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Cahier de doléances et élections de Plougonven.

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C'est le 29 mars 1789 que le corps politique examina la question du cahier des doléances de la paroisse, qui devait être dressé avant la convocation des Etats Généraux. Ces cahiers de doléances, dans lesquels on croit voir trop souvent l'expression directe et sincère des voeux et, des désirs du peuple, ont généralement été rédigés d'après un modèle uniforme, préparé d'avance et plus ou moins modifié selon les cas, par des hommes de loi, avocats ou procureurs, qui firent réclamer aux cultivateurs des réformes sans portée réelle n'intéressant que la riche bourgeoisie, telle que l'abolition du droit de franc-fief. Plougonven les choses se passèrent ainsi ; il fut décidé que le fabrique en charge et deux délibérants se rendraient le lendemain à Morlaix et consulteraient « tel avocat qu'ils jugeront à propos, qui donnera la forme du procès-verbal de doléance, que l'on suivra ». Ce procès-verbal, pour la teneur duquel on ne semble pas avoir jugé utile de donner aucune instruction aux envoyés, manque fâcheusement au registre.

A la séance du 6 décembre, en réponse à l'appel adressé par le gouvernement aux fabriques du royaume, le corps politique déclare qu'il n'y a dans l'église que l'argenterie nécessaire au service divin. Néanmoins, pour seconder les vues de l'Assemblée nationale, il cédera une croix, un plat d'argent, deux orceaux, un vieux ciboire, une petite custode, une boite à huiles et une salière pour les baptêmes.

L'élection de la première municipalité de Plougonven eut lieu les 4 et 5 février 1790, dans la chapelle de Christ. Cent soixante-quatre électeurs actifs étaient présents. On invoqua d'abord « les lumières de l'Esprit Saint » en chantant le Veni Creator, puis on forma le bureau, composé d'Yves Camus, de Kervézennec, président ; Jean Bourven, notaire royal, secrétaire ; Sulpice Laizet, de Kervoazou, Guillaume Guillou et François Derrien, scrutateurs. Yves Camus fut élu maire par 111 voix.

La journée étant avancée, on remit au lendemain la continuation du scrutin, qui désigna pour officiers municipaux Jean Crassin, du Kermeur, Guillaume Lancien, de Ponthouars, Nicolas Nuz, Guillaume Salaün et Yves L'Hénaff. La charge de procureur de la commune fut attribuée au recteur, Missire François Kerneau. Enfin douze notables choisis par un dernier vote, H. Le Lay, H. Le Saout, F. Larhantec, Guy Le Scanff, du Moulin-Rabat, H. Le Guinezre, E. Le Mat, G. Guillou, G. Corvez père, Y. Le Roux, Y. Corre et S. Laizet composèrent, avec le corps municipal, le conseil général de la commune.

Le 16 février, Maître Jean Bourven est élu greffier et prête serment, ainsi que tous les élus et plusieurs électeurs, au nombre desquels l'abbé Nigeou, curé ou vicaire, le chevalier des Cognets et M. Le Bihan de Kerdréoret. La première réunion de la municipalité se tint le 4 avril à la sacristie, faute de local ad hoc. L'on arrête de faire aménager dans ce but la chambre du clocher, puis, avec une louable méthode de travail, on s'occupe d'élaborer un règlement intérieur. Le conseil se réunira tous les mois, dans la matinée du second lundi. Chaque absence non motivée sera possible d'une amende de 30 sols. Chacun parlera suivant son rang et jamais deux ensemble. Quand on aura parlé, on ne fera ni observation ni réplique. Pendant la délibération, défense de s'entretenir de choses étrangères. Les propos offensants et les disputes seront prohibés.

