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LES CORDELIERS DE VANNES |
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La plus ancienne communauté religieuse de Vannes est celle des Frères Mineurs, appelés plus tard Cordeliers. Institués par saint François d'Assise en 1209, ils se répandirent rapidement dans tous les pays chrétiens, et contribuèrent pour une bonne part à l’efflorescence religieuse du XIIIème siècle. La Bretagne ne tarda pas à s’enrichir de ces prédicateurs évangéliques, qui édifiaient les peuples par leur pauvreté et leur mortification. Le couvent de Quimper fut fondé en 1232, celui de Rennes vers 1235, celui de Dinan en 1250, celui de Vannes en 1260, celui de Guingamp en 1283 et celui de Nantes en 1296. |
ORIGINE
« En 1260, dit Dom Morice (Hist. I. 192), la Bretagne se trouvoit affligée par la disette et par la mortalité. Pour fléchir la colère de Dieu, le duc Jean I s’occupa de bonnes oeuvres et fit bâtir une maison pour les Frères Mineurs dans la ville de Vannes ».
Un
registre, conservé aux Archives départementales (Cordel. H), ajoute à cette
note quelques détails : « Venetensis conventus in antiqua Venetorum
civitate,... vetustissimo ac declivi loco, olim extra civitatis muros,
exstructus fuit a serenissimo principe Johanne primo, duce Britanniœ Armoricœ...
Ibi Minores habitare cœperunt circa annum Domini M. CC. LX ».
Ce
couvent était situé au sud-ouest de la cathédrale, en dehors du vieux mur de
la ville. Il était presque voisin du manoir de Kaer, dont les seigneurs lui
firent plus tard quelques libéralités. Il ne nous est resté aucune
description de ce monastère primitif, mais on doit croire qu’il se composait,
comme dans les siècles suivants, d’un carré d’édifices autour d’un cloître.
La
chapelle, dédiée sous l’invocation de saint François d'Assise, était
orientée comme la cathédrale, et formait le côté sud du monastère. C’était
un parallélogramme allongé, qui mesurait environ 34 mètres de longueur sur 14
de largeur, et dont le style appartenait nécessairement au XIIIème siècle.
Elle fut dédiée par Guy de Conleu, évêque de Vannes, le 31 mai 1265, suivant
cette note du même registre : « Ecclesia vero conventus dedicata fuit a
Reverendo Patre Guydone Episcopo Venetensi anno Domini M. CC. LXV, die ultima
mensis Maii ». On y arrivait directement en descendant la rue Noé, qui
s’est appelée longtemps la rue Saint-François.
On
ne connaît pas exactement la dotation primitive. Les comptes du Duc en 1434 et
1437 mentionnent une rente annuelle de 180 livres, à la charge de dire cinq
messes par jour pour le Duc et ses enfants, de plus une rente de 26 livres, pour
cinq messes chaque vendredi, et enfin une rente de 40 livres pour les Heures
canoniales. Mais on ignore si ces fondations remontent à l’origine de la
maison.
Le
supérieur du monastère portait, comme ailleurs dans l’ordre de saint François,
le titre de Gardien, et il relevait du provincial de Touraine, qui avait
le droit de visite et de correction.
SEPULTURES
L’une
des premières difficultés que rencontrèrent les Frères Mineurs à Vannes fut
occasionnée par les sépultures.
En droit
ecclésiastique, c’est au curé de chaque paroisse qu’il appartient de faire
les enterrements de ses paroissiens, c’est-à-dire de faire la levée du
corps, de le conduire à son église, et de bénir sa tombe. Mais si le défunt
ou sa famille a choisi sa sépulture dans un cimetière ou une chapelle de
communauté, le curé de la paroisse fait la levée du corps à domicile et le
conduit directement jusqu’à la porte de la chapelle, où finit son pouvoir,
et les religieux de la maison célèbrent chez eux les obsèques et font
l’inhumation.
Telle est
la loi de l'Eglise, à laquelle toutefois des transactions particulières
peuvent apporter quelques modifications de détail. Ainsi, à Vannes, après
quelques tiraillements entre les Frères Mineurs et les chefs des paroisses de
Saint-Pierre, de Saint-Patern, de Notre-Dame et de Saint-Salomon, l’évêque
de Vannes, Jean Le Parisy, et le provincial de Touraine, Alain, intervinrent
dans le conflit, et arrêtèrent les conditions suivantes, le 11 janvier 1308
(N. S. 1309) :
1° Les
paroissiens de Saint-Pierre de Vannes, qui auront choisi leur sépulture chez
les FF. Mineurs, seront d’abord portés à l’église de Saint-Pierre ou à
celle de Saint-Michel, où une messe de Requiem sera célébrée pour
eux, puis ils seront conduits à Saint-François, avec tous les luminaires et
fournitures funéraires, pour y être inhumés, et après l’office les
luminaires et les fournitures seront partagés par moitié entre la paroisse et
le couvent.
2° Les
étrangers de passage, comme les voyageurs, les colporteurs, qui se trouveront
à mourir à Vannes ou dans les faubourgs, et qui auront choisi leur sépulture
chez les FF. Mineurs, y seront conduits directement par le clergé de la
paroisse ; et après la cérémonie on partagera également par moitié le
luminaire, les draperies et les fournitures.
3° Il en
sera de même des fidèles de Saint-Patern, de Notre-Dame, de Saint-Salomon, et
des autres paroisses du diocèse, qui auront choisi leur sépulture chez les mêmes
Frères : le chapitre de la cathédrale ne pourra réclamer aucun droit de
conduite ni de partage. (Cordel. H).
Ces
principes trouvèrent leur application dès 1312 pour l’enterrement du duc
Arthur II. Ce prince, qui avait fait du bien aux FF. Mineurs de Vannes, voulut
être inhumé clans leur église. Son corps fut déposé au milieu du choeur, et
au-dessus on dressa un sarcophage sculpté, avec la statue couchée du Duc en
marbre blanc.
Ce qui
suit, dit le registre du couvent, était écrit sur son tombeau : « Cy gist
le large prince Arthur, Duc de Bretaigne, fieulx du bon Duc Jehan II, lequel
mourut a Lyon au couronnement du pape Clément V, et de Mme Béatrix, fille du
roi d’Angleterre ; il trespassa au chasteau de l’Isle-lez-la Roche-Bernard,
le XXVIIème jour du mois d’aoust l’an de grace M. CCC. XII. Sa vie et le
servige volentiers vos raconterois et les bonnes tèches si je povois, mais
ceste tombe ne peut pas comprendre ; icy il fut ensépulturé, avecques grande
feste et grand compaignie de la noblesse de la duché ; nous ama Frères Ménours
et moult nous hénoura. Priez Dieu que son herme (ame) soet en repos. Amen ».
Suivant
les bénédictins D. Lobineau et D. Morice, le corps d'Arthur II aurait été
porté chez les Carmes de Ploërmel, et les entrailles seulement auraient été
inhumées chez les Cordeliers de Vannes. Mais il y a ici une confusion : c’est
le coeur du prince, qui fut porté à Ploërmel et déposé dans le tombeau du
duc Jean II, son père, comme on peut le voir dans les titres des Carmes, et
c’est le corps lui-même qui fut inhumé à Vannes, comme le prouvent
l’existence du tombeau et le texte même de l’épitaphe.
Ce
tombeau a été détruit à l’époque de la Révolution ; la statue du Duc,
gravée et publiée par les Bénédictins, a été brisée par les Vandales du
temps, et aujourd’hui il n’en reste qu’un fragment, conservé au Musée
archéologique.
L’accord
de 1309, concernant les sépultures, fut complété, le 21 avril 1383, par un
article additionnel, portant que les enfants, qui ne peuvent pas eux-mêmes
choisir leur sépulture, pourront néanmoins être inhumés chez les FF.
Mineurs, sur la demande formelle de leurs parents ou tuteurs, demande qui sera
communiquée au vicaire de Saint-Pierre.
TERRAINS
Le jardin
des religieux était situé entre leur maison et le mur de la ville ; il se
partageait en deux parties : la première, voisine du couvent et au niveau du
sol, appartenait aux Frères ; la seconde, voisine des murs et la plus considérable,
formant la douve de la ville, appartenait au Duc, et n’était utilisée par
les religieux qu’à titre précaire et révocable.
Or en
1342, pendant la guerre de Succession, la ville de Vannes fut prise et reprise
tour à tour par les partisans de Blois et ceux de Montfort. Pendant ce temps,
il avait fallu réparer les murs de la ville, curer les douves, et rejeter les déblais
sur le terrain voisin. Cette opération avait été, pour les FF. Mineurs en
particulier, la ruine complète de leur double jardin ; et cet état se maintint
pendant le reste de la guerre, jusqu’à la bataille d'Auray en 1364.
Jean IV,
pour prévenir le retour de pareils désagréments, résolut d’enclore le
couvent dans la nouvelle enceinte de la ville de Vannes et de creuser des douves
le long des murs neufs ; il céda aux religieux en toute propriété les
vieilles douves, et il leur permit de les combler pour agrandir leur jardin.
C’est à quoi fait allusion cette note du Registre des Cordeliers :
«
Conventus Sancti Francisci Venetensis, anno 1385, multum fuit amplificatus a
generosissimo principe Johanne IV ». C’est dans ce couvent que le même
Duc et le connétable de Clisson se réconcilièrent en 1395, et arrêtèrent
entre eux les conditions d’une paix sincère et définitive. « Est locus
in quo nedum Britanniœ duces in pristinam concordiam distractos reducebant, sed
etiam ibi vota sua Deo optimo maximo, Virgini illibatœ et B. Francisco
offerebant ».
Le duc
Jean IV mourut à Nantes le 1er novembre 1399, et, peu après, quelques-uns de
ses officiers contestèrent le don des vieilles douves fait aux FF. Mineurs.
