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PILLAGE DU CHATEAU DE MÉZARNOU EN 1594. |
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Yves du Liscouët, sieur du Bois de la Roche près de Guingamp, fut au temps de la Ligue, dans notre province, l’un des principaux chefs du parti huguenot. Catholique de naissance, il avait apostasie pour se marier, « aimant mieux, le misérable (dit un historien de ce temps), faire banqueroute à Dieu et à son salut qu'au beau nez d’une femme ». Il était fort brave, d'ailleurs, mais il ternit sa bravoure par des actes de brigandages qu'eût avoués l’affreux bandit La Fontenelle, son contemporain. L'un de ses plus odieux exploits fut le pillage du manoir de Mézarnou, en la paroisse de Plounéventer [Note : Auj. département du Finistère, arrondissement de Morlaix, canton de Landivisiau], au mois d'août 1594, dont, au reste, il profita bien peu de temps, étant mort assez misérablement trois mois après (en novembre 1594) au fameux siège de Crozon. Le naïf et pittoresque chroniqueur de cet âge malheureux raconte brièvement cette infâme trahison au chapitre XXXI de son Histoire de la Ligue, M. Le Men, archiviste du département du Finistère, vient de retrouver dans le dépôt confié à ses soins, une pièce des plus intéressantes, qui, tout en confirmant le récit de Moreau quant au principal de l’événement, en modifie plusieurs circonstances et y en ajoute beaucoup d'autres. — C'est une requête présentée en 1603 aux juges de Quintin par le sieur de Mézarnou, pour obtenir d'être indemnisé de ses pertes par la veuve de du Liscouët. La partie la plus curieuse de cette pièce est peut-être l’inventaire du trésor et mobilier de Mézarnou (art. XVIII), estimé 70,0000 écus, soit environ un million et demi, valeur actuelle. Et pourtant le sieur de Mézarnou n’était point au rang des premiers seigneurs bretons. Cela seul montre comme la richesse abondait en Bretagne avant les guerres de la Ligue.
REQUÊTE DU SEIGNEUR DE MÉZARNOU.
En la cour de Quintin soustient et propose noble et puissant messire Hervé Percevaux, seigneur de Mézarnou, la Pallue, Pascouët, Tihaudy, etc., envers noble et puissante Philippe de Maridor, dame douairière de Liscouët, tant en son nom que comme curatrice de noble et puissant Benjamin du Liscouët, son fils, seigneur dudit lieu, deffendeur, les faits et chacun cy-aprés :
Et premier, qu'il est à entendre que les maisons de Mézarnoul, la Pallue, Pascouët et autres maisons appartenant audit demandeur, ne sont pas maisons fortes ny qu'il y ait été fortiffié, aussi qu'il n'y a fossés autour d'icelles, ausquelles il n'y a eu jamais garnisons entrenues ny connues qui s'y soient retirez pour faire la guerre, ains maisons de plaisir ausquelles il y a seulement étendues de jardins, vergiers, étangs et remparts d'étendue de logis, jeux de palmail, paulme, carrières et autres exercices et décorations de maisons.
II. — Que, au temps des derniers troubles en ce royaume, ez deux ou trois ans précédens l’an 1594 et jusqu'au mois de juillet audit an, les sujets du Roy habitans en l'évesché de Léon firent un traité avec le seigneur de Sourdéac, lieutenant pour Sa Majesté au bas pays, au moyen duquel et de certaine somme de deniers, qu'ils payèrent annuellement tant au Roy que audit soigneur de Sourdéac, ils devoient vivre en toutte assurance, sans pouvoir estre prins prisonniers de guerre, ravaigés, ny souffrir aucuns actes d’hostilité, et continuèrent en ceste seureté publique sous la faveur dudict traité, même ledict sieur de Mézarnoul, jusqu'au mois de juillet que ledict de Sourdéac fit entendre ausdits habitans avoir commandement du Roy de les avertir qu'ils s'en fussent entièrement et absolument réduits en l'obéissance de Sa Majesté.
III. — Et pour les y convier, fit ledict seigneur de Sourdéac bannir qu’il bailloit un certain temps, qui finissoit à deux heures après midy au premier jour d'aoust ensuirant, pendant lequel temps étoit tout acte d'hostililé deffendu ; de sorte que plusieurs se réduirent et firent le serment de fidélité au Roy entre les mains des officiers royaux des juridictions dudict évesché, commis à ladicte fin.
