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SAINT-POL-DE-LEON SOUS LA REVOLUTION (CHAPITRE 40).

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CHAPITRE XL.

SOMMAIRE.

Le maire de Saint-Pol écrit au sous-préfet de Morlaix que les fêtes décadaires sont délaissées. — Judicieuse réponse du sous-préfet. — Ecroulement de la galerie qui menaît du séminaire (aujourd'hui les Ursulines) à Kréisker. — Roscoff et Saint-Pol font la paix. — Epidémie à Jersey et à Guernesey. — Renouvellement de la municipalité. — Demande au gouvernement d'un établissement d'instruction publique à Saint-Pol. — Promulgation de la paix continentale. — Nouvelles avanies infligées aux prêtres fidèles. — Ordre de s'éloigner. — Déclaration nouvelle de ces ecclésiastiques. — La municipalité refuse au citoyen Loussaut un certificat de bonnes vie et moeurs. — Il est mis en demeure de payer ses contributions — Un sénatus-consulte autorise les prêtres déportés à rentrer en France. — Dernière fête décadaire. — Demande au préfet maritime de trois cloches pour Saint-Pol. — Bonaparte consul à vie. — Le conseil municipal demande que le siège épiscopal soit établi à Saint-Pol. — Règlement pour la sonnerie des cloches. — M. Elie Corre, nommé curé de Saint-Pol, prête serment dans la cathédrale de Quimper. — Epilogue.

Le Directoire, ce gouvernement pourri, sentant que le peuple se désaffectionnait de jour en jour de l'état actuel des choses, usa de toutes sortes de moyens pour ranimer dans les esprits le culte de la république. Pour amuser les Français il avait multiplié les fêtes civiles, véritables mascarades, que le peuple, plein de mépris pour les misérables, devenus les maîtres de la France, finit par délaisser entièrement. Comme le dit un Père de l'Eglise, l'âme est naturellement chrétienne. La plupart des Français se souvenaient des fêtes si belles, si touchantes du catholicisme, fêtes qui vont si bien au cœur, et ils soupiraient après leur retour.

Dans le courant de septembre 1800 — 25 fructidor, an VIII — Je citoyen maire de Saint-Pol écrivait au sous-préfet de Morlaix :

« Les fêtes décadaires sont complètement délaissées : le temple décadaire reste désert quand on donne lecture des lois, de l'état des naissances et des décès survenus dans la décade. Aucun mariage ne se fait plus le jour de la décade ».

Voici dans quels termes le sous-préfet répond à cette communication :

« Citoyen Maire,

Il est bien malheureux que toutes les fois qu'une loi nouvelle, ou un arrêté des consuls, semble se rapprocher de la Liberté, — tel est celui relatif à la célébration des décades et des déclarations de mariage, — le peuple des campagnes, en les interprétant à sa manière, se relâche des institutions républicaines aux quelles ses habitudes grossières l'empêchent de se plier.

Que faire en pareil cas ? D'un côté l'arrêté laisse aux citoyens la liberté d'exercer leur industrie, et ne les assujettit plus à observer les jours de décade, — d'un autre côté, les jours fériés de la religion dont les errements sont respectés par la loi, sont les régulateurs des habitudes de la multitude, et le temps les a consacrés.

Ira-t-on avec la force armée repousser les approvisionnements publics qui ne sont jamais moins cher que quand ils sont abondants ? — Dira-t-on à un peuple qui ne sait résister à aucune demande, au nom du bien public, qui acquitte ses impôts avec empressement : « Tu ne vendras l'aliment de la vie que tel jour ; tu ne paraîtras plus sur nos places qu'à telle époque ? ».

Non, citoyen maire, les principes de philosophie, dont le gouvernement fait preuve, le portent à fermer les yeux sur les erreurs populaires, quand l'Etat est paisible.

C'est à ce repos que nous devons nous attacher, et lorsque la guerre extérieure nous menace encore, laissons les villageois, vendre tel ou tel jour leurs denrées, s'il est plus content et s'il s'acquitte mieux des tribus qui peuvent soutenir la machine du gouvernement et nous assurer la victoire et la paix ». Signé : Duquesne.

Voilà certes un sous-préfet modèle. S'il eût vécu de nos jours, on l'eût traîné aux gémonies sans autre forme de procès.

La galerie qui servait de communication entre le corps du logis du ci-devant séminaire et l'église du Creisquer menaçait d'une ruine prochaine, par suite de sa vétusté et par son défaut de réparation depuis la suppression du séminaire. Sur l'observation de différents citoyens que la chute de cette galerie, vu le passage continuel des habitants de la rue Cadiou avec le haut bout de la ville, pourrait occasionner les accidents les plus graves, les citoyens maire et adjoint de Saint-Pol « considérant que la dépense de cette galerie serait très considérable, sans cependant aucun but d'utilité publique et que le danger qu'elle faisait courir aux passants, était imminent, arrêtèrent dans la séance du 15 brumaire, an IX, — 7 novembre 1800 — de la faire démolir sur le champ et d'employer les matériaux qui en proviendraient à la réparation du corps de garde de la place, alors inhabitable, et des autres édifices publics de la commune qui nécessiteraient des soins » [Note : Reg. des délib., etc. Fol. 73. — Les religieuses Ursulines occupent aujourd'hui les bâtiments du séminaire de Léon].

