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LA PRINCESSE MARGUERITE. — LE XVIIème SIÈCLE. — PÉRIODE DE CALME EN BRETAGNE. — FONDATIONS RELIGIEUSES A JOSSELIN. — LA DÉVOTION A NOTRE-DAME DU RONCIER. — LES ROHAN-CHABOT.

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L'héritage entier d'Henri de Rohan fut longtemps et vivement contesté à sa fille Marguerite. Le plus grave reproche que put lui faire sa mère, fut son mariage avec un gentilhomme d'un rang, sinon moins honorable, du moins inférieur quelque peu au sien et avec un catholique. Assister au transfert de l'illustre nom de Rohan sur la tête d'un gentil-homme qui n'était ni prince, ni pair ; et voir passer des biens immenses [Note : Marguerite de Rohan était princesse de Rohan, de Fontenay et de Léon, comtesse de Porhoët, dame de Blain, etc. (cette dernière terre ne fut élevée au marquisat qu'en 1660). Elle avait successivement refusé trois princes souverains] aux mains d'un rival politique, c'en était trop ! L'année même du mariage de Marguerite avec Henry Chabot, seigneur de Saint-Aulaire (1645), Marguerite de Béthune présenta soudainement au monde un fils, nommé Tancrède, né en 1630, qu'elle avait caché depuis ce temps, par crainte, disait-elle, que Richelieu le lui enlevât. Elle put le reconnaître dans les formes légales, d'autant plus facilement qu'Henri II était mort depuis sept ans. Celui-ci, sa vie durant, n'avait jamais considéré sa fille que comme l'unique héritière de son nom et de sa fortune. Sa femme s'était tenue loin de lui pendant toute la période de son absence à l'étranger, et la légèreté de caractère de Marguerite de Béthune était notoire.

Le roi Louis XIV n'ajouta pas foi un instant à ses protestations. Il appuya Marguerite de Rohan de toute son autorité en confirmant son contrat de mariage, dans lequel il était stipulé qu'elle apportait à son époux la communauté de tous ses biens et de tous ses titres à la condition expresse que les enfants qui naîtraient porteraient le nom et les armes des Rohan. Des lettres patentes furent délivrées le 19 septembre 1646, homologuant la transmission des biens et des titres ainsi que la condition relative au nom et aux armes. Et comme la pairie s'éteignait par la mort, sans enfant mâle du titulaire, de nouvelles lettres d'érection intervinrent en 1648, rétablissant le duché-pairie de Rohan en faveur de l'époux de la comtesse de Porhoët. Tancrède mourut aux armées l'année suivante : avec lui prit fin la légende de sa naissance, mais non les jalousies de la branche Rohan-Guemené contre celle de Rohan-Chabot.

Maintenant que nous venons de fixer sur Henri Chabot et ses descendants l'héritage du Porhoët, voyons quelle fut la physionomie du pays au XVIIème siècle.

A Josselin d'abord, ce fut un retour à la foi, un élan de piété admirable, véritable réaction qui succède habituellement à la persécution.

