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LES URSULINES DE VANNES

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C’est en 1535 que sainte Angèle Mérici groupa autour d’elle un certain nombre de jeunes filles de Brescia, pour visiter les malades à domicile et instruire les ignorants des vérités de la religion. Elle les mit sous la protection de sainte Ursule, et de là vient leur nom d’Ursulines. Ces pieuses filles ne vivaient point en communauté, mais elles demeuraient dans leurs familles, comme nos tertiaires d’aujourd’hui, et faisaient seulement les voeux simples de chasteté et d’obéissance.

Quelque temps après la mort de la fondatrice (1540), un certain nombre de ses filles se réunirent en communauté, mais sans clôture, afin de continuer leurs oeuvres de miséricorde spirituelle et corporelle. Elles n’étaient plus isolées, mais associées, ou congrégées, comme on disait alors : c’était un progrès. Dès lors il fallut ajouter le voeu simple de pauvreté aux deux autres. Ce genre d’association, si avantageux aux fidèles, se répandit dans toute l'Italie, et pénétra en France en 1594.

Dans ce dernier pays, on crut utile d’établir presque partout la clôture, et de supprimer la visite des pauvres, pour ne conserver que l’instruction des jeunes filles. C’est dans ces conditions que furent érigés le couvent de Paris en 1612, celui de Bordeaux en 1618, celui de Dijon en 1619, celui de Lyon en 1620, etc... Ces monastères donnèrent rapidement naissance beaucoup d’autres, qui se rattachèrent à eux, en formant diverses congrégations. 

ORIGINE

C’est la congrégation de Bordeaux qui fonda la maison de Vannes. Voici comment les Chroniques des Ursulines racontent le fait. « Mr Michel Hépaud de Rumelin, chanoine de Tréguier, ayant obtenu les permissions nécessaires de Mgr Sébastien de Rosmadec, évêque de Vannes, et celles de la maison de ville, la Mère Louise Guays, dite de Jésus, supérieure des Ursulines de Tréguier, vint s’établir à Vannes, le 29 août 1627. Elle était accompagnée des soeurs Susanne Guays, originaire de Laval, Adelice de Plusquellec, de Tréguier, Marie Bodin, de Laval, Anne Marets et Anne Boullain. 

« Elles s’établirent près du Port, sur la terre de Kaer ; ce qui offusqua d’abord les marchands, qui craignaient pour leur commerce ; mais tout se pacifia avec le temps. La Mère Guays ayant donné ordre au logement des soeurs, et fait ouverture des classes, où accoururent une grande multitude de filles, s’en retourna au bout de cinq mois au couvent de Tréguier, et obtint de Laval une autre supérieure pour Vannes, qui fut la Mère Jeanne Rolland, dite des Séraphins ».

Celle-ci s’occupa des acquisitions nécessaires pour fonder le nouvel établissement. Dès le 26 avril 1629, elle acheta de Isabeau de Vennes, femme de Jean Cothorel, pour 5,900 livres, une maison avec un jardin et un pré derrière, donnant sur la rue du Port, aujourd’hui rue Thiers, et y fit élever une chapelle provisoire, en attendant la construction d’une chapelle définitive. Le 22 février 1630, elle acheta de Jacquette Lechet, femme Pélisson, et d'Olivier Lechet, sieur de Saint-Ducat, au prix de 6,000 livres, une maison, située rue du Pessu, avec deux jardins derrière. L’année suivante, 14 février 1631, elle acquit de François Le Gal, marchand, une autre maison, en la même rue, avec cour et puits derrière, pour la somme de 2,500 livres. Elle reçut en 1632 une petite tenue à Kervenic, comme dot d’une religieuse. Plus tard elle acheta un petit appentis en la rue Comohic, dite de l'Unité à la fin du XIXème siècle, pour la somme de 900 livres.

