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LE CHATEAU DU PLESSIS-BERTRAND A SAINT-COULOMB |
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Le château du Plessix-Bertrand (ou Plessis-Bertrand) n'est plus qu'une ruine de nos jours ; on reconnaît, néanmoins, les murs d'enceinte, les tours de sept à huit mètres de diamètre, des vestiges de douves. Enlevée en 1387 par Clisson, en guerre contre le duc Jean IV, la forteresse subit un siège au cours des guerres de religion après avoir été prise, perdue, reprise par les ligueurs et réparée plus forte qu'on ne croyait. Au mois de septembre 1597, René de la Tremblaye, capitaine d'un parti de Royaux, entreprend le siège du Plessix-Bertrand à la demande des Malouins. Dès le premier jour, surveillant les approches sans casque, La Tremblaye reçoit un coup d'arquebuse dans la tête et meurt le 8 septembre. Malgré la paix rétablie par l'Edit de Nantes, signé par Henri IV le 13 avril 1598, nombre d'aventuriers de tous les pays, accourus en Bretagne depuis dix ans, continuent à vivre de rapines et de pillages ; aussi, avant de quitter la province, le roi ordonne la démolition ou le démantélement de nombreux châteaux qui leur servent de repaires ; ce fut le sort du Plessix-Bertrand. L'état pitoyable de la vieille forteresse transparaît dans un aveu de 1687 où il est déclaré ne subsister « qu'un ancien portail accompagné de deux tours ruinées et démolies depuis longtemps, entourées de fossés remplis desdites ruines et démolitions ».
L'histoire est plus évocatrice du passé du Plessix-Bertrand (ou Plessis-Bertrand) que les pierres qui en restent et gisent éparses.
Dans la première moitié du XIème siècle, en 1028, Guinguené, archevêque de Dol, distribuant à sa famille une partie de l'immense seigneurie temporelle attachée à son fief épiscopal, donne à son frère bâtard, Salomon, la seigneurie de Saint-Coulomb qui porte d'abord le nom de Guarplic, plus tard du Guesclin. « Il y a lieu de croire, écrivait la Borderie en 1871, que l'érection de la seigneurie du Guesclin et celle de la paroisse de Saint-Coulomb furent simultanées, soit que l'archevêque Guinguené ait voulu du même coup pourvoir à l'organisation féodale et à l'organisation religieuse de ce territoire, soit plutôt que Salomon, le nouveau seigneur, ait tenu à établir une paroisse dans son fief pour éviter d'être, lui et ses hommes, tributaires d'une église étrangère. D'après cela l'origine de la paroisse de Saint-Coulomb serait certainement antérieure à l'an 1040 et remonterait probablement aux vingt-cinq premières années du XIème siècle ». Le raisonnement de la Borderie et la date de 1028, citée plus haut d'après Hay du Châtelet, le biographe de Bertrand du Guesclin, concordent et se confirment l'un l'autre.
Le premier seigneur portant le nom de Guarplic est Geoffroy, nommé dans un acte de 1180 rapporté par Dom Lobineau. Cet acte nous apprend que Geoffroy est le fils de Bertrand, mort avant 1150 et dont la filiation est présumée se rattacher à Clamaroch qui se dit fils de Richer, vivant dans le commencement du XIème siècle et qui pourrait avoir été la tige de la maison du Guesclin. Ce Richer fit bâtir, vers 1030, le château de Richer, alias Château-Richeux, en la paroisse de Saint-Méloir, et mourut vers l'an 1050.
Revenons à Bertrand Ier, père de Geoffroy. Il avait épousé Floride, laquelle donne, à la mort de son mari, en 1150, la terre, de la Fresnaye aux moines de l'abbaye de la Vieuville, du diocèse de Dol, fondée cinq ans auparavant. On suppose que cette terre venait d'elle et quelle était de la maison de Landal parce que la paroisse de la Fresnaye relevait de la seigneurie de ce nom. Outre Geoffroy, Floride donna à Bertrand deux autres fils, Richard et Guillaume, cités dans l'acte de 1180 évoqué plus haut. Par cet acte, Geoffroy, retour de la croisade, confirme la donation faite par sa mère, trente ans plus tôt, à l'abbaye de la Vieuville, et à laquelle il avait consenti avec ses frères.
