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LOUIS RIPAULT DE LA CATHELINIÈRE, CHEF VENDÉEN.

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LA CATHELINIÈRE (Louis RIPAULT DE), chef vendéen, célèbre par son courage et sa cruauté. A la première insurrection des départements de l'Ouest, en 1793, il souleva les paysans du pays de Retz, et s'empara du port de Saint-Céré et de Bourg-Neuf. Repoussé de Nantes avec Charette et attaqué par plusieurs colonnes républicaines en 1794, ne pouvant résister à ces forces, il voulut licencier ses troupes. Forcé de combattre par ses soldats, il battit une colonne républicaine ; mais, vaincu à son tour et blessé de deux coups de feu, il fut pris, conduit à Nantes et fusillé.

Ripault (Louis-François-Charles), chef vendéen secondaire, se qualifiait chevalier de La Cathelinière, du nom d'une métairie située commune de Frossay, dans l'arrondissement de Paimbœuf, département de la Loire-Inférieure. Sa famille, que était anciennement originaire de la même paroisse, avait été déclarée noble d'extraction, par arrêt de la Chambre de réformation, du 21 juin 1669. Elle sortait cependant à peine de la poudre des greffes ou tabeliers, et tenait encore au bras une utile liasse. Un de ses membres était petit notaire des petites juridictions seigneuriales de la Hunaudais et Saffré, en Frossay, dans le XVIème siècle. Le registre ou répertoire de ses actes, in-4°, en parchemin, existe et fait partie du cabinet d'archives de M. Chevas, a Nantes. (Voir aux pièces justificatives).

Louis-François-Charles Ripault de La Cathelinière naquit à la Mégerie, autre gentilhommière de Frossay, le 19 août 1768. Sa mère, Louise-Elisabeth Dorion, était issue d'une famille bourgeoise de Paimbœuf, et, par elle, il était cousin de Piron, autre chef vendéen, également subalterne. Son père avait eu lui-même pour mère Anne-Marguerite Ducassia, fille d'un lieutenant civil et criminel au présidial de Nantes, et petite-fille d'un ancien sous-maire et juge consul des marchands de cette ville. Ses parents ne pouvant rien en faire et ne possédant qu'une fortune médiocre, avec beaucoup d'enfants, l'embarquèrent fort jeune sur le navire d'un capitaine-marchand de la localité, nommé Delcol, qui se plaignait souvent de l'incapacité de son élève, et ne le désignait que par l'épithète de grand flandrin. Les autographes du personnage témoignent d'ailleurs de son peu d'aptitude, et prouvent qu'il ne savait pas écrire deux mots de français orthographiés [Note : En voici un curieux spécimen, fidèlement reproduit, d'après l'original qui fait partie de notre collection : « Monsieur, sy vous voulié faire des échange, je vous donnerée dix prisonnié pour. Chevalier de la CATHELINIÈRE, commandant généralle de l'armée catholique du péye Rai. Ce 19 juin 1793. Reponse dessuite ». Ces lignes furent écrites sur une lettre contenant une proposition d'échange de prisonniers, à l'occasion de la captivité d'un membre de la famille propriétaire du château d'Aux] ; en revanche, il était excellent tireur.

Comme Charette, il venait de quitter la marine, lorsque le soulèvement de la Vendée éclata [Note : Il est à observer que Charette et Cathelinière, l'un et l'autre marins, étaient tous deux chevaliers]. Cette tentative féodale, sous couleur religieuse, eut naturellement pour chefs les gentilshommes des bourgs et paroisses rurales, qui l'avaient provoquée par l'intermédiaire des prêtres, principalement du Haut clergé, composé de cadets de noblesse. C'est ainsi que Ripault se trouva choisi comme général, par les paysans de son canton, et s'empara, avec eux, du Port-Saint-Père et de Bourgneuf, où ils commirent tout d'abord d'atroces cruautés. Indépendamment du pillage auquel il se livrèrent, ils se saisirent, dans cette dernière ville, de diverses personnes désignées pour périr, les conduisirent à l'embranchement de la route de Nantes à Arthon, au lieu nommé la Feillette, et les y fusillèrent.

Parmi elles, une jeune femme, Mme Salaun (Élisabeth-Justine de Laveaux), femme d'un capitaine de navire, tomba sous la première décharge, mortellement atteinte [Note : Elle s'était mariée à Notre-Dame de Nantes, le 16 janvier 1787]. Un marchand, nommé Gauthier, fut plus heureux : blessé seulement à la joue, il eut la présence d'esprit de se laisser choir sur le coup et couvrir de terre ; puis il attendit, pour se relever, le départ des mitrailleurs et des fossoyeurs.

L'ancien maire de Bourgneuf, Pierre Mourain, avocat en Parlement ex-représentant de la Loire-Inférieure à l'Assemblée législative, était une des victimes plus spécialement vouées à la mort. Il reçut, presque à bout portant, la décharge des pistolets de La Cathelinière, et, comme il respirait encore, il fut achevé à coups de pelles apportées pour enterrer les cadavres [Note : Pierre Mourain est auteur de Réflexions sur les troubles intérieurs du royaume, Paris, impr. Nationale, 1792, in-8 de 12 pages ; et d'une Opinion sur les ecclésiastiques non assermentés... Inde mali labes].

