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LE TRESOR DE LA CATHEDRALE DE QUIMPER

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I. — INVENTAIRE.

Le n° 31 du Cartulaire du chapitre de Quimper, contient deux inventaires du trésor de la cathédrale, l’un de 1275 et l’autre de 1361. L’étendue de ces documents ne me permet pas de les reproduire ici. Ils sont d’ailleurs fort sobres de détails sur les objets dont ils font l’énumération, et ne présentent au point de vue de l’art, qu’un médiocre intérêt. Je me bornerai donc à donner la traduction du plus ancien et du plus court de ces deux inventaires. Il fut rédigé le vendredi après les Cendres 1273, par Daniel, trésorier de l’église de Quimper, et mentionne les objet suivants :

Parmi les reliques, le corps de saint Ronan, confesseur, avec plusieurs menues reliques, dans une châsse d’argent.

Le chef de saint Ronan, dans une boite d’argent.

Le chef de saint Conogan, dans une autre boîte d’argent.

Partie du bras de saint Corentin, dans un bras de bois argenté.

Un soulier de sainte Anne, dans un soulier d’argent.

Partie du bras de saint Maudet, (Mautedi), dans un bras argenté.

Deux pièces de reliques, en une coupe d’argent.

Des reliques de sainte Radegonde et de saint Armel (beati Armagili), dans une grande coupe d’argent, qui contient d’autres reliques dans une boîte d’ivoire.

Du sang qui coula du Crucifix, dans un vase de cristal.

Quatre croix ; trois grandes, dont une dorée avec incrustation de pierreries ; deux autres argentées, et une petite en or, à pied d’argent, contenant de la vraie croix (in qua est Crux sancta).

Huit calices avec leurs patènes.

Trois encensoirs d’argent.

Trois plateaux (bacinos) d’argent.

Trois coquilles (testus) (sic), dont une entièrement et les deux autres en partie argentées.

Quatre orceaux ou burettes (urceola) en argent.

Une grande Bible en deux volumes.

Une autre Bible en un volume, qui est aux mains de l’évêque.

Un livre des Décrétales, prêté au chantre.

Le livre des Sentences, prêté à Geoffroy Le Prévôt.

Les Homélies de saint Grégoire, les Morales de Job ; plus le Psautier à glose et les Morales de Job, qui sont aux mains de l’évêque.

La Genèse, avec des prologues ou sommaires (cum quibusdam prologiis).

Quatre psautiers, dont un aux mains du chantre.

Deux bréviaires en quatre volumes.

Quatre antiphonaires, deux à l’usage de Paris (ad usum Parisiorum), les autres vieux.

Quatre graduels, trois neufs et un vieux ; un autre manuel et un autre antiphonaire manuel.

Un recueil de Proses (unum Sequenciarium), trois missels, un collectaire et deux grands collectaires.

Deux collectaires grands et vieux, deux moyens, et un passionaire.

Un passionaire que Firmin a reçu du prieur de Locmaria.

Les Epitres de saint Jérôme, un vieux graduel, deux autres vieux graduels, et un ancien passionaire.

Sept pièces de soie (pannos sericos), cinq neuves et deux vieilles.

Trois bannières neuves et une vieille.

Deux mîtres.

Vingt-huit bonnes châpes et huit vieilles.

Les chapes de maître Pierre et de maître Firmin.

Sept dalmatiques et tuniques, neuf chasubles et sept aubes avec leurs amicts.

Quatre tapis (tollelas) de soie [Note : Ce mot paraît être un synonyme de Toaillia, Toalea ou Toalia, qui signifiait au moyen âge, pièce d’étoffe, tapis, etc].

Un bâton pastoral en argent.

La chapelle de Rainaud, évêque de Quimper, de bonne mémoire, savoir trois aubes avec amict, trois palles et dix chasubles (Yves, évêque, est en possession de la troisième) ; le tout avec étoles et manipules et deux tapis (tollelis) servant de custodes.

Un grand tapis (tollelam) orné, trois peignes d’ivoire et quatre autres peignes.