Ceux-ci s’adressèrent à la duchesse Jeanne de Navarre, mère et tutrice du
jeune Jean V. « Receu avons, dit-elle, la supplication de religieux
les FF. Ménours et convent de la ville de Vennes, contenant que par les guerres
et ostilitez, qui longuement ont duré en ce pais de Bretagne, furent mis et
emploiez en douves grant partie et quantité de la place et héritage, où
soulloint estre leurs jardrins, et une porte par où l’en alloit à leur église,
en la partie devers les anciens murs et cloison ancienne de la dite ville, que
l’en appelle murs sarazins, et entre ceulx murs et leur dite église, maisons
et habitations du dit convent ; et depuix que Mgr le Duc, dont Dieux ait l’âme,
fist aclore en fortiffication de la dite ville leurs d. église et habitacions,
et que les d. douves qui avoint esté faites près les d. murs anciens des
terres où souloint estre leurs jardrins furent comblées, en quoy ils ont fait
grandes mises, et à faire le délivrage des terres qui estoient en celle place,
en entencion d’y renouveller et édiffier nouveaux jardrins... » (Cordel.
H. - Or. parch.).
La
duchesse ordonna le 27 mai 1400 de faire une enquête sur tous ces faits. Les dépositions
des témoins ne nous sont point parvenues ; mais l’enquête tourna
certainement au profit des religieux, puisque les terrains leur restèrent.
Le 17
juin 1414, le duc Jean V permit aux FF. Mineurs de faire une porte sur leur
cimetière, lequel était près de l’église. Cette porte était située entre
le mur du jardin et la maison de Jean Laurent, aujourd’hui maison Souvestre.
Dix jours
plus tard, le 27 juin 1414, le même prince étant au château de l'Hermine,
donna aux mêmes religieux, en toute propriété, « une petite pièce ou
portion de terre, syze en la ville de Vannes, entre la porte Saint-Salomon
d’un costé et le verger des dits Frères de l’aultre, et des aultres parts
entre le veill et le nevau mur de la ville, où souloient estre jadis les douves
d’icelle ville... ». Ce terrain est celui qui forme la pointe
septentrionale de l’enclos, à l’angle fait par les deux murs de la ville.
(Ibid.)
On peut
se rendre compte de l’état des lieux, à cette époque, en jetant les yeux
sur le plan cadastral ci-joint.
INHUMATIONS
Nous
lisons dans le testament de Guy de Molac, sire de Molac et de Pestivien, le
passage suivant, daté du 8 septembre 1409 : « .. Je vueille et ordonne que
après mon trespassement, mon corps soit ensépulturé en l’église des Frères
Minours à Vennes, en la chapelle où Monseigneur mon père, que Dieu absolve,
est enterré. — Item, je laisse et ordonne au dit convent, pour dire et célébrer
trois messes par chacune sepmaine, en perpétuel, pour moy, mes prédécesseurs
et successeurs, et y participant ma compaigne et les héritiers d’entre elle
et moy, la somme de trois cens escuz d’or à la couronne, à une fois payée,
à estre dites celles trois messes en la dite chapelle, savoir est, l’une au
mardy, l’autre au jeudy, et l’autre au samedy, par chaque sepmaine, pour ce
que Jean mon frère, que Dieu absolve, y a fondé trois autres messes, par
chacune sepmaine, aux autres jours.. ». — La chapelle, où était le
tombeau des sires de Molac était dédiée à saint Antoine de Padoue. Guy VII
de Molac mourut en 1411, laissant une fille, nommée Jeanne, mariée à Pierre
de Rieux, maréchal de France.
En cette
même année 1411, si l’on s’en rapporte au registre de la communauté, fut
enterré dans le choeur de la chapelle un cardinal de la Sainte Eglise Romaine,
dont le nom est ignoré. Ceci est plus que douteux : le tombeau d’un cardinal
aurait dû laisser quelque trace, et on n’en signale aucune.
Vers
1416, mourut Jean II de Malestroit, seigneur de Kaer et du Plessis du chef de sa
mère. Il avait bâti, en l’honneur de son patron saint Jean, une chapelle au
midi du choeur de Saint-François, et fondé une messe chantée tous les jours
au maître-autel, moyennant une rente annuelle de trente livres monnaie.
Les
religieux, par reconnaissance, lui donnèrent le titre de second fondateur de la
maison, titre transmissible à ses successeurs. Ils l’enterrèrent suivant son
désir, au milieu de la chapelle fondée par lui. Sa famille lui dressa un
tombeau de trois pieds de hauteur, sur lequel on mit sa statue en marbre blanc ;
il était représenté couché, armé de toutes pièces, la tête nue, les mains
jointes, et la poitrine constellée de besants : ce qui rappelait les armoiries
de sa maison. — A la Révolution, le tombeau a été détruit et la statue
brisée ; le Musée archéologique en a recueilli quelques fragments. La statue
de sa femme a subi le même sort.
Le 17
janvier 1432 (N. S. 1433) éclata un conflit, à propos d’une sépulture. Jean
de Trémedern, écuyer, père ou frère de la dame de Kaer, étant mort chez
elle, sur le territoire de la paroisse de Saint-Pierre, le chapitre de la cathédrale
et le vicaire perpétuel, Jean Collet, se rendirent à la maison mortuaire ; les
FF. Mineurs y arrivèrent également avec leur gardien Pierre. La levée du
corps faite, la procession se mit en marche vers la rue Noé et au lieu
d’aller jusqu’à Saint-Pierre, pour revenir ensuite à Saint-François, où
l’inhumation devait se faire, on fit entrer directement le corps chez les
religieux, contrairement à l’accord passé le 11 janvier 1309.
Le clergé
de la cathédrale protesta vivement contre ce procédé, et le vicaire perpétuel,
en entrant dans l’église des FF. Mineurs, entonna, malgré eux, le psaume De
profundis ; puis les chanoines et les chapelains occupèrent les stalles des
religieux, et commencèrent l’office des morts. Après les trois premiers
psaumes et avant les leçons, pendant qu’on récitait tout bas le Pater, un Frère
Mineur prit rapidement la parole et publia une bulle du pape Alexandre IV, de
1260, défendant aux prêtres séculiers, sous peine d’excommunication, de
faire les cérémonies des obsèques dans les chapelles des Mineurs, sans leur
consentement. La lecture finie, les prêtres de Saint-Pierre, ne tenant aucun
compte de la bulle, la regardant peut-être comme apocryphe, chantèrent aussitôt
les leçons et les répons ; et ayant achevé l’office ils inhumèrent le défunt
dans le choeur de l’église.
Le
lendemain, 18 janvier, le clergé de la cathédrale, les chanoines en chapes
noires et les chapelains en surplis, précédés de la croix, vinrent
processionnellement à l’église de Saint-François, pour, y chanter la messe.
Ils occupèrent immédiatement les stalles du choeur, à droite et à gauche, et
commencèrent le chant de l’Introït suivi du Kyrie, pendant que
le célébrant s’habillait à la sacristie. Mais celui-ci, harcelé par les
religieux et menacé de l’excommunication du pape, finit par céder. Il quitta
les ornements qu’il avait déjà pris, et retourna avec sa compagnie à
Saint-Pierre. Mais l’affaire ne pouvait en rester là ; il fallait une décision
de l’autorité. Les FF. Mineurs s’adressèrent à l’évêque d’Orléans,
conservateur des privilèges de leur ordre, pour la province de Touraine.
Celui-ci délégua l’abbé de Prières, pour faire une enquête. La suite de
cette procédure ne nous est pas parvenue.
CORDELIERS
Jusqu’en
1433, il n’est question dans les archives de la maison que des FF. Mineurs, et
à partir de 1440 on rencontre couramment le nom de Cordeliers. D’où vient
cette différence, sinon d’une réforme introduite dans le monastère ?
Les FF. Mineurs étaient les enfants aînés de saint François, les Cordeliers
étaient des cadets, issus d’une réforme. Cette réforme, connue sous le nom
d'Observance régulière, inaugurée en Italie dès 1368 par Frère
Paulet de Trinci, et propagée ensuite par saint Bernardin de Sienne, pénétra
dans notre diocèse à l’époque où nous sommes rendus. Les Observantins
ou Cordeliers s’établirent à Bodelio vers 1430, à Vannes vers 1437, à
Blavet en 1447, à Bernon en 1449, et à Pontivy en 1456.
Le 15
juillet 1440, Yolande d'Anjou, femme de François, comte de Montfort, faisant
son testament au manoir de Plaisance, s’exprime ainsi : « Item, ordonne
que mon corps soit baillé à sainte sépulture, à l’ordonnance de mes
seigneurs le Duc et le Comte, et où il leur pléra. — Item, vueil et ordonne
que en l’église des Cordeliers de Vannes, par chacun jour de la semaine, une
messe soit dite et célébrée pour moy et mes prédécesseurs et bienfacteurs,
à jamais en perpétuel... » (Pr. II. 1332).
La
princesse mourut le lendemain, et fut inhumée dans l’église des Cordeliers
de Vannes ; son tombeau fut érigé dans le choeur, avec une statue en marbre
blanc. A l’époque de la Révolution, ce monument a subi le sort commun, et il
ne reste au Musée archéologique qu’une partie de la statue.
Saint
Bernardin de Sienne ayant été canonisé en 1450, les Cordeliers de Vannes lui
érigèrent un autel dans leur église, et ils eurent la joie d’y voir opérer
de fréquents miracles. Aussi dès 1452, obtinrent-ils du cardinal Guillaume d'Estouteville,
légat du Pape en France, des indulgences en faveur des fidèles qui viendraient
y prier et qui feraient une aumône pour l’entretien de l’édifice.
Le 4 février
1464 (N. S. 11465), Pierre Josso, seigneur du Pont de Noyalo, choisit sa sépulture
chez les Cordeliers, dans la chapelle de Saint-Clair, voisine de celle de
Malestroit, et donna une rente de 40 livres pour avoir des messes. Les religieux
étaient alors FF. Jehan Nicolas, gardien, Jehan de Mais, Yves Lezur, Raoul
Martin, Yves Jouchet, Thomas Chanony, Jehan Guillemet, Geffroy Nouel, Jehan Stir,
Louis Bouffy, tous profès ; Jehan Loret, Guyon Ruaut, et Jehan Le Boursec,
novices. Total : 13 religieux présents au chapitre, sans compter les frères laïcs.
