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Le Coz vicaire constitutionnel, persécution violente, exil de M. le Bot. |
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Conan élu procureur de la commune. — Le Coz, vicaire constitutionnel. — Persécution violente — arrestation et incarcération de M. Desprez, recteur de Réguiny. — Réquisitoire de Conan contre M. le Bot en présence de gens de Saint-Samson et de la municipalité de Rohan. — Elle le dénonce au district — son exil et sa mort en Espagne.
Des élections eurent lieu à Rohan (Archives municipales) sous la présidence de Charles le Garo de Kergadien, commandant de la Garde nationale, le 13 novembre 1791. Il s'agissait de remplacer Perrotin, ex-procureur de la commune, le maire, un officier municipal et les notables sortants d'après la loi.
50 électeurs citoyens actifs prenaient part au vote. Fontaine-Lorant est réélu maire par acclamation à l'unanimité. Le vieillard déclare accepter « par reconnaissance des bontés de l'assemblée ».
Ensuite
sont proclamés :
Pierre Herpe, officier municipal : 27 voix.
Louis-François Conan, procureur de la commune : 34 voix.
Marc le Malliaud, 1er notable
: 34 voix.
Olivier le Roch, 2ème
notable : 30 voix.
Julien Audrain, 3ème notable : 28 voix.
Jean-François Mat, 4ème notable : 26 voix.
Les nouveaux élus la main levée ont juré, suivant la formule alors requise, d'être fidèles à la nation, à la loi et au roi, de remplir chacun leurs fonctions en honneur et conscience, et de soutenir la Constitution de tout leur pouvoir. Puis le maire et les officiers municipaux J. Gambert et P. Herpe choisissent pour secrétaire Joseph Semaria ; il prête le même serment.
Cependant la persécution était déjà commencée contre les prêtres insermentés. Le district de Josselin les avertit qu'ils devront se contenter d'annoncer les fêtes et mariages ; le droit de prêcher leur est retiré (Archives départem. L 253).
Le 3 septembre 1791, le Département lance un décret en vertu duquel tout curé ou vicaire remplacé devait se retirer sans délai, à 10 lieues de la paroisse où il exerçait ses fonctions, ou bien dans sa famille.
Quelques jours plus tard, le 17 septembre, nouvelle aggravation : la même administration départementale interdit aux prêtres insermentés l'asile de leur famille, quand elle n'habite pas à deux lieues au moins de leur résidence.
Sur les entrefaites, la loi d'amnistie du 4 septembre 1791, ouvre les portes des prisons aux prêtres réfractaires internés, et une ère d'apaisement. Trêve éphémère ! Le 16 novembre suivant, M. le Bot est poursuivi par le district de Josselin, pour avoir rétracté son serment. Moins d'un mois après, le 8 décembre, le Directoire du Morbihan édicte que tout ecclésiastique dénoncé par sa municipalité, sera éloigné de 10 lieues de sa commune ou transféré à Groix (Archives départem. L 260).
M. Perrotin parti, la municipalité de Rohan avait à cœur de lui donner comme successeur un vicaire constitutionnel. Elle charge le 26 décembre 1791 les citoyens Mat (Ancien notaire et procureur à Rohan) notable, et le maire Lorant de passer avec Alain le Coz (père Alexis Guédas), gardien des Récollets de Pontivy et provincial, naturellement jureur, un contrat aux conditions les plus avantageuses. Le Coz prendrait l'engagement pendant une année, de célébrer la messe à Rohan, les dimanches et jours de fête.
Le 2 janvier 1792, l'affaire était conclue pour 300 francs sans préjudice des 800 francs alloués aux assermentés par la nation. Outre la messe, le Coz s'oblige à confesser et à rendre les petits services dont il est capable, tant pour l'administration des sacrements que pour les autres fonctions ecclésiastiques (Archives municip. de Rohan et de Josselin - district).
Le Département approuvait cette convention, le 1er avril 1792, et accordait l'autorisation de faire commencer l'année au dimanche 30 novembre 1791, jour où le Coz avait débuté dans son ministère à Rohan.
Ainsi un prêtre recevait des laïques le pouvoir de donner l'absolution. L'intrus fixa sa résidence à Rohan, avec le titre, officiel de vicaire constitutionnel.
