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LE CLERGÉ DE PLOUGUENAST

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Plouguenast était une paroisse à l'alternative, c'est-à-dire que le recteur était nommé alternativement par le St-Siège ou l'Evêque de St-Brieuc. Chacun avait son mois, si la vacance se produisait au cours des mois réservés à ROME, le St-Siège nommait ; si elle survenait pendant les mois de l'Evêque, c'était à lui de disposer du bénéfice.

Les nominations de Rome se faisaient au concours. A cette époque où la séparation n'existait pas, le Recteur était un personnage officiel. Il était d'office membre du Conseil de notables, appelé "le Général" qui était chargé d'administrer la paroisse au temporel. C'était le recteur qui publiait au prône de la Grand'Messe les ordonnances royales et les décisions administratives. Le prône remplaçait le journal officiel et les affiches des mairies, et la sacristie, aux jours de réunion du Général était transformée en maison commune.

Voici la liste des Recteurs de Plouguenast que les registres ont permis de reconstituer : - HENRI LE PARC mourut ou se retira en 1639. Il était problablement de Plouguenast, du moins il y amena sa famille. - GUILLAUME LUCAS (1640-1648), Archidiacre de Penthièvre, théologal, docteur en Théologie, s'en alla à PLERIN puis à MONCONTOUR. Il fit bâtir la sacristie. - JACQUES SYMON (1648-1652), fit ajouter l'aile sud du transept de l'église, appelée chapelle du Saint-Sacrement. - GILLES GOVEL (1652-1667) - ETIENE CORSON (1667-1676), mourut et fut enterré à Plouguenast à l'âge de 45 ans. - J BUSCHOUX (1667-1676), "prêtre très docte et fort homme de bien". - JEAN LEUDUGER (1678-1686), fut nommé recteur n'ayant que trois ans de prêtrise. Fit bâtir l'aile nord du transept dite chapelle St Nicolas. Devint recteur de Moncontour, puis chanoine et scholastique de la cathédrale de St-Brieuc. C'est le plus célèbre de nos anciens recteurs. - LOUIS BAULT (1686-1691), resta à Plouguenast chez son frère et successeur. - PHILIPPE BAULT (1691-1740) ; - J. BAPT. LOHIER (1740-1773) ; - PELLAN (1773-1786) ; - CHAPELAIN (1786-1792), fut exilé à Jersey et Londres. Après la Révolution, il fut nommé en 1802 recteur d'HILLION, Il y mourut en 1812. Si nous en croyons une lettre de Philippe BAULT où il parle de sa moisson, nous devons en conclure que le presbytère avait une petite exploitation.

Parmi ces recteurs celui qui marqua le plus profondément son passage fut JEAN LEUDUGER. Il était né à PLERIN en 1649. ll n'avait donc que 29 ans quand il arriva à Plouguenast. Son premier souci en prenant la charge de la paroisse, nous disent ses biographes, qui exagèrent quelquefois un peu dans leur ardeur à le louer, fut d'organiser la charité. " Mr LEUDUGER pour consolider le bien qu'il avait déjà fait et l'augmenter encore forma, au bout de quelque temps, dans le bourg de Plouguenast, une petite communauté de filles pauvres et pieuses qui se dévouaient entièrement à l'instruction des enfants et au soulagement du prochain. Cet établissement produisit de bons effets. La paroisse renfermait alors un assez grand nombre de maisons nobles : mais en général ils montraient de l'insensibilité à l'égard des pauvres. Par ses discours et ses exemples, le charitable pasteur leur inspira des sentiments plus chrétiens et les pauvres furent secourus ". En formant ce groupe de filles dévouées, il préludait à la fondation de le Congrégation du St-Esprit qu'il devait entreprendre quelques années plus tard. De sa charité, on raconte les deux traits suivants : " Un jour, en visitant les lieux les plus retirés de la paroisse, il trouva dans un sorte de hutte, comme on en voit sur le bord des landes, ou sur la lisière des bois, une famille de mendiants, composée de quatre ou cinq personnes. La maladie avait visité ces malheureux et les avait retenus dans leur cabane, de sorte qu'ils étaient là étendus sur de la fougère transformée en fumier, pourrissant dans la fange, la misère et la souffrance. Le charitable prêtre à cette vue, ne peut retenir ses larmes : il nettoya de ses propres mains ce bouge infect et s'armant d'une faucille, il alla lui-même dans les champs voisins couper du blé et de la paille, pour faire à ces misérables une couche friche, et il ne les abandonna plus qu'il ne les vit guéris et dans un sort aisé ".

"Une autre fois, il se cacha dans un chemin creux pour tirer sa chemise et en revêtir un pauvre".