IV. — Et pour davantage protester de sa fidélité (et) submission au service de Sa Majesté et en assurer particulièrement ledict seigneur de Sourdéac. ledit demandeur délibéra de l'aller trouver au château de Brest.
V. — Mais d'autant que ledict seigneur de Sourdéac imposoit quelques dures conditions aux gentilshommes qui l’alloient trouver pour être receus au service de Sa Majesté et vivre seuremeut en leurs maisons, et outre, crainte d’estre recherché de la rébellion passée, ledict demandeur s'avisa de prier ledict feu sieur de Liscouët, son amy, et aussy intime amy dudict seigneur de Sourdéac, et qui de longue main avoit protesté une fidelle amitié audict demandeur, de l’assister pour aller trouver et salluer ledict seigneur de Sourdéac au château de Brest.
VI. — A cette fin, le demandeur écrivit une lettre missive audict feu sieur de Liscouët, qui estoit lors en garnison en ladicte ville de Landerneau, pour le prier de luy donner jour pour faire ledict voiaige, et parce que les soldats des troupes du party contraire, pour cause de ladicte réduction généralle desdicts habitants de l'évesché de Léon en l’obéissance de Sa Majeslé, prenoient des prisonniers, ravageoient des maisons et coummettoient plusieurs actes d'hostliité audict évesché, ledict demandeur, par même missive, prioit ledict deffunt de luy envoyer un passeport, lequel, pour réponse, récrivit audict demandeur qu'il l'assisteroit fort volontiers audict voyaige et luy envoya aussy un passeport et sauvegarde d'avec ledict seigneur de Sourdéac et un autre de luy-même, avec un homme exprès pour luy demander des commoditez pour se rafraîchir, ce que le demandeur luy envoya abondamment, comme il avoit fait souvent auparavant; et sous la faveur des passeports, plusieurs gentilshommes se trouvèrent audict manoir de Mézarnoul, pour devoir aller, en la compagnie dudict demandeur, avec ledict sieur de Liscouët trouver ledict seigneur de Sourdéac.
VII. — Que ledict deffunt sieur de Liscouët feignant vouloir assurer et garantir ledict demandeur de toutte occasion de mal et de cruauté, luy envoya, sçavoir, après le vendredy, pénultième dudict mois de juillet, deux de ses gens d'armes pour luy servir, néantmoins les susdicts passeports, sauvegardes et assurance, en sa maison de sauvegarde, attendant aller en toutte seureté trouver de compagnie ledict seigneur de Sourdéac.
VIII. — Et le lendemain, jour de samedy, dernier dudict mois de juillet, ledict sieur demaudeur étant aller trouver ledict sieur de Liscouët en la ville de Landerneau, et après s'estre saluez les uns les autres, beu et mangé ensemble, sur ce que ledict sieur demandeur vouloit aller ledict jour à Brest trouver ledict seigneur de Sourdéac, ledict sieur du Liscouët luy dit qu'il n'étoit de besoin et qu'il pouvoit s'assurer sur ses parolles, passeport et lettres missives luy envoyées et serment par luy fait, dont il avoit eu advis, et que le lendemain il fût allé disner avec ledict, sieur demandeur en sondict manoir de Mézarnoul, pour incontinent après partir de compagnie pour aller audict Brest en toutte seureté, comme dit est ; mais il n'y alla que pour faire le dict ravaige, comme il sera fait mention cy-après.
IX. — Que ledict jour de lendemain, dimanche, premier jour d’aoust audict an 1594, ledict seigneur du Liscouët manda par un autre de ses gens d’armes qu'il ne pouvoit aller disner, le suppliant de l’excuser, mais que sans faute il y fût allé souper, lequel gendarme demeura aussi audict manoir de Mézarnoul, attendant l’arrivée dudict sieur du Liscouët, qui n'attendoit autre chose sinon que les deux heures de l’aprés-midy dudict jour fassent passées pour exécuter son dessein, comme l’événement le fit après connoître.