Trois vases de baume.

Un autel portatif (altare portabile).

Deux anneaux des évêques Guillaume et Rainaud.

Deux boîtes d’ivoire avec des reliques.

Une petite châsse d’argent avec des reliques.

Environ une livre de menues perles (parum minus).

Six coussins de soie pour ornement, et deux pièces d’étoffe de soie.

Une boite d’ivoire avec des reliques.

Une dent de saint Corentin avec l’os de son bras (Cartulaire capituli. Corisopit. n° 31, f° 51 r° et v° de la copie, et f° 63 de l’original).

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II. — LES RELIQUES DE SAINT CORENTIN.

A la mort de saint Corentin, premier évêque de Quimper, qui eut lieu, croit-on, au commencement du VIème siècle, son corps fut inhumé dans sa cathédrale, où ses reliques furent conservées jusqu’à l’invasion des Normands en 878. Le clergé de Quimper, craignant qu’elles ne fussent profanées par ces barbares, les confia à Salvator, évêque d’Aleth ou de Saint-Malo, qui se réfugiait alors en France, emportant avec lui les corps des principaux saints de la Bretagne. Ce prélat, arrivé à Paris en 965, remit son précieux dépôt entre les mains de Hugues Capet, qui le fit placer dans l’église de Saint-Barthélémi, en la Cité. Ces saintes reliques ayant ensuite été partagées entre diverses églises, celles de saint Corentin furent données à l’abbaye de Marmoutiers ; mais il en resta quelque portion à Paris, car l’abbaye de Saint-Victor en a possédé une jusqu’à la Révolution [Note : Registre d’extraits de titres du château de Nantes, f° 26 r° (Archives du Finistère). — Albert Le Grand, Vies des Saints de Bretagne. — Biographie bretonne, t. 1, p. 417].

Lorsque le danger des invasions normandes fut passé, l’église de Quimper réclama vainement les reliques de saint Corentin. Ni les prières., ni les offres d’argent ne purent décider les français « faux et cupides » [Note : Fragment d’une Vie de saint Corentin, tiré d’un Passionnaire de la cathédrale, (Registre d’extraits de titres du château de Nantes), f° 26 r°. — Aux Archives du Finistère], à restituer ce dépôt sacré. Cependant il est probable que tout le corps du saint patron de la Cornouaille, n’avait pas été transporté en France en 878, car il résulte de l’inventaire du trésor de la cathédrale, fait en 1273, et dont on vient de lire la traduction, qu’il y avait à cette époque, dans l’église, au nombre des reliques « une partie du bras de saint Corentin, dans un bras de bois argenté ». C’est probablement cette relique que l’on exposait à la vénération des fidèles près de l’autel des Sept-Saints de Bretagne, pendant la durée du pèlerinage.

Cette relique fut-elle plus tard égarée ou confondue avec d’autres ? C’est ce que j’ignore absolument. Ce qui est certain, c’est qu’en 1623, Guillaume Le Prestre, évêque de Quimper, se rendit à l’abbaye de Marmoutiers, accompagné de Guillaume Le Gouverneur, évêque de Saint-Malo ; L. Odespung, chanoine de Rennes, prieur de l’île Tristan et vicaire général de l’archevêque de Tours, en Bretagne ; Thomas Hary, chanoine et député de Rennes ; Symon chanoine de Vannes et député du clergé de ce diocèse, et Julien Le Texier, chanoine de Cornouaille.

Le but de cette solennelle visite de la part de l’évêque de Quimper, était de demander aux religieux de ce monastère « de luy octroyer et départir quelque parcelle ou reliques du corps de saint Corentin, autreffois évesque de l’église de Cornouailles, et reposant alors en l’église de ceste abbaye ». Le mercredi 10 mai 1623, les religieux firent droit à la requête de Guillaume Le Prestre, en chapitre présidé par frère Jacques Huisseau, docteur en droit et grand prieur du couvent de Marmoutiers.

