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ÉCOLE SECONDAIRE ET COLLÈGE MUNICIPAL DE QUIMPER EN 1806-1886.

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I. — L'Ecole Secondaire.

L'Ecole Centrale est supprimée : il faut construire sur de nouvelles bases un établissement d'instruction ; le Maire de Quimper et son Conseil étudient soigneusement la question : ils songent à gérer eux-mêmes l'école secondaire projetée ; l'argent sera fourni par une taxe d'octroi sur le café, le sucre et le sel. Ce projet est repoussé par une commission ; la direction de l'école sera confiée à trois directeurs, anciens professeurs de l'Ecole Centrale : Dubosq, Ollitrault et Le Déan ; cette institution sera privée, mais cinquante places d'internes seront réservées dans le pensionnat que viennent de fonder les trois nouveaux directeurs. Le but principal de l'école sera de former des élèves pour les lycées, mais aussi d'instruire ceux qui ne désireraient pas recevoir une instruction longue et complète, mais voudraient « entrer dans le commerce, la marine, les arts industriels, l'agriculture ». Un cours primaire préparatoire donnera aux enfants l'accès de l'école secondaire divisée en six classes :
6ème classe : éléments de langue française et latine ;
5ème classe : mêmes études, premières opérations de l'arithmétique ;
4ème classe : mêmes études, mathématiques (fractions, carré, cubes, poids et mesures) ; éléments de géographie, musique, dessin, danse ;
3ème classe : mêmes études, éléments d'histoire moderne, d'algèbre, de géométrie ;
2ème classe : mêmes études, éléments d'histoire ancienne, de mécanique ; — les élèves qui se destinent au commerce pourront substituer au latin la langue anglaise et la tenue des livres ;
1ère classe : littérature latine et française, sciences physiques, astronomie, applications à la marine et aux arts.

Ce programme était assez bien conçu, prenant aux collèges de l'Ancien Régime leur hiérarchie par classes, leur stricte discipline intellectuelle, mais gardant de l'Ecole Centrale l'importance des sciences expérimentales.

Les trois directeurs n'eurent pas le temps de l'appliquer.

II. — Fondation du Collège Municipal.

Dès le 24 Janvier 1806, le Conseil général de la commune de Quimper émet le vœu que l'Ecole Secondaire devienne communale ; le Finistère a besoin d'un Collège important ; beaucoup d'institutions secondaires existent dans le département (Brest, Landerneau, Saint-Pol, Morlaix, Quimperlé...), mais l'instruction y est incomplète, les élèves ne vont pas au delà de la troisième ; « leurs progrès sont à peine sensibles, l'instruction et l'enseignement sont presque nuls » ; en conséquence, la municipalité propose d'installer une école secondaire communale dont le programme sera, si possible, conforme à celui des Lycées : huit professeurs recevront un traitement de 400 à 600 francs ; ils seront logés et nourris, et vivront, dans la mesure du possible, en commun ; une école primaire sera installée dans les bâtiments du Collège ; un cours particulier d'agriculture, « l'agriculture se trouvant moins avancée que dans le reste de la France », s'adressera surtout aux futurs prêtres destinés à vivre dons les campagnes.

L'empereur, par décret, approuva ce projet ; mais déjà les directeurs de l'Ecole Secondaire, gênés par le départ de plusieurs professeurs, avaient abandonné l'établissement : l'école est fermée en 1807-1808, et l'on voit Dubosq et Ollitrault mettre en vente leur mobilier.

C'est avec peine que les études purent reprendre en Novembre 1808 ; l'évêque de Quimper voulait que les études ne s'étendissent pas au delà de la troisième et la municipalité persistait à vouloir un cours d'enseignement complet qui donnerait au Collège municipal une supériorité sur les établissements analogues du Finistère.

L'Ecole Secondaire communale, malgré le talent de son directeur Ollitrault et de plusieurs anciens professeurs de l'Ecole Centrale, végète pendant trois années ; et ce n'est qu'en Octobre 1811 qu'est définitivement organisé le Collège de Quimper.