Les délibérations suivantes ont surtout trait, comme celles de l'ancien Général, à des nominations de fabriques, de porteurs de bannières, de notables, etc... La main-mise de l'Etat sur les biens de l'Eglise se décèle par l'invitation adressée aux payeurs de rentes ecclésiastiques de venir faire leur déclaration. Le traitement du recteur avait été fixé à 1.289 livres 8 sols et celui de son vicaire, M. Nigeou, à 700 livres. Cependant, le clergé rural voyait encore les événements avec un optimisme et une satisfaction que la Constitution civile devait bientôt lui enlever cruellement. Le 16 juillet, M. Kerneau, recteur et procureur de la commune, remontre au conseil général « que les électeurs du district de Morlaix l'ayant honoré de leurs suffrages pour être l'un de leurs administrateurs, il se voit obligé de se démettre de sa charge, à cause de l'incompatibilté » et demande qu'il lui soit nommé un successeur. Il requiert aussi l'établissement des gardes nationales « qui ailleurs ont contribué à opérer la révolution qui fait le sujet de notre admiration et qui sera pour les Français une source féconde de bonheur et de prospérité ».

Sur la démission du digne, mais peu clairvoyant recteur, Sulpice Laizet, du Grand-Gaspern, est nommé procureur de la commune. En septembre 1790, M. Kerneau devint président du Directoire du district de Morlaix, charge à laquelle peu d'ecclésiastiques furent appelés en France. En prenant passession du fauteuil présidentiel, il adressa à ses collègues les paroles suivantes : « La place distinguée dont il vous a plu m'honorer parmi vous est dans mon estime au-dessus de mes faibles talents ; en m'y élevant, vous avez voulu rendre hommage à la religion dont j'ai l'honneur d'être ministre ; quoi qu'il en soit du motif qui a déterminé vos suffrages, j'accepte avec soumission une place qui m'est offerte par la religion ou par la confiance ». C'est sous son inspiration que le District refusa aux autorité départementales de faire signifier à l'évêque de Léon, Mgr. de la Marche, la suppression de son siège épiscopal. L'abbé Kerneau n'assista à aucune autre séance du District, mais les délibérations de celui-ci conservèrent toujours, tant qu'il ne fut pas renouvelé, un caractère de modération et de tolérance tout à l'éloge de ses membres (Chanoine Peyron - Documents, I, 18-19).

Le 14 novembre, les citoyens actifs de Plougonyen se réunissent dans la chapelle de Christ pour renouveler par moitié les officiers municipaux et les notables. Les trois nouveaux membre de la municipalité élus sont Guillaume Salaün, de Keranguen, Guillaume Lancien, de Ponthouars et Guy Le Scanff, du Moulin Rabat. Le 2 janvier 1791, ledit Lancien est nommé juge de paix du canton de Plougonven, qui comprenait, avec cette commune, celles de Plouigneau, Lannéanou, Plourin et Le Cloître. Le maire « prie et même ordonne à tous les citoyens qui forment ce canton de le reconnaître pour leur juge de paix et de lui porter honneur et respect en cette qualité ».

Il est remontré par le procureur de la commune, le 9 janvier, que les paroissiens sont dans l'usage d'amener leurs chiens aux offices divins, « ce qui trouble non seulement les ministres de l'autel, mais même tous ceux qui assistent auxdits offices, pour les entendre hurler, aboyer et même pisser et uriner dans l'église ; de l'autre côté, ces chiens sont à même d'être mordus par d'autres chiens enragés et conséquemment capables de mordre et de blesser les enfants d'un chacun ». A sa réquisition, il est décidé que tout particulier pourra tuer les chiens errants et que ceux qui amèneront leurs chiens à l'église seront frappés de 30 sols d'amende. Mais le conseil remet à plus tard l'exécution de la loi portant suppression des bancs et escabeaux seigneuriaux et des armoiries existant dans l'église, tant sur les murs que sur les vitrages.

Le maire se plaint, le 13 février, des façons d'agir du procureur de la commune, qui s'absente très souvent et ne se donne aucune peine pour soumettre à l'assemblée d'importantes questions sur lesquelles il y a urgence à délibérer. Injonction est faite audit Laizet de se conformer aux décrets, sous peine de supporter personnellement les inconvénients de son inexactitude. Piqué de la remontrance, il déclare aussitôt qu'il est démissionnaire, et qu'on devra lui donner un sucesseur Hervé Guillou est désigné à cet effet.