En conséquence de cette décision, « lesdicts révérendissimes évesques cy dénommez, assistés des susdicts et des vénérables religieux, prieur et couvent dudict Marmoustiers se sont transportés derrière le grand autel où repose la châsse dudict corps de saint Corentin, où après les cérémonies, suffrages et oraisons dudict saint chantées, les religieux y commis, ont ouvert ladicte châsse, et en ont levé une parcelle qui paroist estre un os de la cuisse, laquelle parcelle a esté délivrée en présence des susnommés, entre les mains de révérendissime père en Dieu, Guillaume Le Prestre, évesque de Cornouailles, et pour en faire dires de foy partout où il appartiendra, a esté le pré­ent acte dressé par les dicts RR. évesques, grand prieur, religieux dudict Marmoustiers, et plusieurs autres qui ont signé lesdicts jour et an que dessus. Ainsi signé en la minutte : Guillaume, év. de Saint-Malo ; Guill. Le Prestre, év. de Cornouailles ; J. d'Huisseau, gd. Prieur ; R. Guedieu, prieur de Bloslay ; L. Odespung, chanoine de Rennes, prieur de l'Isle Tristan et vicaire général de Mgr. l’archevesque de Tours, en Bretaigne ; L. Blanchard. F. Durand, sous-secrétain ; T. Hary ; Guillaume Jour, chanoine de Saint-Malo ; Julien Le Texier, chanoine de Cornouailles ».

L’authentique de la relique fut ensuite revêtu des sceaux de l’abbaye de Marmoutiers ; et de ceux des évêques de Quimper et de Saint-Malo.

On pourrait penser d’après ce qui précède, que cette relique de saint Corentin fut immédiatement transférée dans la cathédrale de Quimper. Ce n’est cependant pas ce qui eut lieu. L’évêque Guillaume Le Prestre, la transporta dans son manoir de Kervegant, en la paroisse de Scaër, où elle demeura dix-sept ans, c’est-à-dire jusqu’à la mort de ce prélat, arrivée le 8 novembre 1640, à deux heures après minuit. Par son testament daté du 7 du même mois, veille de sa mort, il déclarait « avoir en son manoir de Kervégant, certaine relique de saint Corentin, laquelle il ordonnoit estre rendue en son église cathédrale de Cornouailles ». Par le même testament, il léguait à cette église, la somme de 1.500 livres « pour ayder à faire une châsse à mettre ladicte relique ».

Le jour même de la mort de l’évêque, en présence de plusieurs ecclésiastiques et laïques, notamment du chanoine Julien Le Texier, qui accompagnait Guillaume Le Prestre, dans son voyage à l’abbaye de Marmoutiers, et de frère Yves Pinsart, docteur de Paris, chanoine et théologal de Cornouaille. qui avait assisté ce prélat à ses derniers moments, on ouvrit une grande armoire dans laquelle « on trouva la dicte relicque qui est l’os d’un des bras, qui est de l’épaule au coude nommé (humerus), enveloppé en un taffetas vert et renfermé dans une petite casse longue de bois, couverte de papier, liée de ficelle, et qui avait esté cachetée dudiet sieur Le Texier ». La relique fut ensuite remise dans la boite cachetée du sceau du défunt évêque ; Etienne Pollart, archidiacre de Poher, et Julien Le Texier, chanoine, se chargèrent de la transférer au trésor de la cathédrale.