X. — Car incontinent après, ledict sieur de Mézarnoul, accompagné de cinq ou six montez à cheval alla audevant dudict sieur de Liscouët jusques près ladicte ville de Landerneau, où il ne manqua s'y trouver ledict sieur de Liscouët, qui ne manqua aussy à se trouver luy troisième, et de compagnie arrivèrent audict manoir de Mézarnou, heure de souper, et après son arrivée, après s'estre saluez l'un et l'autre, dit au sieur demandeur que toutes ses affaires se portoient bien, et que d'effet il pouvoit aller luy-même en toutte seureté trouver ledict seigneur de Sourdéac qui ne demandoit autre chose de luy sinon qu'il eût, en vertu de ses dicts passeports, sauvegardes et autres assurances, juré le serment de fidélilé entre les mains de M. Ruynier, conseiller du Roy au siège présidial de Quimper-Corantin, exerceant par commission de la Cour la justice à Brest, de tout quoy après ledict sieur demandeur l'auroit remercié, luy dit que sans faute il fut allé le lendemain audict Brest faire ledict serment néantmoins le précédent par luy fait entre les mains dudict seigneur de Ruynier, puisque la volonté dudict seigneur de Sourdéac étoit telle, et que par soy-même il luy eût présenté le salut afin de recevoir ses commandements, pour satisfaire tant au devoir dudict serment que service que ledict demandeur doibt à Sa Majesté ; et les propos susdicts finis es présences de divers hommes, se mirent à table pour souper.
XI. — Et comme ils estoient à table, trois des gens d'armes dudict sieur de Liscouët vindrent et entrèrent en la salle, où estant entrez dirent tout haut audict sieur de Liscouët qu'ils estoient venus le trouver pour luy donner quelque avertissement.
XII. — Et incontinent l'issue de souper, arrivèrent trois autres gendarmes dudict seigneur de Liscouët, lesquels luy dirent comme les précédents qu'ils étoient venus, et en diligence expresse, le trouver pour luy donner second avertissement comme l’ennemy estoit sur le point de donner en sa garnison. A quoy répondant, ledict sieur de Liscouët dit que ses gens estoient suffisants pour repousser l’ennemy, et sous le prétexte de ces avertissements fit ainsi couller ses gendarmes, armez de leurs cuirasses, portans épées, poignards et pistolets pour exécuter leur dessein.
XIII. — Et comme ils étoient hors de table, sur le point de s'aller coucher, après plusieurs caresses d'une feinte amitié, ledit sieur du Liscouët, prenant ledit sieur demandeur par le poing, qui n'avoit aucunes armes deffensives, espérant, comme il devoit estre, en seureté comme l’un des serviteurs du Roy, luy dit ces mots tirant son épée hors le fourreau, de laquelle il frappa ledit sieur demandeur : « J'ai charge de monsieur de Sourdéac de vous prendre prisonnier de guerre et vous rendre à Brest ». Et incontinent luy et ses gendarmes se rendirent maistres en ladite maison et enfermèrent le demandeur, avec les gentilshommes cy dessus mentionnez et autres ses domestiques, dans une chambre basse qui est au bout de la salle dudit manoir de Mézarnoul, où étant ainsi enfermez fut tiré deux coups de pistollets, et après s'estre informé qui avoit tiré lesdits pistollets, on luy dit que c'étoit les gendarmes dudit sieur de Liscouët qui avoient tué deux hommes dudit demandeur..., et non comptant de ce [ajoute la Requête après avoir mentionné d'odieuses violences exercées contre des femmes réfugiées à Mézarnou], ledit sieur de Liscouët jeta les enfants dudit demandeur, agez de deux à trois ans, hors la cour dudit manoir.
XIV. — Et ce fait, s'élant saisy des armes et clefs de la maison dudit sieur demandeur, ledit sieur du Liscouët alla trouver ledit demandeur en la chambre basse où il l’avoit enfermé, de laquelle il le fit sortir, et l'ayant amené en la salle joignant ladite chambre, luy demanda la clef de son cabinet, et sans attendre réponse mist la main dans la manche du pourpoint dudit sieur demandeur, de laquelle il prist la bourse à laquelle estoit attachée ladite clef avec lesdits passeports et sauvegardes dudit seigneur de Sourdéac et de luy, que ledit du Liscouët luy avoit envoyés, et à l'instant fit rentrer ledit demandeur dans ladite chambre basse avec lesdits passeports, et au lieu de garder état aux susdits passeports, lettres missives, promesses, assurances et sauvegardes, tant de luy que dudit seigneur de Sourdéac, usant d'une grande lâcheté, luy et ses gens ravaigèrent, pillèrent et emportèrent, bruslèrent et brisèrent tous les biens appartenans audit demandeur, qui seront en partye cy après spécifiez, outre ceux qui estoient apartenans à plusieurs et diverses personnes du quartier qui les y avoient portez pour les conserver, jusques à emporter les croix, calices et autres ornements des églises paroichialles de Plouneventer, Lanneufret, Plouédern que du tref de Tremaouézan, servans ausdites églises pour y faire les services divins, qui étoient d'une grande et inestimable valeur.