Signé : Michel Kerhorre, maire, Hervé Chef du Bois, adjoint, Boschet, secrétaire.

Conciliation entre Roscoff et Saint-Pol. — Ce même jour 15 brumaire, le maire de Saint-Pol adressait le pli suivant au maire de Roscoff :

« Le maire de Saint-Pol au maire de Roscoff.

Citoyen,

J'ai reçu hier soir la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire le 13 ; je suis trop ami de la paix pour ne pas concourir avec empressement aux moyens de conciliation que vous proposé entre nos deux communes ; je vais, en conséquence, nommer quatre commissaires pour concourir avec ceux que vous choisirés de votre côté, à un arrangement dicté par l'équité, et qui mettra fin à des contestations qui n'eussent jamais dues avoir lieu entre deux communes circonvoisines ; vous voudré bien m'indiquer le lieu et le jour ou vos commissaires se rendront, s'il survenoit quelqu'empêchement imprévu de la part des miens je vous en préviendroi aussitôt afin de remettre l'assignation. Je vous salue bien fraternellement ».

Une grande épidémie, paraît-il, sévissait dans le courant des mois de septembre et octobre 1800, en Angleterre et dans les îles de Jersey et de Guernesey, car un ordre de la division de l'armée de l'Ouest, signé par le général de division du 21 brumaire, an IX — 13 octobre 1800, — était transmis le 26 à Saint-Pol par le commandant du 6ème arrondissement du Finistère, signé : de La Fosse. Dans la séance tenue le lendemain, 27 brumaire, le conseil municipal arrête : « Que cet ordre sera proclamé, au fort du marché, au son de la caisse et en langue bretonne, et que les riverains seront invités à dénoncer à l'administration toute embarcation anglaise qui s'approcherait des côtes, et ce, avec la plus stricte rigueur, sous les peines qui écheent ».

Trois jours après, à la fête décadaire du 30 brumaire, l'administration municipale fait la communication suivante dans la salle décadaire :

« Au nom du peuple français — du 29 thermidor, an VIII de la République, une et indivisible,

Bonaparte, premier consul de la République arrête : le citoyen Kerhorre est nommé maire de Pol-Léon, département du Finistère ; le citoyen Chef du Bois est nommé adjoint ; le citoyen Floc'h, notaire, item. ».

Après avoir fait serment de fidélité à la Constitution conformément à la loi du 21 nivôse dernier, le citoyen Kerhorre lui donne l'accolade fraternelle, l'installe en qualité d'adjoint et lui remet son brevet [Note : Note : Reg. des délib., etc. Fol. 75].

Conseillers municipaux : — Les citoyens Guillou, Conversy, Le Hir, Roulloin, Péréault, Gélébart, Ménez, d'Arbo, Lozac'h, Sabatier, Poulpiquet-Brescanvel, Rageul, Ridar, Guillaume, Poulpiquet-Kermen, J. Ménez, Guivarc'h, Grall, Déniel, Figuières, Combot, Prigent, Cocaign et Berdelo.

La Révolution, en anéantissant les établissements religieux qui existaient à Saint-Pol avant 1789, avait, du même coup, anéanti les ressources qui donnaient le bien-être à ses habitants. Le commerce était tombé, et tout par suite était en souffrance. La municipalité ne savait comment remédier à cet état fâcheux. Dans la séance du 15 pluviôse, an IX — 5 février 1801, — l'administration municipale choisit trois de ses membres, les citoyens Conversy, Guillou et Roulloin pour rédiger un mémoire à l'effet d'obtenir du gouvernement un établissement d'instruction publique pour la jeunesse. Le citoyen Guillou, rapporteur de la commission, lut, au conseil, le mémoire dont la transcription suit :

« Citoyens,

Plusieurs motifs nous ont paru devoir engager le gouvernement à établir en cette commune un collège ou maison d'instruction publique. Cette commune possède, en effet, un bâtiment vaste primitivement établi et consacré à cet usage. Ce bâtiment, qui a coûté des sommes considérables, présente des ressources précieuses de localités pour le logement des professeurs et l'instruction des élèves. Cet édifice, par son emploi originaire, par les facilités qu'il offre pour l'instruction, par ses formes élégantes et solides, mérite de fixer l'attention de l'administration qui, en économisant les fonds de l'Etat, veut encourager le progrès des lumières.

Quelle cité d'ailleurs, du Finistère, pourroit réclamer avec plus de droits un établissement public que Saint-Pol-de-Léon, si l'on considère les pertes multipliées que cette ville a éprouvées ?

Jadis chef-lieu d'un évêché riche et étendu, et après avoir joui de la masse des produits d'un grand nombre de bénéfices et revenus ecclésiastiques, après avoir compté parmi ses habitants une grande quantité de propriétaires opulens, cette intéressante commune se trouve aujourd'huy réduite, en général, à une déplorable indigence, puisqu'elle n'a pour se vivifier ni les ressources du négoce, ni les produits d'aucune manufacture.

