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Franchise des habitants et du port de Tréguer (Tréguier). |
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La plus ancienne pièce est une enquête de l'an 1507, ayant pour but de constater le privilège acquis aux « bourgeois, manans et habitants de Lantréguer », de faire entrer dans leur port, en franchise complète, sans payer aucun impôt d'aucune sorte, les blés, denrées, marchandises et objets de toute sorte à eux appartenant, et de les faire sortir du port en même franchise. Ce privilège, d'après l'enquête, c'était le duc de Bretagne, Jean V, pendant qu'il était prisonnier des Penthièvre (février à juillet 1420, qui l'avait accordé aux Trégorois, sans doute à cause de la dévotion particulière de ce prince au grand patron de Tréguer (Tréguier), saint Yves, et, pour que ce puissant patron travaillât, efficacement à délivrer le pauvre duc.
DROIT DE FRANCHISE DES BOURGEOIS, MARCHANDS ET HABITANTS DE LA VILLE DE TRÉGUER.
ENQUÊTE DES 27 ET 28 JUILLET 1507.
ENQUESTE par commission et auctorité des Chancellerie et Conseil de Bretaigne, à instance de l'esleu et administrateur de l’eglise et evesché de Tréguer, et des chanoennes et chapitre de ladicte eglise, et bourgeois, manans et habitans des ville et cité de Lantreguer, et pour chacun d'eulx, vers maistre Jehan Kergoet, fermier du debvoir de trecte des blez tirez hors ce pays et duché de Bretaigne dempuix le premier jour de decembre l'an 1504 jusques au daroin jour de novembre l'an 1506 ; à trouver que iceulx esleu evesque, chanoennes, chapitre, bourgeoys, manans et habitons surditz, soint en bonne possession de tirer et faire tirer et mener hors ce pays et duché leurs blez et aultres denrées et marchandises quelconques, sans paier aucun debvoir d'entrée ni yssue de leur port et havre de Lantreguer, et sans qu'ilz y aint esté aucunement contrainctz, lorsqu'ils en ont tiré et faict tirer, à en faire aucun paiement. Et aussi à trouver qu'ilz soint exemps d'iceluy debvoir d'entrée et yssue, par previlleige, don, concession et octroy de prince ; et aultres faictz par eulx narrez et proposez et entre parties contestez, sellon le tiltre et proceix entr'eulx enssuy par les dictes Chancellerie et Conseil, datté le 8e jour de juillet l'an 1507. Ainsi signé : A la relacion du Conseil, J.VAUCOULEUR.
Ladicte enqueste faicte par moy mestre Guillaume Le Bigot, conseiller et maistre des requestes ordinaire desdictes Chancellerie et Conseil et commissaire y nommé et baillé à celle fin, par et avecques moy appellé Pierre Guillemot, notaire royal, les 27e, 28e, 29e et penultime jours de juillet, et 5e jour d'aougst, oudit an 1507.
Premier.
Du vignt septième jour dudict moys de juillet, JEHAN DE KERGUENECH, seigueur du Rochdu, aisgé de soixante quatorze ans ou environ, comme il dit, tesmoign juré dire vérité, purgé de conseil, examiné et enquis, dit et recorde par son serment, qu'il congnoist partie des chanoennes de ladicte eglise cathedral de Treguer, par les avoir ce parlant [Note : Ce parlant, c'est le témoin qui parle, qui dépose, c'est-à-dire ici Jean de Kerguenech] veuz et souvent en leur compaignie fréquenté, savoir, maistre Geffroy Kermaugart, maistre Christofle Keraudren, maistre Pierres Le Lagadec et chacun, chanoennes dudict lieu ; aussi congnoist Jehan Chatel, Jehan Le Bleiz, Jehan Le Rouyc et chacun, bourgeoys, manans et habitans du dit Lantreguer, et plusieurs aultres desdiz bourgeoys dudit lieu, par les avoir ce parlant pareillement veuz souventes foiz. Ne congnoist point l'esleu, evesque de present dudit lieu, ni ledit Kergoet, fermier comme l'on dit de la trecte des blez que l'on charge et decharge en ce pays et duché ; et dit ce parlant qu'il n'a eu don, louyer ne promesse de nulles desdictes parties pour son present record porter, et qu'il les ayme esgallement en justice, sans qu'il vouldroit, pour le prouffits de nulles desdictes parties, dire aultre chose que verité.