Le 17 avril a lieu l'installation du curé intrus, François Cotty, ancien vicaire du Guerlesquin, nommé à Plougonven en remplacement de l'abbé Kerneau, qui avait, comme tous les autres recteurs du district de Morlaix [Note : Sauf M. Le Goff, recteur de Plourin, qui avait prêté serment le 6 février 1791, mais se rétracta publiquement le 22 mai suivant et fut remplacé le 18 août par son ancien vicaire M. Piton], refusé le serment d'adhésion à la constitution civile du clergé. Les habitants vénéraient trop leur pasteur pour ne pas regretter, plus ou moins ouvertement, qu'on lui enlevât sa charge, mais s'il y eut des protestations, le registre n'en a point recueilli l'écho. Le jureur fit enregistrer son institution canonique, délivrée à Morlaix le 6 avril par l'évêque Expilly, le procès-verbal de son élection, en date du 28 mars, puis il requit le corps municipal de se rendre à l'église pour recevoir son serment qu'il prononça en langue bretonne. L'administration lui attribuait un traitement provisoire de 2.000 livres, transformé plus tard en une pension de 800 livres.

Le vicaire de M. Kerneau, l'abbé Yves Nigeou, fut également destitué ; il eut comme remplaçant l'abbé Olivier Jacquin, de Loguivy-Plougras, qui s'empressa, après avoir fait une quête dans la paroisse, de l'abandonner pour s'en aller vicaire à Plourin. Le 15 mai, le procureur de la commune dénonce à l'assemblée cette façon d'agir peu délicate, et, requiert « que les particuliers qui ont en dépôt des blés de cette quête aient à les déposer à la municipalité, qui les fera distribuer aux pauvres ». Mais le maire prit sur lui de les délivrer au sieur Jacquin, ce qui provoqua de vives protestations des trois officiers municipaux L'Hénaff, Le Scanff et Nuz. L'abbé Laizet remplit les fonctions de vicaire constitutionnel jusqu'au 15 juillet, puis il céda la place à son confrère Jacquin, qui, après s'être rétracté de son serment, l'avait répété de nouveau à la municipalité de Morlaix le 11 juillet 1791, et fut installé à Plougonven le 15.

L'abbé Kerneau n'avait point quitté la paroisse et continuait d'officier dans l'église. Sa présence, les réflexions qu'il ne se privait sans doute pas d'émettre sur les agissements de celui qui l'avait supplanté, agaçaient fort l'intrus Cotty ; ce dernier en écrivit au département, et sa dénonciation fut confirmée, le 28 juin 1791, par M. Le Dissez, procureur-syndic du district de Morlaix. « Cependant, ajoutait-il, son prédécesseur est l'un des plus modérés de nos curés remplacés, et qui possède le mieux l'art de se comporter en public » (Archives du Finistère, L. 69). Une autre dénonciation, anonyme celle-là, visait l'ancien curé de Saint-Eutrope, l'abbé Houérou. Il avait, paraît-il, « injurié les citoyens de Plouigneau faisant la procession, jeté les Saintes Huiles au feu parce qu'elles étaient sacrées par l'évêque du Finistère, et fait de maison un refuge continuel de réfractaires » (Ch. Peyron. Documents. I. 271). Le 7 juillet, MM. Kerneau et Nigeou furent arrêtés et conduits au couvent des Carmes de Brest, où ils restèrent emprisonnés jusqu'au 27 septembre suivant, avec de nombreux prêtres insermentés du Finistère. L'abbé Houérou semble n'avoir pas été saisi ; il mourut au Minihy Tréguier le 27 décembre 1792.

Entre temps, la municipalité de Plougonven prend diverses mesures inspirées des nouveaux principes ; elle supprime du nombre des fréries, devenues des sections, celles du Duc et de l'Abbaye, en haine des noms féodaux et monastiques : elle fait déposer à son greffe les registres de baptêmes, mariages et sépultures de la paroisse et de la trève de Saint-Eutrope, et dresser l'inventaire des effets de l'église. MM. Riou et Le Mat sont chargés de dépouiller les archives pour établir l'état des biens et revenus de la fabrique. Le 17 juillet, le procureur de la commune demande que l'on continue à dire la messe à la chapelle de Kervézec les dimanches et fêtes, les habitants de ce quartier étant écartés du bourg de cinq quarts de lieue.

