Web Internet de Voyage Vacances Rencontre Patrimoine Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Bienvenue !

Hymnes, cantiques, guerz et divers chants composés en l’honneur de saint Yves

  Retour page d'accueil       Retour page "Saint-Yves"  

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

saint Yves, patron des Avocats et de la Bretagne

La poésie est l’aile de la pensée : elle la promène dans un monde quelquefois imaginaire, mais aussi bien souvent, elle lui permet de parcourir les différentes régions où l’histoire ne peut la suivre. Ensuite elle nous élève à une hauteur telle que nous avons sous les yeux comme une vue d’ensemble d’événements qui ne se sont passés qu’à de grandes distances de temps et de lieux. Les ornements dont elle l’entoure ne font que mieux apprécier cet ensemble gracieux et le graver plus profondément dans la mémoire. C’est ainsi que les premiers faits de notre histoire ont été transmis à la postérité, à une époque où la tradition était le seul moyen d’en conserver le souvenir. En Bretagne surtout, ce pays poétique par excellence, malgré l’âpreté de son climat et la rudesse proverbiale de son sol, les sentiments de l’âme, la reconnaissance du cœur, et l’admiration de la pensée, tout se traduit en une poésie triste parfois, mais suave et d’une saveur toute particulière que lui communique le parfum des fleurs dorées de ses landes immenses. C’est dans ces cantiques et ces guerz que nous trouvons l’admiration, la reconnaissance et la dévotion de nos pères pour saint Yves.

Les hymnes sont nombreuses et très anciennes dans notre liturgie bretonne. Nous ne pouvons les donner toutes, et même, pour ne point arrêter le cours de cette étude, nous ne citerons que le commencement de chacune d’elles, en latin, avec la traduction, aussi complète que possible du reste, pour être compris de tout le monde.

I. — Gaude, Mater Ecclesia, (Hymne de l’office de saint Yves, XVème siècle).

Réjouissez-vous, Eglise notre mère, et vous, terre de Bretagne, tressaillez d’allégresse, car le monde entier célèbre la gloire de saint Yves.

Ce saint, puissant comme le fils du tonnerre, fut un prédicateur distingué. Sobre dans sa nourriture, il se plaisait dans la société des pauvres.

Il mangeait, à la même table, des mets grossiers comme ils en mangeaient eux-mêmes, et avec une égalité parfaite.

Il se prêtait à procurer fidèlement tous les secours qu’on lui demandait, rendait la justice avec une admirable équité, était d’une grande discrétion dans les conseils qu’il donnait, et portait joie et consolation à tous les opprimés.

Tout ce qu’il entreprenait, il le faisait avec un soin remarquable, s’appliquait à apaiser les discordes et ne cherchait jamais à tirer vengeance des injures qu’il recevait.

Sur ses traits, c’était toujours la même gaîté, dans son âme, la même constance : aucune adversité ne décourageait ses desseins ; rien n’assombrissait les traits de son visage.

Il parcourait avec assiduité tout le pays de Tréguier, prêchait au peuple, en allant comme en venant, toujours revêtu d’un habit bien pauvre, mais recevant un éclat extraordinaire des miracles qu’il opérait.

Gloire, honneur et puissance au Christ que nous prions, par les miracles insignes de saint Yves, de nous donner la joie du ciel.

II. — Gaude, terra Franciæ. (Hymne de la même époque).

Réjouis-toi, terre de France, et toi surtout pays de Bretagne, qui nous as donné saint Yves, d’une de tes plus nobles familles.

De même qu’un ruisselet bien aimé de tous, donne à tous son eau limpide ; pour le salut du peuple, qu’il nous donne une voix pour chanter les éloges de sa vie !

Yves s’appliquait à l’étude, surpassait ses compagnons d’école par l’éclat de son esprit. Il les surpassait encore dans les sciences de la terre, et parut au monde avec une auréole d’une incomparable perfection.

Les pauvres, les pupilles, les orphelins et tous les malheureux, étaient l’objet de ses prédilections ; et, en avocat distingué, il poursuivait gratuitement leurs causes pour les défendre.

Après cela, il devint official et se rendit également agréable aux bons et juste pour les méchants, à tel point que jamais pareil juge ne s’était encore vu.