Cette commune donne aux pères de famille, jaloux de l'instruction de leurs enfants, les moyens de les y entretenir à moindres frais que dans les villes voisines, en raison du prix plus modéré des comestibles et du logement ; à l'économie domestique se joindroit le bienfait d'un air salubre, d'un site pittoresquement varié et d'un calme précieux pour les études.

Ces considérations, citoyens, nous semblent déterminantes pour obtenir à Saint-Pol-de-Léon l'objet d'une demande que nous nous flattons de voir appuiée auprès du gouvernement par des administrateurs sages et éclairés » [Note : Reg. des délib. du 14 frimaire an IX, au 2 thermidor, an X. Fol. 18-25].

Cette pétition qui méritait certes d'être prise en considération n'eut alors aucun effet.

Le 30 germinal, an IX — 19 avril 1801 — la municipalité de Saint-Pol fêtait la promulgation de la paix continentale. Ce fut un jour de grande allégresse dans toute la France. Dès la veille, à Saint-Pol, on avait pris toutes les mesures possibles pour donner beaucoup d'éclat à la fête. Le lendemain, l'administration municipale, les chefs civils et militaires se transportèrent à dix heures du matin sur la place publique, et on y proclama la paix aux cris répétés de : vive la Paix, vive la République, vive Bonaparte, vivent nos armées, nos généraux, et au bruit du canon [Note : Reg. des délib. du 14 frimaire an IX, au 2 thermidor, an X. Fol. 35].

Signé : M. Kerhorre, maire, Chef du Bois, adjoint, Le Floch, adjoint, Boschet, secrétaire.

Nous avons vu plus haut que dans le courant de thermidor, an VIII, MM. Elie Corre, Le Moall, de Mathézou, Péron et Yves Kérebel qui avaient déclaré fixer leur résidence à Saint-Pol, avaient été invités alors à se rendre à la municipalité pour y présenter leurs cartes de sûreté, et autorisés à exercer librement leur culte.

Il est à croire que la liberté donnée à l'exercice du culte catholique contrariait certains patriotes. Le 18 prairial, an IX — 7 juin 1801 — le conseil municipal se réunissait, et après lecture d'une lettre du sous-préfet de Morlaix, en date du 14 courant, invitait de nouveau MM. Péron, Henry, Corre, Le Moall, Kérebel et Mathézou à se rendre à la municipalité pour prêter le serment suivant à la Constitution, conformément à la loi du 21 nivôse, an VIII :

« Je promets fidélité à la Constitution ».

Ces messieurs crurent ne pouvoir pas prêter le serment qu'on leur demandait. Ils firent observer toutefois « que toujours disposés à prêcher la paix, l'union et la soumission aux lois, ils promettaient de se soumettre à l'autorité et au gouvernement, par conséquent aux lois civiles et réglementaires et de police qui en émaneraient ou qu'ils porteraient pour le maintien du bon ordre et de la tranquillité, conformément à la loi du 7 vendémiaire, an IV.

Sur ce refus, défense expresse est faite aux ministres du culte ci-dessus nommés de célébrer à l'avenir le culte catholique dans la ci-devant église cathédrale qui était en leur possession et qui allait être fermée. En vertu d'un ordre du sous-préfet de l'arrondissement, le citoyen Kerhorre, maire de Saint-Pol, intime l'ordre à MM. Kérebell et Le Moall, lesquels n'étaient pas originaires de Saint-Pol, de quitter la commune dans les vingt-quatre heures, et de se retirer dans celle de leur origine [Note : Reg. des délib. du 14 frimaire an IX, au 2 thermidor, an X. Fol. 43-44].

Il est également enjoint à MM. Joguet et Bleuven, ministres du culte, en surveillance à Saint-Pol, de se rendre sur le champ à la sous-préfecture de Morlaix où ils recevront des ordres ultérieurs.

Dix jours après, — le 29 prairial, — MM. Jean Péron, Michel Henry, Elie-Joseph Corre, Nicolas-Marie Le Moall, Yves Kerebel, Jacques-Marie-Joseph Mathézou se présentent de nouveau à la mairie où ils font la déclaration suivante :

« Etrangers à toutes les discussions civiles et politiques, comme la religion que nous professons nous l'impose, nous venons donner à la puissance temporelle une garantie de notre soumission, sauf néanmoins la religion catholique, apostolique et romaine, dont la loi garantit le libre exercice, à cette condition. En conséquence nous promettons fidélité à la Constitution et signons :

Je promets fidélité à la Constitution. — Jean Péron, prêtre catholique.

Je promets fidélité à la Constitution. — Henry, prêtre catholique, apostolique.

Je promets fidélité à la Constitution. — Corre, prêtre catholique, apostolique et romain.

Je promets fidélité à la Constitution. — Le Moall, prêtre catholique romain.

Je promets fidélité à la Constitution. — Kérébel, prêtre catholique romain.

Je promets fidélité à la Constitution. — J.-M.-J. Mathézou, prêtre catholique, apostolique et romain.