Les guerres de Bretagne l'obligent sans doute à quitter son château de Richeux pour se retirer en celui du Guarplic, dit depuis du Guesclin, construit, ou plutôt fondé par Salomon sur un rocher peu éloigné de la côte, en Saint-Coulomb. C'est de là que Geoffroy prit son surnom. On ignore le nom de sa femme qui le rendit père de deux fils, tous deux prénommés Bertrand : Bertrand l'Ancien et Bertrand le Jeune. Selon toute apparence le premier mourut avant son frère puisque la succession est recueillie par celui-ci.
Bertrand. dit le Jeune, vivant en 1181 et 1190, est le père de Pierre Ier du Guarplic ou du Guesclin. Ce dernier s'oblige, dans un accord passé avec le chapitre de Dol, à célébrer l'anniversaire de son père, le sien, celui de sa femme et celui de son fils, accord confirmé par Jean de la Mouche, évêque de Dol, le mardi 20 mai après la Pentecôte 1225. Un titre de l'abbaye de Saint-Michel nous apprend que Pierre, avec Bertrand son fils, donne à cette abbaye, en 1232, les dîmes des novales de son fief en la paroisse de Saint-Méloir. Il vivait encore en 1246, mais mourut la même année puisqu'un acte de 1247 de l'évêque de Dol, Etienne, désigne comme son successeur son fils Bertrand III qui reconnaît devoir à l'évêque deux chevaliers des dix que ce prélat, grand seigneur féodal, doit au duc de Bretagne.
En 1259 Bertrand III signe un compromis avec les chanoines de Dol sur la dîme de Hindré, en Saint-Coulomb, document rapporté par Dom Morice dans ses « Preuves ». Dix ans après, en 1269, il conclut avec le chapitre de Dol un nouvel accord inséré par le Père du Paz dans son « Histoire générale ».
Entre temps, le roi saint Louis ayant donné le château du Guesclin à Henry d'Avaugour au mois d'août 1234, par suite de circonstances que nous passerons sous silence parce qu'elles n'intéressent pas notre sujet, Bertrand du Guesclin, à l'exemple de son père Pierre Ier, demeurait probablement au Château-Richeux. L'état de la vieille forteresse ne devait pas être assez bon pour mériter seulement sa restauration en vue d'assurer une meilleure défense, après les dégâts occasionnés par les guerres, puisque Bertrand décide, en 1247, d'élever au milieu des terres, en la paroisse de Saint-Coulomb, une de ces places fortes que la nature de leur enceinte extérieure, composée d'une palissade de bois, faisait appeler des plessix, et lui donna le nom de Plessix-Bertrand. Elle était achevée en 1259.
Bertrand III du Guesclin meurt après 1293, date d'un acte où il est nommé avec son fils aîné Pierre. Un fils puîné, Bertrand, seigneur de Broons, forma la branche ayant donné le jour au connétable.
Pierre II, seigneur du Plessix-Bertrand, épouse successivement Mahaud de Broons, au plus tard en 1293, puis Alix N. dont il a Tiphaine, mariée à Bertrand de Châteaubriant, seigneur de Beaufort en Plerguer ; enfin, Jeanne de Montfort, dame de Largentaye et de Plancoët qui lui donne un héritier : Pierre.
Troisième du nom, Pierre du Plessix-Bertrand s'unit à Julienne de Saint-Denoual et de cette union naît une fille unique Tiphaine, nièce, par conséquent, de cette autre Tiphaine, dame de Beaufort. De ses deux maris, Jean de Beaumanoir et Pierre de Tournemine, la fille de Pierre III n'a pas d'enfants quand elle passe de vie lu trépas au début de l'année 1417 ; par testament elle lègue le Plessix-Bertrand à son cousin Brient de Châteaubriant, seigneur de Beaufort.