Ce mouvement se manifesta par plusieurs fondations pieuses. La Ville, d'elle-même, appelle les Carmes, qui s'y établissent le 10 avril 1625. Le nombre des religieux était fixé à six, et la maison, définitivement établie dans le haut de la ville, au raubourg Saint-Martin, près de ce qui est aujourd'hui la promenade, relevait du couvent de Saint-Pol de Léon [Note : En 1627, les religieux font acquisition à Isabeau Rolland, dame des Clos, pour leur installation provisoire, d'une maison avec cour et jardin, appelée la maison du Chapeau Rouge, et d'une autre appelée la maison Hervo ou de la Rivière, « situées au faubourg Saint-Martin, dans le fief temporel du prieuré dudit Saint-Martin, noble et discret Messire Alain Bonin (de la Villebouquais) lors titulaire dudit prieuré ». Deux ans plus tard, se préoccupant de la construction d'une chapelle et d'un couvent définitif, après avoir obtenu de la communauté de ville, la cession de la moitié de ses octrois sur le vin et le cidre pendant neuf ans, ils abandonnent à Guillemette de Saint-Pern, dame de la Villebouquais et de Penmené, leurs maisons du Chapeau Rouge et de Hervo, contre les maisons et les terres de la Carrière, contenant quatre journaux trois quarts. C'est dans cette propriété de la Carrière que, le 5 août 1640, on posa, au milieu d'un grand concours de fidèles, la première pierre de l'église et du couvent. Voici l'inscription que portait cette pierre : L'an du salut 1640, le 5 août, siégeant le pape Urbain VIII, régnant le roi Louis XIII, cette première pierre a été bénite et posée par l’illustrissime Achille de Harlay de Sancy, évêque de Saint-Malo, abbé de Saint-Méen, conseiller du roi, en présence de noble homme Jean de Nourquer du Camper, sénéchal du comté de Porhoët, représentant la très excellente princesse Marguerite, duchesse de Rohan, princesse de Léon, comtesse de Porhoët, lequel, au nom de la ville de Josselin, posa cette pierre avec ledit évêque, pour édifier l'église et le monastère des Frères Carmes réformés de la province de Tours, sous le titre et l'invocation de saint Joachim, père de la glorieuse Vierge Marie ; présent aussi et consentant, noble Alain Bonin, recteur-prieur de Saint-Martin, avec le concours de nobles hommes Jacques Moro, alloué ; Jean Farault, lieutenant ; Yves Gatechair, procureur fiscal ; Yves Touzé, procureur syndic ; grâce à la munificence des habitants de Josselin (Le MENÉ, Bulletin de la Société Polymathique du Morbihan). L'église qu'on y construisit était fort simple (en 1670, elle avait deux chapelles prohibitives, l'une réservée à Marguerite de Rohan, l'autre à Alain Bonin de la Villebouquais) et la maison ne pouvait guère contenir qu'une dizaine de religieux. Le couvent fut approuvé par lettres patentes du roi Louis XIV, le 8 septembre 1655. Les Bonin de la Villebouquais, que nous voyons revenir maintes fois dans les annales de Josselin aux XVIIème et XVIIIème siècles, habitaient la seigneurie de Tregranteur et Josselin même. Ils avaient qualité de juveigneurs de Porhoët et droit d'enfeu à Notre-Dame]. Leur mission principale était de s'occuper d’exercices pieux et de prêcher dans les paroisses environnantes.

Plus tard, une sainte fille des Ursulines de Dinan, Hélène Mingart, n'a qu'à manifester la pensée d'installer dans sa ville natale une communauté de son ordre, pour qu'aussitôt elle en obtienne le consentement (1639). Malheureusement, l'agrément de la suzeraine, Marguerite de Rohan, encore mineure, fut plus long à obtenir ; il fallut attendre jusqu'en 1646 pour envoyer de Dinan les cinq religieuses chargées de la création. Elles s'établirent non loin des Carmes et sur la même paroisse [Note : Elles descendirent d'abord dans une maison qui servait d'hospice aux Carmes, située vis-à-vis l'une des portes de la ville, dans le faubourg Saint-Martin ; puis les bases du nouveau monastère furent jetées à l'est de la maison appelée le Chapeau Rouge, et au nord de la promenade actuelle. L'église fut dédiée à Notre-Dame sous le titre de l'Ave Maria. Le tout, avec un jardin situé au nord, formait un enclos respectable (LE MENÉ, Bulletin delà Société Polymathique du Morbihan). L'importance du monastère grandit rapidement. Des lettres royales furent enregistrées au Parlement de Rennes en 1639].

En 1677, c'est dame Suzanne du Guémadeuc, ancienne prieure de Locmaria en Plumelec, qui installe, à la sortie du faubourg Saint-Nicolas, un prieuré de l'Ordre de Saint-Benoit, connu depuis, sous le nom d'établissement du Mont Cassin. La très illustre princesse, Madame Marguerite, duchesse de Rohan, à titre de comtesse de Porhoët, appose sa signature à l'acte de fondation et autorise par là dame du Guémadeuc à « faire édiffier et construire ladite église et le couvent à ses frais et dépans »,
« au lieu proche la ville et le faubourg Saint-Nicolas, nommé Longueraye, acquis depuis peu par Messire Sébastien du Guémadeuc, conseiller du roi, seigneur évêque de Saint-Malo, abbé de Saint-Jean des Prés et de la Noë ». Le nom du Longueraye fut changé en celui du Mont Cassin du Guémadeuc, et le roi donna son approbation. Ce prieuré fut érigé en abbaye en 1682. Le monastère comprenait église, maison, cours, jardins, etc. (Le Mené, Bulletin de la Société Polymathique du Morbihan).

Trois abbesses se succédèrent de 1682 à 1739 : Suzanne du Guémadeuc, la fondatrice, sœur de l'évêque de Saint-Malo ; Eléonore du Guémadeuc, nièce de celle-ci, et Thérèse de Faramus. Le titre abbatial fut supprimé en 1739 et la maison devint simple prieuré comme à l'origine.

Des prédicateurs étrangers se firent entendre du haut de la chaire ; un de ceux-ci organisa à Sainte-Croix (1637) une confrérie du Rosaire à laquelle s'inscrivirent des frères et des sœurs en grand nombre.