Et avons demandé acte de notre soumission ».

Faisant droit à leur requête, le citoyen Kerhorre, maire de Saint-Pol, leur donna acte de leur déclaration à valoir et servir à ce qu'il sera vu appartenir. Signé : Michel Kerhorre, maire, Boschet, secrétaire [Note : Reg. des délib. du 14 frimaire an IX, au 2 thermidor, an X. Fol. 45].

Désormais les prêtres fidèles ne furent plus inquiétés, et ils purent exercer leur saint ministère en toute liberté. La persécution avait duré dix ans. Elle avait jonché le sol de ruines matérielles ; bien plus déplorables encore furent les ruines morales qu'elle avait accumulées dans les âmes. Nous sommes toujours sous les influences pernicieuses de cette néfaste époque. Les Droits de l'Homme sont continuellement à l'ordre du jour ; quant aux devoirs de l'homme, personne n'y songe. Le virus révolutionnaire a pénétré un peu partout, s'il n'a pas tout contaminé.

De la séance tenue par la municipalité de Saint-Pol, le 14 vendémiaire, an X — 6 octobre 1801, — nous extrayons ce qui suit :

« Une grande nouvelle vient de parvenir en cette commune ; la signature de la paix avec l'Angleterre.

Pénétré des sentiments de la plus vive allégresse, et désirant la partager avec nos concitoyens,

Nous, maire et adjoints, arrêtons :

1° Qu'à 4 heures de l'après midi de ce jour toutes les autorités civiles et militaires seront invitées à se rendre dans la grande salle de la mairie pour de là se rendre sur la place pour assister au feu de joie qui sera allumé en signe d'allégresse publique ;

2° Le commandant du 6ème arrondissement, les officiers de la garnison, toutes les troupes seront également invitées à s'y rendre ainsi que la garde nationale.

Le commandant du 6ème arrondissement sera de plus invité à faire tirer le canon pour donner plus de solennité à la fête. Une illumination générale sera ordonnée pour commencer à 8 heures du soir et finir à 10 heures. Signé : Hervé Chef du Bois, adjoint ; Le Floch, adjoint ; Michel Kerhorre, maire ; Boschet, secrétaire » [Note : Reg. des délib. du 14 frimaire an IX, au 2 thermidor, an X. Fol. 73].

Le 19 vendémiaire, le citoyen Loussaut adressait à la mairie une pétition à l'effet d'obtenir de la municipalité un certificat de bonnes vie et mœurs. Dans la séance, tenue le 22 du même mois, les citoyens, maire et adjoints de Saint- Pol, arrêtent qu'il n'y a pas lieu d'accorder au citoyen Loussaut le certificat par lui demandé [Note : Reg. des délib. du 14 frimaire an IX, au 2 thermidor, an X. Fol. 75].

Moins d'un mois après, le 7 brumaire, an X — 28 octobre 1801, — le maire fait mettre deux garnisaires chez le citoyen Loussaut, qui refuse de payer ses contributions et qui n'a pas rendu compte des impositions perçues par lui en 1797 et 1798.

Les garnisaires exhibent le réquisitoire dont ils sont porteurs au citoyen Loussaut, lequel en prend lecture, puis le garde en disant qu'il se f . . . de toute la garnison et qu'il ne paierait pas ses contributions.

Le commandant de la place, vu l'état de surexcitation du citoyen Loussaut, envoie quatre hommes de renfort pour maintenir le bon ordre dans sa maison. On leur refuse toute espèce de vivres et de literie, et ils sont obligés de coucher par terre, sans paille ni couverture.

Le lendemain matin, à 8 heures, le dit Loussaut quitte la maison, accompagné de sa femme, après avoir fermé toutes les portes, laissant les garnisaires dans la cuisine, sans vivres [Note : Reg. des délib. du 14 frimaire an IX, au 2 thermidor, an X. Fol. 80-82].

Comme l'ancien évêché restait inoccupé, la municipalité en fit la demande au gouvernement le 3 ventôse, an X — 23 février 1802. — On y établirait la maison commune, la justice de paix et la gendarmerie.

Un sénatus-consulte, en date du 6 floréal, même année, — 26 avril, — autorise les prêtres déportés à rentrer en France, à la condition de promettre d'être fidèles au gouvernement établi par la Constitution, de n'entretenir ni directement ni indirectement aucune liaison ni correspondance avec les ennemis de l'Etat, et de déclarer qu'ils ne possèdent aucun titre, décoration, traitement ou pension des puissances étrangères.

Quatre jours après la notification du sénatus-consulte précité, 30 avril 1802, Saint-Pol célébrait sa dernière fête décadaire. Nous reproduisons le procès-verbal, dressé à cette occasion.

« L'an X de la République française, ce jour 10 floréal, nous, maire et adjoints de la ville et commune de Saint-Pol-de-Léon, arrondissement de Morlaix, département du Finistère, accompagnés de notre secrétaire, en exécution de la loi du 13 fructidor, an VI, — 1er septembre 1797, — relative à la célébration des décadis, certifions et rapportons que nous étant transportés jusques et dans la salle décadaire de cette commune, nous y avons fait donner lecture par le ministère de notre dit secrétaire greffier : 1° de la notice des naissances et décès reçue dans la première décade de floréal, an X courant ; 2° des lois, arrêtés et actes du gouvernement contenus dans le bulletin n° 170.