Il rendait la justice à chacun en particulier, apaisait les discordes et les procès en supprimant les causes qui les faisaient naître.

Il devint ensuite prêtre, puis curé, et par ses prédications fermes et savantes, montrait à ses ouailles le chemin du ciel.

III. — Yvo, quis tibi debitas. (Hymne de la même époque).

Yves, qui pourrait arriver à chanter des éloges qui vous sont dus, comme un tribut de notre reconnaissance, vous qui rappelez à la vie ceux qui viennent d’en être privés.

Yves, vous commandez aux flammes de l’incendie ; vous délivrez, par un éclatant prodige et le secours de vos puissantes prières, ceux qui sont tourmentés par le démon.

Yves, vous donnez la lumière aux aveugles ; vous rendez le marcher aux boiteux ; vous terminez les discordes et les procès, et en rétablissant la paix vous la rendez durable.

Yves, vous guérissez les corps de toutes leurs infirmités, quels qu’en soient le genre et la gravité ; vous apaisez la tempête, et rendez à la mer la tranquillité de ses flots.

Yves, ceux qui vous prient humblement, vous brisez leur fers et apparaissez au milieu des dangers, pour aider et sauver ceux qui réclament votre protection !

Yves, nous qui sommes vos serviteurs et que le malheur accable de tous côtés, tournez vos regards vers nous et daignez nous délivrer de tant de maux !

Gloire, honneur et puissance à la Trinité-Sainte qui donne, avec tant de munificence, une telle puissance à saint Yves.

IV. — Laus resonet hymnidica. (Hymne du XVème siècle. Propre de Saint-Malo).

Afin que la louange exprimée dans cette hymne retentisse à l’oreille des fidèles, que saint Yves, si puissant au ciel, nous prête son appui.

Le concert des Anges et de tous les bienheureux réjouira le ciel des accents de leur reconnaissance, pour les bienfaits de saint Yves.

Du pays de Bretagne, sa patrie, Yves, sorti comme un lys, dans la vision béatifique possède un trône au ciel.

La puissance apostolique, par la main de Clément VI, rendit les honneurs de la canonisation émanée du pouvoir des clés, à Yves, le grand thaumaturge breton.

Honneur et gloire à la Sainte-Trinité qui nous justifiera sur la terre, par les mérites de saint Yves couronné au ciel.

V. — Mater vidit in somnio. (Hymne du même siècle).

Sa mère vit en songe qu’Yves son fils serait un grand saint. Sa tendre piété consacra son âme à Dieu, et la passion de Notre-Seigneur augmenta encore la sainteté de saint Yves.

Yves, dans sa jeunesse, aima l’étude des Livres Saints, que votre grâce, Seigneur, lui rendit pleins d’attraits.

A travers les saints exercices de la prière, Yves, ô mon Dieu, ne se guida que par votre divine clémence.

Gloire au Père, au Fils, au Saint-Esprit, par les œuvres admirables de saint Yves. Que remplis de ses divines leçons, nous le voyions un jour au ciel !

VI. — Qualis mane novo. (Hymne du Propre de Tréguier, XVIIIème siècle).

Tel le matin, quand le soleil sort sa tête radieuse dans un ciel sans nuage, annonce au laboureur une abondante moisson et présage au peuple un jour brillant.

Ainsi, par sa naissance, Yves, dès son enfance, annonça à ses pieux parents les heureuses prémices de son âme, présageant déjà quelle serait la sublimité de sa vertu quand il serait homme parfait.

Et par quelles belles vertus il brille déjà aux yeux de tous, soit qu’il porte des sentences, ou que pasteur des âmes, il conduise déjà ses ouailles, dans les sentiers que sa parole leur a fait connaître.

Accourez près de lui, ô pauvres, que la dureté des cœurs du riche ou la puissance des grands tiennent sous le poids de l’oppression, sa parole victorieuse et puissante défendra vos droits méconnus, et portera aux affligés l’aumône de son cœur.

Qui que vous soyez, qui avez conscience d’un crime, écoutez d’une oreille attentive ce prédicateur pieux et éloquent. Bientôt vos cœurs percés des flèches du repentir, feront éclater des sanglots de douleur !