Or, il advint que peu de temps après « un libertin et un yvrogne » ayant renversé et brisé la statue de saint Corentin, qui décorait la fontaine de ce nom, située à l’extrémité du faubourg de la rue Neuve, et les magistrats de la ville ayant laissé impunie une pareille impiété, Dieu vengea saint Corentin, en frappant de la peste la maison du coupable, d’où la contagion gagna bientôt tous les quartiers de la ville de Quimper. Déjà la maladie avait enlevé le tiers des habitants, lorsque le Père Bernard, supérieur du collège des jésuites, touché de compassion, demanda à Dieu de lui faire connaître quel saint on devait invoquer pour faire cesser le fléau. Ayant achevé sa prière, le Père Bernard, qui était lui-même regardé comme un saint, crut entendre une voix qui lui disait : C’est à saint Corentin qu’il faut avoir recours. Comme l’évêque Mgr. du Loue était alors absent, le père fut aussitôt faire part de cette révélation à l’official, M. de Kerguélen, et lui dit que si l’on faisait un voeu public à saint Corentin, il avait la certitude que ce saint patron de la ville apaiserait la colère de Dieu. A la prière de M. de Kerguélen, le syndic de la communauté fit immédiatement assembler les bourgeois dans la maison de ville, et après qu’on leur eut fait le récit de ce qui venait de se passer, ils s’engagèrent par un voeu à placer honorablement dans la cathédrale, la relique du bras de saint Corentin, que M. Le Prestre de Lézonnet, leur précédent évêque, avait obtenue de l’abbaye de Marmoutiers. Aussitôt la peste cessa, et, d’après la tradition, le mal s’arrêta où il avait commencé, c’est-à-dire vis à vis la fontaine de saint Corentin.

Pour réaliser le voeu qu’ils avaient fait, les bourgeois de Quimper firent construire à l’entrée du choeur de la cathédrale un jubé. Le 2 mai 1643, les chanoines présentèrent la relique de saint Corentin à messire René du Louët, récemment nommé au siége de Quimper, comme successeur de Guillaume Le Prestre. Après l’avoir vue, ce prélat la remit au trésor, et ordonna que la solennité de la translation serait faite le lendemain 3 mai, « et la relique de suite mise en évidence, pour estre vénérée ». Elle eut lieu en effet, avec toute la magnificence et la dévotion convenables à une pareille cérémonie, et la châsse, qui renfermait le bras du glorieux patron de la Cornouaille, après avoir été portée en procession, fut déposée dans la tribune du jubé que la ville de Quimper avait fait construire [Note : Vie du R. P. Julien Maunoir, par le R. P. Boschet, pues 65 et suivantes. — Michel Le Nobletz composa sur cet événement, un cantique breton, qui a été publié dans le Recueil de cantiques du P. Maunoir].

La descente du « bras de saint Corentin » n’avait lieu que très-rarement « dans les nécessités urgentes et après avoir épuisé toutes les ressources de la religion » (Titre de la fabrique de Saint-Corentin) Voici de quelle manière s’accomplit cette solennité le 28 août 1768 :

« Cette année les pluies ayant été très-abondantes, et ne permettant pas de ramasser la moisson, sur une requête présentée par MM. les Maire et Échevins de cette ville, après avoir déjà fait trois processions, les trois jours précédents, pour obtenir de Dieu un temps favorable, le jour suivant, qui était un dimanche (jour choisi exprès pour faciliter la dévotion du peuple), on annonça à midi la cérémonie, par le son de toutes les cloches ; l’on l’avoit déjà annoncé au prône. Après le sermon deux dignitaires chanoines montèrent à l’ambon, revêtus d’aubes et de tuniques, accompagnés d’un diacre et sous-diacre, revêtus aussi de tuniques ; ils ouvrent la porte de l’endroit où est renfermée la relique ; on nettoie la châsse, et on la descend sur un brancard préparé et orné pour recevoir ce précieux dépôt ; on la porte précédée de la croix, sur l’autel de Saint-Corentin d’en bas, en présence du chapitre, du bas-choeur, du clergé, des prêtres de Saint-Mathieu, des Cordeliers et des Capucins, qui tous avoient été invités pour cette cérémonie, du Présidial et de l’Hôtel de Ville. Pendant cette cérémonie on chanta l’hymne de saint Corentin, Pange solemnes ; laquelle étant finie, chacun du clergé alla baiser la relique ; se dirent ensuite les Vêpres solennellement, et à la fin de Complies, on porta la relique processionnellement autour de l’église, en dedans. Les deux dignitaires chanoines qui l’avoient descendue la portèrent sur leurs épaules ; quatre diacres les accompagnèrent, pendant qu’elle étoit entourée de six grenadiers fusiliers, pour empêcher la foule qui étoit prodigieuse. On fit trois tours, tous les corps, tant séculiers que réguliers, marchants à la procession. Les reliques de saint Ronan et les autres, également que la statue d’argent de saint Corentin, précédoient la relique du bras de saint Corentin, autour de laquelle il y avoit quatre flambeaux allumés. La procession étant finie, on déposa la relique sur une des tables de marbre du sanctuaire, du côté de l'pître, et le plus digne du choeur, après qu’on eut chanté un répons de saint Corentin, chanta l’oraison du saint, et l’oraison pour le beau temps ».