Il n'est donc pas extraordinaire que, pour accroître la vitalité d'une foi si intense, la Vierge, déléguée par la Providence, ait daigné se révéler à Josselin, dans la plénitude de ses grâces ; elle fit des prodiges. Aux cris de repentir et d'amour, elle répondit par des effets tangibles : des miracles.

La dévotion à l'image sainte, découverte jadis dans un buisson épineux, devint de plus en plus florissante. Tout le Porhoët vint chaque année se jeter à ses pieds. Une procession, d'une pompe solennelle, avait lieu le mardi de la Pentecôte. Voici, d'après Ogée, en quels termes la décrit le Carme Irenée de Jésus-Maria, qui écrit en 1666 : « Marchaient d'abord six compagnies de bourgeois et habitants de la ville et des faubourgs, commandées par un gentilhomme. Puis une compagnie de deux ou trois cents Léonnais, demeurant à Josselin, pour apprendre le français et faire le commerce. Ils étaient vêtus de bleu, bonnet sur la tête, galant sur l'oreille, avec leur chupanne et leurs grandes chausses à la Suisse, l'épée au côté et la hallebarde en main, commandés par un bourgeois. Entre les compagnies de Josselinais et celles de ces bas-bretons, un homme coiffé, vêtu et armé à la turque, rendait ses hommages à celle qui, suivant l'expression de l'auteur, est aussi bien la dame de l’empire Ottoman que de l'empire Chrétien. Venait ensuite une troupe de vierges innocentes, dont plusieurs choisies parmi les pensionnaires des Ursulines. D'autres filles représentaient les trois Marie ; une autre, la princesse Ursule, couverte d'un manteau royal à franges d'argent, accompagnée de deux petits anges faisant l’office de pages, et suivie de ses onze mille filles d'honneur. Celle qui la représentait, dit le bon Père, en conduisait à la vérité beaucoup moins (onze probablement). Le clergé régulier et séculier (entre autres les curés des quatre paroisses), le corps de justice, une bande nombreuse de pèlerins de Saint-Jacques, relevaient encore l'éclat de cette procession qui s'avançait majestueusement au concert des tambours, des trompettes, des violons, des bombardes, des musettes de Poitou, et recevaient en chemin plusieurs salves de mousqueterie. Quatre prêtres, revêtus d'aubes et de dalmatiques, portaient l'image de Notre-Dame sur un brancard richement orné ; elle était accompagnée de quatre filles parées qui tenaient des cierges blancs à la main. Il y avait des assistants des neuf évêchés de Bretagne et même des extra-provinciaires. Comme une grande partie des cinquante-deux paroisses [Note : Dans ces cinquante-deux étaient comprises celles de la châtellenie de la Chèze qui, l'auteur ne semble pas s'en douter, faisaient alors partie du duché de Rohan] du comté de Porhoët accourait avec empressement à cette grave et joyeuse solennité, l'on y comptait trente à quarante bannières, outre plusieurs membres de diverses confréries portant des torches vertes, jaunes et rouges, chacune de dix-huit pieds de hauteur et du poids de cent livres » [Note : Au XVIIème siècle, il n'est pas encore question d'aboyeuses. Elles ne font leur apparition qu'en 1727, suivant un procès-verbal régulièrement rédigé. Trois enfants du bourg de Camors furent les premiers atteints de ce mal. Depuis cette époque, il y eut à Josselin des aboyeuses presque sans interruption. La science n'a su se prononcer sur le caractère de cette étrange maladie qui survient inopinément et dont les crises s'apaisent au contact des reliques de la Vierge].

Les papes attachèrent des indulgences à cette admirable dévotion ; le peuple et les seigneurs enrichirent le sanctuaire d'objets d'art remarquables. Citons entre autres un calice que le même Carme regarde comme un don royal, de Louis XIII probablement. « Il est massif, d'argent doré, pèse dix-huit marcs, a quatorze pouces de hauteur, un pied et demi de circonférence et contient plus d'un pot de roi. Le nœud est très artistement travaillé. Les images du Sauveur et des douze apôtres y sont tellement finies qu'on les distingue facilement les unes des autres, avec l'instrument de leur martyre, dans leurs niches séparées, avec leurs chapiteaux. La patène a trois pieds de tour. On remarque au milieu l'image de Notre-Seigneur et de la Vierge, et autour celle des quatre évangélistes. L'empreinte des armes, sous le pied du calice, fait présumer que c'est le vœu d'un de nos rois ».

