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Manoir et Seigneurie de Rosampoul en Plougonven. |
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Nous rejoignons la route de Saint-Eutrope près du hameau de Kernivinen, car Vincent Le Borgne, sieur de Kerguidou, avait en 1530 un estage qu'il affermait à Jehan Le Guyriec, puis nous croisons bientôt les avenues du château de Rosampoul, très ancien fief d'une branche cadette de la famille de Kerloaguen, qui surpassa notablement en puissance et en richesse la branche aînée, demeurée assez obscure. Morice de Kerloaguen, seigneur de Rosampoul, était en 1400 président à la Chambre des Comptes de Bretagne, et l'un des conseillers du duc Jean V. De son mariage avec Marguerite Estienne, il laissa Morice de Kerloaguen, chevalier, seigneur de Rosampoul, président aux Comptes après son père, marié vers 1420 à Mademoiselle Louise Beschet, dame de Rybemont, fille du seigneur des Landes en Saintonge. Cette noble dame, très dévote à Saint-Eutrope, patron de son pays natal, et protecteur des hôpitaux, en introduisit le culte dans l'évêché de Tréguier, et lui dédia une chapelle qu'elle fit bâtir en 1442, de concert avec son mari, sur la terre de Rosampoul, en l'enrichissant « de plusieurs belles fondations ».
Jehan de Kerloaguen, leur fils aîné, semble avoir épousé l'héritière de Garspern. Il était en 1465 lieutenant du capitaine de Morlaix, Pierre de Quélennec, et obtint du duc la concession d'une justice à trois poteaux sur sa terre de Rosampoul. Ayant eu « la jambe rompue », il se fait remplacer à la montre de 1481 par son fils Guillaume, sieur de Garspern, lieutenant du capitaine de Morlaix après lui, qui comparaît en équipage d'homme d'armes, avec cinq servants. La femme de ce dernier, Alix de Kermellec, lui apporta les terres et fiefs de Kermellec-Loumenven en Plouénan et Guiclan. Il meurt en 1518, et son fils Pierre de Kerloaguen, seigneur de Rosampoul, Garspern, Kermellec, épouse une opulente héritière cornouaillaise, Louise Le Saux, dame de Pratanros (en Penhars), Coëtcanton, Kerbastard, etc.
Parvenue ainsi à un haut degré de prospérité, la filiation mâle des seigneurs de Rosampoul devait bientôt s'éteindre tragiquement avec Julien de Kerloaguen, chevalier, fils des précédents, assassiné en 1529 par le sieur de Québriac. De son union avec Gilette d'Acigné, il n'avait eu qu'une fille, Adelice de Kerloaguen, que sa mère maria par contrat du 18 juin 1530, à l'âge de cinq ans, à Jérôme, ou Hiérosme de Carné, fils de Marc, sire de Carné, grand-maître d'hôtel héréditaire de Bretagne, gouverneur de Guerrande et Brest, vice-amiral de Bretagne, et de Gillette de Rohan. Ce mariage n'alla point sans résistance de la part de certains parents de la petite penherez, et François Ier dut délivrer le 4 août 1530 une commission aux sénéchaux de Morlaix Léon et Cornouaille pour qu'ils eussent à réprimer sévèrement toute « assemblée de gens, portz d'armes, forces, violences ne voye de faict en quelque manière que ce soict » au sujet des dites contestations.
Hiérôme de Carné hérita les charges et distinctions de son père. Il mourut en 1580, laissant trois fils, René, sire de Carné, époux d'Anne de Rieux, qui continua la branche aînée ; François, sieur de Rosampoul qui suit, et Christophe, sieur de Crémeur, abbé laïque du Relec, blessé au combat de Plestin et mort prisonnier à Coatfrec en 1590. François de Carné de Rosampoul, chevalier de l'ordre du Roi, gouverneur de Brest après son père, épousa Renée de Catelan. Il embrassa avec ardeur la cause de la Sainte-Union des catholiques, « pour ne pas tomber, disait-il, sous la domination de l'hérésie », et fut en Bretagne l'un des plus actifs lieutenants de Mercoeur, pour lequel il défendit avec vaillance le château de Morlaix, assiégé en 1594 par les troupes royales. La rançon considérable à laquelle le taxèrent les vainqueurs ruina sa fortune ; il dut vendre en 1609 la terre de Rosampoul à Jean Le Lévyer, sieur de Kerochiou, conseiller au Parlement de Bretagne en 1588, ardent ligueur comme lui, qui avait fait partie du Parlement de Nantes, et, comme tel, avait été condamné à mort par ses collègues royalistes de Rennes.
Après la pacification, il reprit son siège de magistrat, non sans s'être soumis à une humiliante amende honorable. On le trouve en 1610 présentant à l'évêque de Tréguier Missire Pierre Paul, prêtre, comme gouverneur de Saint Eutrope (Archives du Finistètre 242 G.3). Compromis dans le soulèvement du duc de Vendôme, il fut arrêté nuitamment à Rennes, en 1628, et conduit à la Bastille où il mourut peu après. A cette époque, Rosampoul semble avoir été recouvré par la famille de Carné, mais pour peu de temps, car en 1630 Guy Autret de Missirien la fit saisir judiciairemeint et vendre à François Le Cozic, sieur de Kerloaguen. Par contrat du 8 décembre 1650, ce dernier et le sieur de Kermellec son fils, échangent leur terre de Rosampoul contre celle de Garspern, appartenant à François du Parc, seigneur de Kergadou, conseiller au Parlement de Bretagne en 1634.