III. — La vie matérielle.

Le principal du Collège est assisté d'un « bureau d'administration » composé de quelques notabilités de la ville : maire, procureur, docteurs, curé de Saint-Corentin, etc. ; ce bureau a pour rôle de veiller au progrès des études, à la police des classes, de proposer la répartition des fonds, d'arrêter les comptes de recettes et de dépenses ; en cas de vacance de chaire, il peut désigner au Recteur d'Académie des candidats ; ses délibérations doivent être approuvées par le grand maître de l'Université.

Le Collège n'occupait pas tous les bâtiments construits aux XVIIème et XVIIIème siècles : la ville de Quimper avait en 1806 permis à l'évêque d'occuper, pour son séminaire, l'aile occidentale de l'établissement. De longues discussions s'engagèrent entre le Conseil municipal qui voulait rentrer en possession de son bien et l'autorité diocésaine : aux dires de celle-ci, le séminaire était bien à l'étroit, il était possible de lui concéder d'autres bâtiments, puisque, au moment où le Collège avait huit cents élèves, il disposait encore de moins de place.

Le préfet du Finistère estimait qu'il y avait un moyen de mettre fin à ces discussions : transférer le séminaire dans quelque autre local à choisir (ancien palais épiscopal, Calvaire, etc.) et demander l'érection du Collège municipal en Lycée.

En Mai 1811, il montre taus les avantages de cette solution : la « population mâle » de Quimper est destinée « par la situation topographique du pays à s'élancer dans la carrière militaire et maritime », le local destiné à recevoir le Lycée est un des plus beaux de l'Empire... Le 9 Mai 1812, il déclarait que le Finistère était « peut-être l'unique département qui ait à sa charge les frais d'établissement d'un séminaire ; les circonstances qui ont produit cette exception onéreuse ne doivent pas être du moins un motif d'opposition à la création d'un établissement d'utilité publique [un Lycée] qui est vivement désiré par les autorités locales et que réclament les besoins des administrés... ».

Survient la campagne de Russie ; il n'est plus question de faire du Collège un Lycée. Le séminaire diocésain restera encore un quart de siècle dans les bâtiments du Collège [Note : Chanoine Peyron : Les Séminaires de Quimper et de Léon, Quimper, 1899].

En 1829, la ville de Quimper demande l'érection de son Collège municipal en Collège royal ; en 1840, de Carné montre que Quimper, « par la nature même de son aspect comme de ses mœurs », présente « cette physionomie sérieuse et tranquille si propre à un établissement universitaire » ; il fait à la ville de Brest de flatteuses allusions : « Sera-ce au bruit des tambours et à celui des armements, sera-ce à la porte d'un bagne, où trois mille forçats traînent leur chaîne, que s'élèvera ce sanctuaire de la jeunesse que la religion et l'étude sont seules appelées à visiter ? » ; la voix éloquente du futur académicien ne fut pas entendue, pas plus que ne le sera en 1863 celle du maire de Quimper, Porquier.

La ville continua donc à supporter tout le poids de son Collège : ce poids fut très lourd ; périodiquement, le Conseil municipal constate l'état de délabrement dans lequel se trouvent les bâtiments : en 1835, tous les planchers, la toiture de la chapelle sont à refaire ; en 1852, la ville demande à l'Etat une subvention ; en 1880, il y a 23.000 francs de dépenses à faire au Collège : la municipalité, considérant que le Collège de Quimper est un des plus anciens établissements secondaires de la Bretagne, qu'il est situé au chef-lieu dans des conditions de salubrité parfaite, pourvu de vastes locaux, de cours et de jardins spacieux, qu'il représente l'enseignement de l'Université dans une zone étendue, qu'il fait concurrence à l'enseignement congréganiste, qu'il coûte 24.000 francs à la ville pour un budget total de 224:000 francs, demande à l'Etat une subvention annuelle proportionnée à l'utilité de cet établissement.

Et pourtant la ville n'a pas à sa charge l'entretien de tous les bâtiments : l'aile occidentale, qu'occupait le séminaire, a été offerte à une école d'agriculture autorisée par lettre ministérielle du 28 Novembre 1837 ; cette école étant destinée aux élèves de la campagne, la municipalité refuse d'en faire les frais. Notons que cette institution, le Likès, fut rapidement prospère, et en 1864 elle s'établira route de Kerfeunteun.

Si l'on ajoute aux frais d'entretien des constructions, les traitements des professeurs, le renouvellement du matériel scolaire, l'on doit affirmer, qu'en dépit des subventions de l'Etat, la charge de son Collège fut pour la ville de Quimper très lourde.