Le serment civique du clergé n'avait pas entraîné la sécularisation des actes de l'état civil [Note : Cette sécularisation ne fut attribuée aux municipalités qu'après l'édit de proscription 26 août 1792, contre le clergé non conformiste c'est-à-dire insermenté. Jusque-là la grosse difficulté était que les mariages contractés seulement devant les non conformistes étaient nuls au point de vue légal, tandis que les mariages célébrés par les constitutionnels étaient nuls du religieux]. Les curés constitutionnels étaient officiers publics, pour constater les mariages, naissances et décès. Mais comme les catholiques orthodoxes refusaient d'accepter leur ministère, et s'adressaient uniquement aux insermentés, il en résulta que les prêtres constitutionnels eurent leurs registres, et les non-constitutionnels les leurs.
Détail curieux : MM. le Bot et le Coz — après entente il semble bien — inscrivent sur le même registre et à la suite les uns des autres, les baptêmes et mariages. Le premier signe tantôt recteur, d'autres fois curé, le second : A. le Coz prêtre ou A. le Coz vicaire. Plusieurs actes de baptême ne portent pas la signature du prêtre.
Comme bien l'on pense, même dans la cité rohannaise, qui voulait allier mais subordonner les principes de la religion chrétienne à ceux de la Révolution, le ministère de l'intrus ne fut guère fructueux. Le caractère sacré du prêtre s'effaçait devant le mépris de sa personne, d'autant que le pape avait enlevé aux jureurs tout pouvoir de juridiction. Par conséquent les confessions qu'ils entendaient, les mariages bénits par eux étaient de nulle valeur.
Le registre dont nous venons de parler, porte pour l'année 1792 : « J'ai entendu dire que le père Guédas, récollet, a reçu le 22 juin 1792, en face de l'église, les promesses mutuelles du mariage à contracter entre Julien. Labourier, veuf d'Yvonne Glais, et Marie Thomas, veuve de Julien Guégan, ce en présence de M. Desaunays, Olivier le Roch, Joseph Latimier et de Joseph Guillot. Signé : Le Bot, recteur ».
Ce dernier bénissait lui-même le mariage, le 2 juillet suivant.
Dans le district de Josselin l'attitude du clergé relativement au serment civique en 1791 fut diverse. Pour ne parler que des environs de Rohan :
A Bréhan-Loudéac le recteur Vincent le Pioufle [Note : Natif de Cadelac, département des Côtes-du-Nord, aujourd'hui Côtes-d'Armor] et ses deux vicaires Guillaume le Verger [Note : Natif de Loudéac, départemental des Côtes-du-Nord, aujourd'hui Côtes-d'Armor] et Yves Pédron [Note : Natif de Plourhan, départemental des Côtes-du-Nord, aujourd'hui Côtes-d'Armor] refusèrent de jurer ;
à Radenac M. Jacques Ropert [Note : Natif de Rohan, départemental des Côtes-du-Nord, aujourd'hui Côtes-d'Armor] et son vicaire Joseph Picard refusèrent de jurer ;
à Crédin Julien le Gentil et son vicaire Conas refusèrent de jurer ;
à Pleugriffet le pasteur Pierre Dréan avait 73 ans, quand il prêta le serment civique sous condition, le 20 mars 1791 : il se rétracta le 3 avril suivant. Il devait mourir le 16 janvier 1795, détenu à la Retraite des femmes à Vannes ;
à Saint-Samson le recteur Edme Darlot et son vicaire Gautier jurèrent sans restriction. Le Drogo, successeur de Gautier, était aussi un conformiste.
A Rohan nous connaissons la conduite de MM. le Bot et Perrotin sur ce point.
A Réguiny M. Pierre Desprez [Note : Natif de Bains, fit ses études de théologie au Saint-Esprit à Paris, nommé au concours recteur de Réguiny, le 15 septembre 1772], recteur, et son vicaire Briand, chargé des petites écoles, refusèrent le serment [Note : M. Rivière, recteur de Lantillac. refuse aussi le serment].
Ajoutons que M. François Rouillard, curé (vicaire) : à Gueltas, trêve de Noyal-Pontivy, prêta en 1791, le serment qu'il rétracta aussitôt.