Ces terrains une fois acquis, la Mère Jeanne Rolland fit commencer le grand bâtiment destiné à renfermer le choeur des religieuses au rez-de-chaussée, et leurs salles et cellules au premier et au second étages. C’est aujourd’hui le vieux corps de logis, formant le côté oriental du cloître : on en payait les derniers frais en 1646 et 1647, comme le prouve un registre de comptabilité de cette époque.

Le même registre mentionne aussi plusieurs dons manuels faits aux Ursulines, dans les premiers temps de leur arrivée. Ainsi, en 1630, M. Claude Gouault, archidiacre de Vannes, donna un grand missel, et contribua aux frais d’un ostensoir en argent doré, pour exposer le Saint-Sacrement. De son côté, Mme Anne Le Roy, prieure de Locmaria, en Plumelec, donna un petit calice en argent, et M. Bertrand Guymarho, sieur de Keriargon, fit don d’une chasuble et de petits tableaux en albâtre. En 1632, M. Pierre Durancau, chanoine de la cathédrale, donna un grand tableau de la sainte Vierge entourée de fleurs. Toutes ces libéralités et d’autres encore prouvent la sympathie avec laquelle on accueillit les Ursulines, et l’espoir qu’on fondait sur elles pour l’instruction et l’éducation des jeunes filles.

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PROGRES

La supérieure Jeanne Rolland fut remplacée, vers 1641, par Susanne Guays, dite Marie des Anges, originaire de Laval, professe de Tréguier, et venue à Vannes dès 1627 pour la fondation. Celle-ci, d’un esprit doux, d’une humeur accueillante, réussit à gagner à sa communauté ceux qui lui avaient été primitivement hostiles, et grâce à leur assistance elle fit plusieurs acquêts d’immeubles, qui lui avaient été d’abord refusés.

Elle acquit, en 1644, une maison située dans la rue de Comohic ou de l'Unité, et une autre maison dans la rue de Poulho ou de Richemont, avec un grand jardin derrière. En 1645, elle acheta une maison avec un jardin derrière, le tout situé à droite en, entrant dans la chapelle : cette maison servit de logement à l’aumônier ; elle n’existe plus aujourd’hui.

La Mère Susanne Guays s’employa constamment avec zèle au bien de sa communauté. Sans avoir égard aux grandes dépenses qu’il avait déjà fallu faire pour la construction d'un grand bâtiment, elle pourvut suffisamment à tous les besoins temporels de ses filles, afin qu’étant déchargées de ces sortes de soins, elles pussent vaquer plus librement au service de Dieu et du prochain et à leur perfection spirituelle. Elle fit aussi quelques règlements de détail pour sa maison, et les fit approuver par Mgr de Rosmadec. Elle obtint également que les Pères Jésuites seraient leurs directeurs, et ils l’ont été depuis jusqu’à leur suppression en 1762.

Après avoir gouverné pendant six ans, elle retourna sous l’obéissance avec tant de plaisir, qu’elle ne voulut jamais user de la liberté qu’on lui donna d’agir à son gré, et elle se soumit à demander toutes ses permissions à la nouvelle supérieure. C’est la soeur Colombe Guymarho, dite de Sainte-Ursule, qui lui succéda en 1647. On trouve à cette époque les noms des soeurs Claire Lesfroy, dite du Saint-Sacrement, — Hélène Le Corvaisier de Pellainne, dite de Sainte-Croix, — Louise de Sécillon, dite de la Conception, — Renée Pitouays, dite de Saint-Joseph, — Ursule Commelin, dite de la Passion, —  Georgine Mancel, dite de l'Incarnation, — Yvonne Luco de Truélin, dite de la Résurrection, — Renée de Saint-Pezran, dite de Sainte-Marie, — Catherine Sorel du Bois-de-la-Salle, dite de Jésus, — Marguerite de Valleaux, dite de Saint-Augustin, — Hélène Le Lardeur, dite des Cinq-Plaies, — Madeleine de Saint-Pezran, dite de la Présentation, — Anne de la Bourdonnaye de Keroset, — Elisabeth Morin, dite de la Nativité, — Louise du Bot, dite de Sainte-Thérèse, — Marguerite Moitte, dite de Sainte-Gertrude, — Elisabeth de Trédazo, dite de Saint-Jean, etc....

