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LE CONSEIL GÉNÉRAL DE SAINT-ÉNOGAT (1726-1778)

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Nous avons eu l'heureuse chance, trop tardive pourtant, d'exhumer de leur séculaire tombeau de poussière entassée, de papiers jaunis, de toiles d'araignées semblables aux bandelettes des momies, trois vénérables registres des délibérations du Conseil-général de la paroisse de Saint-Enogat. [Note : Archives de la paroisse de Dinard qui a sans interruption succédé à la vieille paroisse de Saint-Enogat].

Nous espérons que les détails qu'ils nous racontent intéresseront les esprits curieux de notre histoire locale.

Ce qu'était le général. — Nul n'ignore que les villes bretonnes se divisaient en deux catégories. Les villes importantes étaient représentées aux Etats, prenaient part au vote de l'impôt provincial, possédaient un conseil municipal composé d'échevins, que présidait un maire, appelé parfois procureur syndic ; c'étaient les communautés de villes.

Les bourgs de campagne et les petites villes avaient une tout autre organisation. En principe ils n'avaient aucune existence communale, aucune organisation politique. On les considérait comme des paroisses, n'ayant que des intérêts religieux ! Ces paroisses ne votaient point l'impôt provincial, parce qu'elles n'avaient point à le payer; elles ne devaient acquitter qu'un impôt local, dont le revenu, employé sur place, était destiné aux dépenses locales.

Cette vie toute fermée des paroisses rurales était dirigée par le Conseil général chargé de l'administration matérielle et financière de la paroisse [Note : Lire : Histoire de Saint-Servan par M. J. Haize, Ch XIII, p. 165-174].

Dans le conseil général de Saint-Enogat, le Recteur de la paroisse, doyen de Poudouvre, avait la préséance. Y prenaient place, au dessous de lui, deux trésoriers en charge, élus pour un an, le sénéchal, [Note : Sénéchal ou bailli : officier rendant la justice au nom du roi ou des seigneurs] le procureur-fiscal [Note : Procureur fiscal : ministère public] de la juridiction de La Crochais, le vicaire ou curé, douze anciens trésoriers ayant voix délibérante, six notables ayant voix consultative.

Les réunions étaient annoncées au prône, le Dimanche précédent, et, l'heure venue, par le son de la cloche. Elles se tenaient dans la sacristie.

L’administration financière de la paroisse était une des attributions du général : il devait s'occuper « du vote, de la répartition, de l'assiette et de la cueillette des fouages, [Note : Impôt sur chaque ménage ou feu] capitations, [Note : Impôt personnel ou par tête] tailles, [Note : Impôt sur les roturiers, à la place du service militaire] dizièmes et vingtièmes [Note : Impôt sur le produit des biens fonds, levé dans les besoins pressants ; remplacé pac le vingtième en 1749] ». L'assiette était établie par des asséeurs ou égailleurs, le recouvrement opéré par des collecteurs nommés par lui.

Les affaires militaires ne lui demeuraient pas étrangères. Nous le voyons, le 13 Août 1779, sur l'invitation de Mgr le Duc de Duras communiquée par M. Duchatel à M. de la Boüexière, aide-major des bataillons garde-côtes de Plancoët, « nommer une personne, en la solarisant, pour recevoir en dépôt les armes des garde-côtes désarmés et les entretenir dans l’état qu'ils seront lors du dépôt ».

D'autres fois, le général imposait aux particuliers, le logement des militaires, sur la présentation d'un billet signé par le capitaine et le lieutenant du gué.

La réglementation de la coupe du goémon ou « gouaymont » était dans ses attributions. Il en fixait, chaque année, l'ouverture et la clôture, du 1er Septembre au 3 Avril. Il poursuivait ceux qui le recueillaient en temps prohibé, ou les habitants des paroisses voisines qui empiétaient sur les côtes de Saint-Enogat; c'est ainsi que le 9 Mars 1777, Jean le Court et cinq autres habitants de Pleudihen furent condamnés à six livres d'amende, et que Jean Rozé et François Legobien subirent le 11 Mars 1778, une semblable condamnation.