A la date du 9 octobre, on trouve la liste des commerçants du bourg assujettis à la patente. On y comptait déjà 6 cabarets ou auberges, dont deux, il est vrai, tenus par Gilette Larchier, femme Rogé, et Joseph Raoul, ne vendaient que du vin. François Boubennec, Jacques Souriman et J. Le Saoût débitaient de l'eau-de-vie et du tabac ; Jérôme cadet de l'eau-de-vie ; Guillaume Le Gravet, du tabac seulement. Par ailleurs il y avait un mercier, un fournier et une marchande de draps, Anne Le Foll, femme du notaire Bourven.

Le 6 novembre, l'adjudication du blanchissage des linges de l'église, de la fourniture du pain à chant et de « l'habillement des autels », est faite à Marie-Anne Briand, cuisinière du curé constitutionnel Cotty, et cautionnée par son maître, pour 24 livres par an. L'intrus réclamant des ornements neufs, le conseil donne mandat à Yves Le Roux, trésorier, d'acheter des étoffes, soieries, livres et fournitures diverses, et de payer les tailleurs et autres ouvriers. Le maire Jean Bourven et l'abbé Cotty sont chargés de garder les clefs des archives de Saint-Eutrope, où se trouvent déposés un calice d'or et sa patène, jusqu'à ce que la place de vicaire de cette chapelle, actuellement vacante, soit remplie.

Le 31 décembre 1791, l'abbé René Kerhervé, précédemment vicaire à Plougonven, est arrêté sur la commune « vêtu d'une manière qui annonce tout au moins l'inconduite d'un ecclésiastique qui s'oublie au point de se ranger dans la classe des vagabonds ». Le district de Morlaix, estimant que sous ce déguisement, il cache « des menées sourdes et contraires à la tranquillité des campagnes », décide qu'il sera de jour à autre transféré à Brest (Ch. Peyron. — Notes manuscrites. Bibliothèque de l'Evêché). Il rejoignit au château de cette ville son recteur M. Kerneau et son confrère M. Nigeou, emprisonnés une seconde fois vers le début de décembre. Au mois d'août 1792, tous trois furent déportés en Espagne.

M. Kerneau était redevable à la commune d'une somme de 1.200 livres pour la réparation du presbytère et des choeurs et cancels des églises de Plougonven et de Saint-Eutrope. Son frère Olivier Kerneau s'étant engagé à effectuer ce payement, la municipalité arrêta d'en consacrer le montant aux réparations de l'église. L'adjudication de ces travaux eut lieu le 9 janvier 1792, dans la chambre de la tour. Quelques articles du devis sont d'une rédaction pittoresque.

« A la chapelle du Rosaire, le plafond sera cloué avec des clous de petit-six sous une teinture bleue de ciel à l'huile, sauf à l'adjudicataire à répondre de la rétable du Rosaire et à la remettre en place sans y causer aucun dommage. — Le grand châssis de la chapelle de Saint-Jean aura une couche de peinture verte, et la retable sera refaite de neuve, en la même forme que la vieille.

Dans la chapelle de Sainte Anne il sera fait une rétable de 4 pieds de quarré ; le châssis de ladite rétable sera bien travaillé en bois de chêne ; dans laditte rétable l'on tirera le poltret de Sainte Anne qui tiendra sur le bras l'himage de Notre Seigneur, et l'on tirera encore un poltret à chaque côté, ainsi et comme l'entrepreneur trouvera convenable. Le châssis sera peint en peinture bleuf de ciel marbré et les grademens (gradins) seront aussi peints de même. La plafonderie de toute l'église sera réparée avec les bois que l'entrepreneur trouvera dans les reliques. L'himage de Sainte Anne sera posée auprès de la rétable, côté du midi, et la corniche au-dessus sera peinte en couleur bleuf de ciel. Enfin, le nom de chaque statut sera sur le siège de chacun d'eux écrit en grosses lettres moulées et dorrées ». L'adjudicataire fut Vincent Le Morin, charpentier, de Kerdavid en Saint-Eutrope. Le même jour, le trésorier est autorisé à acheter une lampe de cuivre, une chape noire, à faire relier les livres liturgiques et à remplacer la vitre du soleil ou ostensoir. Tous ces soins dénotent que la municipalité entendait bien, même sous un nouveau régime hostile aux « calotinocrates », ne pas se désintéresser du bon entretien et de la dignité de son église.

