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François LE GALL et François CORRIGOU, prêtres guillotinés à Quimper
en exécution de la loi des 29-30 vendémiaire an II.

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François LE GALL, François CORRIGOU et Anne LE SAINT, leur receleuse.

185. — François Le Gall, fils de François et de Jeanne Breton, naquit à la Maison-Neuve en Guimilliau et fut baptisé le lendemain dans l’église de cette paroisse. Il reçut la tonsure et les mineurs à Saint-Pol-de-Léon. Il y fut fait sous-diacre le 3 avril 1756, diacre le 26 mars 1757 et prêtre le 11 mars 1758, après avoir mérité d’excellentes notes lors de son examen pour ce dernier ordre.

M. Le Gall remplit les fonctions de vicaire auxiliaire dans sa paroisse natale depuis sa prêtrise jusque vers la fin de l’année 1772. Il y résidait alors au bourg avec sa mère. Celle-ci le suivit à Landivisiau, quand il s’en alla dans cette localité, alors trêve de Guicourvest, exercer l’office de curé. Il conserva ce poste jusqu’au 28 décembre 1784, date à laquelle il fut nommé par son évêque recteur de Plouénan, où on relève sa première signature, le 14 avril 1785 et sa dernière, le 24 avril 1791. Cet ecclésiastique avait en effet refusé de prêter serment à la Constitution civile du Clergé, refus qui lui valut, aux termes de la loi, d’être déclaré déchu de sa cure, et de voir l’intrus Touboulic venir l’y remplacer.

Mais il arriva à Plouénan ce qui se produisit en Bretagne de façon générale ; personne n’acceptait le ministère des curés intrus et l’on continuait de s’adresser pour l’administration des sacrements aux prêtres réfractaires, lesquels ne quittaient leurs paroisses qu’à la dernière extrémité et s’y tenaient cachés dans des hameaux ou des fermes écartés.

186. — Or, à cette époque vivait avec sa belle-sœur Anne Cadiou, au manoir de Pénanéac’h en Plouénan, une vieille fille du nom d’Anne Le Saint, née et baptisée le 9 décembre 1748, du mariage de Claude et de Barbe Le Mesguen. Elle avait donc 43 ans en 1791. Ses parents lui avaient fait donner une instruction soignée pour le temps et l’avaient envoyée étudier chez les Ursulines, à Saint-Pol-de-Léon. On ne sait rien sur la vie d’Anne Le Saint depuis sa rentrée dans sa famille jusqu’à la Révolution française, sinon qu’elle était très vraisemblablement tertiaire de saint François, car l’on ajoute habituellement à son nom le qualificatif de « sœur » et le tiers-ordre franciscain était le seul alors existant à Plouénan.

Animée, ainsi que sa belle-sœur, des meilleurs principes, Anne Le Saint qui avait un de ses frères prêtres, ne tarda pas à donner asile dans les vastes bâtiments du manoir-ferme de Pénanéac’h aux ecclésiastiques persécutés. Un diacre nommé Le Goff, décédé en 1846, curé de Saint-Pol-de-Léon, trouva dans ses murs de son propre aveu, un refuge assuré, ainsi qu’une ancienne Ursuline de Saint-Pol, mère Victoire Le Duff, celle-ci cousine de la belle-sœur d’Anne Le Saint. Elle fit venir à son tour dans cette maison hospitalière l’abbé Corrigou, ancien aumônier de son couvent dont l’avait chassé la persécution.

187. — Cet abbé François Corrigou, fils de Prigent et de Charlotte Figuière, était né à Sibiril le 25 novembre 1737. Le lendemain, il reçut le saint baptême dans l’église paroissiale. Il n’avait que 16 ans quand il fut tonsuré le 15 mars 1755. Il reçut les mineurs le 17 mars 1761, le sous-diaconat le 10 avril 1762, le diaconat le 19 mars 1763, enfin la prêtrise le 17 avril 1763, le tout des mains de Mgr de Vaudurant ou d’Andigné de la Châsse, qui se succédèrent à cette époque sur le siège de Léon.