Le curé constitutionnel Marchesse, vieillard de 65 ans, recteur de Bourgneuf et Saint-Cyr depuis vingt-un ans, fut attaché à la queue d'un cheval, accablé de mauvais traitements et traîné jusqu'à Machecoul, quartier-général des insurgés, où il avait été vicaire pendant dix-sept ans. Rendu là, on le conduisit à l'affreuse prison qui, comme un abattoir, ruisselait du sang des patriotes égorgés ; mais il n'en franchit pas le seuil : les brigands qui le tiennent lui écrasent la tête entre la porte et la muraille. Trente et quelques autres habitants de Bourgneuf, menés également à Machecoul, furent presque tous massacrés le lundi de Pâques, dans l'enclos des Filles du Calvaire, où Charette et Souchu parquaient leurs victimes [Note : Notes historiques et statistiques sur les communes du département de la Loire-Inférieure, par J. Chevas. Canton de Bourgneuf, arrondissement de Paimbœuf, pag. 74-75, in-8, 1852].

Ayant ensuite assemblé le plus d'hommes qu'il put dans la localité, Cathelinière coopéra, le 27 mars, à l'attaque et à la prise de Pornic par Charette. Ce dernier traçait ainsi le bulletin de cette expédition, dans un singulier billet autographe, que fait partie de notre collection de pièces révolutionnaires, sur l'Ouest de la France.

A Monsieur Souchu, pour tire au Conseil central (de Machecoul).
Frères et amis, Avec le secours de l'Être-suprême, nous avons pris Pornic dans une demi-heure. Les brigands de cet endroit s'étant réfugiés dans différentes maisons, d'où ils pouvaient nous faire beaucoup de mal, je ne trouvai que le feu qui put faire sortir ces coquins de leurs cavernes. Vous me trouverez peut-être sévère dans mes expéditions, mais vous sçavez comme moi que la nécessité est un devoir. La perte de l'ennemi est à peu près de soixante hommes. Nous n'avons eu que deux hommes de blessés, encore il y en a un qui l'a été par sa faute. Vous recevrez demain un canon de 18 et un pierrier, que nous avons pris à Pornic. Nous sommes, frères et amis, dévoués pour la bonne cause jusqu'à la mort. LE CHer CHARETTE commandant. Pornic, 27 mars 1793
.

Ripault se joignit encore à Charette, le 20 juin suivant, pour reprendre Machecoul, et quelques jours après pour assiéger Nantes. Mme Delco, femme de son ancien patron, s'y était réfugiée. Il lui fit alors passer dans un coin de beurre, que lui porta une paysanne, un billet par lequel il l'engageait à ne rien craindre, et à se disposer à le recevoir chez elle, lorsqu'il serait entré dans la ville avec son armée. Ce fait donne à la fois une idée de l'outrecuidance des chefs vendéens et des subterfuges employés pour correspondre à l'intérieur de la cité [Note : « Les lettres de Charette pénètrent par des hoctiers ou leurs femmes, qui viennent en ville par les ponts, sous le prétexte d'enlever les immondices » (Note de police extraite des papiers du Comité révolutionnaire de Nantes)].

Quoique subordonné, dans les circonstances importantes, au chef principal de la basse Vendée, par une sorte de suzeraineté féodale, et comme relevant en arrière fief d'un seigneur dominant, il resta toujours autant qu'il put chef de canton indépendant. Il assista en cette qualité, le 19 juillet, au conseil de guerre, tenu à Châtillon, pour procéder à l'élection d'un nouveau généralissime des armées royales et catholiques, en place du paysan Cathelineau. On sait que le choix tomba sur d'Elbée, qui n'eut pu d'abord commander en chef, mais qui avait pris toutes ses mesures pour lui succéder : ce qui vexa cruellement Charette, auquel le Conseil avait seulement assigné le grade d'adjoint aux généraux de division. Un mois et demi après, Ripault signait, avec les autres chefs vendéens, le Règlement général sur la distribution de la force armée dans le pays conquis, du 4 septembre, qui servit plus tard à sa condamnation. (Voir aux pièces justificatives).

D'après le général Turreau, Cathelinière commandait douze mille hommes dans les environs de Machecoul et de Princé [Note : Mémoires pour servir à l'Histoire de la guerre de la Vendée, pag. 81, 1ère édit. de l'an III — 1795, à Evreux Chaumont, in-8 ; et pag. 61 de l'édit. De Baudouin, Paris, 1824, dans la Collection des mémoires relalifs à la Révolution française, publiée par MM. Berville et Barrière]. Son jugement ne lui en donne que dix mille, et nous croyons que ce dernier chiffre est bien suffisant.

Les faits d'armes de Cathelinière ne présentant guère que des actes isolés et sans portée d'agression ou de résistance, on n'entrera point dans ce dédale d'opérations, vraie stratégie de guérillas, dans un pays difficile, bocageux et coupé. L'extrait suivant d'un rapport militaire du général Haxo au général en chef, en donne suffisamment l'idée :

« Hier matin, écrivait-il le 13 janvier 1794, j'ai fait attaquer le rassemblement de La Cathelinière dans la forêt de Princé. L'attaque était dirigée sur quatre points. La première colonne, sortie de Paimbœuf, s'est portée sur la paroisse de Chauvé ; la seconde, sortie de Machecoul, sur Arthon ; la troisième, sortie de Sainte-Pazanne, sur Saint-Hilaire-de-Chaléons ; la quatrième enfin, sortie du château d'Aux, sur Rouans. Cette disposition avait pour but d'envelopper et de détruire l'ennemi. Mes intentions ont été en partie remplies : les rebelles, au nombre de sept à huit cents, sortant de la forêt de Princé, avec l'intention de se porter sur Bourgneuf, ont été attaqués de front par la seconde colonne, et pris en flanc par la troisième ; cette disposition a jeté une telle terreur parmi les rebelles, qu'après une fusillade assez vive de la part de nos républicains, cette horde s'est mise totalement en déroute. J'ai donné ordre aux quatre colonnes de les suivre sans relâche ».

