4 novembre 1814, Charles Ladvocat, célibataire, avait vendu à Jean-Guillaume Briot de la Mallerie, propriétaire, demeurant en son château de Loyat, arrondissement de Ploërmel, faisant tant pour lui que pour Mme Emmanuelle Le Roux de Coëtando, son épouse, le château de la Crochais, ainsi que les fermes de la Porte de la Crochais, de la Ville-Goujeon, du Pont-Aven, de Lanrodel et de la Lande-Crochais.
La terre de la Crochais, à la mort de M. Jean Briot de la Mallerie, passa entre les mains de son troisième fils M. Cyr-Charles Briot, né en 1803 et filleul de M. Charles-René Ladvocat de la Crochais. M. Cyr-Charles Briot, épousa Mlle Mathilde de la Noë-Coëtpeur et prit le nom de Briot de la Crochais. A sa mort, la Crochais tomba en partage à ses filles Mesdemoiselles Eulalie et Aline Briot de la Crochais. C'est encore cette dernière, châtelaine du Couëdic, en Credin, près de Rohan, Morbihan, qui est vers 1913 propriétaire de cette terre.
APPENDICE.
Morcellement de la terre de la Crochais par la Révolution (Archives des Côtes-d'Armor, série Q).
Les moulins à eau de la Crochais loués 800 livres par an, furent vendus 810.000 livres, le 18 prairial an VII (6 juin 1799), au citoyen Denis faisant pour Julien Martin, de Treméreuc [Note : Les moulins de la Crochais confisqués sur Charles et Jean Ladvocat de la Crochais, rentrèrent dans la main de la Nation par suite de la déchéance du premier acquéreur et furent rachetés le 27 mars 1807, par Charles-René Ladvocat de la Crochais, pour la somme de 7.225 francs. (Dubreuil : Vente des Biens Nationaux dans les Côtes-du-Nord, p. 522)].
La métairie de Lanrodel louée 725 francs par an, fut achetée 6.100 francs, le 8 messidor an VII (26 juin 1799), par Joseph et Louis Mahé, de Ploubalay.
La maison principale, la retenue et les métairies de la Crochais et de l'Effendais, louées 1.450 livres l'an 1785 à Julien Martin, furent vendues 14 050 livres, le 15 vendémiaire an VIII (10 octobre 1799), à François Dhermitte, de Saint-Brieuc, procurateur des administrateurs de la Compagnie Rochefort et faisant en leur nom [Note : La maison principale et la retenue de la Crochais ainsi que les métairies de l'Effendais, de la Lande-Crochais, de la Ville-Goujeon et du Pont-Aven, furent rétrocédées le 20 juillet 1801, à Marie-Franeoise-Céleste Ladvocat de la Crochais, pour la somme de 32.593 fr. 75. (Dubreuil : ouvrage cité p. 544)].
La métairie de la Lande-Crochais, louée 650 francs par an à Mathurin Bedfert, fut achetée à la même date par le même, 6.232 francs.
La métairie de la Denislais louée 800 francs plus 92 livres de charges, à Mathurin Josselin fut achetée à la même date par le même, 8.300 livres.
Les métairies de la Ville-Goujeon et du Pont-Aven estimées valoir 1.150 livres de revenus (le bail n'ayant pu être présenté par la veuve Marie Rouault, fermière), furent achetées à la même date par le même 11.250 livres.
PIÈCES JUSTIFICATIVES.
Description sommaire DU CHATEAU ET DE LA TERRE DE LA
CROCHAIS, LORS DE LEUR MISE EN VENTE EN 1799 [Note : Dubreuil dans la
Vente des Biens Nationaux dans les Côtes-d'Armor estime à 404 journaux
314, l'étendue des propriétés des Ladvocat à Ploubalay].
Inventaire
effectué le 30 messidor an VII (11 juillet 1799).
La maison
principale de la Crochais dévastée et indigente de réparations, contenant 31
mètres 17.44 de long, sur 13 mètres 65.88 de laisse.
La cour au-devant vers
midi, dans les angles oriental et occidental et méridionnal de laquelle sont un
colombier et une chapelle. Le tout couvert en ardoises.
Le jardin principal
contenant un demi hectare, avec un cabinet dans la partie nord d'icelui couvert
en ardoises.
L'ardoiserie ou appartement servant à loger l'ardoise, dans
l'angle occidental méridionnal de la basse cour.
L'ancienne cuisine derrière
l'ancienne maison ci après. Le petit Mail contenant un hectare de terre
plantée de vieilles souches de châteigniers.
Les objets ci-dessus ne faisant
point partie du bail du fermier estimés par les experts 75 livres de revenus
annuels.
Le pavillon situé dans l'angle oriental méridionnal de la
basse-cour, servant de demeure au fermier, contenant 7 mètres 70 de long, sur 8
mètres 44 de large, chambre et grenier au-dessus.
Retraite à porcs, remise à
la suite, étable à brebis et hangard.
L'ancienne maison au nord de la
principale, servant d'écurie, d'étables à vaches, de grange et de cellier,
contenant 20 m. 87 de long, couverte en ardoises, mais aussi très indigente de
réparations.
Cinq autres étables avec semailles à l'occident de la
basse-cour, mesurant 16 mètres 56 de long, couvertes en ardoises, mais très
indigentes de réparations.
Le fournil avec deux autres retraites à l'occident
de la prédite cour, le tout contenant par fond y compris la basse-cour au
milieu, environ un demi hectare.
Le petit jardin contenant 20 ares.
Une
petite chenevière dans lequel il y a un tour de pierre sans moulant.
Deux
enclos, un courtil, une chenevière et la vieille chesnaie plantée de chênes,
âgés d'environ 30 ans, contenant un hectare et demi.
Deux prairies et un
terrain contenant un quart d'hectare plantés de châteigniers, agés d'environ 25
ans, l'avenue de la Crochais plantée de chênes, châtaigniers et hêtres, la
petite pièce du Fresne plantée en hêtres, chênes et ormes, âgés d'environ 22
ans, un petit terrain au bout planté de chênes, châtaigniers et hêtres.
Le
bois taillis de l'Effendais avec beaucoup de baliveaux contenant quatre hectares
et demi. Le grand Mail au midi de la maison principale de la Crochais contenant
un hectare et demi planté de quatre rangs de chênes, âgés d'environ 30 ans.
Le bois de la haute futaye de Taliboinet contenant un hectare ; autre bois de
haute futaye contenant cinq hectares : les deux plantés en chênes, châtaigniers
et hêtres de belle venue. (A. Lemasson).
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