XV. — Que le lendemain lundy, 2ème jour dudit mois, ledit demandeur fut mené, rendu comme prisonnier de guerre, par les gendarmes dudit sieur de Liscouët, qui estoient enflez et creuz du nombre et la survenue de pluyes (?) qui vindrent comme à la foulle tout de nuit dudit Landerneau audit manoir de Mézarnou, ayant le mot du guet de leurdit maître et capitaine de se donner audit ravaige, et après avoir esté présenté audit sieur de Sourdéac, fut mené en une basse fosse, où il n'y avoit que toute obscurité, ne voyant la plus grand part du temps ciel ny terre, où il fut cruellement traité par l’espace de six mois ou environ, jusques à ce que, par force, par les mauvais traitemens et menaces que l’on luy faisoit journellement, il fut contrainct, pour se rédimer de ceste dure captivité, promettre payer, néanmoins estre serviteur du Roy, la somme de neuf mil cinq cens écus, qu'il auroit payée audit château de Brest parce qu'on luy faisoit dire qu'il n'en sortiroit jamais, sinon en payant ladite somme, sans luy dire pour quelle cause ne sans avoir égard à la commisération d'un homme dépouillé de tout son bien, si mieux n'aimoit bailler la plus belle desdites maisons qu'il ayt, entr'autres sa maison et seigneurie de la Pallue avec ses forests vives, franchises, apartenances et dépendances.
XVI. — A quoy ne voulant consentir, auroit esté laditte forest endommagée par les gens dudit sieur de Sourdéac ; en somme, de plus de six mil écus.
XVII. — Que pour parvenir au payement d'une si grosse et excessive rançon, ledit demandeur, dénué de tous ses biens, meubles, bagues, joyaux, auroit été contrainct vendre et engager la plus grande part de ses héritages, tant à cause de pure et simple vente que à terme de racquit, lequel passé n'a peû ny sceû faire lesdits racquits, outre les deniers qu'il auroit prins de plusieurs marchands à intérêts qui ne sont encore payez, pour satisfaire à telles inhumanitez : occasion que sa rançon seule et dépens de sa prison luy porte perte et ruyne jusqu'à présent de dix-huit à vingt mil écus, sans comprendre la perte de ses obligations, cédules, actes, contracts, garants, lettres et enseignemens concernant le fait de ses maisons, tant dudit Mézarnoul et Pascouët, La Pallue, Tihaudy, que autres seigneuriales maisons luy apartenant, livres et études de ses prédécesseurs, outre la perte de tous ses meubles tant précieux que autres, ainsi qu'en partye seront, à la sçavance et connoissance dudit demandeur, cy après spécifîez de la forme que ensuilt : auquel butin et ravaige furent les gens et soldars dudit sieur du Liscouët quinze jours entiers, outre l'espace de six semaines qu'ils auroient tenu garnison audit manoir de Mézarnoul, pendant lequel temps ils auroient bruslé et brisé, comme dit est, tant les meubles de bois qu’ils ne pouvoient déplacer que portes et fenêtres dudit manoir, encore que ladite maison ne soit maison forte, ne icelle avoir esté fortifiée, ains maison parterre et [de] plaisir, en laquelle il n’y a jamais eu garnison, sinon ledit défunt sieur du Liscouët qui l’a occupée pour violenter le pays.
XVIII — El premier, ce que ledit sieur de Mézarnoul a
perdu et luy a esté prins et volé lors de sa prinse :
Six vingt coupes et
tasses d'argent doré, faites en chapeau de cardinal, autre partye à l'antique
façon, les autres façon de Paris, partyes couvertes et non couvertes,
jusqu'au nombre de quatre-vingt-six coupes, et le reste tasses d'argent.
Plus, deux coupes d'or massif.
Item, une éguière d'or massif, qui avoit environ une coudée de hauteur.
Plus, deux chaisnes d’or pezantes huit cens écus chacune et plus.
Item, les liz de testes d'or et d'argent, pierres précieuses, bagues et joyaux, qui apartenoient tant à ses défuntes mère et compaigne que à son épouse d'à présent.
Une éguière ayant environ demie coudée de hauteur, faite à écailles d'or massif, laquelle était couverte.
Quatorze autres éguières d'argent doré.