L’administration de l’Eglise était la fonction principale du général.

En 1729 il vend les chaises « 10 sols le pied ».

Le 30 Décembre 1770, il fonde une messe matinale qui sera « dite tous les Dimanches et fêtes et payée 120 livres à chacun premier de l'an ». Cette somme devait être « répartie sur les habitants, tant nobles que roturiers, au marc la livre de leur capitation ; dans lequel égail ne seront compris ceux qui ont des chapelles desservies ».

Le 9 Mars. 1770, il impose le paiement d'un droit à ceux qui demandent la croix d'argent aux enterrements.

Cette administration n'allait pas toujours sans conflit : M. Guillaume Duchesne, curé d'office [Note : Il devait être premier vicaire, remplacant le recteur-doyen M. Gilles Duchesne (1725) qui mourut le 22 Mai 1771 et devait dès lors être fort malade. Dinard St-Enogat, p. 143] ayant « fait enlever quatre cierges qui avaient été donnés pour orner et être consommés à l'autel de sainte Anne, avec les rozes et les cœurs de cire dont ils étoient ornés, » le général lui vota un blâme et décida de le poursuivre « à l'amiable ou en justice » (5 Février 1769).

L'Eglise de Saint-Enogat reçut, au cours du XVIIIème siècle, divers remaniements que nous allons indiquer. [Note : Description : Dinard St-Enogat à travers les âges. p. 137].

En Novembre 1727, on construisit « une petite chapelle voustée pour les fonds baptismaux, placés dans la porte du costé nord ; » et, au mois de Décembre 1732, on y plaça une balustrade qui coûta 280 livres [Note : Boiserie aux f. b — Voir ouvrage précité, p. 140].

En même temps, on ouvrit « dans la sacristie un grand vitrau de pierre de taille du costé nord » et on l'arma « d'une bonne grille de fer ». On plaça aussi un lambris dans cette sacristie, et, dans l'église, une chaire à prêcher du prix de 150 livres.

Le 27 Décembre 1770, le général vota « de faire redresser le pavé de l'église et de reblanchir le rededans d'icelle ».

Le 31 Juillet 1774, eut lieu l'adjudication d'une « orloge à plasser dans la tour de l'église pour l'utilité et le service des paroissiens ». Bertrand Ohier de la Maisonneuve accepta de faire ce travail pour 400 livres.

Au mois de Mai 1781, « on répara et augmenta la balustrade du chœur, on répara les lambris et les vistrages des fenestres, on passa à l'huile et on peignit les portes en couleur d'olive ».

Les principaux travaux, commandés par le général, furent faits au maître-autel et à la chapelle du Rosaire.

Le maître-autel. — Nous avons donné sa description et le procès-verbal de sa construction dans notre histoire de Dinard. Nous y avons indiqué aussi la translation de la statue de saint Enogat du prieuré de Dinard, le 8 Janvier 1637 [Note : Ibidem, p. 138 et 139]. Voici les détails complémentaires que nous recueillons dans les registres que nous analysons ici.

Messire Yves Nouvel, qui fut recteur-doyen de 1675 à 1725 [Note : D. S. E. p. 143] avait laissé, par testament, 500 livres « pour être employées à la construction d'un rétable au grand autel ». Sa nièce, « honorée femme Yvonne Cornillais, demoiselle Joliff » les offrit au général le 28 Décembre 1726. La somme parut insuffisante sans doute, et l'affaire en resta là jusqu'au 10 Juin 1731. Elle fut alors acceptée, et le nouveau recteur, Gilles Duchesne des Noyers, « s'obligea à fournir le reste par le recours de personnes charitables : » sa souscription atteignit la somme de 600 livres. Messire Jacques le Bonhomme, de Saint-Malo, exécuta le travail. La bénédiction eut lieu le 9 Août 1732.