IV. — Les programmes. Les élèves.

Au Collège municipal, comme dans tous les établissements secondaires de France, les programmes ne différèrent pas tout d'abord de ceux des Collèges de l'Ancien Régime et ce ne fut que lentement que l'on fit une part à l'enseignement moderne et scientifique des Ecoles Centrales.

L'on revient aux études presque. purement littéraires : explication des auteurs latins (Virgile, Horace, Cicéron, Tite-Live, Salluste), commentaires des traités sur les divers genres littéraires, un peu d'histoire, d'instruction religieuse. En 1850, l'emploi du temps de la classe de rhétorique est assez suggestif :

Lundi matin : pas de classe, cours d'histoire ;
Lundi soir : Etude du traité de rhétorique de Leclerc, Racine (Britannicus), Bossuet (Oraison funèbre d'Henriette de Fronce) ; Sophocle : Œdipe-Roi.
Mardi matin : Tacite (morceaux choisis), Virgile (Episodes), Bossuet ; Mardi soir : Questions littéraires développées par Lesieur ; études littéraires sur les ouvrages français prescrits pour le Baccalauréat ; Mercredi matin : Traité de rhétorique, Racine, Buffon, Virgile ;
Mercredi soir : Pas de classe, cours de mathématiques ;
Jeudi matin : Etudes littéraires comme le mardi soir ;
Vendredi matin : Pas de classe, cours d'histoire ;
Vendredi soir : Poétique française ;
Samedi matin : Traité de rhétorique, Tacite, Virgile ;
Samedi soir : Etudes littéraires, Œdipe-Roi.

Pourtant, cet enseignement paraît déjà beaucoup trop théorique : dès 1831, l'on reproche au Collège d'enseigner trop de grec et de latin, de ne viser qu'à former des médecins, des avocats, des ecclésiastiques, et non pas des citoyens pouvant accéder à toutes les places dans la société. L'évolution économique, les progrès de la grande industrie sous la Monarchie de Juillet et le Second Empire donneront à ces reproches un sens plus profond.

L'enseignement moderne apparaît à Quimper sous une forme assez curieuse : en 1834, une Ecole Primaire Supérieure, créée en vertu de la loi Guizot, s'installe dans les bâtiments du Collège ; elle sera tour à tour annexée au Collège et autonome. L'enseignement, au début, est donné par les professeurs du Collège : Histoire et géographie, grammaire, éléments de chimie et de physique, mathématiques, dessin, tenue des livres et « écriture perfectionnée » ; cette école se fit remarquer par son succès à l'Ecole des Arts et Métiers d'Angers. Lorsque la loi Falloux (1850) retira aux E. P. S. l'existence légale, celle de Quimper subsista annexée au Collège ; suivant un rapport du principal Ayrault, en Avril 1859, elle comprenait soixante élèves répartis en trois années, une année préparatoire, une année s'adressant aux élèves qui se destinaient au commerce et aux travaux de la campagne, et une année préparatoire aux Arts et Métiers. Cette école sera prospère jusqu'à la création du pensionnat Sainte-Marie au Likès.

En 1865, la loi du 27 Juin crée un « enseignement secondaire spécial » orienté, suivant Duruy, vers « les réalités et les besoins locaux » ; cet enseignement fera une place aux mathématiques, à la physique, à la mécanique, à l'histoire naturelle, à l'application des sciences à l'agriculture et à l'industrie. Cet enseignement, qui vise à « la diffusion des connaissances fondamentales et usuelles », deviendra, par une suite de décrets de 1881 à 1890, l'enseignement secondaire moderne ; ainsi sera réalisée dans le Collège la fusion des programmes des anciennes écoles secondaires et ceux de l'Ecole Centrale.

Le nombre des élèves du Collège de Quimper subit au XIXème siècle des variations considérables, oscillant entre 200 et 85. Deux crises paraissent avoir été particulièrement graves pour notre établissement : l'une vers 1830-1832, l'autre vers 1852-1856.