Dict oultre ce parlant qu'il est demourant a present en la parrouesse de Ploeguyel, trante cinq ans a ou environ [Note : Donc depuis 1472], et que auparavant lesdictz trante cinq ans il fut l'un des bourgeoys, manans et habitans demourans en la ville et cité dudict Lantreguer, soy y marchandant par l'espacze d'environ vignt cinq ans [Note : De 1447 à 1472], et que durant sa demourance audit Lantreguer il se y marchandoit en grosserie [Note : Il était marchand en gros], savoir, par tirer, faire tirer, mener, conduire, charger et faire charger blez, vins et aultres marchandises par pluseurs et réiterées foiz en divers navires, que n'est à presant souvenant des noms d'iceulx, fors d'un duquel il dit que Henry Provost estait lors maistre après Dieu, où il chargea au port et havre dudit Lantreguier, qui est au davant de ladicte ville et cité, nommé le havre de la Roche-Derrien [Note : A Tréguer, ou plutôt un peu au-dessous de cette ville, s'unissent, on le sait, les cours d'eau dits Guindi et Jaudi, qui forment par leur confluent la rivière de Tréguer, Il y a donc à Tréguer deux ports ou hâvres différents l'un au nord cette ville, à l'embouchure du Guindi, l'autre, le principal, celui du Jaudi, à l'est de Tréguer, devant le grand quai de cette ville, et que l'on appelle ici hâvre de La Roche-Derrien, parce qu'il est formé par le Jaudi ou rivière de la Roche-Derrien, mais qui d'ailleurs n'a aucun rapport avec le port ni avec la petite ville de la Roche-Derrien], lesdictes especzes de marchandises pour porter, mener et conduire dudit port et havre de Treguier, tant ès parties d'Espaigne, Biscaye, que à La Rochelle et ailleurs, sans que jamais, à cause de ladicte trecte et charge que en fist ce parlant, il en payast nul ne aucun debvoir de yssuie à recepveurs quelzconques, leurs clercs ne commis, avecques, ne luy en firent jamais question ne demande.
Interrogé qui estoint les recepveurs pour lors, dit n'en entre à présent membré [Note : « N'en être à présent souvenant ». Membré = le latin memoratus] ; plus, dit ce parlant que durant le temps de sadicte demourance et negociacion qu'il fist audit Lantreguier, et a deux ou trois voyaiges que il fist dudit havre de Lantreguier, chargé de blez et aultres marchandises, pour porter ésdictes parties d'Espaigne et ailleurs, ne sçauroit aultrement certifier le temps ne à quelz voyaiges ce fut, Guillaume de Kernech et Geffroy Le Lagadec, lors pareillement bourgeoys et marchons demourans en ladicte ville de Lantreguer, y chargèrent et firent charger certain numbre de froment dont n'est à present membré du nombre, et iceulx Kernech et Le Lagadec baillèrent charge à ce parlant de adenerer et proufilter ledit blé aux mieulx qu'il eust peu et comme le sien propre, ce qu'il fist, et leur en rendit, de retour desdictz voyaiges, compte et relicqua. Dit ce parlant que, pour cause de ce, il ne lesdiz nommez ne poierent nul debvoir de trecte et de yssue à recepveurs quelzconques, et dit en entre certain, pour tant qu'il estoit respondant du tout desdiz blez et en tenoit compte, tant de yssues, entrées de portz et havres, que de toutes aultres charges.
Mesmes dit ce parlant qu'il a, par pluseurs et réiterées foiz, veu à pluseurs aultres bourgeoys et marchans demourans en ladicte ville et cité dudit Lantreguer, charger et faire charger, mener et conduire dudit port et havre de Lantreguer du froment et aultres especzes de marchandises, en pluseurs et divers navires que ne sçauroit à present aultrement declerer, hors ce pays et duché, sans que à cause de ce ilz poyassent nul debvoir de yssue, ne paroillement debvoir d'entrée de marchandises qu'ilz ayent deschargé ou fait descharger oudit havre de Lantreguer, que soit venu à notice, sçavance ne congnoissance de ce parlant.