Six douzaines de vaisselle d'argent pour servir la cuisine, six autres douzaines pour servir le dessert.
Six saunières d'argent doré, et autres six saunières d'argent non doré.
Deux flacons d'argent avec leurs chaisnes aussy d'argent.
Quatre douzaines d'assiettes aussy d'argent.
Demie douzaine de brasières d'argent.
Une douzaine de grands chandeliers d'argent.
Une douzaine d'écuelles d'argent.
Deux douzaines de cuillères d'argent.
Six vinaigriers d'argent pour servir vinaigre sur la table.
Quatre grands bassins pour servir à laver, qui estoient si pezans que c'estoit le faix d'un homme sur ses bras, chacun desdits bassins.
Six autres bassins d'argent pour même sujet, de moindre pesanteur que les précédens.
Deux calices avec leurs platènes d'or massif.
Plus, une croix où la représentation en figure estoit de nostre Sauveur et Rédempteur Jésus-Christ, laquelle croix et dite figure estoient d'or massif.
Six petits orceux à mettre vin et eau pour servir à la messe, avec les autres ornements, comme chapes, chasubles, tuniques et estolles jusqu'au nombre de demie douzaine de chacune sorte, partye desquelles chapes, chasubles, tuniques et estolles estoient de drap d'or et d'argent, les autres de battures figurez où estoient, en broderie de fil d'or el d’argent, tant la figure de nostre Sauveur et Rédempteur Jésus-Christ que écussons auxquels estoient les armoiries et alliances du demandeur et de ses prédécesseurs, avec quatre grands chandeliers d'argent, et autres ornements de lingerie servant ordinairement aux chapelles des maisons dudit demandeur.
Plus, tous les habits tant dudit sieur demandeur que à défuntes demoiselles sa mère et compaigne que épouse d’à présent, valans dix mil écus et plus.
Plus, la garniture de lits à faire chambres, tant audit manoir de Mézarnoul que de La Pallue et Pascouët ; en chacune desquelles chambres il y avoit deux lits de tours de ciel, couvertures, courtines et contenances tant de velours que de soye avec les franges - crespes de fil d'or et d'argent de plusieurs et diverses couleurs, parementez et enrichies de plusieurs vers et dictons, avec les écussons et armoiries, tant dudit sieur demandenr que de ses prédécesseurs, raportez et tirez à point d'éguille en fil d’or et d’argent et de diverses couleurs de fil de soye, avec leurs tapis autrement deshabillières de même étoffe.
Plus, les garnitures de tours de lits complets pour dix chambres, partye desquels estaient faites à point d'éguille en fil de soye de diverses couleurs, et autres partyes de fil de laine et de serge de Caën avec leurs franges crespes.
Plus de la tapisserie pour garnir et tapisser tant les salles que chambres desdites maisons de Mézarnoul, Pascouët et La Pallue, tirée à personnaiges représentans diverses histoires avec plusieurs vers et dictons.
Trente douzaines de linceuils de fine toile, contenant chacun linceuil cinq laizes, chacune laize contenant deux aulnes de longueur.
Une douzaine de linceulx de raiseul, contenant chacun linceuil cinq aulnes et pareille laize de longueur.
Dix douzaines de linceulx de réparation, contenant chacun linceuil quatre aulnes.
Une douzaine et demie de souilles d'orilliers ouvraigez, et six douzaines de souilles d'orilliers de fine toile non ouvraigez.
Six vingt couettes de plumes de duvet, avec leurs traversières et deux orilliers et traversin à chacune couette.
Deux cens quarante couverture de lits, tant de fines Cathelonnes que drap de Londres.
Trente douzaines de nappes de fines toile de lin, contenant chacune nappes quatre aulnes et demie, et soixante douzaines de serviettes de mesme toile, avec quatre douzaines de nappes de fil de réparation, pour servir à la cuisine et quatre douzaines de serviettes de mesme toile.
Plus quarante douzaines de plats d'étaing, vingt douzaines d’assiettes, six douzaines d'écuelles à oreilles, deux douzaines de grands saucières, deux douzaines de saucières, une douzaine de pots à anses appelez cocquemarts, quatre douzaines de pots contenant les uns environ deux potz et les autres trois potées, quatre douzaines d’autres pots, deux douzaines de pintes, une douzaine et demie de flacons et vingt pots pour servir à la chambre, le tout d’étaing.
Trois douzaines de grands chandeliers de cuivre servans aux chambres ; une autre douzaine de chandeliers d'estain avec une douraine et demie d'autres chandeliers moyens aussy de cuivre.