Cette lecture finie, la salle décadaire a retenti des cris répétés de vive la République !

La fête s'est ainsi terminée, et l'assemblée, avant de désemparer, a fait entendre les mêmes cris.

De tout quoi nous avons fait et rédigé le présent procès-verbal sous nos seings, celui de notre secrétaire en chef, les dits jour, mois et an [Note : Reg. des délib. du 14 frimaire an IX, au 2 thermidor, an X. Fol. 122, verso].

Signé : Michel Kerhorre, maire, Le Floch, Hervé Chef du Bois, adjoints, Boschet, secrétaire ».

Nous avons déjà eu l'occasion de le dire ; ce sont les décadis qui ont ruiné la foi dans maintes contrées de la France. Aujourd'hui encore à peine y voit-on quelque vestige de la religion chrétienne. Dans ces pays, en effet, le jour du Seigneur n'est plus connu et le paysan travaille aux champs, le dimanche comme les autres jours.

Le conseil municipal, dans la séance du 24 floréal, an X, — 14 mai 1802 — insérait dans sa délibération la pétition suivante qu'il adressa au préfet maritime :

« La commune de Saint-Pol-de-Léon, avant la Révolution, possédait une des plus belles sonneries de la ci-devant Bretagne. Les cloches furent enlevées pendant les orages de la Révolution, et il n'en est resté que deux, dont une trop petite pour être d'aucune utilité.

Ayant appris que le préfet maritime de Brest en délivrait aux municipalités qui lui en faisaient la demande, le maire et les adjoints de Saint-Pol prient le dit préfet maritime de vouloir bien accorder à leur commune trois cloches dont elle a une nécessité indispensable, d'après la loi bienfaisante sur les cultes ».

Le César n'est pas loin. Encore quelques mois, et aux cris de Vive la République succéderont ceux de Vive Napoléon ! Vive l'Empire !

Le pli suivant, arrivé à Saint-Pol, le 2 prairial, an X — 21 mai 1802 — vers les onze heures du matin, était transcrit le même jour sur le registre des délibérations de la municipalité, fol. 126-127. Nous le reproduisons textuellement :

« Extrait des registres des délibérations des consuls de la République.

Paris, le 20 floréal, an X de la République une et indivisible.

Les consuls de la République sur les rapports des ministres ;

Le Conseil d'Etat entendu :

Vu l'acte du Sénat conservateur du 18 de ce mois, le message du Premier Consul au Sénat Conservateur en date du lendemain 19,

Considérant que la résolution du Premier Consul est un hommage éclatant rendu à la souveraineté du Peuple ; que le Peuple, consulté sur ses plus chers intérêts, ne doit connaître d'autre limite que ses intérêts mêmes,

Arrêtent ce qui suit :

Article 1er. — Le Peuple français sera consulté sur cette question : Napoléon Bonaparte sera-t-il consul à vie ?

Art. 2. — Il sera ouvert dans chaque commune des registres où les citoyens seront invités à consigner leur vœu sur cette question.

Art. 3. — Ces registres seront ouverts aux secrétariats de toutes les administrations, aux greffes de tous les tribunaux, chez tous les maires et tous les notaires.

Art. 4. — Le délai pour voter dans chaque département sera de trois semaines, à compter du jour où cet arrêté sera parvenu à la préfecture, et de sept jours à compter de celui où l'expédition sera parvenue à chaque commune.

Art. 5. — Les ministres sont chargés de l'exécution du présent arrêté, le quel sera inséré au Bulletin des Lois.

Le second consul, signé Cambacérès, par le second consul ; le secrétaire d'Etat, signé Hugues : B : Marret. Le ministre de la Justice, signé : Abriat.

Certifié conforme : le ministre de la Justice, signé : Abriat.

La pièce ci-dessus adressée aux communes du Finistère le 2 prairial, an X, doit être publiée et on devra s'y conformer dans toutes les communes.

Le dit arrêté arrivé à Saint-Pol le 2 prairial, an X, vers les onze heures du matin. Signé : Michel Kerhorre, maire, Boschet, secrétaire » [Note : Reg. des délib. du 14 frimaire an IX, au 2 thermidor, an X. Fol. 126-127].

Le 15 pluviôse, an IX — 5 février 1801, — l'administration municipale de Saint-Pol, nous l'avons mentionné plus haut, avait adressé un mémoire au gouvernement à effet d'obtenir un établissement d'instruction publique. Cette démarche n'eut alors aucun résultat.