La Cathelinière avait essuyé beaucoup de rencontres et de petits combats, dont il s'était tiré, lorsque dans une dernière affaire, peut-être dans celle-ci ou peu après, il fut dangereusement blessé au ventre, soit par les républicains, comme il le dit en son interrogatoire, soit par un traître, comme le prétendent Beauchamp, Bouvier-Desmortiers et fa tradition. Il put cependant échapper provisoirement, en se cramponnant à son cheval, et se réfugia dans sa maison incendiée du Moulinet, en Frossay, où il se croyait mieux caché, et plus à portée de recevoir les secours dont il aurait besoin. Mais il ne farda pas à y être pris. Le hasard le trahit dans une circonstance où la force armée ennemie était venue de ce côté. Toutefois, il existe encore à cet égard deux versions : d'après l'une, et c'est la plus accréditée, une garde national de Paimbœuf, nommé Marquis, l'aurait découvert sous une met de pressoir, en poursuivant une poule qui s'y était sauvée [Note : « L'agent national du district de Paimbœuf au comité du Salut public. — 11 ventôse an II (1er mars 1794). Le sieur Cathelinière, chef de brigand et fameux par ses assassinats, a été pris hier dans son pressoir, au Moulinet, par des troupes du cantonnement, sous les ordres de l'adjudant général Guillemé. Un détachement était sorti, et les volontaires rôdaient autour de cette maison ; ils courent après une poule qui se réfugie sous le pressoir ; en allongeant la main pour la prendre, ils trouvent une couverture, et dessous un brigand fort mal habillé, ayant une large blessure au côté. Ils lui disent que s'il veut leur déclarer où est Cathelinière, on lui sauvera la vie. Il répond : c'est moi. Effectivement, c'était le scélérat. On le conduit à Nantes, au Tribunal révolutionnaire »]. D'après l'autre, ce serait son propre cheval abandonné, qui, en revenant instinctivement auprès de son maître, l'aurait décelé dans ce pressoir [Note : « La Cathelinière, l'un des chefs les plus redoutables des brigands, était abandonné de tout le monde ; il avait vu incendier toutes ses propriétés, et il était réduit à se loger sous le toit d'un pressoir. Un cheval qu'il laissait paître, errer dans la prairie, n'ayant point d'asile pour le loger, fit découvrir son maître, près duquel il alla se réfugier à l'approche des volontaires. Il fut conduit à Nantes et guillotiné » (Bulletin du Tribunal révolutionnaire, VIème partie, n° 59 p. 233. Déposition de Dubois-Crancé dans le procès de Carrier)]. Quoi qu'il en soit, Cathelinière ne commandait plus alors que trois mille hommes, que son absence acheva de disperser. Conduit immédiatement à Nantes, par bateau, il fut d'abord amené au Comité révolutionnaire, qui s'était empressé de le requérir, pour en tirer des renseignements sur la guerre de la Vendée.

Il comparut ensuite devant les représentants du peuple, Prieur (de la Marne), Garrau, Hentz, Francastel, Dubois-Crancé, alors en mission à Nantes, et devant le général en chef Turreau. Aux reproches des commissaires de la Convention, d'avoir fanatisé les paysans, et fait verser tant de sang pour leur religion et leur roi, La Cathelinière répondit qu'ils méritaient le même reproche, eux qui fanatisaient le peuple pour la liberté, qui n'était, selon lui, qu'une chimère [Note : Rapport de Hentz et Francastel, sur leur mission près de l'armée de l'Ouest, etc., pag. 5, en note. Paris, imp. nat., vendémiaire an III, in-8 de 38 pages].

Dans une autre circonstance de nos guerres civiles, un républicain fut amené prisonnier devant le général des royalistes : Pourquoi te bas-tu, lui demanda ce général ? — Pour être libre, répondit le républicain. — Crois-tu donc, répliqua le royaliste, que je veuille être esclave ? Et il avait raison historiquement ; seulement, il voulait la liberté pour lui, et l'oppression pour le reste, c'est-à-dire, l'autorité privée ou féodalité : le républicain voulait au contraire la liberté pour tous, c'est-à-dire l'égalité dans la liberté ou l'autorité publique.

A défaut de concordance et de justesse absolue, les paroles de La Cathelinière attestaient du moins une grande énergie de la part d'un pauvre blessé, placé dans une pareille situation. Après qu'on l'eut entendu, le général requit aussitôt sa traduction à la commission militaire de l'armée de l'Ouest, en ces termes :

« Au quartier général, à Nantes, le 12 ventôse, an second de la république française, une et indivisible. Turreau, général en chef de l'armée de l'Ouest, ordonne aux citoyens composant la commission militaire, de s'assembler sur le champ, dans le lieu ordinaire de ses séances, pour y juger Cathelinière, chef de brigands. Le général en chef, TURREAU ».

Ce fut alors que La Cathelinière dit à un aide-de-camp qui le gardait, en attendant son transfert:
« Les mesures adoptées par votre général nous ont réduit à la dernière extrémité ; mon parti est perdu sans ressources. M. de Charette ne voulait pas faire la guerre cet hiver, et si l'on nous eut donné le temps de nous réparer, nous aurions eu au printemps cinquante mille hommes, à l'épreuve de toute espèce de dangers, de fatigues et de privations. Nous manquons de munitions de guerre, et la destruction des moulins et des fours nous privera du secours des munitions de bouche qui nous restent, etc. » [Note : Mémoires de Turreau, déjà cités, p. 228. Les mêmes données avaient déjà été fournies, après la prise de Noirmoutier, par le généralissime d'Elbée, qui croyait aussi son parti perdu. Voir également Turreau, page 191].