Pourvu du service de plusieurs chapellenies ou altaristeries, M. Corrigou exerça, aussitôt sa prêtrise, le ministère dans la paroisse de Plouvorn où l’on relève sa première signature, le 6 mai 1764 et sa dernière le 23 septembre 1783 : tout au début de son arrivée, comme simple prêtre et, à compter du 22 septembre 1773, en qualité de curé.

A son départ de Plouvorn, l’abbé Corrigou fut nommé aumônier des Ursulines de Saint-Pol-de-Léon, et remplit ses fonctions jusqu’au 9 mars 1792, date à laquelle ses religieuses furent expulsées de leur couvent. Nous avons dit que, grâce à la Mère Marie-Victoire Le Duff, il trouva asile au manoir de Penanéac’h en Plounénan.


188. — Pas plus que l’abbé Le Gall, recteur de Plouénan, M. Corrigou n'avait en effet prêté serment ; pas plus que celui- ci, il ne s’était soumis aux injonctions des lois persécutrices révolutionnaires. Le décret du 26 août 1792, celui des 21-23 avril 1793, la loi des 29-30 vendémiaire an II, si terribles dans leurs conséquences, n’avaient pu les faire l’un et l’autre abandonner la Bretagne et laisser sans secours spirituels, les âmes des fidèles livrées par les autorités révolutionnaires à des prêtres d’une vertu médiocre, travaillant sans mandat ni juridiction réelle, dans des paroisses qu’ils avaient usurpées.

M. Le Gall était cependant l'objet de dénonciations sans nombre de la part du prêtre Touboulic, son successeur intrus. On en trouve une dès le 26 juin 1791 adressée au District de Morlaix et quelques jours après une autre émanant du maire de Saint-Pol-de-Léon. Les 26 et 30 juillet de cette année, Touboulic renouvela ses plaintes. Enfin, à la suite d’une quatrième dénonciation datée du 12 décembre 1791, le directoire du District de Morlaix expédia à Plouénan un détachement de soldats avec l’ordre de rechercher et d’arrêter les prêtres réfractaires et les séminaristes de cette localité, mais les bons chrétiens de Plouénan surent faire bonne garde et préserver cette fois leurs prêtres de tout danger.

189. — Malheureusement le refuge de MM. Le Gall et Corrigou fut à la fin vendu par un traître nommé Hervé Landaouez. Si bien qu’un détachement de la garde nationale de Saint-Pol-de-Léon fut envoyé, dans la nuit du 7 au 8 septembre 1794, perquisitionner aux villages de Kerandraon et de Pénanéac’h en Plouénan, avec mission d’arrêter tous les individus suspects qu'il y pourrait découvrir. On surprit de la sorte MM. Le Gall et Corrigou, qui y prenaient leur sommeil. Le séminariste Le Goff eut seul l’adresse de s’échapper. On arrêta en même temps leurs courageuses receleuses, Anne Le Saint et Anne Cadiou, sa belle-sœur, ainsi que mère Marie-Victoire Le Duff, la religieuse ursuline, et un des domestiques de la maison nommé Mével.

Au moment où les argousins de la Révolution se préparaient à emmener prisonniers les maîtresses de Penanéac’h, se produisit une lutte de générosité très émouvante rapportée par la bonne sœur Le Duff :

« Laissez ma sœur, s’écriait Anne Le Saint, conservez-la à ses enfants. S’il y a eu crime à donner asile à ces deux Messieurs, c’est à moi seule d’en répondre ; le bâtiment où vous les avez arrêtés est ma propriété ; c’est moi qui en ai disposé en leur faveur ». Hélas, toutes ces protestations demeurèrent inutiles. Il n’appartenait pas du reste aux capteurs de faire la discrimination des responsabilités. Aussi toutes les personnes énumérées plus haut furent-elles entassées dans une charrette et l’on partit pour Saint-Pol-de-Léon, où après un interrogatoire subi par les deux prêtres et Anne Le Saint devant les membres du Comité de surveillance de cette ville, l’on se mit en route sur Morlaix. Là, les administrateurs du district rendirent, le 9 septembre, un arrêté ordonnant le transfert des prisonniers à Quimper dans la maison d’arrêt du Tribunal criminel du Finistère et antichambre de la guillotine.