Le nouveau châtelain du lieu descendait d'une très antique lignée chevaleresque que ses traditions rattachent aux sires d'Avaugour. Sa branche avait longtemps porté le nom de Le Bervet, en raison d'une clause du contrat de mariage de Tristan du Parc, sieur de la Motte, en Plougonven, fils cadet de Philippe du Parc, seigneur dudit lieu, avec Claudine Le Bervet, en 1405, mais son père Yves Le Bervet, sieur de Kergadou, avait repris le nom de du Parc, avec le consentement du marquis de Locmaria, chef de la famille. François du Parc obtint en 1652 et 1684 des lettres patentes pour l'érection en châtellenie de sa terre de Rosampoul, avec annexion de Creachboss, en Botsorhel, et d'éléments des fiefs de Bodister et Trogoff en Plougonven. Il mourut en 1684 à Morlaix, veuf de sa femme Marie Le Duc de la Biardais.
Leur fils aîné Messire Jean du Parc, chevalier, seigneur châtelain de Rosampoul, conseiller au Parlement de Bretagne en 1673, fournit déclaration en 1683 pour la terre de Rosampoul aux commissaires de la réformation du domaine royal. Le manoir était alors « demy-ruiné », mais sa description laisse apparaître un édifice considérable, avec ses deux pavillons d'angle, sa cour close, son portail surmonté de trois chambres ses jardins en friche, son colombier, son grand étang « où il y a bien du poisson qu'on pesche assez utillement et avec beaucoup de facilité, mais qu'on ne sçaurait garder des frippons qui le pillent journellement ». Après les terres, rentes et cheffrentes, l'acte énumère les droits honorifiques, fondation de l'église de Saint-Eutrope, banc, accoudoir, grand tombeau élevé au milieu du choeur, armoiries dans toutes les vitres, prières nominales, présentation de chapellenies, chapelle du Rosaire à Plougonven, chappelle de Saint-Sauveur dans la cathédrale de Quimper-Corentin, droit de haute justice, patibulaires à trois poteaux, foires à Saint-Eutrope, etc., etc... (Archives du Finistère, E. 633).
Marié en 1693 à dame Péronelle-Angélique de la Villéon, marquise douairière de Coëtlogon, Jean du Parc mourut à Paris, sans postérité, en 1720. Son frère cadet Joseph du Parc, seigneur de Coatrescar, hérita de lui, rendit aveu au Roi de sa succession en 1720 et décéda à Rennes en 1730 sans avoir été marié, laissant pour son héritier principal et noble au paternel un sien neveu, René du Parc, seigneur de Keryvon, conseiller au Parlement de Bretagne, marié en 1730 à Anne-Amadore de Giberne.
Restauré tant bien que mal, le manoir de Rosampoul fut habité de 1690 à 1722 par les de l'Estang de Kerogon, « nobles et honorables personnes ainsi qu'il se voira marqué par leurs signes », écrit le curé de Saint-Eutrope dans la relation d'un acte de mariage de 1699. On les trouve s'alliant aux Carné (vers 1690), aux Morice de Saint-Ange (1695), aux Botloré de Kerbalanec (1695), aux Le Blonsart du Bois de la Roche (1722). Après cette dernière date, ils disparaissent de la trêve.
René du Parc, seigneur de Keryvon, Rosampoul, etc., mourut à Rennes en 1788, sous doyen du Parlement de Bretagne. Lors de l'affaire de la Chalotais, il avait été un des douze magistrats non démissionnaires, et s'était de ce chef attiré de nombreuses inimitiés et force injures dont la plus violente n'était pas ce nom d'Ifs (J... F...) par lequel les ennemis du duc d'Aiguillon désignaient couramment les membres du « Parlement Maupeou ». L'aîné de ses fils, Amateur-Anne, comte du Parc, dernier seigneur de Rosampoul, capitaine du régiment de Condé-Cavalerie en 1766, émigré en 1792, mourut sans alliance à Ettenheim (duché de Bade), en 1794, étant colonel de cavalerie à l'armée de Condé. Son frère cadet Joseph-René, vicomte du Parc, seigneur de Coatrescar, était officier de marine, prit part à la guerre d'indépendance de l'Amérique, en qualité de capitaine des vaisseaux du Roi, et ses services lui valurent„ avec la croix de Saint-Louis, la distinction de l'Ordre de Cincinnatus.
Il quitta le service vers 1790, mais n'émigra point et traversa la période de la Révolution à sa terre de Rosampoul sans y être inquiété sérieusement. Veuf de Marie-Thérèse de Kermenguy, qu'il avait épousée en 1783, il se remaria à Marie-Thérèse Le Pappe et mourut à Rosampoul en 1814, moins de 6 mois après cette fête où il avait salué avec une joie si profonde la restauration du trône séculaire des Bourbons. De son premier mariage, il laissait un fils, M. Florimond du Parc, maire de Plongonven en 1815, mort sans alliance à Morlaix en 1852, après avoir vendu le manoir de Rosampoul à M. de Tromelin.
Le château actuel, élégante construction moderne à tourelles et toitures élancées, a été bâti par la famille de Crezolles, à l'emplacement d'une très modeste maison rurale. Il a passé depuis aux Boscal de Réals, qui l'ont tout récemment aliéné. Il domine à l'ouest un bel étang encadré de futaies. Sur une des pelouses est placée une grande vasque de granit montée sur trois supports cylindriques, qui provient du vieux manoir de Kervenniou, en Plouigneau. (L. Le Guennec).
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