En même temps qu'il prenait cet arrêté, le général Turreau le notifiait aux membres de la commission militaire, séant à Nantes :

« Vous voudrez bien, citoyens, au reçu du présent ordre, procéder au jugement d'un chef de brigands, nommé le chevalier de Cathelinière, que je vais faire conduire à votre tribunal sous bonne et sûre garde. L'exécution doit suivre de près la sentence, d'autant plus qu'une blessure dangereuse met Cathelinière dans l'impossibilité d'exister longtemps. Il faut empêcher la mort de prévenir son supplice. Vous avez à venger, par votre jugement, les malheureuses victimes de la fureur de ce scélérat. Salut et fraternité. Le général en chef, TURREAU ».

Le commandant temporaire de la place, Boivin, recevait aussi des instructions pour se concerter avec la commission militaire, quant aux mesures à prendre lors du procès et de l'exécution de La Cathelinière. Ordre précis était donné pour que tous les postes fussent doublés, et la plus grande surveillance observée.

Comme c'était un personnage de marque et fort connu dans la ville, on crut devoir procéder à son jugement avec plus de solennité qu'à l'ordinaire. Les deux commissions militaires près les armées de l'Ouest et des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor), qui siégeaient alors à Nantes, se réunirent au Bouffay, dans la salle des audiences du tribunal révolutionnaire, sous la présidence de Mutius-Scaevola Lalouet, et, dans une séance extraordinaire, le condamnèrent à mort. Voici textuellement l'interrogatoire qu'il subit, et auquel se bornèrent à peu près les débats qui précédèrent le jugement :

Interrogé s'il n'était pas aux massacres de Machecoul ? — Nie le fait. — Son âge ? — 25 ans passés d'août. — S'il a été garde du roi ? — Non. — Si son armée est passée avec Charette ?
Répond que oui. — Comment a-t-il été blessé ? Avoir été blessé par les républicains ; il s'était avancé avec son armée pour couvrir Salar. — [Note :  Il y a ici omission d'une question relative sans doute à Charette, car il ne peut s'agir de Cathelinière dans la réponse. La même lacune se reproduit ensuite plusieurs fois] Répond qu'il a encore quinze à vingt mille hommes. — Environ quinze armées. — A dit ne recevoir aucune nouvelle de Charette, parce que son armée a passé au Nord. — Son second était Salmonière, tué à Savenay. — Qu'est devenu La Rochejacquelein ? — Il n'en sait rien. — S'il a connaissance de Piron ? — Dit qu'il le croit mort à Savenay (on sait le contraire). — S'il commandait l'avant-garde à Savenay et n'a point passé la Loire ? — Dit avoir retiré toutes ses forces à Sainte-Pazanne, pour tromper les patriotes. — Où a-t-il caché ses papiers? — Ils sont brûlés. — Son père a été pris dans les marais de Bouin. — A dit n'avoir jamais connu Bois-Gautier. — S'il connaissait Stoflet ? — Répond qu'il le connaît, qu'il commandait sous La Rochejacquelein. — Qu'ils subsistaient par la quantité de grains cachés. — Ils souffraient faute de moulins. — Le moulin qui reste est un moulin à eau, placé en Arthon, aux Perrières [Note : Perrières et Salar ci-dessus sont des localités inconnues, que le greffier a sans doute mal orthographiées].

Cet interrogatoire fini, lecture fut donnée au prévenu de l'article 6 de la loi du 19 mars précédent, puis les deux commissions militaires réunies le condamnèrent à la peine de mort, ses biens confisqués au profit de la République, et ordonnèrent que la sentence serait exécutée sur-le-champ. (Voir aux pièces justificatives).

En politique, on accepte le fait. La raison dédaigne de protester contre la fatalité, et la nature s'y soumet. Il n'y avait plus, dès-lors, pour Cathelinière, qu'à marcher à la mort, impassible et muet. Tout au plus lui passerait-on un amer sourire, en apercevant sur son passage la statue de la liberté ; et c'est là ce qu'on attend de ce chef à l'âme d'acier, qui regarde la mort comme prix du ciel, soit qu'il la donne, soit qu'il la reçoive, surtout après sa réponse aux commissaires de la Convention. Mais le même homme, que les extrêmes périls de la guerre n'avaient pas ébranlé, et qui venait d'affronter les juges de son roi, manqua de fermeté et se démentit devant l'échaffaud. Comme d'Elbée, à Noirmoutier [Note : « Je suis si peu ennemi du système républicain que, si l'on veut surseoir mon exécution jusqu'à ce que le projet de pacification soit au point que l'on ait plus besoin de moi, j'offre d'y travailler sous telle surveillance que ce soit. J'offre de pacifier les districts de Montaigu, Cholet, Saint-Florent, une grande partie de Vihiers, sinon la totalité. Mais il est essentiel que j'aie pour agents généraux le citoyen Boisy, dans le district de Montaigu, et le citoyen Duhoux, dans celui de Saint-Florent .... ; m'obligeant, si l'on m'emploie, à ne pas écrire un mot que je ne soumette à la révision du surveillant que l'on m'indiquera. Fait à l'île de la Montagne (Noirmoutier), ce 20 nivôse, l’an II de la République. Signé D'ELBÉE ». En présence de si honteux désaveux de soi-même, de la part de généraux, voir même d'un généralissime des armées royales et catholiques, qui n'avaient d'autre alternative honorable que la victoire ou le martyre, on pardonne à la Dubarry de s'être écriée : Encore un petit moment, mon petit bourreau. Elle, du moins, ne cédait qu'à l'instinct de la vie, mais elle ne promettait pas la vertu], il chercha à prolonger sa vie, afin de prêcher la soumission aux paysans, disait-il. C'était en quelque sorte adorer ce qu'il avait brûlé et brûler ce qu'il avait adoré. Cette insigne faiblesse ne servit qu'à lui attirer le mépris de ses ennemis. Peu de jours après son supplice, un juge des commissions militaires, nommé François Bignon, écrivait à quelque ami, dans une lettre intime qui a été publiée plus tard :

« Nous avons jugé le fameux La Cathelinière ; il est mort en j.-f. Après son jugement, il nous a demandé un sursis de trois jours, pour avoir le temps de faire une proclamation aux malheureux habitants des campagnes qu'il avait lui-même égarés, et les faire rentrer dans le devoir. La commission n'y a eu aucun égard, et il a été expédié sur-le-champ » [Note : Pièces remises à cinq époques différentes, par les comités réunis, à la commission des Vingt-un (chargée d'examiner la conduite de Carrier). Imprimées par ordre de la Convention, pag. 111 ; Paris, impr. nat., brumaire, an III, in-8].