« Pendant huit jours la relique resta exposée à la vénération du peuple. Tous les jours on chanta la grand’ messe canonialement, et les Vêpres furent solennelles. Tous les jours on fit la procession dans le même ordre et avec la même solennité. Tous les corps y assistèrent, et chaque chanoine, suivant l’ordre d’ancienneté, disant la grand’ messe et faisant l’office du jour ».

« Le dimanche suivant, 4 septembre, on fit la clôture de cet octave par une procession générale. La veille, dès midi, on annonça cette cérémonie par le son de toutes les cloches, également que le soir à sept heures, et le lendemain à midi. Ce jour donc, à l’issue des Complies, se fit la procession solennelle à l’église paroissiale de Locmaria. Kerfeunteun et Locmaria y furent invités, outre ceux qui avoient assistés aux précédentes processions. On arriva à Locmaria dans le même ordre et M. l'Evêque qui officioit à la procession, y donna la bénédiction du Saint-Sacrement. On revint ensuite à la cathédrale, où rendus, on chanta les prières ordinaires, et ensuite on remit la relique en sa place ordinaire, en chantant Pange solemnes » (Titre de la fabrique de Saint-Corentin).

Le 8 juillet 1782, sur la représentation faite par l’évêque, « que les mauvais temps désoloient les campagnes et que les moissons étoient sur le point de se perdre, » le chapitre décida que l’on descendrait le jour même, le bras de saint Corentin, suivant l’usage observé dans les « calamités pressantes, » et que l’on suivrait pour cette cérémonie, ce qui avait été pratiqué en 1768. La même solennité eut lieu, pour les mêmes motifs, le 6 mai 1785.

La relique du bras de saint Corentin existe encore aujourd’hui dans la cathédrale. On verra par le procès-verbal suivant, comment elle fut préservée de la destruction en 1793.

« Nous soussignés vicaires épiscopaux du Finistère, certifions à qui il appartiendra, que cette cassette renferme les reliques du bras de saint Corentin ; qu’avant le douze décembre mil sept cent quatre-vingt-treize, ère chrétienne, elles étoient renfermées dans une cassette d’argent, qui fut enlevée le dit jour où le vandalisme exerça ses fureurs dans cette ville en brisant et renversant les autels, en hachant les confessionaux, en déchirant les tableaux, en brulant les statues des saints sur le Champ-de-Bataille ; que l’autentique a été perdue, que des personnes, dignes de foi, nous ont rapporté qu’un envoyé des Vandales, que nous connaissons, et que nous nous abstenons de nommer pour ne pas perpétuer le souvenir de sa scélératesse impie, avoit jetté dans le bûcher, que formèrent les statues, le dit procès-verbal ; que, nonobstant l’enlèvement de l’autentique, nous sommes certains que ce sont ici les reliques du bras de saint Corentin ; que lesdites reliques furent transportées de nuit chez Yves-Claude Vidal, curé ou recteur d'Ergué-Armel, par Dominique Mougeat, sous-diacre, accompagné de Daniel Sergent, menuisier, homme honnête et digne de confiance, demeurant rue Neuve ; que le dit Sergent a apporté à la sacristie de saint Corentin le 11 décembre 1795, une cassette de bois colorée en gris, moulure et sculpture rouges et bleues ; qu’elle a été bénite par Louis-Marie Sérandour, vicaire épiscopal ; qu’on y a déposé les dites reliques en présence des soussignaux (sic). En foi de quoi nous avons signé avec les témoins, à Quimper le 11 décembre 1795, 20 frimaire, 4ème année républicaine. — Signé : R. J. Bourbria, vic. ; J. Legac, vicaire ; J. Goasguen, vic. ; Y. Cl. Vidal, curé d'Ergué-Armel ; Kerlen ; Huraut, vic. ; L. M. Sérandour, vic. ; D. Mougeat, sous-diacre ; Sergent, menuizié ; D. Marchal ; Yves Jean Scéau ; Guino, curé d’Elliant ; J. L. Caveillé ; Le Bihan, marchand » (Titre de la fabrique de Saint-Corentin).