Le 26 décembre
1476, le F. Tristan Mandart, gardien, et D. Guillaume Ermar, recteur de
Saint-Patern, convinrent entre eux que si un paroissien de Saint-Patern
choisissait sa sépulture chez les Cordeliers, avis en serait donné au recteur
ou au curé afin qu’il vint faire la levée du corps ; mais si une heure après
le temps fixé pour le départ, il n’y avait ni recteur ni curé, les
religieux feraient eux-mêmes la levée du corps et le conduiraient chez eux ;
après la cérémonie, les religieux, pour reconnaître la juridiction
paroissiale, compteraient au recteur de Saint-Patern le quart des droits funéraires
et des oblations reçues (Cord. H. Orig. parch.).
Le 28 mai
1482, Yves Davy, receveur ducal, fonda une messe basse, tous les samedis, à
l’autel de Notre-Dame de Bonne-Nouvelle, au bas de l’église.
En 1496,
on trouve à Vannes la mention d’une confrérie de la Conception de Notre-Dame,
établie pareillement dans plusieurs autres maisons de l’Ordre. Pour en faire
partie, il fallait se faire inscrire et donner une somme de dix deniers une fois
seulement. En retour on était reçu participant aux messes, prières et bonnes
oeuvres de tout l’ordre de saint François. Les religieux obtinrent même du
pape Alexandre VI, le 28 janvier 1496, la faculté d’absoudre les associés de
certains cas réservés.
En 1515,
mourut Jean Robert, de l’ordre de saint François ; évêque de Tibériade et
auxiliaire de Vannes. Il fut enterré dans le choeur de l’église des
Cordeliers. Le titre épiscopal de Tibériade fut donné quelque temps après à
Geoffroy Le Borgne, prieur des Carmes du Bondon.
On peut
enregistrer en 1517 une faveur considérable accordée par le pape Léon X aux
religieux franciscains de l'Observance régulière. Gouvernés jusqu’alors par
un vicaire général, ils eurent à partir de cette année un ministre général,
spécialement chargé de leur observance et marchant de pair avec le ministre général
des Conventuels ou anciens Frères Mineurs. Cette concession fut accueillie avec
la joie la plus vive par tous les Observantins ou Cordeliers du diocèse de
Vannes.
FONDATIONS
Les ducs
de Bretagne, on s’en souvient, étaient les fondateurs et les patrons du
couvent de Saint-François de Vannes. Après l’union de la Bretagne à la
France, leurs titres passèrent aux rois de France. Mais les seigneurs de Kaer,
voisins du couvent, tenaient à être considérés comme fondateurs et patrons
secondaires. Le 25 janvier 1542 (N. S. 1543), Claude de Malestroit, sire de Kaer,
du Plessis, de Kerambourg, de Roguédas, etc... se rendit au chapitre de la
communauté, composé du F. Julien Gauvaign, gardien, et de quatorze autres
religieux ; et là, en présence du F. Jehan Rocard, vicaire du provincial, il
confirma la fondation d’une rente annuelle de 30 livres monnaie, faite jadis
par un de ses ancêtres, pour une messe chantée tous les jours, et sans y rien
ajouter ; il demanda à être reconnu comme patron et fondateur du couvent et à
participer aux prières de la communauté ; ce qui lui fut accordé sans
opposition.
C’est
à partir de cette époque, qu’on trouve dans les archives du monastère une série
de fondations, dont voici le résumé.
Le 1er
mai 1551, Jeanne Cadio, veuve de Guyon de Callac, donna une rente de 6 livres
pour une messe tous les vendredis.
Le 5
juillet 1558,. Olivier de Kerméno, seigneur de Kerario, donna 30 liv. de rente
pour sa sépulture et une messe solennelle tous les jours.
Le 31 décembre
1566, Louis de Keralbaut donna un capital de 500 liv. pour sa sépulture, une
messe basse quotidienne et des prières.
En 1571,
Christophe Kermarec, écuyer, donna une rente de 50 liv. sur Broel, pour avoir
une messe basse tous les jours.
En 1571,
sentence pour le paiement d’une rente de 6 liv. donnée par Pierre Macéot,
sieur de l’Isle, pour une messe annuelle.
Le 6 mai
1572, Jean d'Aradon donna un capital de 500 liv. pour avoir une messe
quotidienne à l’autel Saint-Jacques.
Le 16
octobre 1572, Charlotte Le Goff donna 120 liv. pour avoir sa sépulture, une
messe le dimanche et des prières.
Le 12
novembre 1572, Olivier Ferrara donna 20 liv. pour fonder une messe solennelle le
2 novembre de chaque année.
Le 1er février
1573, Pierre Salomon, seigneur de Liziec, légua 200 liv. pour avoir une messe
basse tous les lundis, avec prières.
Le 2 février
1573, Gilles de Musillac légua une somme de 200 liv. pour avoir une messe basse
tous les vendredis.
Le 23
octobre 1573, Gratienne Henry donna 32 liv. pour faire prier Dieu pour elle et
pour son mari 0l. Ferrara.
Le 16
avril 1574, Françoise Le Bodic donna 240 liv. pour avoir deux messes basses par
semaine et des prières.
Le 18
avril 1574, Jean Davy légua 400 liv. pour avoir une messe basse tous les
lundis, un service et des saluts.
Le 9
avril 1581, Olivier Rouxel assura un capital de 1200 liv. pour avoir une messe
basse tous les jours de l’année.
Le 20 mai
1581, Sébastienne Cado légua un consttitut de 330 liv. pour avoir une
messe basse tous les samedis, avec prières.
Le 21
novembre 1581, Julienne de Gourvinec, dame de Kerlevenan, légua 200 liv. pour
fonder trois messes de Requiem.
Le 30
juin 1581, Françoise Savary, dame de Kerbodo, légua une rente de 10 livres
pour fonder son service anniversaire.
Le 1er
juillet 1583, Pierre du Théno, sieur du Pargo, légua une rente de 15 livres
pour fonder son anniversaire.
Le 1er
juillet 1584, Julienne Hervo légua 120 livres pour une messe chaque vendredi,
et une rente de 50 sols pour un service.
Le 12
octobre 1589, René de Kerméno, sieur du Garo, donna 600 livres pour fonder le
service solennel de N. de la Haye, sa femme.
En 1591,
la confrérie des Merciers fonda une messe basse à chaque lundi et une messe
chantée à chaque fête de la sainte Vierge.
Le 24
avril 1592, le sieur Cavat et sa femme donnèrent 240 livres pour avoir leur sépulture,
un service et une messe le mercredi.
Le 4 mai
1592, la confrérie des Tailleurs fonda une messe basse tous les dimanches et
mercredis, et deux messes chantées par an.
Le 19
septembre 1592, Perrine Olichon donna 209 livres pour avoir sa sépulture, huit
services et une messe chaque mardi.
Le 27
janvier 1595, Jean Le Thiec, recteur, donna 60 livres pour avoir son
anniversaire au jour correspondant à son décès.
Le 4 août
1595, B. Guymarho, chantre, donna 300 livres pour fonder son anniversaire et
celui de son frère Henri.
Le 17 décembre
1598, le roi Henri IV confirma une rente annuelle de 50 livres pour la récitation
du Pater et de l'Ave, à midi.
TRANSACTIONS
Ces
fondations étaient nombreuses assurément, mais avec le temps elles
diminuaient, soit par la perte du capital, soit par manque de paiement de la
rente. Ainsi, les seigneurs de Kaer, si soucieux de leurs prérogatives, restèrent
pendant quarante ans, sans payer leur rente annuelle de 30 livres monnaie ou 36
livres tournois ; leur chapelle de Saint-Jean, faute d’entretien, tomba en
ruines. Enfin, M. Mathurin de Montalais, seigneur de Chambellay, neveu et héritier
bénéficiaire de René de Malestroit, seigneur de Kaer, etc., promit, par acte
du 9 février 1600, de rebâtir la chapelle et de continuer la rente, à
condition d’être reconnu, comme ses prédécesseurs, patron du couvent.
Plusieurs
années s’écoulèrent, et les engagements ne furent pas tenus. Las
d’attendre, les religieux actionnèrent le seigneur de Kaer et mirent la
saisie sur ses biens. Alors intervint une transaction, en date du 10 août 1611,
par laquelle les religieux se chargèrent eux-mêmes de faire reconstruire la
chapelle, moyennant la somme de 2,100 livres tournois, qui leur serait payée en
quatre ans par ledit seigneur. « Laquelle chapelle ainsy construite sera
entretenue en réparation de couverture et de pierres faillantes seulement à
l’advenir par lesdits religieux ; aux vistres de laquelle chapelle seront mips
les escussons et armoiries, tant des seigneurs et dames de Ker et Malestroit,
que mesmes des seigneur et dame de Chambellay ; ensemble remetteront en ladite
chapelle les deux statues de marbre, quy y estoient antiennement, et les feront
symenter et accommoder au mieux que faire se pourra. Et par le fait du présant
accord, lesdits seigneur et dame demeurent quittes des erréages dudit sommaire
de 36 livres tournois de rante, depuis tout le temps passé (40 ans) jusques à
ce jour, mesme de touz les fraiz et mises des procédures, que iceux relligieux
pourront prétandre ; et continueront lesdits seigneur et dame de Chambellay le
payement dudit sommaire de 36 livres tournois de rante à l’advenir, à chacun
terme de janvier et d’aougst ».
La
seigneurie de Ker passa des Montalais à Jacques Barrin de la Galissonnière,
puis par vente, en 1639, à Roland Morin, sieur du Trest, en 1659 à Jean de la
Landelle, seigneur de Roscanvec, et en 1666 aux évêques de Vannes, par retrait
féodal. Les Cordeliers ne sachant plus à qui s’adresser, pour avoir la rente
de 36 livres tournois, fondée jadis par les Malestroit de Ker, la réclamèrent
d’abord aux évêques de Vannes, puis aux Lannion, barons de Malestroit, qui
acceptèrent le patronage de la chapelle de Saint-Jean et promirent, en 1716, de
continuer le paiement de la rente.
Une autre
affaire sollicita vers le même temps, toute l’attention des religieux. Au
midi de leur cour, se trouvait un terrain vague, limité à l’ouest par le mur
de la ville, au sud par les dépendances de Ker, et à l’est par le jardin et
la maison d'Amador Le Guédois. C’était un lieu de passage, pour se rendre de
l’église de Saint-François au port, et réciproquement ;
les enfants du quartier y prenaient habituellement leurs ébats ; il avait une
contenance de 19 cordes et un quart.