O Pasteur qui connaissez vos brebis, les aimez et les chérissez ; juge suprême, qu’une louange perpétuelle retentisse à vos oreilles, ô Jésus, qui remplissez d’une ardeur céleste les auxiliaires que vous vous êtes donnés !

VII. — Aurora nondum fulgida. (Pre de Tréguier, XVIIIème siècle).

L’aurore précédait le flambeau qui ne brillait pas encore au ciel, lorsque, dans son amour il t'appelait Seigneur, par des chants divins. Ainsi il veillait toute la nuit couché sur la terre humide, répandant à tes pieds, ses prières brûlantes, fruits de la piété de son cœur, et les soupirs de son âme.

Encore enfant, il avait commencé à dompter, par ses jeûnes incessants, les révoltes de son corps, et il le frustrait pieusement de la nourriture qui lui était due, pour rassasier les pauvres.

Sa sainte demeure, sa porte bénie étaient tous les jours assiégées par une foule de mendiants, et c’est au milieu des vœux de reconnaissance, exprimés par les pauvres, qu’il entrait dans sa maison.

La foule se faisait un devoir et un honneur de l’appeler partout le père des pauvres, et lui-même honorait son pays, en se montrant réellement digne de ce nom.

Soyez glorifié à jamais, ô Jésus, juge suprême et prêtre éternel, qui choisissez des ministres zélés et les remplissez de votre divin souffle.

VIII. — Hymnis laudes concrepamus. (Propre de Saint-Malo, XVIème siècle).

Faisons dans nos hymnes retentir ses louanges, et pour le salut de nos âmes, chantons Yves trônant au-dessus des astres du ciel.

Yves s’éleva au-dessus de lui-même, à l’aide de la grâce, et Dieu se l’attacha par les liens de la charité.

Son lit, c’était la terre nue avec une pierre pour appuyer sa tête. C’est ainsi qu’en se combattant il vainquit sa chair et maintint son cœur dans la plus grande pureté.

Yves, fort comme un lion, soutint seul avec avantage les droits de l’Evêque qu’usurpaient les serviteurs du roi.

Que le Père, le Fils et le Saint-Esprit, par les mérites de saint Yves, nous pardonnent nos fautes et nous conduisent à l’entrée du céleste séjour.

IX. — Non parta solo sanguine. (Pre de Tréguier, XVIIIème siècle).

La pourpre due à d’autres mérites qu’à l’effusion de leur sang, orne les bienheureux au ciel : il y a en effet d’autres guerres qui ont également leurs triomphes.

Yves n’a pas eu à endurer les croix ou les peignes de fer aigu : dur et cruel pour son propre corps, il s’est martyrisé lentement.

S’il ne fut pas tourmenté par un licteur, des chaînes, des fouets ou des ongles d’acier, son ardent désir de mourir pour le Christ y a suppléé abondamment.

Par la chasteté, il a dompté sa chair ; par la foi, maîtrisé son âme ; et par l’amour, les flammes du ciel ont brûlé tout son corps en holocauste divin.

Ses veines se rompaient sous l’étreinte de cet amour, comme s’il eût voulu arracher sa vie avant le temps, et répandre son sang en flots abondants.

Jésus, donnez-nous de mourir avec vous, de ressusciter avec vous, et de mépriser les choses de la terre, pour aimer les biens célestes.

X. — Laus et honor Trecoriæ. (Prose extraite d’un missel du XVIème siècle).

La gloire et l’honneur du pays de Tréguier, le flambeau de la France aussi et la lumière la plus brillante de la Bretagne, Yves est honoré en ce jour !

Qu’on prodigue donc à sa mémoire les éloges les plus magnifiques, et qu’on exalte sa gloire dans le ciel ! Là il voit le roi de gloire dans sa majesté adorable, et le trône élevé de Marie associée au trône du roi du ciel.

Là, Dieu lui accorde d’écouter les prières et de venir au secours de la pauvre humanité, comme on le reconnaît dans l’univers tout entier.

Par lui, le marcher est rendu aux boîteux, la lumière du ciel aux aveugles, la santé aux malades et la vie aux morts. La langue des muets est déliée, la chaîne du captif est brisée, les torrents sont arrêtés, comme divisés et séparés en deux par un puissant mur d’airain.

Les incendies sont éteints, la fureur de la mer s’apaise, les hydropiques se désenflent et la paralysie disparaît.