Le 16 janvier 1792, le vicaire Olivier Jacquin passe vicaire à Botsorhel, selon certificat du sieur de Luslac, curé du Guerlesquin. Il fut remplacé le 11 mars par le sieur Jacques, qui devint le 22 septembre curé de Guissény, district de Lesneven. Le sieur Laizet, vicaire au Guerlesquin, revint alors à Plougonven, passa le 1er avril 1793 à la succursale de Plougras, commune de Loguivy, le 7 septembre fut installé vicaire à Cloître-Plourin, et le 23 décembre à Lannéanou. Ces mutations continuelles dans le clergé assermenté ne sont guère un indice de quiétude d'esprit et de sérénité d'âme.

Le 29 janvier 1792, deux commissaires de police sont nommés dans chaque frérie, et le 26 février, le Général de la commune s'assemble à l'effet d'établir au bourg une prison qui sera affermée et entretenue aux frais des contribuables du canton. Le choix des délibérants se fixe sur la Maison Ronde, vieux pavillon en tourelle adossé au cimetière, et appartenant au ci-devant marquis de Tinténiac. On lui demandera de louer cet immeuble au prix actuel, et, s'il refuse, la valeur locative en sera évaluée à dire d'experts. Guillaume Le Parc, charpentier au bourg, est nommé geôlier. Parmi les signataires de cette délibération figure Guillaume Le Lay, député constituant et maire de Lannéanou.

L'ancien système d'impôts ayant été totalement bouleversé, le corps municipal se trouvait fort empêché pour faire l'assiette des nouvelles contributions mobilière et foncière, d'autant que les citoyens fournissaient, de très mauvaise grâce les renseignements indispensables. Il crut trouver un sauveur dans François-Marie Le Teurnier, homme instruit et actif, et le bombarda d'office, le 20 avril, commissaire des contributions. Mais Le Teurnier refuse énergiquement cette charge et ses embarras « pour des raisons aussi solides que péremptoires ». Il habite Plufur, qu'il ne veut pas quitter ; il vient s'y marier ; il ne connaît pas le quart des paroissiens, encore moins leurs facultés ; n'a pas droit de vote à Plougonven, etc... Bref, il laissa la municipalité aussi empêtrée que devant.

Le 21 août 1792, « l'an IV de la Liberté », les municipalités de Plougonven, Lannéanou, Plourin et Le Cloître s'assemblent dans leurs églises respectives pour la levée des hommes qui doivent être nommés ou tomber au sort pour se rendre à Morlaix le 24 et à Brest le 25.

Le 23 septembre, le sieur Toussaint Le Bihan-Goariva, ex-noble, demeurant en son lieu de Goariva, se présente au bureau municipal, déclarant faire sa soumission et vouloir prêter le serment constitutionnel. Il affirme sa déclaration, quoique tardive, sincère et véritable. La nouvelle récente des effroyables massacres de septembre à Paris, ne fut sans doute pas étrangère à ce revirement. Deux autres ex-nobles, MM. René du Parc de Coatrescar et Pierre de Loz de Coëtgourhant habitaient la commune avec leur famille, le premier à Rosampoul, le second à Mezédern, mais on ne voit pas qu'ils aient fait le serment civique, ce qui ne leur attira d'ailleurs aucun ennui sérieux. Plougonven ne compta que deux émigrés, M. Jean-François Le Rouge de Guerdavid, dernier seigneur de Mezédern, et Pierre-Toussaint des Cognets de Correc, époux de Marie-Louise Le Bihan, héritière du manoir de Kerdréoret, auxquels on peut adjoindre le marquis de Tinténiac, qui résidait au château de Brézal, en Plounéventer, mais possédait dans la commune des propriétés considérables. Ces biens, confisqués au profit de l'Etat, et vendus nationalement, comprenaient, avec les deux manoirs de Kerloaguen et de Gaspern, plus de quarante convenants, maisons au bourg, moulins, métairies et bois.