Les
religieux le considéraient comme la continuation de leur cour et une dépendance
du monastère ; ils y avaient même enterré des morts, le long du mur de la
ville, en temps d’épidémie. Dès 1559, ils avaient manifesté l’intention
de l’enclore ; mais le sieur Le Guédois s’y était opposé, parce qu’il
avait une porte donnant sur le terrain, et un droit de passage pour se rendre
soit à Saint-François, soit sur le port. L’affaire n’eut pas alors de
suite.
Après la
mort de ce voisin, les Cordeliers reprirent leur projet. Ils firent en 1603 un
petit talus et y plantèrent quelques arbustes ; puis en 1608 ils obtinrent de
René d'Aradon, gouverneur de la ville, la permission de l’enclore du côté
du manoir et du bastion de Ker. Aussitôt la veuve d'Amador Le Guédois,
Perronnelle Philippe, et ses deux gendres Noblot et Martin, formèrent
opposition et entamèrent un procès.
Après de
longues procédures, on transigea le 20 novembre 1613. Les religieux eurent la
liberté de faire leurs murs de clôture au midi et au nord ; en retour, ils
reconnurent à leurs adversaires leur droit de vue et de passage sur le terrain
contesté, leur remirent une clef de la porte à claire-voie pour se rendre à
l’église, et promirent de ne jamais enterrer auprès de leur maison. Aussi
transformèrent-ils ce terrain en jardin.
Plus
tard, en 1634, M. Jean Morin, président au présidial de Vannes, et acquéreur
de l’immeuble des Guédois, obtint des Cordeliers la cession d’une bande de
ce terrain, contenant 7 cordes 1/4, plus large au sud qu’au nord, et il prit
l’engagement de payer une rente censive tous les ans, de ne faire sur le
terrain cédé aucune construction ayant vue sur la portion réservée, et de
faire de son côté une porte pour aller à Saint-François, sans passer désormais
sur le terrain des religieux.
DELABREMENT
Cependant
le monastère des Cordeliers s’en allait de vétusté. Les religieux le
remarquaient bien ; il était nécessaire de le reconstruire, ou d’y faire au
moins de grosses réparations. Malheureusement ils étaient trop pauvres pour
entreprendre un si grand travail. Ils s’adressèrent donc à la communauté de
la ville de Vannes, qui leur vota généreusement, le 27 septembre 1630, un
secours de 3000 livres. Mais pour toucher cette somme, il fallait les lettres
patentes du roi, et elles se firent attendre pendant plusieurs années. Pour
obtenir enfin leur expédition, on fit dresser, le 11 juillet 1637, un procès-verbal
de visite des lieux, avec l’indication minutieuse des travaux à exécuter, et
le calcul des dépenses. Ce procès-verbal, qui existe encore aux Archives départementales,
est précieux parce qu’il donne les mesures des édifices, et qu’il permet
de reconstituer l’ancien monastère.
Voici les
principaux passages de ce document :
« ...
Les massons nous ont monstré en l’églize que le grand pignon du bas
d’icelle est tout couleupvré (fendu), et penche fort vers le dehors, dans
lequel il y a deux beaux autelz, l’un de la Nativité de Nostre Seigneur,
l’autre de Nostre Dame de Bonne-Nouvelle ; le dit pignon a de large par le bas
25 piedz, et de haulteur jusque à l’éguille 60 piedz, sans les fondementz,
et d’épaisseur 4 piedz.
A costé
du grand pignon, il y en a un autre petit, quy est le boult d’une aile (collatérale)
de l’églize, le dit pignon a 25 pieds de-hault et 15 de large, les fondementz
non compris.
Plus
une grande longére de muraille, faisant d’un costé le carré du convent en
bastiments, quy a 157 pieds et demy de longueur, et 25 pieds de haulteur, sans
les fondements ; et un escalier de mesme haulteur, quy est tout couleupvré,
ayant ses marches toutes rompues ; et presque tout le grand corps de logis estayé
par dedans, de crainte que la couverture ne tombe.
Plus
trois longères dedans un petit clouaistre , qui ont de longueur, la première
33 pieds, la deuxiesme 49, et la troisiesme 36 pieds.
Plus,
entre le petit clouaistre et le grand, il y a un corps de logis, dans lequel il
y a deux dortouers, l’un sur l’autre, les longères ayant de haulteur, sans
les fondements, 30 pieds, et de longueur 52 pieds chacune, chaque pignon a de
largeur 29 pieds par dehors, et de haulteur, sans les fondements, jusque à l’éguille
45 pieds : toutes lesquelles murailles sont vieilles et caduques, et ne peuvent
plus estre racommodées, et sont à refaire.
Plus
une longère du grand dortouer vers le jardin, quy a de longueur 143 pieds, et
de haulteur sans les fondements 16 pieds.
Plus
une longère des infirmeries par dehors qui a 40 pieds de long, et 13 pieds de
hault sans les fondements : toutes lesquelles murailles se doibvent reffaire.
Plus
dix pieds d’en hault du pignon de l’église, proche du maistre autel, sont
couleupvrés, et il est nécessaire de les reffaire tout à neuff... ».
Ce procès-verbal
porta coup, et les lettres patentes, autorisant la ville à donner 3000 livres,
furent expédiées le 10 août 1637. Avec cet argent et quelques autres
ressources, on fit les réparations les plus urgentes au vieux couvent et on bâtit
un nouveau corps de logis, vers le nord de l’enclos, entre l’extrémité des
vieux bâtiments et l’ancien mur de la ville, à l’endroit où se trouve
vers la fin du XIXème siècle la maison de M. Mauricet.
RECOLLETS
Ces
travaux étaient à peine terminés, quand les Cordeliers éprouvèrent une vive
alerte.
Les Récollets,
religieux franciscains comme eux, soumis au même ministre général qu’eux,
formaient une congrégation distincte, qui était alors fort en faveur, à cause
de sa grande régularité. Ces nouveaux venus avaient pris beaucoup
d’extension, soit en fondant de nouvelles maisons, soit en occupant celles des
Observantins ou Cordeliers qui demandaient à embrasser leur réforme.
C’est
ainsi qu’en 1642 ils s’établirent à Bernon, comme ils s’étaient établis
à Pontivy et au Port-Louis. L’année suivante, ils tentèrent de
s’introduire à Vannes. Appuyés par Mgr de la Mothe-Houdancourt, évêque de
Rennes et commissaire apostolique en cette affaire, ils obtinrent, le 22
septembre 1643, un arrêt du Parlement, rendu sur simple requête, pour se
substituer aux Cordeliers de Vannes. Mais ceux-ci, ne voulant pas se laisser étrangler
sans crier, protestèrent comme leurs confrères de Rennes, et adressèrent au
Parlement la supplique suivante.
« A
Messeigneurs de Parlement supplient humblement les humbles et dévots gardien et
religieux de Saint-François de Vennes, contre les PP. Récollets dudit Ordre ;
Disans...
que les Récollets, sur une simple requeste, sans ouir les supplians, ont fait
enjoindre aux magistrats de les installer ici, par un arrest obtenu par une
grande surprise faite à la religion de la Cour ; à l’exécution duquel
arrest l’alloué de Venues voulant procéder, les supplians se sont opposés,
estimant que la Cour aura agréable de les ouir... avant de les condamner,
... et qu’il est tout à fait injuste que sans aucune cause ils soient chassés
de leur maison, de laquelle ils sont profeix, et en laquelle ils ont vécu avec
toute sorte de bons exemples.
Ce
considéré, Nosseigneurs, qu’il vous plaise voir : ledit arrest rendu sur
requeste le 22 septembre 1643, et signification d’icelluy ; deux procès-verbaux
faits par l’alloué de Vennes des 28 et 29 septembre ; délibération de la
communauté de Vennes du 5 septembre audit an ; attestation de Monsieur l'Evesque
dudit lieu de la vie et observation de la règle des suppliants ; requeste présentée
à la Cour le 4 septembre 1643, contenant l’opposition des suppliants aux
attentats et innovations desdits Récollets ; acte de l’institution du P. Le
Roy, l’un des suppliants, en la charge de Gardien et Supérieur dudit monastère
de Vennes, du 25 septembre 1643 ;
Et en
conséquence recevoir les suppliants opposants à l’exécution dudit arrest,
et appelants comme d’abus de l’assignat de la dite maison de Vennes aux Récollets,
et de l’institution du P. Aubineau (comme supérieur par l'Evêque de Rennes)
; et ordonner que le dit Aubineau et autres Récollets joincts avecq luy seront
assignés pour procéder sur la dite opposition et appel ; et ce pendant leur
faire expresses inhibitions et deffenses d’empescher les dits gardiens et
religieux suppliants, ny les troubler dans la dite maison de Vennes, par offre
que font les suppliants de déduire plus amplement leurs moyens d’abus et
opposition ; mesme recevoir la présente requeste, en tant que besoin, pour
requeste civile à l’encontre du dit arrest, et tenir tant leur dite requeste
civile que appel pour scellés, veu la pauvreté notoire des suppliants, qui
seront obligés de prier Dieu pour vos prospérités. Signé : Fr. Le Roy,
gardien, etc... ».
Le
Parlement, touché peut-être de ces raisons, et témoin de la tenace opposition
des Cordeliers de Rennes, semble avoir laissé en paix ceux de Vannes. Toujours
est-il que les Récollets durent céder, et laisser aux Cordeliers les deux
maisons de Vannes et de Bodelio.
ENCLOS
Au
sud-ouest de l’enclos des Cordeliers, et derrière le manoir de Ker, se
trouvait un bastion ou éperon, qui depuis la Ligue faisait partie des
fortifications de la ville, et qu’on appelait tantôt le bastion de Ker, tantôt
le bastion de Brozillay.
Pierre de
Lannion, gouverneur de Vannes après René d'Aradon, son beau-père, avait
permis aux religieux d’y conduire leurs malades, pour leur faire respirer
l’air.
