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Plougonven : ses origines, saint Conven, l'époque féodale et les grands fiefs. |
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Les origines de la paroisse doivent remonter, comme celle de tous les plous voisins, à la grande migration bretonne de 514 à 525, composée de Dumnoni insulaires, qui, chassés de leur patrie par les invasions anglo-normandes, passèrent la Manche et vinrent s'établi, depuis le Couesnon jusqu'à l'Elorn, dans la région continentale à laquelle ils transférèrent le nom de leur pays perdu d'outre-mer, la Domnonée (Note : La Domnonée insulaire n'est autre que la partie du Sud de la Grande-Bretagne appelée Devon par les Anglais et Dyfnaint par les Gallois). Réduits au désespoir, attaqués, massacrés, pillés sans relâche, succombant sous le nombre malgré les héroïques efforts d'Arthur et de Cadwallon, les Bretons fuyaient par clans entiers et traversaient la mer avec leur clergé, leurs moines, les reliques de leurs saints, pour aborder aux rivages d'Armorique alors incultes, sauvages, presques vides d'habitants depuis les horribles ravages des Alains et des Saxons au siècle précédent. Là, chaque bande se tailla un territoire à sa convenance et s'y installa tranquillement, sous l'unique autorité du machtyern, chef de l'émigration, et la direction religieuse des prêtres et des moines qui l'avaient suivie dans son exil.
Plougonven a pour patron primitif un thaumaturge inconnu, Saint Conven, qui fonda probablement l'église et donna son nom au plou (Plebs Conveni). On peut croire que Saint Conven accompagna en Petite Bretagne le clan qu'il édifiait de ses vertus ; qu'il s'établit d'abord au lieu même du débarquement, au fond d'une anse charmante et abritée où existe encore une petite chapelle à lui dédiée, en la paroisse de Plouézoc'h. Puis, comme le fit Saint Guirec, qui abandonna son promontoire de Manathias pour les futaies de la Forêt-Profonde, Saint Conven quitta son ermitage du littoral, remonta la rivière de Morlaix et marcha par une vieille voie gallo-romaine courant au Sud-Est, jusqu'à ce qu'il eut trouvé un canton paisible, abondant en bois et en eaux, ensoleillé et agréable, devant la sévère perspective de l'Arrée. Il fixa là sa demeure, y vécut vénéré et y mourut sans doute, car on ne connaît en Bretagne, aucun autre sanctuaire sous son vocable. Au quatorzième siècle, son culte était déjà tombé au discrédit, et Saint-Yves, canonisé en 1347, le supplanta bientôt après dans le patronage de l'église paroissiale, qui garda pourtant jusqu'à la fin du XVIIIIème siècle un autel de Saint Conven. Dans sa chapelle de Plouézoc'h, il est figuré tête nue, face rasée, vêtu de la robe des cénobites, tenant à la main un livre et un bâton courbé.
Au point de vue féodal, Plougonven faisait partie de la châtellenie ducale de Morlaix-Lanmeur et du fief de Plougastel [Note : Il conviendrait d'écrire étymologiquement Pougastel ; mais la forme en Plou a prévalu et s'est imposée] (Pagus Castelli, ou pays du château), région comprise entre le Queffleut et le Douron, qui constituait au spirituel l'un des trois archidiaconés de l'évêché de Tréguier, et formait une grande seigneurie possédée dès le onzième siècle par la famille de Dinan. Le Plougastel tirait cette appellation, semble-t-il, d'une forteresse gallo-romaine qui couronne un mamelon élevé, près d'Encremer en Plouigneau, et qu'on nomme encore le château de Dinan (Castel-Dinan). Il y a aussi sur le Tromorgant un moulin de Dinan.
Josselin (Gothcelinus) de Dinan contresigne en 1040 la charte de fondation, par la duchesse Berthe, du prieuré de Saint-Georges en Plougasnou, agissant là comme seigneur du fief de Plougastel, dont cette paroisse dépendait. En 1294, Monsour Rolland de Dynam déclare devoir au duc un chevalier de la terre de Poastel (Pou-Hastel ou Plougastel). La maison de Dinan-Montafilant possédait en Plougonven le château de Disquéou, déjà ruiné au moyen-âge, et en Plourin le manoir fortifié de Bodister, résidence habituelle des Dinan, lorqu'ils venaient visiter leurs domaines du Tréguier. Aussi le nom de Bodister prévalut-il dans la suite comme celui de chef-lieu de cette partie du fief.