Tandis que cela se passait à Nantes, un membre de la Société populaire de Paimbœuf demandait à chanter des couplets, enfants de son patriotisme, sur la prise du chef royaliste. Le dépôt en fut ordonné après l'audition, et le nom du citoyen Delaunay, leur auteur, proclamé dans la séance avec enthousiasme.

Ces couplets amenèrent la proposition d'envoyer une adresse aux représentants du peuple, pour en obtenir que La Cathelinière fût jugé et exécuté à Paimbœuf, dans l'arrondissement duquel il avait commis tous ses forfaits. Cette adresse est aussitôt rédigée et adoptée ; deux membres sont députés à Nantes pour la présenter et l'appuyer ; mais la Société populaire s'y était prise trop tard pour avoir le triste spectacle de la mort d'un ennemi politique, car, à la séance du lendemain 3 mars, le citoyen Marquis, celui-là même qui avait découvert La Cathelinière, et l'avait accompagné à Nantes, vint rendre compte, à l'assemblée, de son voyage, et dire quel plaisir la population nantaise avait ressenti à la vue du prisonnier. Il a été interrogé, jugé et condamné à mort, dit Marquis ; l'exécution a suivi de près... et ces paroles sont couvertes d'applaudissements frénétiques [Note : Notes historiques et statistiques sur les communes du département de la Loire-Inférieure. — Canton du Pellerin ; par J. Chevas].

La prise et l'exécution de La Cathelinière furent annoncées en même temps à la Convention nationale, dans sa séance du 16 ventôse suivant (6 mars), par une lettre du général en chef Turreau, à la lecture de laquelle on applaudit. Cette nouvelle fut confirmée le lendemain, par une autre lettre du président de la commission révolutionnaire, Lalouet, qui avait présidé les deux commissions militaires réunies.

 

PIÈCES JUSTIFICATIVES
Et Preuves de la Notice sur Ripault de La Cathelinière.

FAMILLE RIPAULT.
« Ripault ou Ripau, sieurs de la Caffinière, de la Castelinière, ressort de Nantes, porte de gueules au sautoir échiqueté d'or et d'azur, cantonné de quatre fleurs de lis d'or. Arrêt du 21 juin 1669 ».
(Le père TOUSSAINT DE SAINT-LUC, Mémoires sur l'état de la noblesse de Bretagne, IIIème part., page 244 ; Paris Prignard, 1691, in-8°)
« Jean Ripault, sieur de la Caffinière, épouse Jeanne Brecart [Note : « Jehan Ripault et Jehanne Brecart, sa femme, à cause d'elle, par raison de la maison ancienne de la Caffinière, jardins, bois anciens, revenus et autres héritages, un hommage au seigneur de Frossay » (Extrait d'un vieux ms. historique sur Frossay)].

Jean Ripault, sieur de la Caffinière, épouse Renée Le Blanc ; ils vivaient en l’an 1528.
Claude Ripault, sieur de la Louynais, épouse, en septembre 1570, Anne Goheau.
Jérôme Ripault, sieur de La Caffinière, épouse, en l'an 1599, Anne Carduel.
René Ripault, sieur de la Caffinière, épouse, en février 1633, Anne Poyet.
Christophe Ripault, sieur de la Caffinière.

Suzanne Ripault, partagée en l'an 1602, épouse Gédéon Laurent.
François Ripault épouse, en juin 1642, Marguerite Poyet.
Charles Ripault, sieur de la Cathelinière [Note : « Aveu du 20 juin 1504, rendu par nobles gens Jehan de Saffré et Jehanne Viau, sa compagne, seigneur et dame de la Cathelinière, à noble et puissante dame Hardouine de Surgères, noblement à foi et hommage et rachat, des lieu, domaine et hébergement de la Cathelinière et autres héritages, sur quoi déclarent devoir 8 deniers monnoie de rente ». (Ibid.) Ce n'est que longtemps après que la terre de la Cathelinière, qui est une métairie située sur le chemin de Frossay à Chauvé, est entrée dans la famille Ripault et lui a servi de surnom].

Par arrêt rendu en la Chambre de la Réformation, le 21 juin 1669, au rapport de M. Denyau, ils ont été déclarés nobles d'extraction » (Réformation, de la noblesse de la province de Bretagne, faite les années 1667, 68, 69, 70 et 1671, tom. III, lettre R, ms. in-fol., conservé à la Bibliothèque publique de Nantes).

Nous compléterons cet extrait généalogique par les degrés suivants, quoiqu'ils ne s'y rattachent pas immédiatement, mais ils sont les seuls venus à notre connaissance :

Charles Ripault, écuyer, sieur de La Cathelinière, époux d'Anne-Marguerite Ducassia ; dont :
1° Julien-Charles, né le 5 avril 1732 ; il s'intitula, plus tard, sieur de la Corbivais, en Saint-Viault ;
2° François, qui suit.