Claude de
Lannion, marchant sur les traces de son père et de son aïeul, confirma aux
Cordeliers, par acte formel du 15 mai 1666, la jouissance de ce bastion, «
afin que les malades de leur maison, fort renfermée dans un bas lieu de la
ville, se puissent soulager, prenant l’air sur les dites murailles et esperon
; estant trop notoire que souvent il se trouve desdits religieux incommodés et
affligés de maladie, tant par le travail au saint service à l’église,
que pour les assistances continuelles qu’ils rendent au peuple dans ladite
ville et, faubourgs de Vannes, tant de jour que de nuit, lorsqu’ils sont appelés
et ont connoissance des affligés de maladie ; — nous réservant, ajoute-t-il,
l’entrée audit lieu au temps requis pour le service de Sa Majesté.... à
condition qu’ils entretiendront ledit esperon et les murailles jusqu’à la
tour des Filles (ou de Saint-François) de la manière qu’il se trouvent présentement,
qui est en bonne et due réparation ».
Ce
bastion figure désormais dans divers actes de la maison. Citons d’abord un
aveu du 24 avril 1677, qui fournit le dénombrement qui suit :
1° «
Une maison et couvent prochent les murailles de la ville, donnant d’un bout à
maison et jardin de M. de Locmaria, conseiller en la Cour, avec un petit jardin
au derrière, joignant la muraille de la ville, et un jardin au devant dudit
couvent, joignant à l’ancienne muraille de la ville de Vannes, aux maisons et
jardins du seigneur de Sérent, président du d. Vennes, et à dame Nicole
Cillart, daine de Coettec, de l’autre costé à l’églize dudit couvent ;
2° «
Les anciens logements et cloistre au proche de la d. églize, et le passage et
sortie dudit couvent par une grande porte au proche de la muraille de la ville ;
le sémitière au proche de la d. églize et entrée d’icelle ; les portes et
entrée audit symitière donnant de la rue Saint-François ;
3° «
Un jardin au proche dudit symitière (et au midi de l’église), joignant vers
le levant à maison appartenante à dame Jacquette Morice, dame du Boterff,
autrefois au seigneur président Morin, et de l’autre costé aux murailles de
la ville, contenant ledit jardin douze cordes.
4° «
Le droit de disposer du bastion estant sur la muraille au boult du dernier
jardin : lequel bastion est derrière la maison de Messire Julien Gibon,
seigneur du Grisso, par concession des seigneurs gouverneurs de Vennes, sans
desroger aux droits du Roy ni de la ville.
Signé
: Fr. Louis-Damien de Luigné, gardien. — Fr. Boulau, vicaire. — Fr. B.
Anger. — Fr. Louis Bihan. — Fr. Antoine Bellanger. — Fr. C. Mariau. — F.
J. Dumersant. Fr. S. Ricordel. — Fr. P. Géreau, procureur ».
Les
commissaires, députés pour la réformation du domaine du Roi en Bretagne,
admirent cet aveu, sauf l’article concernant le bastion de Ker, dont ils
prononcèrent, en 1683, la réunion au domaine royal. Mais Louis XIV, à la prière
des religieux, leur en rendit la jouissance, par lettres patentes du mois d’août
1687.
Dans un
autre aveu du 28 janvier 1690, les religieux « déclarent qu’il leur
appartient leur couvent, qui est de fondation ducalle, basti par le duc Jean I
l’an 1260, qui consiste en l’église et cloistres, deux pauvres dortoires,
dont un est abandonné, parceque les religieux y devenoient perclus et accablés
de maladies mortelles, l’autre en forme de pavillon menaçant ruine, où ils
habitent présentement, .. n’ayant dans leur enclos qu’un petit jardin au
devant, et cinq ou six sillons au derrière, .. plus un petit jardin, autrement
cimetière, vis-à-vis leur église.. ».
A cette
époque, Gabriel Santon, chirurgien, occupait la maison située au sud du
portail d’entrée de Saint-François. Dès 1681 il s’était arrangé avec
les religieux pour exhausser sa demeure d'un étage, et il leur avait permis
d’appuyer leur portail au pignon de sa maison.
CONFRERIES
Trois
confréries avaient leur siège dans la chapelle des Cordeliers : celle des
Tailleurs, celle des Merciers et celle de Sainte-Reine.
Le 4 mai
1592, les Tailleurs de la ville de Vannes formèrent entre eux une confrérie,
sous « le nom de Monsieur saint Jean, pour être servie à l’autel de
Madame sainte Anne, près la porte et entrée de la vieille chapelle de Ker ou
de Malestroit ». Ils y fondèrent deux messes basses par semaine, l’une
le dimanche et l’autre le mercredi, avec distribution de pain bénit ; de
plus, deux messes chantées aux fêtes de saint Jean-Baptiste et de saint Jean l'Evangéliste,
et vêpres la veille ; le tout pour une rétribution annuelle de 30 livres.
Pour
subvenir aux frais de la fondation et fournir les ornements nécessaires, chaque
tailleur payait par an douze sous, et chaque lingère six sous.
En 1687,
la confrérie étant prospère, les tailleurs ajoutèrent à leur fondation un
service pour leurs défunts, le lendemain des fêtes de saint Jean-Baptiste et
de saint Jean l'Evangéliste, et obtinrent des religieux la permission de tenir
leurs réunions dans le chapitre du couvent, et de placer une armoire dans la
chapelle pour y déposer leurs ornements. Ils promirent aussi d’assister
chacun, avec un cierge à la main, à la procession de l’octave du sacre en
l’église de Saint-François, et portèrent la rétribution annuelle de 30 à
60 livres.
Un siècle
après, la confrérie, voyant ses ressources diminuer, demanda, par une délibération
du 6 août 1773, la suppression des deux messes basses du dimanche et du
mercredi, le maintien des messes chantées et des services, et la réduction des
honoraires à 30 livres par an. Les religieux acceptèrent cette réduction, et
l'Evêque la sanctionna le 29 avril 1774.
2. «
Les marchands Merciers de Vannes, dès l’an 1591, avaient fondé une messe
basse au lundy de chaque semaine, et une haute à chaque feste solennelle de la
Vierge, pour laquelle fondation ils avoint assuré de payer 50 sols de chaque
grande messe et 5 sols de chaque basse messe, fournissant d’ornements et de
luminaire, à estre dittes sur les 8 heures, à l’autel de Nostre Dame de
Vray-Secours, dans le cloistre, avec le droit de recueillir avec la tasse les
offrandes des assistants, sans prétendre à celles qui seroint mises sur
l’autel, sur la table des reliques, ou dans les troncs.
« En
1615, ils érigèrent une confrérie soubs l’invocation de Nostre Dame de
Vray-Secours, à estre desservie à l’autel de Saint-Eutrope dans la nef, où
ils transportèrent l’image de Nostre Dame de Vray-Secours, qui estoit au
cloistre ; et en augmentation de la première fondation, ils promirent 50 sols
pour un service après la mort d’un chacun des confrères.
« Le
24 mai 1620, ayant fait la somme de 180 livres, ils la remboursèrent aux
religieux, pour se libérer de la rente de 13 livres pour les messes basses, et
de l’obligation de fournir les ornements » (Registre, p. 39).
3. La
troisième confrérie ne regardait pas une corporation particulière ; elle était
ouverte à tout le monde, hommes et femmes, et était placée sous le patronage
de sainte Reine, vierge et martyre. Elle avait pour but, comme la plupart des
confréries modernes, la sanctification de ses membres par la pratique des
oeuvres de piété. Sur la demande des religieux, le souverain pontife Innocent
XI, par un bref du 30 janvier 1685, accorda aux membres de cette confrérie une
indulgence plénière au jour de leur entrée, une autre au jour de leur mort,
et une troisième au jour de sainte Reine (7 septembre), aux conditions
ordinaires ; il y ajouta plusieurs indulgences partielles pour différentes
oeuvres de piété.
L’évêque
de Vannes agréa ce bref le 19 février 1686, et permit d’exposer le
Saint-Sacrement aux jours de fête de la dite confrérie.
DOUVES
Depuis
quelques années, les commissaires nommés pour l’aliénation des domaines du
roi avaient afféagé la majeure partie des douves de la ville de Vannes. Les
Cordeliers résolurent d'acquérir la partie voisine de leur enclos, et à cet
effet ils traitèrent avec un adjudicataire qui l’avait obtenue dans son lot.
Voici l’acte qui en fut dressé.
Le 29°
jour d’octobre 1697, avant midy, par devant nous notaires... ont comparu en
personne Louis Duveau, marchand, et Marie Marivaut, sa femme, demeurant près la
porte de la Poterne, paroisse de Saint-Patern, d’une part, et le R. P.
Jacques Drouallain, religieux gardien du couvent de Saint-François, paroisse de
Sainte-Croix, d’autre part ;
«
Disant les dits Duveau et femme qu’ils ont acquis de Sa Majesté les fossés
de cette ville, à prendre depuis la tour des Filles, qui est joignant le dit
couvent de Saint-François, jusques et advis la maison de Bonnard (vers le
port), à la charge de payer 5 sols monnoie de rente par chacun an au domaine de
Sa Majesté ; et en vertu de l’acte et adjudication qui leur en a esté faite,
les dits Duveau et femme ont cédé et transporté, et par ces présentes cèdent
et transportent au dit R. P. Gardien , pour lui et les autres religieux du dit
couvent, les dits fossés, à commencer depuis et compris la tour des Filles
jusqu’au bastion appartenant aux dits religieux vis-à-vis la pointe où il y
a quatre créneaux ; pour la quelle portion séparer, sera fait un fossé de
cinq pieds de largeur, et chacun plantera de son costé comme bon lui semblera,
et les eaux auront leur cours ordinaire, et les d. Duveau et femme seront tenus
de les porter et souffrir.
Et a
esté le dit transport fait et accordé entre parties, à la charge aux dits
religieux de payer au domaine de Sa Majesté la moitié de la dite rente de cinq
sols monnoie par an, au terme limité par le d. contract d’acquisition, et la
moitié des devoirs d’entrée, et la moitié de tous les frais pour parvenir
à la dite acquisition, et ceux qu’il conviendra faire pour le dit contract et
enregistrement, dont les dits Duveau et femme fourniront mémoire, dès qu’ils
auront été saizis de leur contract ; et présentement devant nous le dit R. P.
