RECETTES DIVERSES et ANCIENNES |
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Théorie et pratique du Pot-au-Feu (1864) |
Tout le monde connaît la soupe au buf mais peu de personnes savent la faire convenablement. Nous ferons observer dabord que les pots en terre sont préférables aux marmites en fonte pour la préparation dune soupe au buf, et que, parmi ces pots en terre, ceux qui ont servi valent mieux que ceux qui sont neufs. Nous ferons observer ensuite quon nobtiendra jamais un bouillon aussi bon en mettant la viande dans leau bouillante, quen la mettant dans leau froide ou à peine tiède. En voici la raison : la viande de boucherie contient un liquide de même nature que le blanc duf. Cest ce que les savants appellent de lalbumine. Si vous le saisissez brusquement par la chaleur de leau, il se prend, il sépaissit comme le blanc des ufs que vous faites cuire jusquà ce quils soient durs, et une fois épaissi, il empêche le jus de la viande de sortir, de se mêler à leau et de former ainsi un excellent bouillon. Si, au contraire, vous plongez la viande dans leau froide ou seulement tiède, lalbumine de cette viande séchappe dans leau et finit par former lécume que vous enlevez au fur et à mesure quelle se produit. Le jus sort par conséquent de la viande en toute liberté, et vous êtes sûr que le bouillon nen vaudra que mieux. Sur ce point, la pratique des ménagères saccorde avec la théorie des savants. Nous dirons enfin que la viande grasse qui donne de gros yeux au bouillon, ne vaut pas la partie maigre dun animal gras.
Maintenant que nos recommandations sont faites, parlons du pot au feu.
Pour six litres deau, mettez un kilogramme et demi de buf ou de vache. Si vous avez un morceau de foie, un bout de jarret de veau et un os à la moelle, votre soupe nen vaudra que mieux. Ayez soin de mettre cette viande dans le pot de terre ou la marmite en même temps que leau. Dès que lécume commencera à se produire, salez et jetez dans la marmite deux gousses dail. Lorsque la soupe aura bien jeté son écume et bouillira, mettez-y deux carottes, un gros navet, un panais, un bouquet garni, composé de poireau, de céleri, persil et ciboule ; mettez-y aussi un oignon brûlé pour donner de la saveur et de la couleur au bouillon, ou bien, à défaut doignon brûlé, un oignon que vous aurez fait noircir sur la braise au moment de vous en servir.
Une fois les légumes dans le pot ou la marmite, faites bouillir à gros bouillons pendant environ dix minutes, puis éloignez le pot du feu, et laissez cuire doucement pendant quatre heures au moins, puis trempez, cest-à-dire versez le bouillon sur le pain que vous aurez préalablement fait griller, si cela est possible. Il va sans dire quil y aurait tout à gagner à laisser bouillir plus longtemps.
Quand on trouve que le bouillon se réduit trop et que lon juge à propos de lallonger avec de leau, il faut bien se donner garde demployer à cet effet de leau froide ; il importe quelle soit très chaude.
Crème de cassis, comparable à la meilleure chartreuse (1866) |
Au moment où le cassis commence à développer sa végétation, nous croyons devoir signaler lexcellente liqueur quon obtient avec linfusion de ses feuilles nouvelles.
Voici comment il faut opérer :
1° On prend trois bonnes poignées de feuilles tendres de cassis, on les dépose dans un bocal et lon verse par-dessus un litre de bon alcool très fort ; on laisse macérer les feuilles dans lalcool pendant quinze jours ; au bout de ce temps, on retire lalcool, qui a pris une teinte verte très prononcée, tandis que les feuilles de cassis sont devenues blanches.
On lave les feuilles avec un demi-litre deau, pour enlever le peu dalcool quelles ont absorbé. On réuni cette eau de lavage à lalcool.
2° On fait fondre un kilogramme de sucre blanc, de belle qualité, dans un demi-litre deau sur un feu très doux. Lorsque le sucre est refroidi, on procède à la confection de la liqueur de la manière suivante :
Dans un vase en verre, en faïence, en grès ou en bonne terre vernissée, on verse dabord lalcool qui a servi à linfusion des feuilles, ensuite le sirop de sucre. On ajoute 30 grammes deau de fleurs doranger et lon mélange bien le tout ensemble au moyen dune spatule de bois ou dune cuillère dargent, afin que lalcool et le sucre entrent en combinaison.
Comme toutes les liqueurs, celle-ci a besoin dêtre filtrée à travers une chausse de laine, garnie de papier sans colle, blanc et bien lavé. Après filtration, on met en bouteilles, et la liqueur est bonne à consommer.
Lexpérience a démontré que cette liqueur gagne beaucoup de qualité en vieillissant. Après deux ou trois mois de fabrication, ces principes se trouvent fondus ensemble, et la liqueur, qui est dune belle couleur verte, flatte lil, lodorat et le goût, de manière à rivaliser avec la meilleure chartreuse.