Le 1er novembre, le corps municipal délibère au sujet de la créance qu'il possède sur le recteur déporté, M. Kerneau. Elle s'élève au total à 3.330 livres, et comme on ne peut la recouvrer entièrement, on exige comme garantie la cession du presbytère neuf, occupant la maison de Mon Repos. Il s'agit, au fond, d'installer le curé constitutionnel « en un logement qui le mette à l'abri de l'injure de la saison », et le citoyen Riou, administrateur du district, invite la municipalité à ordonner à Olivier Kerneau, frère de l'ex-recteur, de livrer les clefs de Mon Repos au citoyen prêtre Cotty. Ledit Kerneau, mandé, déclare n'avoir moyen opposant, et promet les clefs dans trois jours, mais les officiers municipaux, peu satisfaits de l'installation de l'intrus chez leur ancien pasteur, refusent tous de signer au procès-verbal.

Le premier registre se termine là, et le second, compris entre les dates du 1er novembre 1792 et du 5 prairial an III (24 mars 1795) a malheureusement disparu, détruit peut-être par ceux-là qui eurent plus tard intérêt à effacer le souvenir de motions violentes et d'actes sacrilèges. La même suppression des délibérations municipales de l'époque de la Terreur se constate à Garlan, Plouégat-Guerrand et autres communes. Mais dans ce qui subsiste à Plougonven, on remarque, à peu d'exceptions prés, une heureuse absence de l'enflure déclamatoire et la réthorique poncive si usitées alors, et qui font aujourd'hui sourire.

M. le chanoine Peyron a noté, dans les papiers du district de Morlaix, une délibération du 7 janvier 1793 concernant la pétition présentée par Marie Le Moine, Louise Laouénan et Marie-Catherine Vacherot, ci-devant Soeurs Blanches se disant de la Charité, résidant au bourg de Plougonven, à l'effet d'exempter de la vente au profit de l'Etat la maison qu'elles occupaient. Un refus formel leur est naturellement opposé, sous prétexte « qu'on ne peut considérer comme hôpital une maison à peine suffisante pour ces 3 femmes, et où elles ne tiennent aucun malade ». Mais voici les vraies raisons : « L'influence qu'ont ces soeurs opiniâtres dans leur costume, leur éloignement des fonctions ecclésiatiques administrées par les prêtres constitutionnels, leur opinion, quoique libre, qui a pour effet de troubler l'esprit des campagnes », tout cela fait un devoir rigoureux au district de rejeter la pétition (Notes mss. Peyron - Archives de l'Evêché). Leur demeure fut acquise, le 7 mai 1793, par l'aubergiste Joseph Raoul.

Le 27 fructidor an II (13 septembre 1794) par ordre du district, le maire Derrien, l'agent national Rogé, et trois officiers municipaux, dressent l'inventaire des effets de l'église. Le trésor contenait une croix d'or ; une Vierge, une lampe, un crucifix, un encensoir, une boite à encens, un bénitoir et, un soleil d'argent ; 26 chandeliers, une croix et 2 bénitoirs en cuivre ; 2 boîtes d'argent pour porter l'Eucharistie aux malades, et 2 boites d'argent pour l'extrême-onction ; un ciboire d'argent avec son couvercle, 5 calices et 6 patènes d'argent. Les ornements, jasubles, chapes, tuniques, etc..., étaient nombreux et variés (Archives du presbytère). Tout ce qu'il y avait de précieux fut sans doute réclamé pour la fonte, car le trésor actuel de l'église ne possède rien d'ancien.

Le magnifique calvaire du cimetière fut abattu pendant la Terreur, en conséquence des ordres vandaliques enjoignant aux municipalités de faire disparaître les croix, « ces restes impurs du fanatisme, qui insultent aux regards des bons citoyens » (Ch. Peyron — Documents, 326 327). Il ne fut relevé qu'en 1810, à la suite d'une délibération municipale constatant « que la démolition de la croix contenant la Passion entière a totalement dégradé le cimetière dont elle faisait l'ornement, et qu'il ne faudrait que de la bonne volonté pour la reconstruire, attendu que la plus grande partie des matériaux et statues se trouvent sur les lieux brisés ». (L. Le Guennec).

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