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III. — LA CHASSE DE SAINT RONAN.

Saint Ronan, né en Irlande de parents devenus chrétiens par les prédications de saint Patrice, apôtre de cette île, passa en Armorique à la fin du Vème ou au commencement du VIème siècle, après avoir exercé dans son pays les fonctions épiscopales. Il s’établit d’abord aux environs de Brest, dans une solitude où fût bâtie depuis, la petite ville de Saint-Renan. Mais comme la réputation de ses vertus lui attira bientôt un grand nombre de visiteurs, il abandonna cette retraite et vint se réfugier dans la forêt de Névet, sur le bord de laquelle il bâtit un ermitage à l’endroit où s’élève aujour­d’hui l’église de Locronan, à quatre lieues de Quimper. Cette église possède une côte de saint Ronan, enchassée dans un reliquaire d’argent. Mais la plus grande partie des reliques de ce saint fut transférée à une époque inconnue, dans la cathédrale, où l’évêque Rainaud fit construire pour les recevoir en 1219, une chasse en vermeil ornée des figures des douze apôtres, qui fut placée dans le choeur au haut de la colonne du grand autel. Voici un procès-verbal inédit qui donne la description de cette châsse, et fait connaître l’état dans lequel se trouvaient les reliques de saint Ronan en 1687.

« Francois De Coëtlogon, par la grace de Dieu et du St Siège, évêque de Quimper et comte de Cornouaille, à ceux qui ces présentes verront, salut et bénédiction en notre Seigr. ; sçavoir faisons à tous ceux qui ouvriront ce reliquaire, qu’à requête des nobles et vénérables chapitre et chanoines de Cornouaille, nos confrères soussignants, ce jour vingt et neufième d’avril 1687, nous avons conjointement avec eux fait descendre du haut de la colonne du grand autel de notre Eglise cathédrale, un grand reliquaire long quarré, bien clos et fermé de deux serrures, avec deux clefs différentes, et garni autour des figures des Sts. Apôtres en relief, d’argent doré, avec deux lames de cuivre doré, sur lesquels estoint gravés ces mots, sçavoir sur la premiere : + Anno domini millesimo ducentesimo nono decimo in tempore Renaldi Gallici ; et sur la seconde : Corisopitensis electi composita fuit arca Sti. Ronani confessoris atque Pontificis ; dans lequel reliquaire nous avons trouvé les reliques et ossemens cy après dénommés, scavoir (suivant la déclaration de deux maistre chirurgiens qui ont esté appelés pour ce sujet) : l’omoplat du costé sinistre, le femur d’une cuisse, un mantibule inférieur, un os occipital, le tibia ou agitoire d’un bras, un autre humeras, tibia ou agitoire, une des vertèbres du dos, un cubitus du bras, un morceau du radius ou cubitus, un autre cubitus ou faucille, l’apophize de l’omoplat, une des vrayes costes entière, et une autre rompue et un autre os rompu du tibia ; le tout enveloppé bien proprement dans une escharpe de tafetas verd, placé dans un bout du reliquaire, et dans l’autre bout estoit un grand paquet de linges, sur lequel nous avons trouvé un parchemin cousu avec du fil blanc ou estoit escrit : hic est sanguis dominicus effusus in corporati et nappis altaris, dans lequel paquet nous avons trouvé trois nappes d’autel, dont une est rayée au deux bouts de trois filets bleufs, dans lesquelles étoint plusieurs linges, corporaux et autres de différentes grandeurs les uns blancs et les autres plus ou moins salis ; et un autre petit paquet entouré d’un parchemin sur lequel est escrit : Hic cecidit stilla sanguinis Christi, dans lequel il y a plusieurs linges, quelques morceaux de parchemin et quelques lambeaux de soye.