L'année suivante, la municipalité suppliait le gouvernement d'établir à Saint-Pol le nouveau siège épiscopal de préférence à Quimper. Voici les motifs, mis en avant, à ce sujet dans la séance du 11 prairial, an X — 31 mai 1802 :

« Le citoyen maire a représenté que l'ancien palais épiscopal existe et qu'avec des réparations peu coûteuses, il offriroit un logement commode et agréable à l'évêque du Finistère, que la cathédrale se trouve dans le meilleur état, et que le superbe bâtiment servant ci-devant de collège n'exigeroit que de médiocres réparations pour être dans le meilleur état possible ; qu'après les pertes multipliées que cette commune a éprouvées, elle se trouve aujourd'huy dénuée de toutes espèces de commerce et de ressource ; qu'en conséquence il seroit intéressant pour cette villed'y obtenir la résidence de l'évêque.

Le conseil, prenant en considération la représentation du citoyen maire, a nommé une commission pour rédiger un mémoire, en obtention d'un siège épiscopal dans cette ville. Cette commission est composée des citoyens Le Hir, Guillou, Gélébart et Roulloin, les quels sont invités à s'occuper au plus tôt de la rédaction du dit mémoire ».

Rédigé séance tenante, il fut adressé le même jour au ministre de l'intérieur.

Nous le reproduisons ici :

« Saint-Pol-de-Léon, département du Finistère, le 11 prairial, an X de la République Française.

Le conseil municipal, extraordinairement rassemblé, par permission du préfet, en date du 29 floréal dernier — 19 avril 1802.

Au Ministre de l'Intérieur,

Citoyen Ministre,

Pleins de confiance dans la sagesse de votre ministère, toujours ami de la justice distributive, nous croyons pouvoir vous exprimer le vœu de nos concitoyens sur l'établissement du siège épiscopal du Finistère dans notre ville.

S'il suffisait, pour motiver notre demande, de mettre sous vos yeux le tableau fidèle des pertes considérables éprouvées par notre commune, nous vous en offrirons la série dans la suppression d'un siège épiscopal, de son chapitre, d'un séminaire, d'un collège nombreux, d'une maison de retraite pour les femmes, de trois communautés religieuses, d'une juridiction, d'une commission intermédiaire des Etats de Bretagne, d'un haras, d'une école d'hydrographie, dans l'émigration enfin d'un grand nombre de familles opulentes dont les dépenses calculées avec celles des établissements précités s'élevoient, sans exagération, à une somme annuelle de plus de 600,000 francs.

Mais, sans nous livrer ici à des regrets inutiles sur l'ancien état de prospérité dans notre cité, nous ne ferons valoir auprès de vous, dans cette circonstance, que les avantages précieux qu'offrent encore dans nos murs une cathédrale en bon état, un palais épiscopal avec de vastes jardins, un superbe collège, bâtiment neuf et solide, et un séminaire, localités faisant encore partie du domaine national.

Si vous joignez à ces avantages la salubrité de l'air dans un pays fertile et pittoresque, le prix modéré des comestibles, le voisinage des principales villes du département, vous apprécierez d'un coup d'œil l'importance de notre position géographique pour les établissements que comporte un siège épiscopal.

Nous désirons infiniment que ces puissantes considérations militent en notre faveur.

Nous désirons aussi que l'évêque du Finistère connoisse les ressources particulières à sa destination que présente notre ville. Il y est depuis longtemps appelé par le vœu unanime de ses habitants, fidèles aux saints principes d'une religion de paix et de charité [Note : Reg. des délib. du 14 frimaire an IX, au 2 thermidor, an X. Fol. 129-130].

Signé : Michel Kerhorre, maire, Ménez, secrétaire ».

Le sénatus-consulte du 6 floréal, an X, avait été accueilli en France avec la joie la plus vive. Il faut le reconnaître, ce fut une politique habile de la part du gouvernement consulaire, car il gagna de la sorte quantité de nobles familles, heureuses de revoir ceux des leurs qui s'étaient expatriés pour échapper à la mort.

Quelques semaines après la publication de l'amnistie, le 29 prairial, an X — 18 juin 1802 — comparaissaient à la mairie de Saint-Pol MM. Jérôme-François Kéroulas, Jean-Guillaume Le Gac, prêtres déportés, et le citoyen François-Marie Monnier-Villeneuve, lesquels déclarèrent avoir débarqué dans la matinée de ce jour, au port de Roscoff, et arriver directement d'Angleterre, sur le navire la Princesse-Auguste, capitaine Piers. Ils représentèrent l'état d'infirmité où ils se trouvaient, ce qui les empêchait de se rendre à Quimper auprès du préfet pour y prêter le serment voulu par la loi.

Après vérification de l'état des sus-dénommés par les citoyens Guillou et Lozach, le maire reçoit leur serment individuel « d'être fidèles au gouvernement établi par la Constitution et de n'entretenir ni directement ni indirectement aucune liaison ni correspondance avec les ennemis de l'Etat, déclarant aussi ne posséder aucun titre, ni décoration, traitement ou pension des puissances étrangères ». Acte leur est décerné de leur serment. Signé : Jérôme-François Kéroulas, prêtre catholique. Le Gac, prêtre, Monnier de Villeneuve, Michel Kerhorre, maire, Boschet, secrétaire.