"Tout était distribué en aumônes : revenus de son bénéfice, produit des oblations et quêtes, blé, pain, vêtement ; souvent, il donnait les mets servis sur sa table, si un malheureux se présentait au moment du repas".

Sa mère qui était venue habiter avec lui le blâmait de tant de générosité. C'était aussi un grand missionnaire, élule de Michel Le Nobletz et du Père Maunoir. Nous remarquons par les registres qu'il faisait de longues absences en dehors de sa paroisse. C'était qu'il travaillait à une mission. Lui-même invitait des prédicateurs étrangers à Plouguenast pour le carême et l'Avent. "Jean LEUDUGER fut un modèle de pasteur qu'on ne trouvait qu'à l'église, dans sa bibliothèque, au foyer des pauvres et au chevet des malades".

Les archives de Saint-Brieuc conservent une lettre d'un autre recteur Philippe BAULT invitant les Pères de Montfort de SAINT-LAURENT SUR SEVRES (Vendée) à venir prêcher une mission à Plouguenast. Elle vaut d'être transcrite. Elle est de 1732.

" Monsieur, après vous avoir souhaité une bonne et heureuse année, quoique je n'ayes pas l'honneur d'être connu de vous, ny celuy de vous connaître que de réputation ; Je m'addresse avec confiance à vous, pour vous supplier de vouloir bien me donner dans ma paroisse, une mission cette année avec tous vos confrères, que je salue respectueusement : Scavoir si vous pourver donner au moins 5 semaines, car la moisson est abondante et à peu d'ouvrier, il y a dans la paroisse trois mil communiants sans parler des enfants que je réserveroy à ce temps pour leur première communion, ny des habitants des paroisses circonvoisines qui sont très peuplées, je trouveray des confesseurs à votre secours, nous sommes déjà dix de cette paroisse, où il n'y a point eu de mission depuis 21 ans. Je trouve des Supérieurs de retraites et missions qui ne peuvent me donner que quinze jours francs à la Trinité prochaine, ou vingt cinq dans le mois d'août. 15 jours, c'est trop peu, ce n'est que troubler l'eau de la rivière sans prendre le poisson, le mois d'août mes paroissiens sont occupés à faire leur récolte, d'autant plus que je la fayray moi-même. Pour la mission je seray ravis qu'elle soit parfaite pour donner cette joie au ciel et cette douleur à l'enfer. Mgr l'Évêque de St.-Brieuc vous agréra volontier : la longueur du chemin mettra peut-être obstacle à mes souhaits ; Mais ne craignez point je vous enverrai chercher et conduire, il y a icy un coup de fillet à faire, marqués moi au plus tôt, si vous pouvez me venir dans le commencement du Caresme, ou la Pentecoste ou St Jean prochain, et vous obligerez sensiblement celuy qui désire avec ardeur vous avoir chez luy et qui est et sera toujours avec le respect le plus parfait et le plus sincère, Mr, votre humble serviteur ". Rr de Plouguenast.

Nous ne savons si cette mission eut lieu.

Le recteur était toujours assisté de deux curés. Cette fonction fut souvent remplie par des prêtres de Plouguenast. Les ressources du chef de la paroisse étaient constituées par la dime, le casuel, les Fondations et le tiers des dons en nature que recevait l'église. Le temporel de l'église était administré par le Général de la paroisse qui tenait lieu de conseil paroissial.

Ce Général comprenait : - Le procureur fiscal de la Seigneurie dont dépendait la paroisse. (chez nous, ce fut longtemps PALLIER, sénéchal du Pontgamp). - Douze membres choisis parmi les anciens trésoriers. - Deux trésoriers en exercice, appelés trésoriers de fabrique ou marguilliers. - Le recteur.

Le budget de la paroisse se composait : - Des biens immeubles légués, en fondation, par la générosité des fidèles, pour lesquels on devait des messes ou des services. Comme biens d'église nous trouvons chez nous au XVIIIème siècle la métairie de Glégan, la métairie de la Rochette, une maison à deux étages au Bourg, une pièce de terre et une portion de prés de la Ville Gour, le champ de moulin, le pré de la chenaye. - La location des bancs et chaises qui se faisait à la criée. - La concession des tombes dans l'église ou le cimetière. - le casuel, ou part de la fabrique dans le casuel. - Les quêtes, dons, offrandes, telles que lin, blé, beurre, volailles que les fidèles déposaient devant une statue et qui étaient vendus par les trésoriers après la grand'messe.

Le Général payait le personnel de l'église : chantres, prédicateurs, organistes, enfants de chœur, sacristains, bedeaux. Il pourvoyait à l'entretien du culte.

Voici une délibération du Général de 1766, 21 décembre, concernant les droits de la fabrique, pour les bâptèmes, enterrements, les bancs d'église et les moyens de pourvoir à la sûreté du coffre-fort.