En général les prêtres intrus faisaient une guerre acharnée, hypocrite aux insermentés, en particulier à Réguiny où le curé constitutionnel M. Lamour ne cessait de dénoncer le recteur au district. Informé de ces délations, le Département donne l'ordre d'arrêter le fanatique dangereux. M, Desprez était un homme intelligent, habile, populaire. Il avait l'oreille et le cœur de ses paroissiens, qui lui témoignèrent leur confiance et sympathie, en le choisissant pour leur premier maire. Le jureur installé dans La paroisse le 26 juin 1791, ne recueillait guère que le mépris de la saine population.
Deux jours durant et deux nuits, la gendarmerie et la milice de Rohan avaient cherché M. Desprez, sans pouvoir mettre la main sur sa personne. Il connaissait les chemins, les sentiers, les bois et les landes. A l'approche de ses persécuteurs, les gens donnaient l'alerte et favorisaient sa fuite.
Enfin dans la nuit du 5 au 6 juin 1792, M. Desprez tombe au pouvoir de la troupe. Elle l'emmène à Rohan dans la maison d'arrêt (Archives municip. registre des délibérations et archiv. départem. L 254). Dès le lendemain, des gardes nationaux et des gendarmes de Rohan avec l'aide de leurs collègues des Forges de Lanouée, conduisaient M. Desprez en prison à Josselin. De là il fut transféré à Vannes.
L'enlèvement de M. Desprez avait produit dans paroisse une véritable révolution. L'événement à peine connu, en hâte la majeure partie des habitants de Réguiny s'assemblent au bois Vincennes, la nuit du 6 au 7 juin pour délivrer leur recteur. A cette nouvelle les rohannais tremblèrent. Qu'allaient-ils devenir sans autres armes que leur civisme ?
Devant la municipalité de Rohan et une partie des gens de Saint-Samson assemblés à l'auditoire le 15 juin 1792, le procureur de la commune Conan rappelle le danger couru et toujours à craindre. « Si, vous étiez assaillis, leur dit-il, comme vous en êtes menacés par les mauvais citoyens de Saint-Gouvry, Crédin et Bréhan-Loudéac, dont vous êtes souverainement détesté particulièrement des prêtres inconstitutionnels qui les gouvernent, quelle serait votre ressource ?... ».
Sur ses instances la municipalité de Rohan demande au Département, 60 fusils au moins et autant de baïonnettes. On les prendrait à Josselin ou à Pontivy. Ainsi pourront-ils repousser avec succès les tentatifs (sic) éventuelles des ennemis de la Constitution contre les bons citoyens.
Ensuite Conan, jacobin vulgaire, dans un galimatias à moitié incompréhensible, dénonce M. le Bot son recteur, le qualifie de réfractaire et parjure [Note : M. le Bot avait prêté le serment civique avant le 1er octobre 1791 ; le 20 octobre suivant, il l'avait rétracté (Archiv. départem. L 183)]. Il a, dit le procureur, rétracté son serment. Et puis contrairement à la coutume paroissiale, le jour octave de la Fête-Dieu, il s'est abstenu de chanter la grand'messe, même d'y assister. Ce n'est pas tout : cette année il a négligé de prendre à l'évêché, pour le renouvelleraient des fonts baptismaux, les saintes huiles. Ce que voyant, la municipalité en a demandé à M. le Masle pour la Pentecôte. Par le même exprès l'évêque constitutionnel du Morbihan avait autorisé, au cas de refus du sieur le Bot, M. le Coz à faire la cérémonie de l'eau lustrale. A-t-elle eu lieu ou non lui Conan l'ignore. : Quoi qu'il en soit, un fait est certain : après avoir fait usage des saintes huiles, le recteur s'enferma dans la sacristie avec Jacques Beau [Note : Jacques Bean, aubergiste], homme suspect de fanatisme, sous prétexte de l'entendre en confession. Sur ces entrefaites le prêtre le Malliaud se présente à la porte de la sacristie. Mais le sieur le Bot refuse d'ouvrir.
Que le lecteur nous excuse de mettre ici une parenthèse, pour faire la connaissance de la famille le Malliaud, qui a laissé un nom tristement célèbre dans l'histoire de la Révolution à Rohan.
Les le Malliaud étaient originaires de Crédin. De cette paroisse Jean le Malliaud vint à Rohan où il se maria le 26 avril 1717, avec Marguerite Collin. Les nouveaux mariés tinrent dans notre ville un petit commerce.