Charles avait un frère nommé Pierre, sieur de la Rimbaudière, qui avait épousé la soeur de sa femme, Barbe Ducassia, et qui mourut le 17 janvier 1750, à l'âge de cinquante-cinq ans ; — et une soeur des prénoms de Marie-Jeanne.

François, chevalier, sieur de La Cathelinière, né le 9 mars 1733, épousa Louise-Elisabeth Dorion. Il habita d'abord la Mégerie, petite gentilhommière de Frossay, où naquirent ses premiers enfants, et prit ensuite pour demeure le Moulinet, vers 1773. Il fut l'un des premiers chefs du pays de Retz, lors du soulèvement de la Vendée ; mais quand il fallut se battre, comme il était très gros et peu ingambe, il céda le commandement à son fils et se retira, avec sa femme et ses deux filles, dans les marais de Bouin, où ils furent tués.

De tous ses enfants, on se bornera à celui qui, comme chef vendéen, est le sujet de cette notice, et dont voici l'acte de naissance :

« Le 19ème jour d'août 1768, a été baptisé par moi, recteur soussigné, Louis-François-Charles, né de ce jour à la Mégerie, fuis de Messire François Ripault, sieur de La Cathelinière, et de dame Elisabeth-Louise Dorion, son épouse. Ont été parrain Jean Laheu, et marraine Michelle Guineau, femme de René Vrignaud, qui ont déclaré ne savoir signer. – J.-B. PICART recteur de Frossay ».

xxxxxxxx

DE PAR LE ROI.
RÈGLEMENT GÉNÉRAL SUR LA DISTRIBUTION DE LA FORCE ARMÉE DANS LE PAYS CONQUIS.

Le conseil militaire et le conseil supérieur d'administration (des armées royales et catholiques) réunis, considérant que, par son décret du 2 août 1793 [Note : Voici les principaux articles de ce décret, sur lequel les chefs vendéens, en s'accolant aux étrangers, déversaient tant d'odieux : I. Le ministre de la guerre donnera sur-le-champ les ordres nécessaires pour que la garnison de Mayence soit transportée en poste dans la Vendée ... II. Il sera procédé à l'épurement de l'état-major et des commisaires des guerres de l'armée des côtes de la Rochelle, pour leur substituer des officiers-généraux et des commissaires d'un patriotisme prononcé. VI. ll sera envoyé, par le ministre de la guerre, des matières combustibles de toutes espèces pour incendier les bois, les taillis et les genêts. VII. Les forêts seront abattues, les repaires détruits, les récoltes seront coupées par les compagnies d'ouvriers pour être portées sur les derrières de l'armée, et les bestiaux seront saisis. VIII. Les femmes, les enfants et les vieillards seront conduits dans l'intérieur ; il sera pourvu à leur subsistance, à leur sûreté, avec tous les égards dus à l'humanité. XIV. Les biens des rebelles de la Vendée sont déclarés appartenir à la République ; il en sera distrait une portion pour indemniser les citoyens qui seront demeurés fidèles à la patrie, des pertes qu'ils auraient souffertes], la soi-disant Convention nationale, poussant la cruauté jusqu'au délire, a prescrit aux soldats égarés qui défendent sa cause, la dévastation entière du pays conquis, l'enlèvement des moissons, l'incendie des forêts, la déportation des vieillards, femmes et enfants, la démolition de toutes les habitations, du riche comme du pauvre, la confiscation des biens et des propriétés, et le massacre général de tous les hommes en état de porter les armes, sans distinction d'état, de rang et d'opinion, pour ne faire du pays entier qu'un vaste désert, et le partager ensuite entre eux et leurs complices.

Que déjà les chefs sanguinaires des armées soi-disant républicaines mettant à exécution ces barbares décrets, ont exercé des cruautés inouïes, des brigandages affreux et d'horribles massacres dans les parties du pays conquis, dont le sort des armes leur a fait obtenir la possession momentanée ;

Qu'abusant de l'indulgence qu'ont eue les puissances étrangères pour la garnison de Mayence et celles des autres villes françaises, conquises en leur nom et par la force de leurs armes pour sa majesté très-chrétienne, la même Assemblée contraint les soldats qui composaient lesdites garnisons à marcher en poste contre nous qui soutenons la même cause, au mépris du serment qu'elles ont fait de ne plus porter les armes pendant la durée de la guerre ;

Convaincus que, pour résister à nos ennemis, préserver le pays conquis et ses malheureux habitants des horreurs dont ils sont menacés, mettre à couvert des incursions de l'ennemi leurs enfants et leurs femmes, leurs biens et leurs propriétés, rendre impuissants tous les efforts de la scélératesse et de l'irréligion combinés contre nous et dirigés par des êtres féroces, dont le premier besoin parait être la soif du sang, il faut de l'ensemble dans les vues, de l'unité dans les projets et une telle distribution de force, qu'en même temps que nos armées agiront offensivement, des corps séparés protègent et défendent tous les points de la frontière du pays conquis ; sur ce, ouï M. Carrières pour le procureur-général de Sa Majesté, ont arrêté et arrêtent ...

(Suit un long règlement en trente-neuf articles, à la fin duquel on lit) :

Fait en conseil militaire et en conseil supérieur d'administration, réunis à Châtillon-sur-Sèvre, le 4 septembre 1793, l'an premier du règne de Louis XVII.