Gardien a payé aux dits Duveau et femme la somme de 25 livres, sçavoir, 15
livres pour les voyages que le dit Duveau a faits en la ville de Rennes, au
sujet de la dite acquisition, et 10 livres de baise-mains...
Fait
et passé au dit Vennes, en l’étude de Jarno, notaire royal, sous les signes
du dit R. P. Gardien, du dit Duveau et les nostres ».
Dès le 5
novembre de cette année les Cordeliers affermèrent leur part des douves de la
ville à Jean Baudrier, jardinier, à la charge de planter une haie d’épines
le long du pavé, de planter 108 arbres fruitiers, de faire un fossé mitoyen prés
du bastion, et de payer 40 livres par an à la fête de Noël.
De leur côté,
les religieux se trouvaient posséder sur la Garenne un petit jardin, qui leur
était arrivé on ne sait ni quand ni comment, mais qui représentait
probablement une fondation. Voulant sans doute s’épargner le souci de le
louer et de le relouer à chaque terme, ils l’afféagèrent par acte du 11 décembre
1697, à René Guéhart et à sa femme à la condition d’une rente de 8 livres
par an.
Ils
avaient aussi un petit pré à Poulho, provenant d’une fondation de Pierre
Thomas, greffier.
FONDATIONS
En
finissant la revue du XVIIème siècle, il ne sera peut-être pas inutile d’énumérer
les fondations faites à cette époque, parce qu’on y peut trouver des noms
intéressants.
Le 17
juin 1602, Thomas Marquet et sa femme donnèrent 380 livres pour fonder une
messe tous les mardis et quatre services.
Le 13 août
1602, Jean Cavat donna 66 liv. pour avoir un service à trois messes chantées
et une seconde tombe.
Le 14
juillet 1603, le même Cavat versa 150 liv. pour une messe quotidienne en carême
et un service à l’Ascension.
Le 20
novembre 1606, Pierre Moutet légua 240 liv. pour avoir trois grand’messes les
24 et 29 juin et 27 décembre.
Le 5
septembre 1607, Jean Gâtechair donna 800 liv. pour sa sépulture et un service
solennel tons les lundis.
Le 5
janvier 1607, Marie Guymarho de Keravéon donna 300 liv. pour doter une
fondation faite par elle.
Le 19 août
1608, Jean Morel, sacriste de Saint-Pierre, donna 1,000 liv. pour avoir sa
pension, et après sa mort un service par semaine.
Le 26
janvier 1612, Julien d'Aboville et sa femme donnèrent 4 perrées de seigle par
an, pour des messes et des services.
Le 4 juin
1612, Sébastien Nicolazo, scolastique, donna 600 liv. pour une messe tous les
lundis à la chapelle des Lices.
Le 3
juillet 1612. Jean Gainche et sa femme donnèrent 240 liv. pour une messe tous
les samedis à la même chapelle.
Le 31
juillet 1612, Guillaume Farault donna une rente de 12 liv. pour une messe tous
les lundis et des prières.
Le 5 février
1613, Yves Le Floch, seigneur de Luzunan, donna 200 liv. pour une messe tous les
mardis à la chapelle des Lices.
Le 25
juin 1614, Sébastien Nicolazo, scolastique, donna 300 liv. pour une messe tous
les dimanches à la même chapelle.
Le 14 mai
1614, Olivier Jégo donna 210 liv. pour fonder une messe tous les vendredis à
la même chapelle.
Le 5 juin
1617, Olivier Nizan et sa femme donnèrent une rente de 6 livres pour un service
et trois grand’messes.
Le 22
juin 1618, Jean Morel donna 100 liv. pour avoir sa sépulture et un service
anniversaire.
Le 2 février
1619, Christophe Laurent et sa femme donnèrent une rente de 37 livres 10 sous
pour un service par semaine.
Le 14
mars 1619, Jean Le Métayer légua une rente de 20 liv. pour une messe tous les
dimanches à Saint-Pierre.
Le 27
juillet 1621, Michelle de Larlan, de Kermadec, donna 240 liv. pour fondation non
expliquée.
Le 7 août
1622, Jean Morel, prêtre, donna 100 livres pour avoir six services par an, à
jours déterminés.
Le 30
septembre 1625, Guillaume Le Mur, notaire, donna une rente de 3 liv. pour un
service fixé au 4 octobre.
Le 3
octobre 1625, Yves Le Floch et sa femme donnèrent 75 liv. pour fonder un
service à trois grand’messes.
Le 1er août
1626, Jeanne Le Guédois, veuve, donna une rente de 42 liv. pour deux services
anniversaires.
Le 9
septembre 1626, Jeanne de Maigné du Prat donna 600 livres pour deux messes par
semaine et trois services par an.
Le
17 janvier 1627, Bertrand Guymarho, chanoine, donna 240 liv. pour une messe tous
les jeudis à la chapelle des Lices.
Le 28
janvier 1628, Jeanne Bouessel, veuve, donna 400 liv. pour deux messes par
semaine et trois services par an.
Le 7 février
1628, Guillaume Billy donna une rente de 16 liv. 10 pour doter les messes chantées
des Merciers.
Le 17
juillet 1641, Béatrix Laurent donna 300 liv. pour fonder treize services
solennels, dont un à Saint-Patern.
Le 14 mai
1632, Jeanne Grandvalet, veuve, donna 300 liv. pour avoir quatorze services par
an à jours déterminés.
Le 25
juin 1632, Anne Davy, veuve, donna une rente de 26 liv. pour une messe le samedi
et quatre services par an.
Le 30
juin 1632, Guillaume Le Gal et consorts donnèrent une rente de 4 liv. pour
avoir un service le 14 août.
Le 3
janvier 1633, Jean Le Mézec légua une rente de 24 liv. pour avoir deux messes
de Requiem par semaine.
Le 4 février
1634, Jean Riguidel légua une perrée de seigle par an pour deux services
solennels pendant vingt ans.
Le 19
juin 1636, Jeanne Mahé, veuve, légua 18 livres de rente pour avoir un service
au jour de saint Antoine de Padoue.
Le 6
septembre 1638, Jean Bigaré, sieur de la Landelle, donna 360 liv. pour fonder
une messe basse tous les mercredis à la chapelle des Lices.
Le 18 mai
1640, Guillaume Yver légua une rente de 18 liv. pour fonder une messe basse
tous les lundis.
Le 20
avril 1657, Jeanne de Livillion, veuve, légua 300 liv. pour une messe
tous les vendredis et un service par an.
Le 5
octobre 1657, Perrine Coudé, veuve, donna 90 liv. pour avoir un anniversaire de
trois messes au 20 octobre.
Le 29
mars 1660, Bertrand Sérac donna 400 livres pour fonder une messe basse tous les
jeudis de l’année.
Le 15
juin 1661, Yvorée Le Net, veuve Vaillant, donna un plat d’argent pour avoir
trois messes par an et des prières.
Le 25
juillet 1661, Jeanne Gargan légua 180 livres pour avoir huit messes basses par
an et un service.
Le 12
avril 1662, Jeanne Olivier, veuve Goudelin, légua 300 liv. pour fonder quatre
services à trois messes chacun.
Le 14 août
1665, Jeanne Le Mézec de Kergonano légua 120 liv. pour avoir un service à
trois grand’messes.
Le 20
septembre 1665, Françoise Lechet de Redevant donna 100 liv. de rente pour deux
messes par semaine et deux services par an.
Le 19
novembre 1668, Claude Le Sep, veuve, donna 18 liv. de rente pour fonder le
double de Saint-Louis, avec exposition.
Le 31 décembre
1668, Renée Gaveau, veuve, donna 40 liv. de rente pour douze messes, avec
exposition et procession, et un service.
Le 3
janvier 1670, Françoise Aubert donna 75 liv. de rente pour une grand’messe
tous les lundis avec prières.
Le 12
juillet 1670, Jacquette Le Crossec donna 500 liv. de capital pour avoir
vingt-quatre messes basses par an et un service.
Le 17
octobre 1670, Anne Hamelin donna une rente de 76 liv. pour douze grand’messes
avec exposition.
Le 8
avril 1672, Françoise de Gaincru de la Cotardaye laissa 500 liv. pour une messe
par semaine et un service par an.
Le 31 mai
1675, Charles Guillo et F. Aubert donnèrent une rente de 6 liv. 5 sous pour
fonder deux services.
Le 19
juillet 1675, Françoise Texier donna une rente de 15 sous pour une messe
annuelle le 4 octobre.
Le 5 février
1680, Robert de la Lande et sa mère donnèrent 10 liv. de rente pour avoir
douze messes et un service.
En 1681,
replacement de 300 liv. jadis léguées par Yvonne Le Métayer, dame de Paillado,
pour des messes.
Le 30 mai
16.. , Jeanne de Quélen de Kerbervet donna 300 liv. pour avoir deux messes
basses par semaine.
En 1... ,
Pierre Thomas, greffier, donna une prairie près du Poulho, pour avoir une messe
par semaine et deux tombes.
Le 8 décembre
1685, Antoine Sauvageau légua une rente de 3 liv, pour une messe au 13 juin.
Le 4 mars
1687, la confrérie des Tailleurs constitua une rente de 63 liv. pour les deux fêtes
de saint Jean et deux messes par semaine.
Le 25
mars 1688, Marie Robert donna 400 liv. pour fonder des prières et une octave de
saluts à l’Assomption.
Le 15
juillet 1680, M. du Vieux-Châtel donna 120 liv. pour avoir douze messes par an
à jours fixes.
Le 8
juillet 1690, Jeanne Sancier, veuve, légua 936 liv. pour avoir deux messes
basses par semaine.
Le 30
octobre 1693, Françoise Cosson donna une rente de 22 liv. 4, 5, pour des prières
et une octave de saluts à la Conception.
Le 23
novembre 1696, Louise Rello donna pareille rente pour des prières et une octave
de saluts à la Présentation.
Le 17 février
1705, Jean Boulanger donna une rente de 10 liv. pour avoir vingt messes basses
par an.
Le 24
avril 1715, Jeanne Phélippot donna une rente de 24 livres pour une octave de
saluts.
