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Prise de possession de Mgr LE CLERC en l'évêché de Léon

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Prise de possession

de Mgr Guy Le Clerc en l’évêché de Léon

(13 mai 1520)

(Archives de l'Evêché de Quimper).

Au nom du Seigneur, ainsi soit-il.

Sachent tous que l’an de la Nativité du Sauveur 1520, le dimanche 13 mai, année VIIIème du Pontificat de Notre Très Saint-Père le Pape Léon X, en présence de Nous, notaires soussignants, s’est présenté Révérendissime Père en Dieu Guy le Clerc, par la miséricorde de Dieu et la grâce du Saint-Siège, évêque de Léon, qui pour se conformer aux anciens usages constamment observés par ses prédécesseurs lors de leur joyeux avènement dans leur ville épiscopale, a voulu, à leur exemple, faire sa première et solennelle entrée en la forme qui suit :

D’abord, le Prélat, avec une suite nombreuses, est arrivé au faubourg de la ville, près le cimetière de l'église de Saint-Pierre, sur la route qui conduit de la Madeleine à cette église, non loin d'une extrémité du cimetière où se trouve la chapelle nouvellement élevée en l'honneur de St Jean et de St Sébastien. Là s’est alors présenté noble écuyer Charles de Kermavan, chevalier, seigneur de Penanech, frère et comme procureur de noble et puissant Tanguy de Kermavan, seigneur de Seisploë et Lesquelen, absent, et immédiatement le Révérend Père en Dieu a fait observer au dit Seigneur qu'il devait descendre de cheval, et prenant la mule du Prélat par la bride, le conduire jusqu'à l'église Saint-Pierre, comme ses ancêtres les seigneurs de Kermavan l'avaient toujours fait. Obtempérant à cette injonction, Charles de Kermavan, comme procureur de son frère Tanguy, descendit de cheval et, la tête découverte, prit par la bride la mule du Prélat et le conduisit ainsi jusqu'au portail de l'église Saint-Pierre où le dit seigneur de Kermavan soutint l'étrier droit de la selle au Seigneur Évêque descendant de sa monture ; mais en raison de ce service, le seigneur de Kermavan s'empara de la mule du Prélat et la remit à son valet ; cependant, le Seigneur Évêque entra dans l'église Saint-Pierre, et s'agenouilla à l'entrée, sur un prie-Dieu préparé au côté droit de la porte, puis s'assit sur un siège disposé et orné à cet effet. Là, le seigneur de Kermavan, toujours au nom de son frère Tanguy, retira au Seigneur Évêque sa chaussure, ses bottes, sa coiffure et son manteau, desquels il s'empara à raison de ce service.

Ensuite de quoi le Prélat s'avança jusqu'au maître-autel, où ayant prié quelque temps sur un prie-Dieu, il s'assit sur un fauteuil, et fit appeler les nobles et puissants seigneurs de Kermavan, de Coettivi, de Kerguern, de Penmarch et de Coetmenech. A cet appel, apparurent bientôt devant le Prélat Charles de Kermavan, seigneur de Pennanech, comme procureur de son frère aîné, Tanguy de Kermavan, absent ; Richard de Coetanezre, seigneur de Pratmaria, procureur du seigneur Jacques du Juch, chevalier du Mur et de Coettivy ; écuyer Olivier Kerneau (Cornouaille) de Kerguern et de Coatanroch (Bois de la Roche) ; noble écuyer Charles de Penmarch, seigneur de Coetlestremeur, procureur de Henri de Penmarch et de Kerelleau ; enfin, écuyer Pierre le Louet, seigneur du Plessis et de Coetjunval, comme procureur de noble et puissant François, seigneur de Lafeuillée, Langarsau et de Coetmenech.

Lesquels procureurs, en vertu de leurs mandats respectifs, prièrent le seigneur Évêque de les recevoir et agréer pour faire l'office de leurs mandants les seigneurs de Kermavan, Coettivi, Penmarch et Coetmenech ; le Rév. Père en Dieu, constatant l'absence notoire du diocèse de Léon des dits seigneurs, admit, pour cette fois seulement, leurs mandataires pour remplir l'office que les dits seigneurs lui devaient personnellement ainsi qu'à ses successeurs, en qualité de vassals nobles du diocèse de Léon, leur rappelant qu'en cette qualité c'était leur devoir de le défendre, lui et son Église de Léon, de toute oppression et violence.

Ce à quoi les dits mandataires s'engagèrent, dans la mesure du possible.