Pendant qu’il tient l’hostie élevée, on la voit s’entourer d’une brillante lumière, et l’enfant mort dans le sein de sa mère recouvre miraculeusement la vie.

Un pauvre, le plus répugnant à voir, reçoit l’hospitalité dans sa maison ; il s’asseoit à sa table et mange avec lui, et au moment où ce pauvre va sortir, on le voit environné d’une clarté éblouissante.

Un homme est renversé sous la roue d’un moulin, on l’invoque, la chute rapide de l’eau s’arrête ; on retire le malheureux et il n’a reçu aucun mal.

Le Souverain Pontife est affligé d’une fièvre ardente, et l’on croit qu’il va mourir. On invoque saint Yves pour lui et il recouvre subitement la santé.

Le démon est chassé ; la peste qui infectait l’air est repoussée. La fureur de l’ennemi est apaisée et les ravages de la guerre sont arrêtés.

Tout ce qui est demandé par l’intercession de saint Yves est accordé ; les grâces du ciel sont répandues avec abondance sur tous les pécheurs.

XI. — Quam labor difficilis. (Autre prose de la messe de saint Yves, XVIème siècle).

Quel difficile labeur, quel poids formidable que celui du ministère des âmes !

Tout en s’abstenant des vanités de ce monde, il porte ce lourd fardeau sur ses épaules, fortifié par la grâce qui lui vient d’en haut.

Yves, pasteur infatigable, se garde avec un soin assidu contre les dangers de la mer immense.

En gouvernant bien son peuple, que d’écueils il sut franchir, que de traits il a pu éviter !

Fixe comme une colonne, il ne laissa jamais sa barque s’engloutir sous les flots.

Plein de soucis dans son ministère, puissant par sa parole, il fournit toujours un bon pâturage à ses ouailles.

La religion jaillit de son cœur, l’onction adoucit sa parole, et la charité ouvre toujours sa main.

Il veille nuit et jour, regarde de tous côtés, de crainte que quelque loup ne lui dresse des embûches.

Toi qui descends du ciel où tu étais monté, jette sur nous un regard favorable dans notre misérable exil.

XII. — Quis poli sedem. (Propre de Tréguier, XVIIIème siècle).

Quel nouvel habitant entre dans le royaume des cieux, et provoque ces chants de triomphe au-dessus des astres !

C’est Yves qui va rejoindre au ciel ses compagnons de gloire. Yves l’austère satellite de la vertu, le jurisconsulte incomparable, le prédicateur éminent. Après avoir dompté l’erreur et les fraudes, il triomphe porté sur un nuage, comme sur un char glorieux !

Voici que son triomphe est accompagné du cortège des âmes vertueuses, des vierges éclatantes de pureté, et de piété exempte de faste et d’orgueil.

L’amour au front rayonnant des flammes célestes, conduit ce brillant cortège, et le Dieu de charité en prodiguant ces dons à ses serviteurs, a pour couronne la troupe reconnaissante de ses fidèles dévoués.

Yves, qui jusque dans l’assemblée des bienheureux, aimez à être appelé le défenseur de la veuve et du pauvre, faites que, marchant sur vos traces, nous puissions suivre votre exemple.

Gloire suprême, louange éternelle vous soient rendues, ô Jésus, qui juge en même temps que prêtre, façonnez pour votre service des ministres enflammés de l’amour divin !

XIII. — Quæ dies tanto celebrata cultu. (Extrait de la fête de l’élévation du corps de saint Yves, au propre de Tréguier).

Quel est donc ce jour célébré avec tant de solennité ! L’antique cité de Trecor accourt au sépulcre de celui dont la terre recouvre encore les cendres bénies !

Dans sa reconnaissance, le peuple trécorrois vient vénérer les ossements de saint Yves dans leur tombeau de granit. Tous ceux qui le prient ont bientôt éprouvé son heureuse protection.

Telle fut l’origine de l’antique dévotion de nos aïeux ! Qu’elle revive plus forte que jamais ! Qu’elle fasse revivre aussi tout ce qu’il y a de feu sacré contenu dans ces restes vénérés et que sa cendre conserve encore !