" Le Général assemblé au nombre de 12 plus les anciens trésoriers, ce sont : Jean LABBE, Pierre MEUNIER, Jacques ROCHARD, Vincent LAMANDE, Jean DIEULESAINT, le sieur Louis VIET, Rolland AMICEL, François RAULT, Jean MARTIN, Pierre HENRY, le sieur Pacifique VIET de la Ville Hamon et Pierre VISDELOUP. Jean Labbé préside en qualité d'ancien.

Délibérant sur les remontrances et représentations faites de la part des sieurs Yves GALERNE et Pierre ANDRE, trésoriers en charge, au sujet du revenu de la fabrique, et de l'argent que des voleurs ont tentés d'enlever, il y a quelques jours de cette église.

1°) Enterrement et services : La fabrique fournira exclusivement les cierges qui seront demandés, sans que les particuliers puissent les fournir eux-mêmes, étant privés par là d'un revenu qui lui appartient. Les particuliers pourront demander des cierges de cire blanches ou jaune.
- 4 sols pour la cire blanche pour une grand'messe,
- 3 sols pour la cire blanche s'il n'y a pas grand'messe.
- 3 sols pour la cire jaune s'il y a
grand'messe,
- 2 sols sans grand'messe, et ce par enterrement et service.
Les cierges qui brulent pour les services qui se font le dimanche seront éteints pendant le prône et les vêpres qu'on dit après la grand'messe.

2°) Pour les bâptemes : les trésoriers achèteront 2 flambeaux de cire blanche de moyenne grosseur, et sera pavé pour chacun d'iceux cinq sols, et ils seront éteints sitôt le bâptème fini. Dans la sacristie, si on ne demande que des cierges, on paiera pour chacun d'eux, 2 sols pour les blancs, un sol six deniers pour les jaunes. On pourra les jours d'enterrement et grands services et autres faire allumer les dits flambeaux depuis le Sanctus pusqu'au Pater pour cinq sols.

3°) Au sujet des amessures, il sera payé 1 sol pour cierge blanc, six deniers pair cierge jaune.

4°) Pour les blancs : ceux qui ont des titres payeront comme avant mais devront les exhiber le dimanche en quinze. Ceux qui n'ont pas de titres payeront annuellement par pieds, 10 sols, si les bancs sont au-dessus des premiers piliers de la nef vers le chœur, 8 sols au dessous.

5°) Les cloches pour les enterrements, baptèmes, services, 10 sols pour chacun si elles sont sonnées d'en haut, cinq sols pour ceux sonnés d'en bas.

6°) Pour la croix d'argent et encensoir, 10 sols par enterrement. La croix sera portée chez le défunt à son décès, 2 sols pour chaque service, 3 sols pour l'encensoir d'argent.

7°) On ne paiera rien pour le droit de terrage, sauf ceux qui ont des tombes, six pieds sur deux, ils payeront 20 sols par an.

8°) Il sera fait un coffre-fort pour l'argent de fabrique, qu'on a deux fois tenté de voler, dont trois clés, une pour le Recteur, une pour le procureur fiscal, une pour les trésoriers en charge. Le Général prie Mr de la Ville Hamon de vouloir bien garder le coffre-fort jusqu'à ce qu'on travaille aux réparations de l'église, c'est-à-dire au printemps prochain ".

DE PALLIER Greffier.

Ainsi, le Général se chargeait effectivement de toutes les questions matérielles concernant le culte. C'était un gros souci enlevé au clergé qui n'avait qu'à le conseiller et le diriger.

A côté du Recteur et de ses vicaires, il y avait nombre de prêtres habitués, c'est-à-dire vivant dans la paroisse au milieu de leur famille, leur vie durant ou en attendant un bénéfice. Ils desservaient les chapelles remplaçaient le pasteur absent ou malade et formaient la chorale autour du lutrin pour la grand'messe du dimanche.

J'ai essayé de relever tous leurs noms de 1631 à 1789. A partir de 1632, nous trouvons : - Messires Jacques MOISAN ou MOUESAN DE BAURY; - Julien URVOY ; - Vincent MOY, mort en 1648 ; - Mathurin MOY de la Ville Gigno ; - Rolland LESTURGEON ; - Michel LESTURGEON de la Ville Bertho, mort en 1648 ; - Antoine MOUESSAN mon à 78 ans en 1665 ; - Pierre URVOY de la Haute Poulie mort à 66 ans en 1655 ; - Geffroy LE NOUVEL de Lalesplace ; - Juline HENRY en 1641 ; - Gilles GORVET ; - Henri BUSCHOUX, curé de la paroisse ; - Jacques BUSCHOUX du Pontgamp ; - François LE NOUVEL mort en 1681 à 60 ans ; - Guillaume BUSCHOUX ; - Pierre LE NOUVEL ; François LE NOUVEL de Lalesplace ordonné en 1680 ; - RADENAC des Touchettes, ordonné en 1680, devint recteur de MEUDON ; - Vincent GORVET de la Ville Méno ; - J. DARTAISCHE en 1695 ; - Michel RUELLO ; - Gilles GORVET, devint curé du GOURAY où Julien Gorvet était recteur.