En l'endroit s'éleva entre les dits seigneurs une contestation sur la préséance à observer pour porter la chaise de l'Évêque. Cette contestation fut terminée par l'accord suivant :

Pour obvier au différent que ce jour à l'entrée et réception du Révérend Père en Dieu, Gui, par la grâce de Dieu et du Saint-Siège apostolique, évêque de Léon, en sa cité et église du dit Léon s'est trouvé entre Charles de Kermavan Sr de Pennannech, procureur pour noble et puissant Tanguy Sr de Kermavan de Seizploé et de Lesquélen son frère, à faire les services, honneurs et révérences que doit le dit Sr de Kermavan au dit Sgr. Évêque en son entrée, Richard de Coateznere Sr de Pratmaria aussi procureur pour noble et puissant Jacques du Juch chevallier Sgr. du Juch, du Mur et de Coettivi, nobles hommes 0llivier de Cornouaille Sr de Kerguern et du Bois de la Roche présents en personne ; Charles de Penmarch Sr du Coetlez Tremeur procureur de noble et puissant Henri Sr de Penmarch et de Kerallau, Pierre Le Loet Sr du Plessix et de Coatjunval pour noble et puissant Sr de la Feuillée, Langason et de Coetmenech, desquelles procurations ont les dicts procureurs et chacun respectivement apparu et informé devant mon dit Sgr. et de leur mandement et procuration a suffire sur le fait et prééminence de porter le dit Révérend Père en Dieu en sa chaire en sa ditte entrée et les différends qu'ils avaient sur les postes d'ycelle chaire, ont les dits nommés chacun es dits noms les uns stipulans et acceptans vers les autres respectivement voulu et accordé, et par cette le font, que le dit Sgr. Évêque puisse et pourra sans préjudicier aux droits ne possessions des dites parties et es dits noms et pour cette fois pour obvier à leurs dits différends, de mettre et de présenter quatre gentilshommes pour porter le dit Sr Évêque en sa ditte chaire en son entrée de la maniere accoutumée en acquit et décharge des dits nommés seigneurs et es dits noms et chaccun sans que les dits commis et députés à ceste fois ne aucun d'eux, puissent en l'avenir à cause de ce, prétendre aucuns droits ne possessions au dit privilège et sans aussi préjudicier aux droits de mon dit seigneur et Révérend Père en Dieu ; ensuivant quoi le dit Révérend Père en Dieu a commis et député ô les dittes conditions et réservations Rolland de Quergorlay Sr du Cleusou, Jehan Quelen Sgr. expectant de Guernizac, Jacques Kerourfil Sgr. expectant de Kerarhaes (De Penanquer, d’après Dom Morice), Jehan Kerleroux Sgr. expectant de Kergualle, présents et qui ont porté le dit seigneur en sa ditte chaire en acquit des dits autres sans préjudice leur porter que devant, et sauf à discutter de leur dit différent par autre tems que appartiendra, ce que dessus tenir, fournir et contre ne venir, ont promis et gré, promettent, gréent, jurent et s'obligent par ces présentes, sous hypotèque et obligations de leur bien et par leurs serments renonciants et renoncent chacun d'eux quand à ce, a jour juge par les (ou Parlier, d’après Dom Morice) exoines résumes (ou Remu, d'après Dom Morice) d'office avoir, demander et en user et à touttes autres dilations, exceptions et cavillations quelle oncques nuisants et impechants (ou puissantes empêcher, d’après Dom Morice) l'effet ou enterinance de cette et au droit disant generalle renonciation non valloir et par leurs dits serments, ce fut fait et gré en l'église de St-Pierre près St Paul, par cour sécullière du dit St Paul à laquelle se soumettent les dites parties et chacune et es dits noms à tout le contenu en ceste le dimanche 13ème jour de May l'an 1520.

L'accord étant conclu, le Rév. Père en Dieu, revêtu de ses ornements pontificaux, quitta le choeur de l'église de Saint-Pierre pour se rendre au portail, sous lequel était déposée une chaise à porteurs ; il s'y assit et, la main sur la poitrine, prêta serment, devant les seigneurs qui devaient le porter, qu'il deffendrait les droits, franchises et libertés de l'Église de Léon, et confirmerait les dits seigneurs dans toutes leurs anciennes franchises et libertés raisonnables, n'aliénerait jamais en dehors des cas prévus par le droit les biens immeubles de l'Église et ferait son possible pour les recouvrer s'ils étaient aliénés.

Ce serment une fois prêté, les dits seigneurs portèrent l'Évêque assis sur sa sedia, de la chapelle Saint-Pierre jusqu'à la porte de la ville située dans la rue Verderel, auprès de l'église de Notre-Dame du Creisquer. Le Chapitre et tout le clergé de Léon, portant des surplis et des chapes, précédaient processionnellement au chant des cantiques et des hymnes.