Cette sollicitude que vous eûtes pendant votre vie, bon et saint pasteur, conservez-la nous, maintenant que vous êtes porté par delà les astres, et comme protecteur vigilant de notre cité, jetez un regard favorable sur votre peuple.

Vos compatriotes ont élevé à Dieu ce temple qui portera éternellement votre nom, et c’est avec raison, qu’habitant la même ville et le même pays, ils vous ont tous choisi pour protecteur et patron.

Nous bornons nos citations à ces quelques hymnes dont le texte latin est emprunté à l’iconographie du regretté M. Gaultier du Mottay. Ce nom vénéré se rattache à tout ce que notre temps a donné d’élan au culte des saints de Bretagne, et de saint Yves en particulier.

 

** CANTIQUES **

Parmi les cantiques français, composés en l’honneur de saint Yves, nous mettrons, en premier lieu, celui qui se chantait encore il y a quelques années, dans la cathédrale de Tréguier, et qui est extrait d’un opuscule intitulé : Dévotion des habitants de Tréguier à leurs saints patrons.

1. Tréguier, par des chants d’allégresse,
Célèbre son heureux patron ;
Qu’à ton bonheur tout s’intéresse,
Et que tout exalte son nom.
Pleins de respect pour sa mémoire,
Bénissons-le en ce beau jour ;
Saint Yves, du sein de la gloire,
Sera sensible à notre amour.

2. Kermartin, antique demeure,
Vit naître cet homme pieux :
En lui, tout montra de bonne heure
Un cœur favorisé des cieux :
De sa naissance la noblesse
Ne l’enfla point de vanité ;
Dieu seul fut toujours sa richesse,
Et sa grandeur, l’humilité.

3. Brûlant d’une céleste flamme,
Yves, dès ses plus jeunes ans,
À la grâce ouvre sa belle âme,
Et coule des jours innocents.
S’il avance d’un pas rapide,
Dans les sciences des humains,
Il se montra bien plus avide
Du savoir qui forme les saints.

4. Yves, dont le Seigneur seconde,
Soutient et bénit les progrès ;
Dans le Droit, science profonde,
Brille par d’éclatants succès ;
Mais les lauriers qui le couronnent,
Dans Paris et dans Orléans,
Loin de l’élever ne lui donnent
Que de plus humbles sentiments !

5. Rennes, cette ville fameuse,
Rennes se glorifie encor
Et s’estime à bon droit, heureuse,
D’avoir possédé ce trésor.
Interprète de la justice,
Yves fit régner l’équité.
Par lui, la fraude et l’artifice
Fuirent devant la vérité.

6. Bientôt jusque dans sa patrie,
La renommée avec éclat,
Fait connaitre sa sainte vie
Et son grand savoir au prélat.
L’évêque de Tréguier le rappelle :
Yves, toujours humble et soumis,
Revient pour être le modèle
Et l’apôtre de son pays.

7. Honoré du saint ministère,
Il montra surtout sa ferveur,
Sa piété vive et sincère,
Lorsqu’il immola le Sauveur.
De douces, d’abondantes larmes
S’échappent alors de ses yeux ;
Ces moments pour lui pleins de charmes
Semblent l’élever jusqu’aux cieux.

8. Chargé de l’emploi difficile
De juger les fautes d’autrui,
Yves, zélé, prudent, habile,
De l’opprimé devient l’appui.
Mais si la timide innocence,
En lui trouve son protecteur,
Et le désordre et la licence,
D’Yves ressentent la vigueur.

9. Du ciel un regard favorable
Sur Trédrez, et sur Louannec,
Leur donne un pasteur vénérable
Et bien digne de leur respect.
C’est qu’Yves, dont la voix sacrée
Jointe à l’exemple des vertus,
Des peuples de cette contrée,
Fait bientôt un peuple d’élus.

10. Indigents, âmes affligées,
Que saint Yves a soulagés,
Orphelins, veuves désolées,
Qu’il a tant de fois protégés,
Peignez-nous l’ardeur de son zèle
A vous délivrer de vos maux
Dites combien il fut fidèle
A vous consacrer ses travaux.

11. Dans tout homme, Yves voit un frère
Et le membre de Jésus-Christ ;
Mais les pauvres, il les préfère,
Il les recherche, il les chérit.
Nul bas emploi, nul soin pénible,
Ne lui coûte pour les servir ;
A tous leurs maux, son cœur sensible
Le presse de les secourir.