Jacques de Dinan, chevalier, seigneur de Bodister, dernier de sa race, laissa de son mariage avec Catherine de Rohan une fille unique, née en 1436, qui fut la célèbre Françoise de Dinan. Son magnifique apanage en fit la plus riche damoiselle du duché, mais déchaîna aussi autour d'elle des ambitions sans frein et de féroces convoitises. Veuve à 15 ans du prince Gilles de Bretagne, étouffé en 1451 au château de la Hardouinaye par ordre du duc François Ier son frère, elle épousa en secondes noces Guy de Laval, baron de Vitré. Des Laval, le fief de Bodister a passé par alliance aux familles de Montespédon, de Scépeaux, de Gondy, par acquêt, aux du Parc de Locmaria en 1638, et fut annexé en 1654, par lettres patentes, au marquisat de Guerrand.
Ce fief s'étendait sur presque toute la paroisse de Plougonven, à part les terres dites du Duc et celles de la mouvance de Rosampoul. Les seigneurs de Bodister prenaient le titre de fondateurs de l'église paroissiale, et avaient le droit de placer leurs armoiries dans les lobes les plus élevés du tympan de la maîtresse vitre, ainsi que celui de les mettre en supériorité dans toutes les autres fenêtres.
Des trois grandes seigneuries de la paroisse, Kerloaguen, Garspern et Rosampoul, les deux premières étaient, dit-on, des démembrements de Bodister. Kerloaguen, d'abord possédé par une famille du même nom, a passé par alliance aux Goudelin, Le Cozic, Kersauson et Tinténiac. Le 26 octobre 1643, Messire Vincent du Parc, marquis de Locmaria, vendit, à Yves Le Cozic, seigneur de Kermellec en Plourin, fils aîné du seigneur de Kerloaguen, tous les droits féodaux, terres, rentes, chef rentes, haute, moyenne et basse justice, qui dépendaient de son fief de Bodister en Plougonven. L'acquéreur prit possession le 3 décembre suivant. Noble et discret Messire Charles de la Houssaye, prieur du Ponthou, procureur du marquis de Locmaria, lui transféra la propriété de 12 écussons placés dans la maîtresse vitre de l'église, armoriés du blason des familles de Dinan et de Gondy, de la première arcade du choeur du côté de l'évangile, du banc placé au-dessous et du droit de lisière (bande ornée d'écussons que les fondateurs d'une église pouvaient faire peindre sur les murs extérieurs et intérieurs).
Le seigneur de Kermellec s'agenouilla devant le grand autel, récita « ses prières et oraisons », et fit ensuite célébrer une messe à chant par Missire Hervé Salaün, subcuré, assisté de cinq chapelains. Puis il se rendit dans la chapelle de Saint-Yves, la troisième du côté de l'évangile, dont le vitrail offrait les armes de Dinan et de Chateaubriand en alliance avec celles de Bodister, et se l'appropria de la même façon, ainsi que la chapelle de Christ, le cimetière, où il se promena en jetant de l'eau bénite, enfin 8 maisons du bourg relevant prochement de Bodister. Le lendemain, il termina les formalités requises par la coutume en prenant possession de la juridiction de Bodister en l'auditoire de Morlaix, où les juges du fief, le bailli François Jégou, sieur de Kermorval, et le procureur fiscal Mathurin Cossu, sieur des Aulnais, rendaient la justice aux vassaux. (Archives du Finistère, E.663).
Garspern a également donné son nom à une ancienne famille dont la branche aînée paraît s'être éteinte au XVème siècle. Il appartint ensuite aux Kerloaguen, Carné, Guicaznou et du Parc. Le 8 octobre 1650, Yves du Parc, sieur de Kergadou, échangea son fief de Gaspern, contre celui de Rosampoul et cédé par Yves Le Cozic de Kermellec, qui devint ainsi possesseur de tout ce vaste démembrement de Bodister, et le laissa à ses successeurs, les Kersauson et les Tinténiac.
Rosampoul eut pour premiers seigneurs les Kerloagnen, qui bâtirent en 1442 la chapelle de Saint-Eutrope,et transmirent ce domaine aux Carné, Le Lévyer, du Parc-Kergadou, du Parc-Keryvon, de Crezolles et aujourd'hui Boscal de Réals. J'étudierai par ailleurs d'une façon moins sommaire l'histoire de ces trois seigneuries, ainsi que des autres terres nobles de la paroisse (L. Le Guennec).
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