Se sont présentés le même jour, MM. Jean-Marie-Dominique Poulpiquet, Louis-François Limoges, Henry-François-Joseph Lozach et Pierre-Marie Poullaouec, prêtres déportés, venant également d'Angleterre. Ils prêtent le serment ordonné par la loi et signent. Acte de leur serment leur est décerné par le maire, sauf à eux à se présenter néanmoins devant le préfet dans le délai prescrit par la loi [Note : Reg. des délib. du 14 frimaire an IX, au 2 thermidor, an X. Fol. 134-135].

Dans la séance du 21 brumaire, an XI — 12 novembre 1802 — le conseil municipal s'assemblait pour délibérer sur le règlement à faire pour le son des cloches. Voici ce qui fut statué à ce sujet :

« Vu la lettre du préfet du 5 brumaire, vu aussi l'article 48 des articles organiques du Concordat, relatif au son des cloches, le règlement de M. l'évêque, concerté à ce sujet avec le préfet, en date du 16 fructidor dernier, nous maire arrêtons :

1° Que conformément au dit article 48 du Concordat, le son des cloches pour appeler les fidèles au service divin sera exécuté comme suit : les grands offices seront annoncés les dimanches et fêtes conservées par le Concordat, par trois appels, de demi-heure en demi-heure, au son des cloches à la volée ;

2° Les offices ordinaires, les masses basses seront annoncées par le tintement d'une cloche.

Pour toutes les autres cérémonies religieuses, la sonnerie des cloches est expressément interdite ;

3° En cas d'incendie ou autres alarmes quelconques dans la commune, la grosse cloche sera sonnée à coups répétés pendant que le danger durera, et jusqu'à ce que l'ordre contraire n'ait été donné ;

4° A 6 heures du matin, à midi et à 6 heures du soir, il sera sonné neuf coups, à chaque fois, pour annoncer aux citoyens les heures du commencement et de la cessation des travaux, ainsi que celle du dîner ;

5° La cloche sera sonnée pour l'assemblée du conseil, les fêtes nationales et dans toutes les circonstances où le maire croira devoir le faire, pour le bien du service.

Le présent arrêté sera transmis au sous-préfet pour avoir son autorisation. Signé : Kerhorre, maire, Boschet, secrétaire » [Note : Reg. des Délib. de l'adm. municipale, de Saint-Pol du 2 thermidor an X au 17 pluviôse an XIII. Fol. 28].

M. Corre, ancien recteur du Minihy, avait été nommé curé de Saint-Pol le 22 germinal, an XI — 12 avril 1803. — Quelques jours après, le 30 germinal, le conseil municipal se réunissait pour délibérer sur le logement à fournir au nouveau curé. Voici ce qui fut arrêté dans la séance tenue ce jour : « Il a été donné lecture à l'assemblée de l'arrêté du gouvernement du 7 ventôse, an XI, relatif : 1° à l'acquisition, location ou réparation du bâtiment destiné au culte ; 2° à l'établissement ou réparation du presbytère.

Il a été également donné lecture de la circulaire du préfet, en date du 6 germinal courant, rapellant les dispositions de l'arrêté précité, et enfin de l'article 82 de la loi du 18 germinal, an X, relative à l'organisation du culte.

Le conseil, après avoir délibéré sur les moyens à prendre pour opérer les réparations à faire au bâtiment, servant actuellement au culte, a été d'avis de nommer des commissaires pour vérifier et constater les dites réparations, et a nommé à cet effet les citoyens Berdelo, Gélébart et Jean-Louis Roulloin, avec invitation d'en faire leur rapport à la prochaine séance » [Note : Reg. des Délib. de l'adm. municipale, de Saint-Pol du 2 thermidor an X au 17 pluviôse an XIII. Fol. 50].

Dans cette séance qui se tint le 10 floréal, an XI, — 30 avril 1803 — les dits commissaires présentèrent à la municipalité le rapport suivant :

« Le bâtiment, servant au culte, est en bon état, les habitants de la commune ayant pourvu de leur propre munificence aux réparations urgentes du dit bâtiment.

Quant à l'habitation, devant servir de presbytère, le conseil, considérant que le produit de l'octroi, établi à Saint-Pol, a été employé jusqu'à ce jour au payement des dettes de la commune, et que, n'ayant pas de fonds en caisse, elle ne peut acquérir une maison et un jardin pour le logement du curé, a adopté provisoirement le mode de location ».

L'ancien presbytère, vendu révolutionnairement, avait été acheté par le citoyen Penn et était actuellement occupé par Me Geffroy du Roch-Glaz, veuve Thibault-Plaisance. On entra, en conséquence, en pourparler avec la dite dame et le propriétaire du local. La municipalité s'engagea à payer, comme indemnité de logement, une somme de cent francs à Me Thibault-Plaisance, pour céder le presbytère au 8 vendémiaire prochain, et au citoyen Penn la somme annuelle de 258 francs [Note : Reg. des Délib. de l'adm. municipale, de Saint-Pol du 2 thermidor an X au 17 pluviôse an XIII. Fol. 51].

La loi du 18 fructidor, an XI — 4 septembre 1803 — ayant converti l'ancien palais épiscopal en sénatorerie en faveur du sénateur Cornudet, les bureaux de la mairie furent transférés quelques jours après, le 21 octobre, dans une maison appartenant au citoyen Lubin Salaün.