12. Près d’Yves, le Sauveur du monde
D’un indigent prenant les traits,
De cette charité féconde
Daigne réclamer les bienfaits.
Yves le sert sans le connaître ;
Bientôt, ô prodige, à ses yeux,
Il voit le pauvre disparaître,
Brillant d’un éclat merveilleux.

13. Pour les autres plein de tendresse,
Yves, pour lui, n’a que rigueurs ;
Il prie, il se combat sans cesse,
Comme le plus grand des pécheurs.
Qui pourrait, de sa pénitence,
Raconter la sévérité ?
Ah ! le Dieu qui le récompense
En connaît seul l’austérité !

14. Mais le ciel à la terre envie
Cet homme rempli de vertus ;
Le Seigneur terminant sa vie
L’appelle au bonheur des élus.
Yves, qui n’attend et n’espère
Que cet agréable moment,
Vole à son Dieu comme à sa mère
L’on voit courir un tendre enfant.

15. Il meurt et la nature entière
Semble suivre sa volonté :
Le mort revient à la lumière,
L’infirme reçoit la santé.
Yves, donnant de sa puissance
Mille témoignages certains,
Bientôt avec magnificence
Rome le place au rang des saints.

16. 0 vous que poursuit l’infortune,
A saint Yves, ayez recours.
Vous que la douleur importune
Venez implorer son secours !
Accourez, près de ses reliques
Que l’on conserve en ce saint lieu,
Admirer les marques publiques
De son crédit auprès de Dieu.

17. Nautoniers que le pouvoir d’Yves
Sauva tant de fois du malheur,
Ah ! faites retentir les rives
De cantiques en son honneur.
Quand la tempête vous agite
Et vous menace de la mort,
Confiez-vous à sa conduite,
Il vous fera toucher au port.

18. Grand saint, protecteur secourable,
Du haut des cieux où vous régnez,
Montrez-vous toujours favorable
À ce peuple que vous aimez,
Et par vos vœux, libre d’atteinte
Dans ces lieux conservez la foi,
Du Seigneur une vive crainte,
Sa paix et l’amour de sa loi.

Ce cantique, comme on le voit, est un abrégé de la vie de saint Yves et se termine par une prière touchante. Afin de pouvoir le chanter ensemble, chacun l’apprenait par cœur, et c’était une excellente manière de retenir cette vie admirable et de la faire passer à la postérité. Il est à regretter qu’on se soit éloigné de cette bonne tradition dans les chants qui ont été composés depuis, quelque beaux qu’ils soient par ailleurs.

Le cantique des Angevins est empreint d’une douce piété que nous sommes heureux de saluer chez nos chers et nobles voisins. Nous le reproduisons d’après un exemplaire, imprimé à Tréguier, qu’ils prononcent et écrivent Tréguière comme les Bretons.

Nous n’avons pas besoin de faire remarquer que ce cantique est plus riche de sentiments que de rime. N’importe ! C’est un peuple qui veut honorer notre saint patron dans l’Anjou, cette terre qui a noblement partagé avec la Bretagne les luttes pour la foi et la religion dans nos jours de tristesse et d’oubli. A Tréguier, on cachait ses reliques et dans l’Anjou, l’on chantait toujours ses vertus !

Le Cantique à saint Yves, signé Yvonne de Lannion, vient d’être édité. Nous le donnons pour clore la série des cantiques français que nous n’avons pu reproduire qu’en partie. Il porte l’approbation de Mgr Bouché.

O Trécor, chante à tes campagnes
L’honneur de posséder ton saint prêtre breton,
Jusqu’au delà des mers, aux échos des montagnes,
De saint Yves redis le nom !

Béni soit le manoir antique,
Où saint Yves reçut le jour ;
Béni soit le sol d’Armorique
Empreint des pas de son amour.

Nulle douleur, nulle infortune,
Frappant son seuil hospitalier,
N’a pu se trouver importune,
Au cœur qu’elle venait prier.

La charité qui le transporte
Fait qu’il héberge le Sauveur :
Un pauvre attendait à sa porte
Il le reçoit, c’est le Seigneur !