Interrogé si jamais recepveur ne fermier du debvoir de ladicte trecte et yssue de blez, ne aultres, fisdrent ausdictz Lagadec et Kernech aucune demande dudit debvoir de trecte de blez, dit ne l'avoir point ouy ne sceu ; avecques, n’a veu, congneu ne sceu, de tout son temps, que aucune action et demande eust esté faicte jamais ausditz bourgeoys, manans et habitans de ladicte ville dudict debvoir, jucques puix ung an, qu'il a ouy dire que ledit Kergoet, fermier comme l'on dit de ladicte trecte, a voulu icevix contraindre à le poier.
Interrogé s'il sceit la cause pourquoy lesdictz bourgeoys et habitans que dessur ne poyent ledit debvoir d'entrée et yssue, dit ce parlant que, dès son premier aisge, il ouyt dire et tenir pour chose notoire audit lieu de Lantreguer et ailleurs que le feu duc Jehan de bon memoire, que Dieu absolve, lors qu'il estoit prisonnier dedans le chastel de Chantoceaux par la trayson de ceulx de Blays, exempta et franchit lesditz evesque, gens de chapitre et lesditz manans et habitans dudit Treguer, pour certaines grandes causes, de tout debvoir, tant d'entrée que d'yssue, de toutes marchandises qu'ilz eussent chargez ou faict charger audit havre de Treguer. Et à ceste cause et moyen, comme luy semble, sont en possession d'exemption dudict debvoir de trecte et toute aultre coustume. Et aussi les en a veuz jouir et user sans aucune contrainte.
Interrogé s'il sçauroit declerer aultres que luy et lesdictz Le Lagadec et Kernech ayant joug de ladicte exempcion : dit que non pour le présent, mais ce estre commun entre les maistres mariniers et habitans que dessur, que lesditz bourgeoys et habitans demourans en ladicte ville de Lantreguer, appellée la Provosté, lorsqu'ils chargent ou font charger toutes especzes de marchandises qu'ilz veullent, jouissent de ladicte exempcion, et est chose toute notoire.
Oultre, interrogé s'il a jamais ouy ne sceu qu'il y eust eu prohibicion et deffense faicte de prince de ce païs et duché de non tirer blez hors cedit pays et duché, et si, néanmoins lesdictes prohibicion et deffence et durant icelles, lesditz nommez en ont point tiré ou faict tirer par vertu de leurdicte exempcion ou aultrement : dit ce parlant riens n'en sçavoir aultrement qu'il a cy devant parlé, ne du parssur du contenu oudit tiltre ne interrogatoire baillé par ledit Kergoet, sur lesqueulx d'article en article a esté enquis, Et est ce que depose. Du 28e jour dudit moys de juillet.
(2ème témoin). — JEHAN LE BITOUX, à present demourant au Port Blanc, maistre après Dieu d'un navire nommé la Franczoise de Lantreguer, aisgé de cincquante ans ou environ comme il dit, tesmoign juré dire vérité, purgé de conseil et enquis, dit et recorde par son serment congnoistre partie des bourgeoys et sieurs de chapitre de la ville et cité de Lantreguer, par les avoir souventes foiz veuz et frequanté avecques eulx ; ne congnoist point l'esleu evesque dudit Treguer, ne ledit Kergoet, que l'on appelloit fermier de la trecte des blez. Enquis sur les interrogatoires dudit Kergoet, dit qu'il ayme lesdictes parties esgallement en justice, et qu'il n'a eu don ne promesse pour porter son present record, avecques, ne aucun proufilt ne affection en nulles desdictes parties.