Voici encore un objet de grande valeur, offert par les nobles bourgeois et les habitants de la ville ; c'est une croix en argent. « Elle a deux branches comme toutes les autres croix de cette église ; son poids est de 36 marcs ; sa hauteur de quatre pieds ; sa largeur de deux ; la pomme a près de deux pieds de tour, et l’on y voit les images de Notre-Seigneur et des douze apôtres avec les attributs de leur passion, dans leurs niches et sous des chapiteaux séparés. Au milieu de la croix est le crucifix, d'un pied de hauteur et au revers la figure de Notre-Dame du Roncier. Sur le bras de la croix, sont d'un côté les quatre évangélistes et de l'autre un aigle et un pellican, un agneau et un bœuf, un lion avec des ailes et un ange bien travaillés » (Irenée de Jésus-Maria). Clisson, par testament, avait légué mille livres de huit marcs d'or, pour faire deux calices et deux patènes, ainsi que la plus belle croix qu'il avait dans son château avec les reliques qu'elle renfermait. Hélas ! tout ce magnifique trésor devait disparaître dans la tourmente révolutionnaire, c'eût été crime pour les féaux du pontife de l'Etre suprême d'épargner ce musée de notre histoire.

Authentique, ou non, au-dessus de l'image miraculeuse était accroché encore au XVIIème siècle, le faucillon qui fit jour à la statue, et pour rendre hommage aux vertus de celle-ci, au moins cinq cents ex-votos en cire, outre les suaires, chemises, annilles, etc. étaient pendus tout autour.

Cette époque fut non seulement un triomphe pour la foi, mais aussi une ère de paix et de prospérité. La Bretagne se relevait de ses ruines, pansait ses blessures et recouvrait sa force. La soumission était un fait définitivement accompli, non qu'il n'y eût plus ombre de mauvaise humeur ; de temps à autre, au XVIIème comme au XVIIIème siècle, certains mouvements d'indignation survinrent à la suite d'imposition de taxes trop lourdes, ou déterminées par l'effet d'un bras trop rude ou maladroit ; mais ce ne furent que courtes velléités, soulèvements vite réprimés.

L'œuvre de centralisation s'était accomplie rapidement et la Province resta à l'abri de toute agitation sérieuse, sous la tutelle de sa sœur aînée. La direction provinciale, rassemblée dans la main du Gouverneur, et les querelles de succession et de voisinage enfin terminées, les chefs de la noblesse féodale se sentirent désœuvrés ; ils déléguèrent leurs pouvoirs dans leurs domaines aux officiers civils et militaires et s'en furent à la cour, attirés par l'éclat des fêtes et les faveurs qui rejaillissaient sur tous ceux qui savaient approcher nos rois. Ce n'est pas qu'ils sacrifiassent, sur ce nouveau champ de bataille, leurs ambitions et l'orgueil de leur race ; mais là au moins ce ne furent que querelles de tabourets, rivalités inoffensives de titres et d'honneurs. La Bretagne y gagna la paix ; la France de vaillants défenseurs et de fiers conquérants.
Pour ne porter nos regards que sur l'illustre famille des Rohan, comtes de Porhoët, nous y voyons une suite de maréchaux de camp et de lieutenants généraux.

Pendant ce temps, les titulaires de seigneuries vassales n'étant plus astreints aux droits d'ost et de harelle, quittèrent le mousquet pour la charrue et employèrent leur activité à l'exploitation de leur sol, ainsi qu'à l'amélioration du sort des colons [Note : M. de la Vaissière nous a retracé le véritable rôle du gentilhomme campagnard aux XVIIème et XVIIIème siècles]. Nous ne dirons pas certes, que les moissons dorées se répandirent d'un bout à l'autre du Porhoët ; cette assertion serait démentie par l'aspect réel du pays ; même, nous devons à la vérité historique de ne pas dissimuler que la situation du Porhoët et de sa capitale ne fut jamais bien brillante. Ogée, qui écrit vers 1780, dit qu'une fabrique de très gros draps et de chapeaux fait vivre une partie du peuple de Josselin, mais ne l'enrichit pas. En réalité, le principal commerce de la ville portait sur les blés et sur les bestiaux.

« Quant à l'exploitation du territoire qui l'environne, ajoute-t-il, elle est chétive et languissante, excepté pour le blé noir. On y récolte un peu de seigle et de froment ; ce dernier jouit d'une réputation qui fait désirer qu'on en perfectionne et qu'on en augmente la culture. Le chanvre y réussit ». La grande quantité de terrain perdu en landes lui fait désirer des plantations ; l'idée est excellente, mais il est pessimiste en pensant que les forges de Lanouée épuiseront sensiblement la forêt [Note : Le minerai de fer a toujours été abondant dans le territoire du Porhoët. Roch Le Baillif, médecin de René II, découvrit plusieurs sources minérales. M. Baudouin de Marattes fit, en 1835, à l'Académie des sciences, un rapport très intéressant sur les perturbations subies par l'aiguille aimantée dans la vallée de l'Oust, phénomène qu'il explique par la présence dans le lit de la rivière de sable ferrugineux aimanté.].