Plus, une douzaine de saunières de cuivre en grands personnaiges, et fayances pour mettre aux cheminées tant des salles que chambres desdites maisons pour servir de parades en icelles.
Quatre douzaines tant chaudières, poilles, grands bassins que chaudrons, avec demie douzaine de marmites, le tout d'airain.
Item une douzaine et demie de marmittes et pots, avec une douzaine de poilles à queue et demie douzaine de brasières, le tout de fer.
Plus une douzaine et demie d'autres brasières, tant de letton que de fer, avec les ustansilles des cuisines, tant dudit manoir de Mézarnoul, Pascouët que de la Pallue, comme trépiers, broches, landiers, pasles, fourchettes que cramaillières et autres ustansilles de fer servant ausdites cuisines.
Cinq tonneaux de vin de Gascoigne et deux de vin d’Anjou.
Six ou sept tonneaux de froment, dix ou douze de seigle, quinze d'avoine, et environ quatre tonneaux tant d'orge que bled noir, avec trois ou quatre cens chapons et soixante et quinze coqs et poules d'Inde.
Huit beufs et sept pourceaux gras sous le sel en ses charniers.
Demie douzaine de grands bœufs pour engraisser, avec dix-huit vaches à lait et quinze ou seize toreaux que génisses.
Item, vingt-huit grands chevaux, tous de service, hors quatre poulains de deux et trois ans, qui estoient au foin et à l'avoine aux écuries dudit demandeur, avec leurs harnois et équipages dont le moindre fort desdits poulains valoit deux cens ecus ; avec, six chevaux hongres servant à la charrue, huit cavales avec leurs poulains de lait, el deux grands chevaux appelez étallons.
Plus, demie douzaine de pantz de rez servans à la chasse pour prendre loups et sangliers, contenant chacun d'eux six et sept vingts pas, avec une demie douzaine de charettes ferrées.
Item, quinze paires d'armes toutes complettes, quarante arquebuzes de Milan à mèches, vingt autres arquebuzes de chasse à rouët, vingt mousquets engravez et dorez, quinze pistollets, et deux douzaines d'épées et coutelas.
Quatre-vingt-cinq livres de poudre à canon de Rennes, et deux cens livres de pouldre de Flandres.
Trois pièces de fonte verte montées ; deux douzaines de verges avec leurs bouettes ; une douzaine et demie de fauconneaux de fonte verte, avec deux cens balles de fer pour lesdites pièces de fonte verte.
Plus, les livres et études tant de son ayeul, président en la Cour, que de trois de ses oncles qui avoient esté en leur vivant gens de justice et de robe longue.
Item, trois horloges sonnantes, l'une au portail, l'autre à la chapelle, et la dernière au manoir de Mézarnoul.
Deux douzaines de chaires garnies de cuir et deux douzaines de petits tabourets couverts et garnis de laine.
Trois grands (balius?) façon de Flandres, à pièces de rapports, et dix-huit coffres tant bahus que autres grands et petits, les uns de même façon de Flandres et les autres façon de Rouen.
XIX. — Quels biens et meubles cy dessus specifiez et raportez d'article en autre, sans comprendre ladite rançon, ledit sieur demandeur estime valoir la somme de soixante et dix mille écus, sans comprendre une infinité d’autres meubles et richesses qui estoient au manoir de Mézarnoul, lequel lors dudit ravaige estoit notoirement censé et reputé abonder autant que nul autre manoir de Bretaigne en toutes sortes de richesses et précieux meubles, et desquelz il est impossible au demandeur de faire mention et article par le menu, et néanmoins le vérifira cy après.
XX. — Ces faits vrays et notoires au cartier et iceux connus et veriffiez à suffire, conclud ledit demandeur à ce que ladite défendeur (sic) soit condamnée payer ladite somme de soixante et dix mille ecus audessus (sic, audésir ?) et suivant l’édit du Roy pour lesdites causes, ensemble le resaissir desdites lettres papiers et obligations et enseignements, si mieux ladite defendeur n’aime restituer au demandeur toutes et chacunes les espèces de meubles mentionnez et raportez d'article en autre au présent libellé non deteriorées, ou leur juste valleur et despens, mises, dommaiges et intérêts tant soufferts que à souffrir en cas d’insuffisance contraire.
Fait le premier jour de mars mil six cent trois.
(Pris sur l'original, étant aux Archives départementales du Finistère).
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