Du pauvre orphelin en détresse
Il est le père et le tuteur,
Des malheureux que l’on oppresse
Il est l’ami, le défenseur.

Les trois vertus théologales
Etaient des perles dans ses mains,
Qu’en ses courses sacerdotales
Il sema dans tous les chemins.

Malgré l’enfer qui se déchaîne.
Son nom tout glorieux survit.
De Kermartin jusqu’en Touraine,
On le révère, on le bénit.

Les siècles éteints sur ses rives,
Et le temps, destructeur des lois,
Sur la mémoire de saint Yves
Ont vu s’émousser leurs exploits.

Trédrez, Louannec ont encore
Son souvenir au fond du cœur,
D’âge en âge, il passe, on l’honore.
Et ses autels font leur bonheur.

Il est le Saint-François d’Assise
De notre cher pays d’Arvor ;
Vénérons-le dans son église.
Dont il protégea le trésor.

Bientôt la cathédrale antique
Qui renferme son chef si beau,
Pour trône à la sainte relique

Ce monument sera l’histoire
Du religieux souvenir
Dont son Evêque met la gloire
Au front des siècles à venir.

Cette œuvre qu’un prélat couronne
En y consacrant tous ses droits,
Sera le trésor de l’aumône
Et le fleuron des Trécorrois.

O saint-Yves, sur l’Armorique
Veillez toujours du haut du ciel,
Que vers vous monte ce cantique,
Avec l’encens de votre autel.

Contre la barque de la France,
L’ouragan soulève l’erreur,
O saint Yves, notre espérance,
Apaisez le flot destructeur.

Nous ne pouvons pas laisser de côté les guerz composés en langue bretonne en l’honneur de saint Yves. C’était sa langue, et du haut du ciel il entend encore avec bonheur chanter ses louanges dans l’idiome des anciens châtelains de Kermartin, qui ne lui en avaient pas appris d’autres. Ici le nombre est considérable et le choix difficile. Nous ne ferons qu’en indiquer quelques-uns avec la traduction pour le public.

Nous commençons par le chant le plus populaire aujourd’hui, en faisant remarquer que la traduction n’en rend que faiblement, oui même point du tout, le rhythme, l’entrain, la verve qui le font répéter par tous les échos des campagnes bretonnes.

I. — N’en euz ket en Breiz (Kantik neve zant Ervoan).

Il n’est point en Bretagne, il n’est point un saint, mais pas un qui soit comparable à saint Yves.

Il n’est point dans nos champs boisés, ni sur les bords de la mer, il n’en est pas un aussi bon pour les marins.

Il n’en est point un au pays, tout le monde le dit, qui soit aussi favorable aux laboureurs.

Il n’est point un plus beau modèle pour les hommes de lois, que saint Yves qui est en même temps le miroir des prêtres.

Et pour les pauvres si dignes de pitié et pour tous ceux qui souffrent où trouverait-on un meilleur patron que saint Yves !

Il n’est point une chapelle dans toute la Basse-Bretagne qui soit aussi élégante que sa chapelle.

Si vous voulez prier, mais prier comme il faut, allez à Minihy-Tréguier, pour obtenir votre vœu.

Comme il est doux de prier, quand on est dans la peine, là où pria autrefois ce grand saint !

Comme on est heureux de visiter le manoir béni où est né le plus grand saint de la Basse-Bretagne.

Ce manoir de Kermartin, qui vit en outre cette âme sainte s’envoler vers le ciel !

Il n’est point non plus en Bretagne une église aussi belle que la cathédrale de Tréguier.

C’est pour saint Tugdual, notre père bien-aimé, que vous l’avez bâtie, ô grand saint Yves.

C’est là qu’est votre tombeau, et il n’en est pas un sur lequel se soient passés tant de miracles.

J’irai le visiter à partir de Kermartin, et quand il me faudrait faire le voyage à genoux.

Votre tombeau est bien mesquin et bien pauvre, hélas ! mais on vous en érigera un autre plus beau que jamais.

C’est notre nouvel Evêque qui l’a dit, et nous viendrons à son secours, nous, les vrais Bretons.

Chacun, qu’il soit de Tréguier, de Goëllo ou de la Cornouaille, tiendra à avoir sa pierre dans ce monument.