Vers 1720, nous trouvons : Messires Rolland AMICEL de Maillot ; - GORVEL des Ardillets ; - Jean-François PIVERT ; - Jean MAHE ; - BERTHELOT ; - PALLIER, Curé en 1723 ; - François JAN en 1731 ; - LE CORRE, frère du procureur de la Longraie, vraisemblablement ; - LEBEL en 1740 ; - HUGUE ; - Louis THOMAS mort en 1740 ; - M. THOMAS ; - Autre THOMAS de l'Hotel-neuf ; - Louis PENHARD ; - Pierre JOUNY, de la Dente ou de Boutteville ; - Juline GORVEL ordonné en 1743 ; - LE NOUVEL.

Après 1780 : Rolland et Guillaume HUGUE de la Ville Chauvel ; - Mathurin LAMANDE de la Ville Talou ordonné vers 1779 ; - François GICQUEL de la Vallée ; - Jean RUELLO et François THOMAS, tous deux curés, ce dernier de Broussardel ; - Yves LOUALE de la Touche qui devait tomber sous les balles révolutionnaires. A citer aussi THOMAS François LE SAVOUROUX du Pontgamp qui était professeur de philosophie au collège de St-Brieuc en 1789.

Comme on peut le constater, beaucoup de ces prêtres portent le même nom. Ils étaient évidemment de la même famille, les neveux succédaient aux oncles, on se transmettait le calice de générations en générations.

Comment, tous ces clercs faisaient-ils leurs études ?

Elles aussi se firent longtemps en famille. A St-Brieuc, la première ébauche de Séminaire, dont la création avait été ordonnée par le Concile de Trente en 1545, ne fut fondée que sous l'épiscopat de Mgr DENIS DE LA BARDE, en 1667.

Sans doute le collège de St-Brieuc, tenu par des prêtres séculiers existait dès avant 1620. On y enseignait les belles-lettres et la philosophie, on y adjoignit même bientôt un régent de théologie, mais il est peu probable que le grand nombre de nos compatriotes du XVIIème siècle au moins, y soient venus.

Voici plutôt comment ils étaient encore généralement formés : Quand un enfant ou un jeune homme, manifestait le désir et des dispositions pour les ordres, il se mettait à l'école soit du Recteur, soit d'un prêtre de la paroisse. Celui-ci lui enseignait ce que lui-même avait appris de semblable façon, après la lecture et l'écriture, la grammaire, le latin. A mesure qu'il grandissait, il l'initiait aux Saintes Ecritures, aux Pères de l'Eglise, au Psautier, au chant, à la Liturgie. Quand il était jugé suffisamment préparé, il allait, muni de tous les témoignages requis, de bonne conduite et de science, près de l'évêque solliciter les Ordres Sacrés.

En 1667 Mgr DENIS DE LA BARDE, une des plus belles figures d'évêque qui soient passé sur le siège de St-Brieuc, créa, non pas encore un séminaire, mais les Exercices des ordinands. Tous les clercs aspirant aux Ordres devaient venir faire près de lui, une sorte de longue retraite. La direction de ces exercices fut confiée aux Pères Lazaristes. Ils ce faisaient dans un local, appelé la grande grenouillère, situé où se trouve aujourd'hui l'hôtel des Postes, tandis que le Collège, appelé l'hôtel du Paradis, était dans l'emplacement de la gendarmerie. Le nom de grande grenouillère venait de ce que la maison était entouré de marais où coassaient les grenouilles. Bientôt les Exercices des ordinands se prolongèrent plusieurs mois. Aux exercices de piété on joignit des études de théologie morale et dogmatique, le commentaire des Ecritures, l'initiation aux Cérémonies. Bref, ce fut un véritable Séminaire moderne entre la piété et l'étude.

Une fois ordonnés nos jeunes prêtres revenaient à Plouguenast, chantaient, comme maintenant, une première grande messe solennelle, adressaient la parole à leurs compatriotes puis ils restaient dans leur famille, s'ils avaient les moyens d'y vivre, tout en aidant le recteur, sinon ils sollicitaient une place de recteur ou de curé, ou la gagnaient au concours.

(Abbé Ange Lucas).

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