190. — C'est le 14 septembre que les proscrits comparurent devant la juridiction chargée de les condamner. On a publié ailleurs le texte de leur jugement. On y voit que fidèle au système qu’elle avait adopté dès l'instant où elle vit le péril qui menaçait sa belle-sœur Anne Le Saint, devant ses juges, ne cessa d’assumer la totale responsabilité de l’hospitalité accordée aux abbés Le Gall et Corrigou, hospitalité qu’elle savait cependant devoir lui coûter la vie.

Quant au recteur de Plouénan et à l’aumônier Corrigou, « il résulte de leurs interrogatoires, déclare le Tribunal criminel dans sa sentence, qu'ils sont prêtres et qu’ils n’ont prêté ni l’un ni l’autre aucun des serments imposés aux ecclésiastiques français et qu’ils n’ont pas non plus déféré aux dispositions des lois qui les obligeaient soit à l'exil soit à se faire interner et, qu’au contraire, ils sont demeurés cachés en France, crimes prévus et punis par les lois des 29-30 vendémiaire et du 22 floréal an II quand il s’agissait de sexagénaires ».

Pour Anne Le Saint, il appert, dit-on, de ses aveux, qu’elle reçut et logea chez elle, avec connaissance qu’ils n’avaient pas prêté les serments exigés par les Lois, les prêtres Le Gall et Corrigou dans la nuit du 7 au 8 septembre 1794, crime prévu et puni par la loi du 22 germinal an II.

En conséquence, le Tribunal criminel du Finistère le 14 septembre 1794 les condamna tous les trois à la peine de mort ; l’exécution devant avoir lieu dans les vingt-quatre heures qui suivraient la sentence. Le 15 septembre 1794, les trois victimes scellèrent de leur sang sur l’échafaud de Quimper leur fidélité à Dieu et à son Eglise, mais leur acte de décès fut rapporté seulement trois jours plus tard.

191. — Une complainte bretonne en 27 couplets, composée peu après le trépas d’Anne Le Saint et encore en honneur dans la paroisse de Plouénan, a conservé jusqu’à nos jours dans cette localité le souvenir des trois serviteurs de Dieu. Le 23ème couplet prétend qu’avant de mourir sur l’échafaud, Anne Le Saint aurait demandé que l’on donna aux pauvres de sa paroisse les vêtements qu’elle portait, détail bien touchant et bien digne d’une Tertiaire de saint François.

La vénération dont on entoura à Plouénan la mémoire d’Anne Le Saint dès après son exécution, s’est perpétuée jusqu’à nos jours. Nombreuses sont encore les personnes qui s’honorent d’appartenir à sa famille et parmi elles on compte plusieurs ecclésiastiques. Les prêtres, pour lesquels elle se dévoua, participent toujours à Plouénan de l’auréole qui s’attache à sa mémoire. Leur souvenir est indissolublement attaché à celui de la généreuse chrétienne qui périt pour avoir donné asile à des prêtres persécutés.

BIBLIOGRAPHIE. — Tresvaux du Fraval, Histoire de la Persécution révolutionnaire en Bretagne, op. cit. (1845), II, p. 117. — Tephany, Histoire de la Persécution religieuse, etc., op. cit. (1879), p. 549. — Peyron, Les prêtres mis à mort pour la Foi, etc. (1919), p. 81. — Peyron, Pondaven et Perennès, Le manuscrit de M. Boissiere, op. cit. (1927), p. 130. — Chanoine Perennès, Les prêtres du diocèse de Quimper mis à mort pour la Foi ou déportés pendant la Révolution, in-8°, op. cit., t. 1er.

(Archives du Finistère, série L, et dossiers du tribunal criminel de ce département).

(Articles du Procès de l'Ordinaire des Martyrs Bretons).

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