Le 1er
mai 1719, M. Laurent, sieur de Kercadio, donna une rente de 20 livres pour la fête
du 1er mai et un service le lendemain.
Le 27 février
1740, Michelle Kerrio donna une rente de 18 livres pour expositions, prières et
un service.
Le 15
juillet 1745, Guillemette Comtesse de Courcy donna 620 livres pour sa sépulture
et une messe tous les mardis.
Le nombre
des religieux augmentait en proportion des fondations. En 1680, on y comptait 30
frères.
SEPULTURES
A la
suite des fondations se placent naturellement les sépultures, qui en étaient
souvent l’accompagnement.
Voici la
liste des principaux personnages enterrés chez les Cordeliers, à partir de
1646 ; elle est extraite en majeure partie des registres de la paroisse de
Saint-Pierre ; elle renferme beaucoup de noms de familles de Vannes et des
environs.
Jean Aubin, de Botcoarh, fils de Pierre, inhumé le 7 février 1646.
Jean de
Montigny, ex-gouverneur de Sucinio, le 17 février 1647.
Françoise
Rolland, de Kerménezy, inhumée le 14 mai 1648.
Anne de
Trévegat, fille de François, seigneur de Limoges, le 15 mars 1649.
Anne de Sérent,
fille de Pierre, président du présidial, le 16 décembre 1649.
Pierre de
Coetlogon, fils de Sébastien, sr de Kerface, le 18 février 1650.
Perrine
Le Goff, veuve Le Prat, de Kerbilué, le 16 juin 1650.
Françoise
de Gaincru de la Cotardaye, inhumée le 9 septembre 1651.
René de
Sérent, sieur de Toulmain, inhumé le 18 janvier 1652.
Jean du
Tressay, sieur de l’Isle, inhumé le 5 mars 1652.
Jean de
la Couldraye, sieur de Kerguenan, le 24 mai 1652.
Barthélemy
de Villiers, d’Auray, inhumé le 16 février 1653.
Mathieu
de Lantivy, sieur de la Guittonnière, le 23 mai 1654.
Julien
Cillart, sieur de Kerampoul, sénéchal, le 27 janvier 1655.
François
Botherel, sieur du Vertin, conseiller, le 21 janvier 1656.
Anne
Crose, de la Bouexière, inhumée le 8 juin 1657.
Guillaume
Lechet, sieur de Saint-Ducas, le 5 octobre 1658.
Pierre
Aubin, sieur de la Roche-Laudo, le 16 novembre 1658.
Jean du
Bot, sieur de Sulé, en Surzur, le 19 novembre 1660.
Gabriel
Authueil, sieur de Kerfraval, procureur, le 25 mai 1661.
Jacques
Le Thieis, sieur de Keravelo, procureur, le 14 août 1662.
Jean
Thomazo, sieur de la Noë, inhumé le 25 mars 1663.
Jean
Aubin, sieur de Bernus, inhumé le 18 avril 1663.
Jean Le
Vacher, sieur de Lohac, inhumé le 17 juillet 1664.
François
de Trédazo, sieur de Kerisouet, le 10 janvier 1666.
François
Sesbouez, sieur du Petit-Bois, avocat, le 2 octobre 1667.
Renée de
Sécillon, dame du Defay, le 11 février 1668.
Yves
Guymar, sieur de Saint-Doué, inhumé le 9 octobre 1669.
Jeanne de
la Couldraye, dame du Plessis-Guillemot, 5 juillet &670.
Jean Le
Quinyo, sieur de la Porte, alloué, le 21 juillet 1671.
Charles
de Sérent, sieur de Brambec, inhumé le 16 avril 1672.
Jean de
la Couldraye, sieur de Keranlou, conseiller, 7 septembre 1672.
Sébastien
Jocet, sieur de Kervillart et de Keralvi, 13 janvier 1674.
Guillaume
Chedanne, sieur de Kermelin, le 4 juillet 1675.
François
Michel, sieur du Defay, inhumé le 16 mai 1676.
Pierre
Bigaré, sieur de la Landelle, ex-conseiller, 16 septembre 1676.
Jean d'Estimbrieuc,
sieur de Valemé, avocat, 18 octobre 1676.
Julien
Blesvin, seigneur de Penhoet, inhumé le 22 janvier 1677.
Jean de
la Haye, seigneur de la Haye, en Larré, le 10 décembre 1677.
Paul de
Trédazo, sieur de Kerisouet, inhumé le 7 février 1678.
Charles
de Kernesne, marquis de la Roche, le 26 janvier 1679.
Guillaume
Touzé, sieur de Kereven, conseiller, le 20 octobre 1683.
André
Huchet de la Bédoyère, procureur général, le 20 novembre 1688.
Yolande
de la Marche, dame de Saint-Pern du Lattay, 29 avril 1689.
Pierre
Laurent, sieur de Kercadio, syndic, le 29 mai 1693.
Thérèse
Bigaré, veuve de Philippe Guydo, le 2 avril 1695.
Julienne
du Fossé, veuve de Jean Coudé, le 24 février 1697.
François
Cillart, sieur de Kerampoul, sénéchal de Rhuys, 29 mars 1697.
Jacques
Touzé, sieur du Guernic, inhumé le 1er mai 1700.
Jean de
la Roche, sieur de Kerdavy, le 18 août 1701.
Vincent
de la Roche de Kerdavy, le 20 août 1703.
Jean-Baptiste
de Kermarquer, prêtre, le 29 mai 1706.
Laurent
de Lannion, baron de Camors, le 9 janvier 1708.
Jehan
M. Chanu, sieur de Kerhédein, conseiller, le 20 février 1709.
Marie de
la Couldraye, dame du Chesne-Oran, le 18 décembre 1710.
Anne de
Kervasic, dame du Clérigo, inhumée le 30 décembre 1711.
Pierre Le
Vacher, sieur de Lohac, en Baden, le 9 décembre 1712.
Jean Touzé,
sieur du Guernic, âgé de 30 ans, le 6 mars 1715.
Joseph Botherel de Quintin, sieur de Saint-Denac, le 14 janvier 1716.
Marie-Thérèse
Boutouillic, dame de Sourville, le 13 octobre 1717.
Nicole
Hello, femme d'Octavien Nouvel de Glavignac, 24 mars 1719.
Vincente-Thérèse
Touzé, dame du Plessis de Grénédan, 21 novembre 1720.
Jean
Laurens, sieur de Kercadio, receveur des fouages, 2 septembre 1721.
Jeanne-Eléonore
de Trémeureuc, de Kergomard, le 16 septembre 1723.
Marie
Suard, veuve de Pierre Le Vacher, 82 ans, le 6 avril 1724.
Julienne
Charlotte Bouexic, épouse Gatechair, le 24 mai 1727.
Marguerite
Le Faure, femme Guymar d’Auzon, 4 mai 1728.
Guillaume
Guitton, sieur de Sourville, 86 ans, le 20 novembre 1730.
Jean Touzé,
sieur du Guernic, conseiller, 83 ans, 29 octobre 1731.
Anne
Aubin, dame Coué de Brionel, inhumée, le 19 mars 1733.
François
Boutouiliic, sieur de la Porte, conseiller, le 11 janvier 1736.
Mathurin
Morin, sieur de la Guérinière, procureur, le 23 août 1737.
Vincent
Touzé, sieur de Kernouel, inhumé le 12 juin 1739.
Marc-René
Huchet, seigneur de la Benneraye, le 29 avril 1742.
Hilarion
de Cléguenec, seigneur de Lantillac, le 13 décembre 1742.
Pierre Le
Thieis, sieur de Kermouel, de Keraudren, le 18 septembre 1743.
Georges
de Servaude, seigneur de Villecerf, le 17 février 1748.
Marie-Françoise
Descartes, dame de la Benneraye, le 7 décembre 1748.
Marie-Anne
Thérèse Poitevin Chanu de Kerhédein, le 7 novembre 1749.
Louise
Hervouet, veuve de Jerôme Gibon de Coetec, le 21 février 1751.
Hyacinthe-Thomas
du Breil de la Caunelaye, le 4 mai 1752.
Perrine-Louise
de la Roche de Kerdavy, le 17 décembre 1755.
Félix du
Breil de la Monneraye, capitaine de vaisseau, 7 février 1760.
Charles-Louis
Chanu de Kerhédein, inhumé en 1777.
PAVILLON
La maison
commencée en 1637 joignait à l’ouest les anciens bâtiments. On en avait
conservé un pavillon, ayant 35 pieds de face, formant saillie vers le midi et
retrait vers le nord : renfermait l’unique escalier desservant toute la maison
; de là partait une galerie conduisant à la sacristie, à l’église et au
cloître.
Or ce
vieux débris de l’ancien couvent menaçait ruine. L’architecte Delourme,
appelé à l’examiner en 1702, constata que les murs étaient lézardés et
surplombaient énormément, surtout au midi et au couchant, et que le tout était
à refaire et à mettre dans l’alignement du principal corps de logis. Faute
de ressources, on se contenta d’étayer les murs. En 1706, nouvel examen de
l’architecte, et communication de son avis au Père provincial.
Ce
n’est qu’en 1732, le 22 avril, que les religieux passèrent un marché avec
le sieur Bousseau pour la reconstruction partielle dudit pavillon. « Le mur,
y est-il dit, sera démoli du côté de la galerie qui conduit à l’église,
depuis le coin jusqu’à la porte qui est sous la galerie : ce qui peut
contenir environ 18 pieds de largeur sur environ 45 pieds de hauteur... Le mur
aura 3 pieds et demi dans les fonds, et 3 pieds au rez-de-chaussée, pour être
réduit à 2 pieds et demi, et puis à 22 pouces d’épaisseur. Tous les
jambages des croisées, qui sont crevés ou cassés, sont rétablis : de pierres
de grain et de tufeau, aussi bien que les plates-bandes ; et il sera mis des
palatres en dedans, au lieu d’arrière-voussures : le tout bâti à chaux et
mortier de terre...