Jean le Malliaud eut 17 enfants, 7 du premier lit 10 du second.
Marguerite Gollin mourut le 19 août 1731, a l'âge de 35 ans. Son mari le 5 novembre suivant, se remariait avec Jacquette le Bouler, de Rohan. Elle lui donna dix enfants.
Jacques était le huitième. Né le 23 janvier 1733, il prit pour femme Marie Chérel. De cette union naquirent entre autres : Mathurin-Jean-Marie dont nous venons de parler. Il naquit à Rohan le 26 mars 1756, plus tard devint chartreux. Après avoir prêté le serment civique, il vint dans son pays natal où il fut le mauvais génie de ses parents, et le scandale de ses compatriotes eux-mêmes, si fervents révolutionnaires qu'ils fussent. Finalement leur mépris pour sa personne le força d'abandonner Rohan pour Josselin, où il mourut, dit-on, dans l'impénitence ;
Joseph, né en 1758, épousa : 1° Thérèse le Coq ; 2° Julienne le Roux. Il fut cabaretier.
Mathurine, née le 8 février 1761, mariée à Joseph Jouet, marchands.
Marc, né le 20 décembre 1763, eut pour femme Anne le Dimna, charron.
Revenons à notre sujet et aux griefs prétendus de Conan contre son recteur. Le sieur le Bot, continue le procureur, ayant tout disposé à son gré dans la sacristie, se rendit aux fonts. Là il pria M. le Coz de se retirer, en ajoutant toutefois qu'il n'avait point d'ordre à lui donner. C'est alors que le vicaire constitutionnel s'en alla dire sa messe, pendant que restait dans les fonts avec deux ou trois laïques le recteur... Il a brûlé les saintes huiles, les anciennes ou les nouvelles on l'ignore. Et à Saint-Gouvry comme à Rohan, pas d'huile sainte ni de renouvellement des fonts. Dès lors plus la possibilité — d'après Conan — d'administrer les sacrements de baptême et d'extrême-onction.
Enfin M. le Bot est accusé par le procureur, d'avoir été l'obstacle à la formation d'une municipalité à Saint-Gouvry.
Voilà les charges dont Conan essaie d'accabler le pasteur de Rohan-Saint-Gouvri. Pour un catholique sa justification est facile ; car en définitive M. le Bot est resté fidèle au pape, et n'a voulu entretenir aucune relation religieuse avec les schismatiques. S'il a brûlé les saintes huiles, c'est pour faire échec au ministère de l'intrus.
Cependant la municipalité rohannaise va exercer contre lui ses vengeances :
1er Elle demande l'annexion de Saint-Gouvry à Rohan ; les deux ne formeraient qu'une commune ;
2° Elle dénonce M. le Bot au district de Josselin, prie ses administrateurs et ceux du département, d'agir auprès de M. le Masle, évêque du Morbihan, afin que soient donnés provisoirement et en attendant l'organisation de leur paroisse, les ordres pour pateficher les portes de l'église de Saint-Gouvry, après en avoir enlevé les vases sacrés et tous les objets nécessaires au service divin. Ils seraient transportés dans l'église de Rohan. En somme les municipaux rohannais voulaient empêcher leur recteur d'exercer son ministère, le chasser de sa paroisse. Les événements allaient favoriser leurs desseins.
Le 26 juin 1792, parait un décret du département : sur la demande d'une municipalité, d'un district, ou de six citoyens actifs tout prêtre réfractaire pouvait être interné à Port-Louis.
La persécution religieuse suivait une progression croissante et rapide. Le 21 juillet 1792, le district de Josselin supprime le traitement des vicaires et curés, « afin de ne plus nourrir d'ennemis, en leur prodiguant le prix des veilles et des sueurs des malheureux qu'ils trompent si indignement » ( Archives département. L 254).
Quelques jours plus tard, à l'exemple du distric de Ploërmel, celui de Josselin demande l'internement de ses prêtres à la citadelle de Port-Louis, car « il est convaincu que les troubles qui agitent son territoire, et que les difficultés qu'il éprouve pour l'assiette et le recouvrement de l'impôt, prennent leur source dans les insinuations perfides, et les prédications contre-révolutionnaires des prêtres réfractaires » (Archives départem. L 258).
Vannes aprouve cet internement par charretée, 31 juillet 1792.