En 1781, ce maître-autel eut besoin de réparations. Le 22 Juillet un devis fut dressé par Jean Durocher, « pour parvenir à la pinture et dorure du rétable de la dite église et à la construction d'un nouveau tabernacle ». La mise à prix de 1.300 livres ne trouva pas de soumission.

Le 2 Septembre, nouveau devis par Jean le Roy de Prenelle ; la mise à prix fut cette fois de 1.100 livres, et le travail fut adjugé au dit Le Roy pour 900 livres. Il devait « dorer les boudins, ornements, filets, sculptures ; les colonnes devaient être de marbre noir, et les statues, drapées et carnationnées de bon goût avec un filet d'or autour de la draperie, celles de saint Enogat et de saint Clément auront leurs étolles et chaprons dorés en plein ; la draperie du Crite (Christ) sera dorée en plein et la croix en noire ou couleur de bois ; » il était tenu de rafraîchir le tableau de la résurrection qui occupait le centre de l'autel, et de peindre et dessiner, dans l'enfoncement au-dessus de l'autel un manteau royal de bon goût.

Le sieur Lebreton, menuisier à Saint-Malo, construisit, pour ce même autel, un tabernacle, accosté de deux tours rondes, surmonté d'un couronnement potiche, que remplaçait à l'occasion une niche d'exposition ; le parquet et les gradins de l'autel en bois de chêne et en forme de « bâtons rompus renfermés dans la même ceinture » et « une enveloppe de l'autel et des gradins, en bois recouvert de papier des quatre couleurs, rouge, blanc, vert et violet pour tenir lieu de devant d'autel quand le tombeau sera couvert ». Ce plan, conçu par le sieur Clavier demanda une dépense de 850 livres.

Le sieur Lebreton fut aussi chargé d'abaisser l'aigle qui se trouvait au milieu du chœur.

La Chapelle du Rosaire était aussi chapelle seigneuriale de la Crochais. [Note : Elle était située au Nord de l'Eglise, côté de l'Evangile].

En Novembre 1727 elle fut ornée d'un lambris exécuté « sous le bon plaisir et la charité de M. de la Crochais ».

Le 24 Août, le recteur présenta au général « le dessein d'un rétable, » [Note : Voir Dinard Saint-Enogat à travers les âges. Erection p. 39] et il fut décidé qu'on le fera « construire incessament à condition qu'il n'excédera pas 350 livres ».

Le 9 Septembre 1789, le général, « désirant faire placer un tableau à l'autel du Rosaire, représentant l'histoire du Rosaire, pour laquelle il doit y avoir quatre figures principalles, savoir la Vierge, l'enfant Jésus, saint Dominique et sainte Catherine, et ce qui sera nécessaire de chérubins, pour l'ornement du dit tableau, qui sera peint sur bonne toile à l'huile ; désirant aussi faire peindre les figures de saint Gilles et de saint Jean qui accompagnent le dit autel, » confia le travail au sieur Marsiani, peintre, résidant à Saint-Malo.

Le mobilier et les objets liturgiques étaient achetés par le général.

Le 3 Novembre 1727, il votait l'acquisition d'un coffre pour les archives.

Le 19 Mai 1776, il décidait d'acheter un coffre-fort, qui devait être placé dans la tour, au deuxième étage et contenir l'argenterie ; le même jour, il faisait placer, à ce deuxième étage « l'armoire des ornements qui pourissent dans la sacristie ».

Le 26 Décembre 1778 après la visite de Mgr l'Evêque de Saint-Malo et d'après les ordres donnés par le prélat, le 30 Juin, on acheta « de la toille pour faire deux aubes, deux souplis, six nappes d'hautel, deux rochets ».

Puis, comme il fallait conserver ce qu'on achetait, le général, se conformant à un arrêt de la cour du 12 Novembre 1776, décida que le sacristain coucherait dans l'Eglise. Jean Nogue, sacristain alors, refusa on ne put trouver personne pour accepter cette charge et peut-être ce danger, et on dut aviser le procureur général de l'embarras où on se trouvait.