Cette branche des Châteaubriant conserve jusque vers la fin du XVIème siècle le Plessix-Bertrand dont devient seigneur Christophe à la mort de son père le 14 octobre 1562. Sans hoirs de son union avec Jeanne de Sévigné, puis avec Charlotte de Montgommery, il lègue à sa veuve, « pour remplacer ses deniers dotaux », la seigneurie du Plessix-Bertrand dans laquelle son frère cadet, Briand, pouvait légitimement espérer lui succéder, et après lui l'un de ses enfants issus de son mariage avec Jacquemaine du Boisriou, dame du Boisgerbault en Ruca, et tous baptisés à Saint-Coulomb. Charlotte de Montgommery s'empresse de vendre le Plessix-Bertrand, par contrat du 31 mars 1589, à Guy Ier de Rieux, seigneur de Châteauneuf, lequel n'en profite guère car la mort le surprend en 1591. Son fils, Guy II, décède en 1637, laissant plusieurs enfants sous la tutelle de leur mère Catherine de Rosmadec, morte dix ans plus tard, en 1647. De ces enfants les garçons, Jean et René, meurent jeunes et une fille, Jeanne-Pélagie, mariée depuis 1645 à son cousin Jean-Emmanuel de Rieux, marquis d'Assérac, hérite de Châteauneuf et du Plessix-Bertrand.
Veuve de bonne heure à la suite d'un duel où son mari trouve la mort en 1656, Jeanne-Pélagie privera de ces deux belles terres son fils Jean-Gustave par ses dépenses excessives qui obèrent tellement sa fortune que ses créanciers l'obligent à consentir à la vente de Châteauneuf et du Plessix-Bertrand dont se rend acquéreur, le 20 août 1680, Henry de Beringhen, premier écuyer du roi et personnage important à la cour de Louis XIV. Son fils, Jacques-Louis, lui succède à sa mort, survenue en 1692, et obtient de Louis XIV l'érection en comté de la seigneurie du Plessix-Bertrand par lettres patentes données en juin 1702, enregistrées au Parlement de Bretagne le 20 septembre 1704.
Le nouveau comté s'étend sur huit paroisses : Saint-Coulomb, Cancale, Saint-Ideuc, Paramé, Saint-Meloir. Saint-Servan, Saint-Jouan-des-Guérets et St-Père-Marc-en-Poulet. Sa haute justice s'exerce principalement à Cancale où se trouve l'auditoire ; des ceps et colliers pour la punition des malfaiteurs sont placés dans les trois bourgs de Saint-Coulomb, Cancale et Paramé ; enfin, les fourches patibulaires à quatre pots se dressent au bord de la mer, sur le rocher de la Hoguette, en Paramé, à l'emplacement où l'on construira le Grand Hôtel.
Le trépas met Jacques-Louis de Beringhen dans la tombe en 1723 et ses trois fils se succèdent comme seigneurs de Châteauneuf et du Plessix-Bertrand. Le dernier, Henry-Camille, vend en 1740 ces deux terres qui se trouvent dans les mêmes mains depuis cent soixante ans. Cette fois elles sont séparées l'une de l'autre, la première étant achetée par M. Baude de la Vieuville, la seconde par M. Magon de la Lande.
François-Auguste Magon, seigneur de la Lande et comte du Plessix-Bertrand, avait épousé sa parente Marie-Gertrude Magon et tous deux habitaient la Chipaudière en Paramé. François-Auguste meurt en 1767, suivi dans la tombe par sa veuve en 1772. Leur fils aîné, Nicolas-Auguste, trésorier des Etats de Bretagne, devient après eux, selon les termes d'un aveu de 1787, « seigneur et propriétaire de la terre de l'ancien comté du Plessix-Bertrand ». A cette époque il est veuf de Charlotte Locquet de Granville, épousée en 1741, à laquelle il survit jusqu'à l'âge de soixante-dix-huit ans. Il rend l'âme le 8 novembre 1793, chez son fils Erasme, au manoir de la Chipaudière, et avec lui s'éteint le dernier seigneur du Plessix-Bertrand.
Erasme, marié en 1772 avec Jeanne du Fresne de Pontbriand, périt sur l'échafaud en 1794.
Au XIXème siècle, les ruines du Plessix-Bertrand appartenaient à Mme Le Tarouilly qui fit nettoyer les douves de façon à découvrir la base continue des tours et des courtines de l'ancien château.
(Baron de Mauny).
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