Malgré tous les édits de persécution contre les prêtres non conformistes, la plupart d'entre eux étaient restés courageusement à leur poste. M. le Bot chante encore la grand'messe, le 19 juillet 1792. A partir du 30 de ce mois, jour où il donne la bénédiction nuptiale à Eugène Bernard et à Marie-Louise Basin, le nom de M. le Bot ne parait plus sur les registres de la paroisse.
La Révolution affectait de jour en jour un caractère de guerre religieuse plus violente.
Voici que le département du Morbihan (5 août 1792) supprime le traitement et les pensions aux insermentés, leur défend le port de l'habit ecclésiastique.
Nouvel arrêté départemental aggravant (14 août 1792) : 1° les administrateurs des districts sont autorisés à arrêter et faire conduire directement à la citadelle de Port-Louis, tous les ecclésiastiques non assermentés, et généralement tous ceux dont la détention paraîtrait utile à la tranquillité publique ; 2° défense de cacher un prêtre insermenté sous peine d'une amende qui ne pourra être moindre de 10 livres et en excéder 50 ; 3° le département supplie l'Assemblée nationale d'ordonner la déportation des réfractaires. Elle fut votée par la loi d'exil du 26 août 1792, et publiée dans le Morbihan par arrêté de ce département, le 8 septembre suivant. Tout ecclésiastique assujetti au serment prescrit par les lois de décembre 1790 et d'avril 1791, qui ne l'aura pas prêté ou l'aura rétracté, est condamné sous les huit jours à sortir du district, et sous les quinze à quitter la France. Les infirmes et les sexagénaires seront internés dans des maisons désignées par le département, où on les entretiendra à leurs propres dépens (Archives départem. L 1130). Chaque prêtre insermenté devait demander un passeport, à la mairie de sa commune, pour le pays étranger qu'il avait choisi.
Cependant M. Le Drogo, vicaire constitutionnel à Saint-Samson (ex-récollet ; il passa à Stival en 1793), baptisait deux enfants à Saint-Gouvry les 7 et 24 septembre 1792. Nous en concluons que M. le Bot avait dû, à cette époque, prendre la route de l'exil.
Il partit sans passeport pour l'Espagne où il mourut l'année suivante (Archives départem. L 272).
Pierre le Moyne le petit seigneur de Talhoët avait émigré avant son recteur.
Pendant que les prêtres du ministère et de l'enseignement, les religieux n'osant affronter le martyre, prenaient le chemin de l'exil pour l'Angleterre, la Hollande, l'Espagne..., où ils rencontraient les émigrés nobles, ballottés les uns et les autres par les flots de la Révolution et de l'Océan, quelques insermentés, au péril de leur vie, restaient dans les paroisses pour le salut des âmes.
Pour échapper à l'arrestation, à la mort qui les menace le jour et la nuit, ces héros sont obligés de changer de costume, de domicile fréquemment. Vêtus en paysan, les foins, la paille, les greniers, les granges, les celliers, les écuries, parfois les chênes creux, la brousse leur servent de gîte. Ils couchent rarement deux fois dans le même lieu, et « plus souvent avec les cochons qu'avec les nobles ».
A leur recherche les bleus employaient des chiens dressés, des espions, parfois enfonçaient leurs baïonnettes dans le foin et la paille, promettaient aux recéleurs la mort, aux délateurs une prime.
Le soir venu, les malheureux prêtres sortaient de leur cachette, et se rendaient dans une maison désignée, sûre, pour y prendre leur repas, exercer leur ministère. En l'absence de jureurs dans la paroisse, le prêtre fidèle conférait parfois le baptême la nuit dans l'église.
En cas de danger immédiat, on lui portait à manger dans sa cachette, et s'il était dans un bourg, dans un village, l'alerte était donnée à l'instant. Les grandes personnes, les enfants, jusqu'aux chiens savaient garder le secret sur ces prêtres sublimes [Note : Voir : Registre de l'abbé Guillotin à Concoret (Morbihan) et Vie de M. Eon (prêtre de Mauron) sous la Révolution, écrite par lui-même].
M. Gentil, recteur de Crédin, qui resta parmi ses ouailles, presque à la porte de Rohan, une partie de la révolution sanglante, connut les jours de cette vie héroïque. Il est signalé déporté le 29 frimaire III (Archives départem. L 183).
(P. Martin).
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