Le Presbytère de Saint-Enogat était situé au village de Saint-Alexandre dans le jardin voisin de la chapelle [Note : Dinard Saint-Enogat à travers les âges. p. 140].

Le 3 Mars 1726, des réparations étant nécessaires, le doyen, M. Duchêne, fit une quête, accompagné de « M. Mauffray de la Maisonneuve-fermal ».

Le curé et le général, ayant omis de faire hommage au Roy Louis XV, le presbytère et un champ furent saisis le 29 Août 1729. Cette saisie n'eut pas de suite, car il fallut s'exécuter et « rendre hommage au gracieux souverain ».

En 1772, nouvelles réparations. Le « feu sieur doyen » Gilles Duchêne, étant mort le 22 May 1771, ses héritiers étaient obligés de livrer, à son successeur, le « presbitaire » dans un état convenable. Ils offrirent pour cela une somme très insuffisante ; puis déclarèrent renoncer à la succession (16 Juin 1771). Cependant, le 24 Juin 1771, un arrangement fut conclu avec les héritiers du « feu Sr Gilles Duchêne, vivant doyen de cette paroisse et Missire Julien Aillet curé (1er vicaire) qui a aparûë une procuration lui consentie par Me Julien Duchêne procureur fiscal à Cancalle. Ils paieront 650 livres, accepteront l'héritage purement et simplement et le général se chargera des réparations. L'atouchement de la ditte somme sera faite par les trésoriers en charge ».

Le 5 Avril 1772, le général reçut avis que les réparations projetées couteraient 14 ou 1.500 livres. Il fallait donc faire une levée de 1.000 livres sur la paroisse. « Ici le doyen-recteur Messire Guillaume-Joseph Lemoine » fit « observer que la dureté des temps, les charttée des grains » rendaient cette contribution impossible. Il proposa donc « de prendre à sa charge les réparations locatives annuelles s'élevant à la somme de 24 livres ; » de son côté, le général s'engagea à payer, la première année, 50 livres pour les grosses réparations urgentes. Les 600 qui resteront de la somme donnée par les héritiers de M. Duchêne seront placées et, pendant cinq ans, on dépensera les trente livres d'intérêt pour achever les grosses réparations. Après ces cinq années, on capitalisera les intérêts tous les quatre ou cinq ans on les ajoutera à la somme placée et, de la sorte, au bout de vingt ans, on aura 1.600 livres, qui permettront de faire tous les travaux sans lever d'impôts.

Cette proposition fut mise aux voix et acceptée. L'homologation fut demandée à Nos Seigneurs du Parlement de Bretagne. Ces 600 livres qui devaient être placées, furent prêtées le 26 Avril 1772 à René Lechapt et à Mathurine Gautier, son épouse.

Le Cimetière de Saint-Enogat, qui entourait alors l'église, fut agrandi le 26 Avril 1772 ; la dépense s'éleva à 142 livres.

Visites de l'Evêque de St-Malo. La paroisse de St-Enogat fut à diverses reprises visitée par l'Evêque du diocèse : le 5 Septembre 1616, le 9 Septembre 1620, le 22 Septembre 1621, le 3 Août 1623, le 15 Juin 1629, le 29 Juin 1633 [Note : Registres paroissiaux — Mairie de Dinard] … et plus tard en 1721 [Note : Registres du conseil général de D. S. E]. Les autres visites ne sont pas consignées sur les registres, sauf celle du 30 Juin 1778. Elle donna lieu à la nomination de « témoins sinodeaux pour rendre le témoignage requis à Mgr l'Evesque de Saint-Malo, lors de la visite qu'il a annoncée pour le trente de ce mois ». Ces témoins furent : Jean Lechapt sieur des Saudrais, Sieur François Agan, Sieur Joseph Guillaume Pondart, René Juxtaud sieur de Bellevigne [Note : Délibération du 21 Juin 1778].

(Joseph Mathurin).

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