Signé d'ELBÉE, DONNISSAN, de ROYRAND, chevalier CHARETTE, LESCURE, de BONCHAMPS, de LA ROCHEJACQUELEIN, de LA CATHELINIÈRE, Chevalier DESSESSARTS, de CUMONT, chevalier de FLEURIOT, de BOISY, le prince de TALMONT, STOFFLET, de MARIGNY, DUHOUX-D’HAUTERIVE, chevalier de PERREAU, de SOLERAC, de BEAUVOLLIER l’ainé, chevalier de VILLENEUVE. Par le conseil militaire : DURY DE BEAUVAIS, secrétaire. — GABRIEL, évêque d'Agra, président du conseil supérieur ; Michel DESSESSARTS, second président ; BERNIER, curé de Saint-Laud d'Angers ; BRIN, doyen de Saint-Laurent ; MICHELIN LE MAIGNAN, BOUTILLIER DES HOMELLES, BODI, PAILLOU, LENOIR, COUDRAYE, THOMAS, GENDRON. Par le conseil supérieur : P. JAGAULT, secrétaire général.
(A Châtillon-sur-Sèvre, de l'imprimerie royale du Conseil supérieur, 1793, in-4° de 15 pag.).

 

Le 30 janvier 1794 (11 pluviôse an II), le commissaire du district de Paimboeuf, Benoit, écrit à la Société populaire de cette ville, que le détachement cantonné à Frossay, ayant eu avis que les royalistes se tenaient dans le taillis des Gaudinais, s'y est transporté et a tué pour le moins soixante de ces révoltés.

« Cette nouvelle, porte le procès-verbal de la séance, nous a été confirmé par un de nos braves frères d'armes, témoin oculaire, qui a ajouté que La Cathelinière, digne chef de ces scélérats, avait été grièvement blessé dans cette affaire ».

Le 1er mars suivant (11 ventôse), Muscar, commandant le poste de la Hibaudière, écrit au général Vimeux :

« La bonne nouvelle que je vais t'annoncer te comblera de joie, ainsi que tous les républicains qui désirent voir enfin l'anéantissement de la Vendée. La Cathelinière est pris : un détachement sorti de Vue a fait cette capture à midi. La prise de ce chef, distingué par tant de cruautés, entrainera sûrement la destruction totale de la horde qu'il commandait : on va le conduire à Nantes ».

Le commandant du bataillon de Dieppe écrit également au même général :

« Je t'envoie le fameux La Cathelinière qui a été arrêté par un détachement sorti ce matin de Vue, pour aller protéger l'enlèvement de bois à l'étang de Ferrière. A son retour, ce détachement a fouillé la paroisse de Frossay et a arrêté ce chef de brigands à sa maison du Moulinet. Je l'envoie au Tribunal révolutionnaire, afin que personne n'en prétende cause d'ignorance. Je suis satisfait qu'il ait été arrêté par un détachement du bataillon que je commande ».

De son côté, Vimeux transmet immédiatement au général en chef cette nouvelle qui se repercutait ainsi comme d'écho en écho :

« Je m'empresse de te faire part que le fameux La Cathelinière a été arrêté par un détachement sorti de Vue. Le porteur de la lettre m'a dit qu'il avait trois blessures et qu'il serait amené demain au Comité révolutionnaire. Fais en part, je te prie, aux représentants du peuple ».

Enfin, le lendemain Turreau écrit à son tour au Comité d Salut public, à Paris :
« ..... Un événement également avantageux est la prise du ci- devant chevalier de La Cathelinière ; il est en mon pouvoir. Une blessure dangereuse l'avait contraint de se retirer chez lui, à Frossay. On l'y a trouvé caché dans un pressoir. Il est résulté de l'interrogatoire qu'il a subi, que son absence a dispersé le rassemblement de trois mille hommes qu'il commandait. Son supplice va venger la mort des braves militaires qui ont été les victimes de ses fureurs.

Quinze mille brigands détruits par les colonnes agissantes, La Rochejacquelein tué, La Cathelinière arrêté, une grande partie des repaires des brigands incendiés, presque toutes leurs ressources enlevées, voilà où nous en sommes.... ».

Le même jour, Boivin, commandant temporaire de la place de Nantes, répond au général en chef Turreau :
« Conformément à tes intentions, je viens de donner l'ordre précis pour que tous les postes soient doublés et la plus grande surveillance observée.

Quant aux mesures à prendre lors de l'exécution de La Cathelinière, je te prie de me faire connaître devant quelle Commission militaire il est ou sera traduit, afin que je puisse me concerter avec elle, comme tu nie le prescris ».

(Guerres des Vendéens et des chouans contre la République, française, par un officier supérieur des armées de la République. (Savary), tom. III, pag. 260-264 ; Paris, Baudouin, 1825, 6 vol. in-8°).

« Ordre du Comité révolutionnaire de Nantes.

Considérant qu'il est important de prendre des renseignements du nommé La Cathelinière, chef de brigands, les citoyens Bataille et Jolly sont requis de se transporter sur les quais où doit aborder ce scélérat, et de communiquer le présent aux conducteurs pour le traduire au Comité.
Nantes, le 12 ventôse an II de la République, etc. CHAUX, GOULLIN BACHELIER, etc. ».

Extrait des registres de la Maison d'Arrêt et de Justice du Bouffay, de la commune de Nantes.

«  Concierge de la Maison d'Arrêt du Bouffay, tu feras bonne et sûre garde du nommé Ripault, dit Cathelinière. Nantes, le 12 ventôse l'an deux de la République, etc. GOULLIN ». (Registre d'écrou du Bouffay, fol. 120. En marge : Exécuté le 12 ventôse).

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JUGEMENT DES COMMISSIONS MILITAIRES PRÈS LES ARMÉES DE L'OUEST ET DES CÔTES-DU-NORD RÉUNIES, QUI CONDAMNE LOUIS RIPAULT DE LA CATHELINIÈRE, EX-NOBLE ET CHEF DE BRIGANDS, A LA PEINE DE MORT.