A cette occasion, le conseil municipal, à l'unanimité, chargea le maire d'écrire au sénateur Cornudet pour l'assurer de l'hommage de son respect et de lui rendre la satisfaction qu'il éprouve de le posséder dans la commune [Note : Reg. des Délib. de l'adm. municipale, de Saint-Pol du 2 thermidor an X au 17 pluviôse an XIII. Fol. 80].

Signé : Kerhorre, maire, Ménez, secrétaire, Boschet, secrétaire en chef.

Ce même jour, 28 vendémiaire, an XII — 20 octobre 1803, — et le 18 brumaire suivant — 9 novembre — le maire était chargé par le conseil municipal de soumissionner l'église des ci-devant Minimes et l'Auditoire qui avaient été subrepticement loués, pour le prix de vingt francs, à son détriment.

L'église servirait pour la tenue des assemblées primaires, et l'Auditoire serait transformé en maison commune [Note : Reg. des Délib. de l'adm. municipale, de Saint-Pol du 2 thermidor an X au 17 pluviôse an XIII. Fol. 82].

Signé : Le Hir, Roulloin, Gélébart, commissaires.

M. Corre, nous l'avons vu, avait été nommé curé de Saint-Pol le 22 germinal, an XI. Ce ne fut que plusieurs mois après qu'il se rendit à Quimper pour prêter serment. Nous rapportons ici le procès-verbal de cette cérémonie, qu'on lira, croyons-nous, avec plaisir :

« Du 18 frimaire, an XII de la République Française, département du Finistère, 8 décembre 1803.

Je soussigné, François-Daniel Polluche, secrétaire général de la préfecture du département du Finistère, chargé par l'art. XXVII de la loi du 18 germinal, an X, de dresser procès-verbal de la prestation de serment prescrit par la convention passée entre le Gouvernement et le Saint-Siège, certifie que aujourd'huy, mercredi quinze frimaire de l'an XII de la République française, devant le citoyen François-Joseph Rudler, préfet du département du Finistère, dans l'église cathédrale de Saint-Corentin, à Quimper, s'est présenté Elie-Joseph Corre, nommé curé de Pol-Léon, canton de Pol-Léon, arrondissement de Morlaix, par arrêté de Monsieur l'Evêque de Quimper, du 22 germinal, an XI, approuvé par le premier consul le 27 messidor suivant ; lequel s'est mis à genoux et la main droite placée sur l'Evangile, a prêté le serment dans les termes suivants :

Je jure et promets à Dieu, sur les Saints Evangiles de garder obéissance et fidélité au gouvernement établi par la constitution de la République française ; je promets aussi de n'avoir aucune intelligence, de n'assister à aucun conseil, de n'entretenir aucune ligue, soit au-dedans, soit au-dehors, qui soit contraire à la tranquillité publique, et si, dans l'arrondissement de ma cure ou ailleurs, j'apprends qu'il se trame quelque chose au préjudice de l'Etat, je le ferai savoir au gouvernement.

Du quel serment il a été donné acte par le citoyen préfet, et rapporté le présent procès-verbal, conformément à la loi.

En foi de quoi j'ai délivré le présent acte. Ainsi signé en l'original : Polluche » [Note : Reg. des Délib. de l'adm. municipale, de Saint-Pol du 2 thermidor an X au 17 pluviôse an XIII. Fol. 84].

Nous posons ici la plume. Désormais Saint-Pol n'a plus d'histoire particulière, car la sienne est commune à celle de tous les cantons de France.

Au début de ce travail, nous disions que la Révolution n'était point morte dans notre pays. Par plus d'un côté, notre époque rappelle le temps passé où nos pères ont eu à subir de si rudes, de si douloureuses épreuves. Ce qui se pratique en France depuis deux ans (1902-1903), est de nature à inspirer les plus justes craintes, à faire naître dans les esprits les plus vives alarmes. L'horizon est bien noir et on peut s'attendre à tout. A l'heure actuelle d'effroyables tempêtes se déchaînent contre l'Eglise de France. Les congrégations religieuses d'hommes sont proscrites, et leurs membres, traités en ilotes, sont contraints de prendre le chemin de l'exil. Le tour des congrégations de femmes ne tardera pas d'arriver. N'a-t-on pas déjà vu forcer leurs maisons, et employer l'armée à coopérer à ces tristes exploits ? Immenses, certes, seront les ruines de toutes sortes qui vont s'accumuler dans notre malheureuse patrie. L'Eglise en souffrira, ainsi que ses fidèles enfants. Mais l'Eglise a des promesses, et lorsque les sectaires haineux auront parachevé leur funeste et sale besogne, ils disparaîtront à leur tour, et c'est en vain qu'on en cherchera la trace. Comme le disait un grand chrétien, le président de la République de l'Equateur, tombant sous le couteau d'un assassin : « Dieu ne meurt pas ». Il aura toujours le dernier mot, et l'Eglise, son épouse immaculée, continuera sa marche triomphale à travers les siècles.

(abbé J. Tanguy).

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