En 1830, sept professeurs ecclésiastiques refusent de prêter serment au nouveau gouvernement et démissionnent ; le Petit Séminaire de Pont-Croix fait au Collège de Quimper une redoutable concurrence. Colère du Conseil municipal : « Eh quoi ! l'on a écarté de l'enseignement des hommes qui se refusaient à prêter le serment de fidélité qu'exigeait le gouvernement..., et ces mêmes hommes... pourront reprendre ailleurs le droit d'enseignement qu'ils ont ici perdu ? ils pourront, par des menées sourdes et ténébreuses, par des promesses séduisantes, chercher à s'attirer nos meilleurs élèves... ? ». Cette période de 1830 à 1832 fut très troublée ; les écoliers, sans doute surexcités par les événements politiques, s'agitent ; dans une réunion tenue à Kerfeunteun, ils organisent une sorte d'insurrection, et le principal, Roudaut, reproche à un de ses collaborateurs de ne pas être étranger à ces menées : mais le principal doit démissionner. En Mars 1831, le Bureau d'instruction prend des mesures draconiennes pour rétablir la discipline et assurer la présence des élèves au cours, particulièrement à ceux de mathématiques. Autre élément de trouble : des soldats logés au Collège se conduisent en vrais soudards, chantent, sifflent, leurs instructeurs hurlent comme s'ils commandaient un bataillon sur le champ de bataille ; principal et professeurs se plaignent...

Le clergé combat le Collège, soutenant les petits séminaires qui lui font illégalement concurrence ; les charges financières de la ville étant très lourdes, il est question de transformer le Collège en école secondaire ecclésiastique ; en 1852, la municipalité refuse de destituer les professeurs laïques qui « sont excellents ». En 1856, le nombre des élèves ayant beaucoup diminué, la ville de Quimper peut difficilement verser la somme de 11.700 francs pour 85 élèves ! une commission nommée conclut que « la cause de la situation défavorable du Collège est que les familles bretonnes veulent une éducation religieuse et que cette éducation exige des professeurs ecclésiastiques » ; le principal du Collège de Lesneven a eu beaucoup de succès : il pourrait organiser à Quimper une école secondaire ecclésiastique. Pour des raisons imprévues, le projet échoue et le statu-quo est maintenu.

Arrêté dans son développement par des difficultés matérielles, hésitant dans ses programmes, soumis à des tiraillements d'ordre politique et religieux, durement concurrencé par l'enseignement libre, le Collège de Quimper au XIXème siècle est loin d'avoir joué en Basse-Bretagne le rôle qu'il avait eu aux XVIIème et XVIIIème siècles. Quelques-uns de ses élèves ont cependant tenu dans la société une place intéressante. Louis de Carné, diplomate, écrivain, député de Quimper à plusieurs reprises, est, croyons-nous, le seul Finistérien qui ait été « Immortel ». Guiliard, chirurgien de marine, procéda à l'exhumation de Napoléon, ramena sur la « Belle-Poule » la dépouille mortelle de l'Empereur, et, par lui, nous a-t-on dit, des familles quimpéroises ont reçu de précieux souvenirs... Fenoux, ingénieur en chef et inspecteur général des Ponts-et-Chaussées, construisit le beau viaduc de Morlaix, le port de commerce de Brest, le pont de Douarnenez, le phare d'Armen, etc... Parmi les prix d'honneur, relevons les noms de : Louis Hémon (1860), dont nous verrons plus loin le rôle dans l'érection du Lycée. Félix Hémon (1865), qui devint inspecteur général de l'enseignement secondaire et fut le père du romancier, auteur de Maria Chapdelaine. Georges Le Bail (1873), sénateur du Finistère, que ses fils Georges et Albert suivront au Collège et dans l'arène politique.

Comme aux siècles précédents, le Collège de Quimper fournit un fort contingent de marins et d'explorateurs : l'Amiral Ronarc'h, le héros de Dixmude, y fit ses premières études. Jules-Edmond Caron accomplit, en 1887, au Soudan, sous les ordres de Gallieni, une mission d'une haute importance géographique et politique, qui devait préparer l'établissement de la France à Tombouctou ; avec des moyens rudimentaires, sur une coquille de noix, Caron fit en quelques mois une exploration d'une précision étonnante ; ses études topographiques et ethniques permettent de le compter parmi les premiers pionniers de l'A. O. F.

Plan du collège de Quimper (Bretagne).

(Louis NICOLAS).

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