Séance extraordinaire du 12 ventôse après midi, tenue par les Commissions militaires près les armées de l'Ouest et Côtes-du-Nord, réunies en la salle ordinaire du Tribunal révolutionnaire, place du Bouffay, à Nantes, où présidait Mutius-Scévot Lalouet, président, et assistaient Anne-Jacques-Joseph Le Noir, Étienne Quicque, Claude Castrie et Jean Carrait, ayant pour adjoint Claude Bouchereau, faisant les fonctions de secrétaire-greffier.

Les Commissions militaires des armées de l'Ouest et Côtes-du-Nord, extraordinairement assemblées aux fins d'ordres du citoyen Terreau, général en chef de l'armée de l'Ouest, en date de ce jour 12 ventôse, ont fait traduire, par la force armée, en l'auditoire, Louis Ripault de La Cathelinière, ex-noble, se disant marin, âgé de 25 ans, natif et domicilié de la commune de Frossay, district de Paimbœuf, département de la Loire-Inférieure, chef de brigands. Interrogé sur les dispositions, marches, contre-marches, pourvoyance des armées insurgées, et assassinats commis sur les patriotes par les brigands soumis à ses ordres ; après avoir entendu l'accusé dans ses réponses, déclarations et aveux, les commissions réunies le déclarent atteint et convaincu d'avoir été, en sa qualité d'ex-noble, instigateur et provocateur des attroupements des révoltés ; d'avoir commandé une division de dix mille hommes dans l'armée des rebelles ; de les avoir maintenus dans l'esprit de rébellion par une proclamation incendiaire, au nom du roi, en date du 4 septembre 1793 (vieux style), signée d'Elbée Donnissan, de Royrand, chevalier Charette, Lescure, de Bonchamps, de La Roehejacquelein, de La Cathelinière , etc. , etc. [Note : Le reste comme ci-dessus. Nous supposons que cette pièce est la même chose que le Règlement général sur la distribution de la force armée dans le pays conquis, dont le préambule est, en effet, une véritable proclamation. Il est également au nom du Roi, daté du mère jour et signé des mêmes personnages, dont les noms sont placés dans le même ordre. C'est, du moins, le seul document à cette date que nous ayons dans notre collection, à peu près complète, d'imprimés royalistes à Châtillon-sur-Sèvre], et d'avoir excité cette armée fanatique au meurtre, à l'incendie et au pillage, jusqu'au jour de son arrestation. Pour réparation de quoi, et conformément à l'art. 6 de la loi du 19 mars dernier portant :

« Les prêtres, les ci-devant seigneurs, les émigrés, les agents et domestiques de toutes ces personnes ; les étrangers, ceux qui ont eu des emplois ou exercé des fonctions publiques dans l'ancien gouvernement ou depuis la révolution, ceux qui auront provoqué ou maintenu quelque attroupement des révoltés ; les chefs, les instigateurs, ceux qui auront des grades dans ces attroupements et ceux qui seront convaincus de meurtre, d'incendie ou de pillage, subiront la peine de mort ».

Les Commissions militaires réunies ont, en conséquence et sans désemparer, condamné Louis Ripault de La Cathelinière, chef de brigands, à la peine de mort, ses biens confisqués au profit de la République, et ordonné que ce jugement sera exécuté de suite, dont il sera délivré expédition au département et au district pour en faire les diligences. Le présent jugement sera imprimé au nombre de cinq cents exemplaires dont il en sera adressé aux ministres de l'intérieur et de la guerre, ainsi qu'aux généraux, commandants et commissaires des guerres, pour être lu et publié à la tête des bataillons, et affiché aux endroits ordinaires.
Pour copie conforme au registre : MICHEL VIAU, secrétaire-greffier.
(Placard in-fol. de l'imprimerie d'Hérault, à Nantes).

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SÉANCES DE LA CONVENTION DES 16 ET 17 VENTÔSE AN II. — 6 ET 7 MARS 1794.
Terreau, général en chef de l'armée de l'Ouest, au citoyen Carrier, représentant du peuple.
« Au quartier-général à Nantes, le 12 ventôse, l'an 2 de la République une et indivisible .....
Cathelinière, blessé dangereusement, que l'on faisait chercher depuis quelque temps, a enfin été trouvé chez lui, caché dans un pressoir. Sa tête vient de payer ses forfaits ; de son aveu, le rassemblement de trois mille hommes qu'il commandait a été dispersé par son absence. Espérons que bientôt Charette suivra son complice »
(On applaudit).

Carrier. « Je vous apprends avec satisfaction que ce Cathelinière est le chef de brigands le plus fameux après Charette. C'est lui qui nous inquiéta pour les subsistances dans la forêt de Princé. La tête de ce chef étant tombée, le rassemblement qu'il commandait est dissipé. Il ne nous manque plus que Charette, et après cela nous serons sûrs de l'extermination complète des brigands ».

Lettre de la Commission révolutionnaire du Mans.
Nantes, 12 ventôse, etc.

« Citoyens représentants, la Commission militaire révolutionnaire établie au Mans, à la suite des armées réunies contre les brigands de la Vendée, s'empresse de vous faire part que Louis Ripault, ci-devant chevalier de La Cathelinière, chef de brigands, fameux par les massacres de Machecoul et autres, vient d'être traduit devant elle ; qu'après avoir été interrogé, il a subi la peine due à ses forfaits. Il résulte de ses réponses que, depuis trois semaines qu'il est blessé, son armée est débandée et ne se rassemble plus ; qu’ils n'ont plus aucuns moyens de subsistance, leurs moulins étant tous détruits.

Voilà, citoyens représentants, ce qui nous présage la fin prochaine de la Vendée, et ça ira, grâces aux mesures vigoureuses des braves montagnards ».
LALLOUET, président de la Commission.
(Moniteur du 18 ventôse an II, n° 168, pag. 679-680).

(Dugast-Matifeux).

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