Comme l'Évêque approchait de la porte de la ville, les citoyens et habitants la fermèrent aussitôt, et par l'organe de noble homme Désiré Leseleuc, au nom des habitants de la cité, demanda au Seigneur Évêque qu'avant de pénétrer dans la ville, il prêtât le serment qu'avaient coutume de prêter ses prédécesseurs en pareille circonstance, et aussitôt le Prélat, devant les citoyens et habitants ainsi que devant le sieur Leseleuc, leur représentant, jura solennellement de deffendre les droits de son Église et de conserver les dits citoyens dans leurs anciennes libertés et franchises : acte de ce serment, sur les instances du sieur de Léseleuc, fut dressé par nous, notaires soussignants.

Immédiatement, les habitants ouvrirent leur porte et permirent l'entrée de la cité au Seigneur Évêque, qui continua sa route, toujours porté sur sa sedia, jusqu'à la porte occidentale de l'église cathédrale, vis-à-vis le palais épiscopal.

Là, devant le grand portail de l'église, Hamon Barbier, chanoine, archidiacre de Quemenedilly, au nom du Chapitre et député par lui, adressa un éloquent discours à l'Évêque pour le féliciter de son joyeux avènement dans son diocèse, puis au nom du Chapitre et du clergé de Léon, il pria l'Évêque de prêter le serment accoutumé en pareil cas, ce qui se fit aussitôt de cette manière :

« Révérend Père en Dieu, dit l'archidiacre, comme bon pasteur et Évêque de Léon, promettez-vous de ne pas aliéner, hors les cas prévus par le droit, les biens immeubles de cette Église et de les conserver autant que le comporte la fragilité humaine ?

-        « Nous le promettons et le jurons, » répond l'Évêque.

-        « Promettez-vous de récupérer selon votre possible les rentes ou biens immeubles indûment aliénés ?

-        « Nous le promettons et jurons.

-        « Promettez-vous de garder et défendre à l’instar des Évêques vos prédécesseurs, les libertés, franchises et immunités ecclésiastiques de ce Chapitre et Collège ?

-        « Nous le promettons et jurons.

-        « Promettez-vous d'observer fidèlement les statuts et coutumes louables du Chapitre et de l'Église de Léon ?

-        « Nous le promettons et jurons.

-        « Promettez-vous de garder et remplir toutes et chacune des susdites promesses avec l'aide de Dieu et des saints Évangiles ? ».

L'Évêque répond « Amen, » et entre processionnellement dans l'église, où le Chapitre et le Collège le reçoivent comme leur père en Dieu, et au chant des hymnes et cantiques spirituels le conduisent, toujours porté sur sa sedia, jusqu'à la porte du choeur. Où étant descendu de son siège, il entre au choeur accompagné des chanoines, puis, il est conduit dans la salle capitulaire, où après une courte allocution de l'Archidiacre, le Prélat renouvelle dans la même forme les serments rapportés plus haut, et reçoit successivement tous les chanoines au baiser de paix. Puis, sortant du Chapitre, il rentre au choeur, revêtu des ornements pontificaux et y célèbre lui-même la grand'messe. Après quoi, il se dépouille de ses vêtements Pontificaux, et accompagné de ses chanoines et de plusieurs personnages de la noble assistance, il se rend sans cérémonie au palais épiscopal, et parvenu à la porte du palais, il ordonne la mise en liberté d'un certain nombre de prisonniers.

Avant que le Prélat ne prenne place au repas préparé, le représentant du seigneur de Coetivi, le sieur de Kerguern et les représentants des seigneurs de Penmarch et de Coetmenech exposent au Seigneur Évêque qu'ils ont pendant ce repas certains offices à remplir, auxquels quelques droits et profits sont attachés, ils demandent donc au Prélat qu'il veuille bien les admettre à remplir ces offices et à en percevoir les profits. A quoi le Révérend Père en Dieu déclara consentir.

En conséquence, Messire de Coatanezre, seigneur de Pratmaria, représentant du seigneur de Coettivi, ayant été appelé pour donner à laver au Seigneur Évêque, découper à table, et verser à boire, il s'offrit immédiatement pour remplir cet office, et on lui montra, à cet effet, les bassins d'argent qui devaient servir à laver, les couteaux garnis d'argent pour découper, et la coupe et aiguière d'argent doré pour verser et boire le vin. Et immédiatement, Charles du Quélennec, sur la prière du sieur de Coatanezre, représentant du seigneur de Coetivi, donna à laver au prélat.