«
Moi, Joseph Bousseau, entrepreneur, m’oblige à démolir ledit pavillon et à
le reconstruire à mes frais, comme il est porté par le devis, à fournir toute
la pierre de taille ou tufeau, pour les portes et fenêtres, dont les jambages,
appuis et couvertures seront de moellon piqué ; comme aussi de fournir tous les
bois nécessaires pour les palatres, les étais et la croupe, les religieux ne
s’obligeant à fournir que deux poultres, d’environ 20 pieds de longueur ;
en outre, de fournir tout ce qui sera nécessaire pour rétablir la couverture,
d’enduire les murs de chaux, de fournir toute la terre nécessaire, le sable
et 50 charretées de pierres de massonnage, les religieux s’obligeant à
fournir le surplus...
«
Pour tout quoy, nous religieux nous obligeons de payer audit Bousseau,
entrepreneur, la somme de 1,250 livres, payable en deux termes, sçavoir 600
livres au premier jour d’aouct, et 650 livres au premier novembre prochain.
Fait à Vannes, ce 22 avril 1732.
Signé
: Fr. G. H. Audouyn, gardien. — Fr. L. R. Le Mée, vicaire. — Fr. Le Gennec.
— Fr. Cl. H. Denis. — Bousseau ».
Le
27 mai suivant, on ajouta 150 livres au marché, pour des réparations supplémentaires
: ce qui porta la dépense à 1400 livres. Le travail fut exécuté dans le
courant de cette année. Mais l’expérience fit voir qu’on avait eu tort de
mêler le neuf au vieux. Après les pluies d’hiver, à la fin de février
1733, les vieux murs s’écroulèrent avec l’escalier en pierre et endommagèrent
gravement les murs neufs. L’architecte Desplaces-Le Mière, appelé à
rechercher la cause de l’effondrement, constata que l’on avait eu tort de
conserver les parties anciennes et que l’entrepreneur était à l’abri de
toute revendication.
C’était
une perte sèche de 1,400 livres, et il fallait tout refaire. Cette fois, on résolut
de faire rentrer le pavillon dans l’alignement de la maison. Le 15 octobre
1734 fut signé le marché pour la reconstruction totale du pavillon.
«
Devis du pavillon neuf que les RR. PP. Cordeliers ont dessein de faire au lieu
et place de celui qui s’est écroulé.
«
Le pavillon sera démoli en entier, et rebâti conformément au plan cy attaché,
et de la même construction que celui qui est au levant de la maison, et qui
sera d’alignement au réfectoire.
«
Il consistera en bas dans un grand bûcher en cave ; une infirmerie au-dessus
dudit bûcher et de plein-pied avec le réfectoire ; au-dessus de
l’infirmerie, au premier étage, une grande chambre, et au-dessus de la précédente,
au second, une autre chambre...
«
La charpente sera de la même construction que celle du pavillon qui est au
levant, et de la même hauteur, pour qu’ils soient conformes...
«
Il y aura un entablement de tufeau tout autour, comme il y a au pavillon du côté
du levant, et une lucarne sur chaque croisée. Il sera fait entrer dans la
massonne et dans le crépissage de dehors et enduit de dedans 60 barriques de
bonne chaux.
«
L’entrepreneur sera aussi tenu de faire tous les barrasseaux et terrasses,
ainsi que la couverture. Il sera fait aussi une petite galerie de six pieds de
largeur, au bout du premier dortoir, qui ira jusqu’au mur de la ville, pour
faire des commodités... ».
Le
sieur Bousseau accepta le devis... « Et ne peut l’entrepreneur le faire à
moins de 4,400 livres, et ne peut le parfaire que dans un an, à commencer de ce
jour. Les conditions des termes pour les payements seront : moitié en commençant,
un quart lorsque la charpente sera en place, et l’autre quart à la fin de
l’ouvrage et le renable rendu. A Vannes, ce 15 octobre 1734. Signé : L. B. Le
Mée, gardien. — Fr. G. H. Audouyn. — Fr. P. N. de la Croix. — Fr. G. de
Trolong. — Fr. Jh. Robiou. — Fr. J. Le Poder. — Bousseau ».
Cette
fois le pavillon fut solidement construit.
ALIENATIONS
Au mois
de mai 1748, Denis Rio, marchand à Vannes, avait obtenu, moyennant les frais
d’actes et une rente annuelle de trois livres au domaine, l’afféagement
d’une portion des douves près de la porte Saint-Salomon, et le droit
d’appuyer le pignon de sa maison sur le mur de la ville, sur une longueur de
40 pieds.
Les
religieux, qui avaient la faculté de se promener sur le mur de la ville,
voulurent s’opposer à cette prise de possession. Ils s’adressèrent au
Conseil du Roi, mais ils ne purent obtenir la révocation de l’afféagement.
Tout ce qu’ils obtinrent ce fut d’empêcher l’acquéreur de faire des fenêtres
donnant sur leur propriété.
Qu’on
ne s’étonne pas de ce mot de propriété, appliqué à un couvent de
l’ordre de saint François. Récemment encore, un bref du pape Benoît XIV, du
23 août 1745, avait maintenu les Cordeliers des quatre grandes provinces de
France dans l’ancien usage de posséder des biens immeubles provenant des
fondations. Ce bref avait été publié par lettres d’attache du Roi et
enregistré au Parlement.
Mais le
droit de propriété comporte aussi le droit d’aliénation, et les Cordeliers
de Vannes durent y recourir, pour faire plaisir à leurs voisins. On a déjà
vu, en 1634, l’aliénation d’une bande de terrain, faite au président
Morin. Il faut descendre jusqu’en 1770, pour trouver deux autres ventes.
M.
Jean-François Quifistre, chevalier, comte de Bavalan, ayant acheté l’hôtel
du Pargo, appelé précédemment le manoir de Ker, voulut s’arrondir et avoir
le bastion situé derrière son jardin, et dont la jouissance appartenait aux
Cordeliers. A cet effet, il s’adressa au R. P. Philippe-François Appervé,
gardien du couvent, et celui-ci, autorisé par sa communauté et par le chapitre
général, passa, le 3 janvier 1776, chez M. Le Ridant, notaire, un acte par
lequel il céda à M. de Bavalan « tout droit de propriété, possession et
jouissance sur le dit bastion, à la charge de le tenir et relever du Roy, sous
son domaine de Vannes, de l’entretenir de toutes les réparations qui seront
jugées nécessaires, et de se faire maintenir et conserver, si requis est, dans
la disposition et propriété du dit bastion, et d’obtenir à ses frais toutes
lettres de confirmation ou autres nécessaires... ».
Cette
cession à titre gratuit s’explique par le fait que le bastion était ruiné,
et que les religieux ne pouvaient plus le réparer à leurs frais.
En
même temps, M. le comte du Nédo, ayant acheté l’ancienne propriété du président
Morin, où se trouve, vers la fin du XIXème siècle, l’école communale des
filles, voulut aussi se rendre acquéreur du jardin des Cordeliers, situé au
midi de leur cour, entre sa maison et le mur de la ville.
«
Le dit seigneur, voulant rebâtir sa maison, dont un pignon et une longère
garnie de plusieurs fenêtres donnaient sur le terrain des religieux, leur représenta
que ce jardin qui leur produisait annuellement un modique revenu de 36 livres de
ferme, allait les assujétir à des dépenses trop considérables pour sa
valeur, par la nécessité où ils étaient de rétablir le mur de la ville, qui
leur servait de clôture et qui était écroulé en grande partie ; que
d’ailleurs la reconstruction de sa maison obligerait, tant à cause des pignon
et longère qu’à raison des fenêtres, à un procès-verbal contradictoire,
pouvant donner lieu à des discussions bonnes à éviter.
Toutes
lesquelles considérations ayant été mûrement examinées et balancées de
part et d’autre, même par des conseils et amis communs, la vente fut
consentie, avec l’agrément réservé du chapitre provincial, à la charge au
dit seigneur du Nédo de payer aux religieux une somme de 2,000 livres, en un
seul payement, après que le contrat aura été passé devant notaires, et
d’obtenir le consentement du Roy pour la validité de ce transport ».
Cette
promesse de vente fut contrôlée à Vannes le 5 janvier 1776, puis approuvée
par les supérieurs, et enfin régulièrement rédigée par les notaires.
Quelque
temps après, les religieux permirent au seigneur du Nédo de reconstruire le
mur séparant au nord sa propriété de la cour du couvent et d’y ouvrir une
porte de communication, moyennant une indemnité de cent livres.
De
son côté, M. François-Marie de Montigny, seigneur de Kerisper, demeurant à
Vannes, en son hôtel de la rue de Saint-François, obtint de la communauté et
du chapitre provincial la cession d’un « petit terrain carré, pour y
construire une remise et un grenier au-dessus, le dit terrain joignant au levant
le pignon de la maison de Lespiney, au nord le mur de la cour et maison des
enfants Egu, au couchant et au midi donnant sur la cour des religieux ».
L’acte de vente fut passé le 14 juin 1783, moyennant le prix principal de 300
livres.
Le
sieur de Montigny, à titre purement gracieux, s’obligea de payer à la
communauté, le 14 juin de chaque année, une rente foncière et non
franchissable de 20 sous. Il fut aussi stipulé que l’acquéreur n’entrerait
dans la cour et n’en sortirait que pendant les heures où l’on avait coutume
d’en ouvrir les portes.
Six
ans après, l'Assemblée nationale confisqua tous les biens ecclésiastiques. Dès
le mois d’août 1790, le directoire du département du Morbihan choisit le
couvent des Cordeliers pour y tenir ses séances. Le jardin des Douves fut vendu
au sieur Granger le 10 juillet 1791 pour la somme de 600 livres. L’église, le
couvent et le jardin furent adjugés, le 14 avril 1793, au sieur Danet aîné,
pour le prix de 13,000 livres.
Quant aux religieux, ils étaient réduits à quatre prêtres et à deux frères. Le P. Charrier, gardien, mourut le 2 novembre 1790 ; le P. Toudoux, de Rennes, le P. Durand, de Séez, et le Fr. Chapelain, de Mendon, sortirent le 17 janvier 1791 ; le P. Le Ménager, de Blois, et le Fr. Jégo, de Vannes, restèrent encore quelques mois, et durent partir à leur tour. Ainsi finit un établissement fondé depuis 530 ans.
J.M. Le Mené
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