Après avoir examiné le tout, nous avons remis les choses dans le mesme état que nous les avons trouvées et sous les mêmes escriteaux, mais comme le dict reliquaire étoit fort vieil et saly, Messires du chapitre l’ayant fait refondre, ont fait nouvellement construire de la mesme matière, par le sieur Bernard, orfeuvre, cet autre reliquaire d’argent, la mesme année que dessus mil six cents quatre vingts sept, et après que ledict reliquaire a esté bény, nous y avons fait mettre les deux lames de cuivre doré rompue en quatre grandes pièces, et une petite pièce rompue de l’une des quatre dont nous avons parlé ci-dessus ; comme aussi les ossements et reliques avec le pacquet des linges et leurs écritaux, dans une boëte ou caisse de bois, aussi benye pour ce sujet, que nous avons fait cacheter du sceau de nos armes et de celui du chapitre, à Quimper, ce 15 décembre mil six cents quatre vingts sept. Signé : Fr., évesque de Quimper ; Guy de Lopriac de Coatmadeu, chantre ; Gentil ; Jean Callier, ch. vic. général ; Philippe Emmanuel de Kergozou ; Jean Le Livec, théologal ; S. F. du Bourblanc ; F. de la Berville ».

La nouvelle châsse de saint Ronan, fut remise à la place qu’occupait l’ancienne. Elle fut encore descendue du haut de la colonne, et Mgr. de Ploeuc en fit de nouveau l’ouverture le 26 mars 1711, à l’occasion de l’établissement dans le choeur, d’un nouveau grand autel « que la libéralité et la dévotion de plusieurs personnes de mérite et de distinction, avoient donné à l’église ».

C’est sur la châsse de saint Ronan, que se faisaient au XVème siècle, les serments juridiques. Aussi l’appelait-on « la châsse des serments » (Archa Juramentorum). Ces reliques ont dit être détruites en 1793, car elles n’existent plus dans la cathédrale.

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IV. — LES TROIS GOUTTES DE SANG, etc..

J’ai rapporté par ailleurs le miracle des « trois gouttes de sang ». Les linges sur lesquels on les avait recueillies, étaient conservés en 1273 et en 1361, dans un vase en cristal, d’après les inventaires du trésor rédigés à ces deux époques. Ce n’est donc que longtemps après la construction de la châsse de saint Ronan, qu’ils furent placés dans ce reliquaire où ils étaient en 1687, comme on l’a vu par le procès-verbal qui précède. Ces linges existaient encore vers 1877 dans la sacristie de la cathédrale. Un parchemin cousu au paquet dans lequel ils sont enveloppés, porte cette inscription : « Hic est sanguis dominicus effusus in corporati et nappis altaris ». On voit aussi dans la sacristie, une tête en bois fort vermoulue, qui par son caractère, peut remonter au XIIIème siècle, et que l’on dit être la tête du Christ qui répandit les trois gouttes de sang.

Les autres reliques conservées dans le même dépôt, portent les inscriptions suivantes :

« Reliquiae Sancti Venusti, martyris. Romae, 15 decembris 1703 ».

« Reliquiae Sancti Celestini, martyris. Romae, 13 junii 1707 ».

« Reliquiae Sancti Secundini et Sanctae Liberalae, martyrum. Romae, 28 martis 1723 ».

Les renseignements qui précèdent, sur les reliques du trésor de la cathédrale, ont été tirés, pour la plupart, de procès-verbaux inédits qui font partie des archives de l’évêché de Quimper (R. F. Le Men).

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