En même temps, et avant que le Prélat ne s'assit à table, le seigneur de Kerguern entra au cellier du palais épiscopal où se trouvaient les pièces de vin destinées pour le service de ce repas ; là, il exposa aux serviteurs de l'Évêque que c'était à lui de disposer de tous ces vins en sa qualité d'échanson, et qu'à raison de cet office, il avait droit à tout le vin qui resterait dans les fûts après le repas, que du reste le service de la cave serait fait par ses propres valets, que, dès lors, les serviteurs de l'Évêque pouvaient se retirer.

Également avant le commencement du dîner, les sieurs Pierre du Louet, représentant du seigneur de Coetmenech, et Charles de Penmarch, représentant de Tanguy de Penmarch, descendirent aux cuisines et signifièrent aux serviteurs de l'Évêque que le gouvernement de la cuisine pour ce dîner les regardaient, qu'ils devaient en conséquence mettre à leur disposition les ustensiles nécessaires, ce qu'ils firent immédiatement en leur montrant les casseroles d'étain et de cuivre, les marmites, broches et autres ustensiles nécessaires, que les dits seigneurs confièrent à leurs propres serviteurs pour apprêter le repas du jour.

Après quoi, le Seigneur Évêque se mit à table dans la grande salle du palais, et durant tout le repas, le seigneur de Coatanezre, au nom du seigneur de Coetivi, fit l'office d'écuyer tranchant, découpant tous les mets et servant à boire et à laver au Révérendissime Père en Dieu et pour ce service, à la fin du dîner, il fit enlever, sans la moindre opposition, par ses valets, toutes les nappes, serviettes et essuie-mains, ainsi que tous les fragments de pain, sans oublier les bassins et couteaux d'argent ainsi que la coupe dans laquelle avait bu le Prélat, et l'aiguière et hanap d'argent, dans lequel le dit Coatanezre lui avait offert l'eau et le vin.

De même, le seigneur de Kerguern, durant le dîner, servit et fit servir diverses sortes de vin qu'il tira du cellier avec l'aide de ses valets, et s'acquitta ainsi de son office d'échanson ; seulement, dès qu'une pièce de vin était à moitié vidée, il en brisait la broche et perçait un nouveau fût pour constater le droit qu'il avait sur ce vin. Puis, entrant dans la salle à manger, il déclara que toute la vaisselle d'argent et les coupes qui se trouvaient sur la table pour servir au repas lui revenaient à raison de son office, excepté la coupe du Prélat, le bassin à laver et l'aiguière, comme il est dit plus haut, et en conséquence, après avoir exercé son office d'échanson pendant le dit repas avec l'aide de ses serviteurs, il fit enlever par eux toute la vaisselle d'argent et les coupes lui appartenant, qu'ils portèrent chez François Houssette, hôte dudit seigneur de Kerguern, le tout sans la moindre opposition, puis le dit seigneur fit apporter devant cette maison une pièce de vin, et la faisant défoncer par ses serviteurs, il déclara que tout venant pouvait y puiser librement.

De leur côté, Charles de Penmarch et Pierre Le Louet du Plessis, mandataires des seigneurs de Penmarch et de Coatmenech, après le dîner se rendirent aux cuisines et en firent enlever sans opposition tous les ustensiles d'étain, d'airain, de cuivre et de fer, jusqu'aux landiers et couteaux qui avaient servi à préparer le dit repas.

De tout quoi le Révérendissime Père en Dieu ainsi que tous les dits seigneurs et l'archidiacre de Kemenedilly, au nom du Chapitre, nous ont prié de rédiger le présent instrument publique, ce que nous avons fait les dits jours et an que dessus, en présence des témoins suivants, savoir pour les actes passés hors du Chapitre, nobles maistres de Kersaintgilly, seigneur de Keruzoret, et Jean le Nobletz, seigneur de Kerozern ; pour les actes passés au Chapitre, Jean de Aulnet, seigneur de Castellennec, et Henri Audren.

Ainsi signé : ALAIN DU FOU, clerc de Léon, notaire, et François KERRET, notaire apostolique et impérial. 

Note 1 : La copie de cet acte, dûment collationnée, a été faite à Léon le VI des calendes de Novembre 1747, sur l'ordre de Mgr. Jean-Louis Gouyon de Vaudurant, évêque et comte de Léon, par le sieur Carof, licencié in utroque, avocat au Parlement de Bretagne, doyen des avocats de la ville de Léon.

Note 2 : Dom Morice a donné cet acte dans ses Preuves de l'Histoire de Bretagne, mais en tronquant le texte en bien des points, surtout dans la dernière partie. Nous publions ici une large traduction du texte latin. 

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