Toutefois, grâce aux encouragements de nos gentilshommes campagnards, un grand progrès se réalisa dans la culture et chacun, petit et grand, put trouver sous son toit, sinon la richesse, du moins un certain bien-être inconnu jusqu'alors.

Forcément, avec les obligations auxquelles ils étaient assujettis par leur rang à la cour, les seigneurs du Porhoët eurent peu de temps à consacrer à l'administration suzeraine de leurs terres ; cependant ils y exercèrent une surveillance continuelle et les intérêts mêmes de l'ancien duché trouvèrent toujours en eux leurs plus fidèles défenseurs. Nous avons vu quel prix ils attachaient à la présidence de la noblesse aux Etats ; nous n'en voulons encore pour preuve que le geste de Marguerite de Rohan souffletant d'un coup de pantoufle le maréchal de la Meilleraye, qui osait émettre devant elle des prétentions injustifiées (1651). Le Maréchal, pour se venger, la fit assiéger dans sa demeure par ses canonniers, mais ne put empêcher l'arrêt de la même année, qui trancha définitivement la question par l'alternative [Note : Entre les ducs de Rohan et de la Trémoïlle ; ceux-ci étant les héritiers des barons de Vitré qui les premiers avaient soulevé le différend]. Bien rarement les Rohan firent défaut aux Etats de Bretagne.

Voici, à titre de généalogie des comtes de Porhoët, quels furent les descendants d'Henri Chabot jusqu'à la Révolution. Celui-ci était mort en 1655 [Note : La princesse Marguerite mourut après lui, le 9 avril 1684], laissant pour lui succéder Louis de Rohan-Chabot [Note : Louis de Rohan-Chabot fut dès sa naissance à l'apogée des honneurs. Il avait été baptisé dans la chapelle du Louvre à Paris, par l'évêque de Meaux, premier aumônier du roi, et avait été tenu sur les fonts par Louis XIV et la reine régente Anne d'Autriche] qui épousa en 1678 Marie-Elisabeth du Bec-Crespin.

Louis, duc de Rohan et pair de France, fit en juin 1708, à l'occasion du mariage de son fils aîné Louis Bretagne, un acte important relatif à la transmission de ses biens et de ses titres. Telle est la substance de cet acte : une substitution perpétuelle à l'infini est faite du duché de Rohan, de la principauté de Léon, du marquisat de Blain et du comté de Porhoët, en faveur de son fils aîné et de sa postérité masculine, et à son défaut en faveur de ses puînés ; au défaut des mâles de toutes les branches, en faveur des filles de la branche aînée, à condition que celle qui sera appelée à cette substitution épousera un gentilhomme de la première noblesse, et que son mari et toute la postérité devront prendre le nom et les armes de Chabot comme premier et principal nom (Sandret, La Maison de Chabot).

Cette pièce fut confirmée par des lettres patentes données à Fontainebleau, le même mois de juin 1708, enregistrées au Parlement de Paris et à la Chambre des Comptes de Bretagne en juillet suivant. Guy Auguste, second fils de Louis, fut l'auteur de la deuxième branche des ducs que nous trouverons plus tard.

Louis Bretagne (Louis II) prêta serment et prit séance au Parlement, en qualité de pair, le 12 août 1728, une année après le décès de son père. Françoise de Roquelaure, fille et héritière du duc de Roquelaure, maréchal de France, lui donna deux fils, dont Louis-Marie Bretagne, né le 17 janvier 1710.

Bien que celui-ci (Louis III) se tint habituellement éloigné de la cour, le roi Louis XV récompensa ses services à l'armée en l'élevant au grade de lieutenant général en 1781 et il lui accorda un brevet (6 juin 1704) confirmant en sa faveur et celle de ses descendants mâles et femelles leur droit à être traités de cousins de sa Majesté. Il mourut à Nice en 1791, après avoir perdu tous ses enfants [Note : Louis-Marie Bretagne avait épousé en premières noces Charlotte-Rosalie de Chatillon, fille unique du comte de Chatillon (1735) et en secondes noces : Charlotte-Emilie de Crussol d'Uzès, fille du duc d'Uzès (1758)].

(Hervé DU HALGOUET).

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