Et quand il sera achevé, quelle belle fête à Tréguier ! Nous y verrons tous les Evêques de la Bretagne !

Tous ces Evèques viendront avec le nôtre prier sur la tombe de saint Yves.

Notre nouvel Evêque nous l’a dit, et c’est saint Yves qui se charge de l’en récompenser.

 

II. — Eman miz Mae o vleuian, ar liorzo ag avro (Kantik Goéloiz da sant Ervan). — (Les habitants de Goëllo à saint Yves).

Voici que le mois de mai sème ses fleurs dans nos champs ; c’est le retour de la fête de saint Yves. J’entends du côté de Tréguier, une belle sonnerie, branlant à la volée ; ce sont les cinq cloches de saint Tugdual qui appellent au pardon de saint Yves !

En Bretagne, ô saint Yves, vous n’avez pas votre pareil ! Aussi bien que les Trécorrois, les gens de Goëllo le proclament.

Exaucez toujours notre prière et nous reviendrons nous prosterner sur votre tombeau béni.

Autrefois, on le dit encore, vous avez prié dévotement dans l’église de l’Abbaye (de Beauport) et la chapelle de Kerfot. Vous veniez alors souvent visiter nos ancêtres, et votre prière sur Goëllo produit toujours son effet.

Je vous vois sur le chemin de Saint-Aaron et de Botloy ; sur le chemin de Lanleff et de Plounez, vous rendant à l’Abbaye. Là vous veniez vous délasser sans cesser de prier, auprès de ces saints moines, vos meilleurs amis.

Un jour, de bon matin, vous reveniez de Rennes, quand vous arrivâtes avec votre serviteur Hamon, en face du pont de Lanleff. L’eau était plus grande que de coutume, et le pont était complètement inondé.

Je vous entends, saint Yves, quand vous vîtes cela, dire en riant à Hamon : « Viens après moi, cher ami, marche après dom Yves, Dieu est avec nous dans notre voyage et nous passerons sans accident ».

Vous fîtes alors le signe de la croix sur le Lef débordé, en adressant une prière au ciel. Aussitôt l’eau s’arrête, le lit de la rivière desséchée vous laisse passer avec votre domestique.

On ne vous a pas oublié en Goëllo, ô grand saint Yves ; souvent ma mère me l’a répété comme toutes les autres mères le disent à leurs enfants : Soyez disait-elle, soyez toujours dévot à saint Yves, mon cher enfant, priez-le, et quand vous aurez fait votre première communion, vous viendrez avec moi à son pardon.

La veille du 19 mai, j’allai en courant couper dans la vallée une gaulette de saule blanc, puis je me lève avec le réveil des oiseaux, et après avoir fait le signe de la croix, nous voilà sur le chemin de Tréguier.

De tous les coins de Goëllo, nous voyons venir des pèlerins en grand nombre avec leurs chapelets et leurs gaulettes de saule épluché. Tous, nous nous prosternions pleins de joie, quand nous voyions passer la tête de saint Yves, dans son reliquaire d’or porté par les prêtres.

Bonnes gens, allez en Goëllo et partout vous entendrez dire : « Ici saint Yves a passé, la marque de ses pieds est restée sur tous les chemins, grands et petits, et son nom béni restera toujours gravé dans nos cœurs ».

En Goëllo, nous avons tous confiance en saint Yves, et quand le pays est trop accablé, on nous entend dire : « Allons à saint Yves, la croix de Kerfot à notre tête ».

Quelle belle procession l’on voit alors passer sur les ponts de Lézardrieux et de Tréguier. Qu’il fait beau voir les croix et les bannières passer fièrement dans les rues de Tréguier, pendant que nous chantons les louanges de saint Yves !

Allons donc, mes braves gens de Goëllo, allons voir saint Yves, une fois encore. Il nous aime aussi, comme personne ne nous aime. Hélas ! on a beau travailler, le monde est dans la souffrance. Il ne peut en être autrement : Dieu est oublié !

Allons cette année au pardon pour voir la tombe nouvelle : pauvres et riches nous avons tous contribué à ériger ce monument de notre piété. Allons avec notre nouvel Evêque, allons jusqu’à Tréguier. Comme notre cœur débordera de joie au retour de cette fête !

(France).

© Copyright - Tous droits réservés.