Enquis au parssur sur le contenu oudit tiltre, dict et recorde par son serment ce parlant qu'il y vignt ans jà passez qu'il est maistre marinier hantant la mer, et que durant et puix ledit temps par luy cotté il a esté souventes foiz en pluseurs navires, dont il estoit maistres amprès Dieu, maréer, charger et descharger ou havre de Lantreguer, appellé le havre de la Roche Derrien, pluseurs especzes et sortes de marchandises, savoir, blez, vins, fer, acier, plomp et aultres, tant pour Yvon Jégou, Marie Lesleuter, Yvon Lostice, qui pour lors estoient bourgeoys, manans, habitans et demourans en ladicte cordée (sic) de Lantreguer, que pour aultres bourgeoys et habitans dudit Lantreguer : cordée que l'on appelle la Provosté : des noms desqueulx n'est à present membré, sans ce que, à cause de ce, ceulx bourgeoys, marchans et demourans en ladicte cordée seullement dudit Lantreguer eussent aucunement poié nul ne aucun debvoir d'entrée ne yssue de marchandises quelzcoinques qu'ilz eussent chargé ou faict charger et descharger oudit port et havre dudit Lantreguer, que soit venu à notice, sçavance et congnoissance de cedit parlant.
Mesmes dit aussi l’avoir ouy dire à ceulx nommez et aultres bourgeoys qui chargeoint et faisoint charger et descharger oudit port de Lantreguer, demourans en ladicte cordée, et qu'ilz estoint quictes, francs et exemps de tout debvoir d'entrée et yssue. Bien dit qu'il convenait à ceulx demourans hors ladicte cordée et provosté poier ledit debvoir. Plus dit ce parlant que jamais, durant le temps de sa congnoissance et frequentacion par luy faicte oudit havre de Lantreguer, il n'a veu, ouy ne sceu que nulz ne aucuns desditz bourgeoys, manans et habitans demourans en ladicte cordée dudit lieu de Lantreguer, par cause de quelzcoinques marchandises qu'ilz y ayent chargé, faict charger ou descharger oudit port et havre de Lantreguer, ilz ayent à celle cause poié nul ne aucun debvoir de yssue ne entrée ; ne jamais ne sceut que recepveurs ne commis à la recepte des portz et havres dudit Lantreguer rien ne aucune chose leur en avoir demandé, pour ce qu'il a tousiours ouy dire, et tenir pour chose toute notoire audit lieu de Lantreguer et ès environs, que lesdictz bourgeoys demourans en ladicte cordée dudict Lantreguer sont quictes, francz et exemps d'iceluy debvoir d'yssue et entrée. Et n'a veu jamais qu'il y eust eu de ce question ne debat, fors puix nagueres de temps, qu'il dit que ledit de Kergoet, comme recepveur de ladicte trecte, les y vieult asubgecter.
Interrogé si lesdictz evesque et gens de chapitre dudict Lantreguer sont quictes, francs et exemps comme lesdictz bourgeoys et habitans que dessus : dit riens n'en sçavoir, pour ce que ne les a veuz se marchander. Et enquis au parssur sur le contenu oudit tiltre d'entre parties et des interrogatoires baillez par ledit Kergoet, dit ce parlant riens n'en sçavoir oultre ce que davant a parlé. Et est ce que deppose.
(3ème temoin). — GEFFROY LE LAGADEC, sieur de Kernabat, demeurant prés Lantreguer, aisgé de saexante dix ans ou environ, comme il dit, tesmoign juré dire vérité, purgé de conseil, examiné et enquis, dit et recorde par son serment, qu'il congnoist les chanoennes de present de l'eglise cathedral de Treguer, savoir, maistre Jehan Lyz, vicaire, l'un des chanoennes dudit Treguer maistre Geffroy de Kermauguer, maistre Guillaume Le Micanno, aussi chanoenne dudit Treguer ; aussi congnoist le parssur des aultres chanoennes de ladicte eglise. Pareillement, congnoist Jehan Chatel, Jehan Le Rouyc et Jehan Le Bleiz, bourgeoys et marchans dudit Treguer, à present demourans en la ville et cité de Tréguer, et dit avoir d'eux congnoissance, pour ce que la pluspart du temps il est en ladicte ville avecques ceulx frequantant. Aussi dit congnoistre ledit Jehan Kergoet, recepveur de ladicte trecte, vingt cinq ans a et plus, ne congnoist point l'esleu evesque de Treguer. Dict oultre... (Cætera desunt). (Copie contemporaine). (A. de la Borderie).
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