Presque toutes les religieuses payaient alors à la maison une pension de 260 livres par an ; quelques familles préféraient cependant verser un capital de 4,000 livres environ, pour se libérer entièrement vis-à-vis de la communauté. Quant aux acquisitions, la Mère Colombe Guymarho, de Sainte-Ursule, paraît s’être bornée à l’acquisition, en 1648, d’un petit jardin, joignant le grand portail du jardin du couvent, sur la rue Comohic.

L’ancienne supérieure, Susanne Guays, dite Marie des Anges, avait été chargée de la Congrégation des pauvres femmes et filles, que l’on instruisait tous les dimanches dans les classes. Elle s’y portait avec tant de feu et d’amour, elle y parlait de Dieu, d’un coeur si touché, que les femmes quittaient tout pour venir l’entendre. Le lieu de la réunion pouvait contenir 500 personnes et était ordinairement rempli. Le résultat de ces assemblées fut l’instruction des ignorantes, la cessation de certains désordres, et la pratique sincère de la piété. La Mère Marie des Anges fut rappelée à Tréguier en 1655, au grand regret de ses femmes de Vannes, et envoyée en 1658 fonder une autre maison à Lannion, où elle mourut deux ans après, à l’âge de 52 ans, dont elle en avait passé 37 en religion. 

La mère Colombe Guymarho, dite de Sainte-Ursule, fut remplacée le 23 mars 1654, dans la charge de supérieure, par soeur Claire Lesfroy, dite du Saint-Sacrement. Celle-ci, née à Vannes en 1622, professe en 1638, et d’une santé délicate, fit tant de résistance à son élection, qu’il fallut l’intervention de l’évêque pour lui faire accepter la charge. Sa dévotion particulière envers la sainte Vierge lui fit placer sa statue en plusieurs endroits de la communauté.

Au point de vue matériel, elle prit part, en 1658, à l’acquisition de la prairie du Lorido, qui fut bientôt convertie en jardin, et qui forme aujourd’hui la récréation des élèves de Saint-François-Xavier. Elle acquit également, le 18 janvier 1660, d'Isaac de Rohan, une maison située en la rue du Drézen, avec un jardin derrière, un pavillon à côté, et deux prés, nommés les prés de Kerballot, limités au midi par le jardin des Carmes Déchaussés et à l’ouest par la ruelle du Lorido.

La mère Claire de Lesfroy, libérée de sa charge en 1660, continua à édifier la communauté, et mourut le 9 novembre 1668, à l’âge de 46 ans, dont 30 de profession religieuse.

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CONSTRUCTIONS

La soeur Hélène Le Corvaisier de Pellaine, dite de Sainte-Croix, ayant été élue supérieure le 20 mars 1660, plaça, le jour même, sa communauté sous l’invocation de la Sainte Famille de Nazareth, pour attirer sur elle les bénédictions de Dieu. Cette bénédiction se manifesta bientôt par le nombre de postulantes qui se présentèrent : la mère Le Corvaisier de Sainte-Croix en reçut trente au noviciat durant les six années de sa supériorité. La communauté voyait doubler son personnel, et en même temps son logement devenir insuffisant. Il y avait déjà longtemps que l’on parlait de faire un second bâtiment. Après avoir prié et fait quantité de bonnes oeuvres, la communauté, d’accord avec l’évêque, fut d’avis d’entreprendre la construction, quoique l’on fût dépourvu d’argent, de matériaux et d’architecte, espérant que la Sainte Famille y pourvoirait.

« Peu de jours après cette décision, le couvent reçut 500 livres qui furent destinées à se procurer de la pierre de taille. Un bon religieux Carme, nommé F. Sébastien de Saint-Roch, qui s’entendait parfaitement bien à l’architecture, vint s’offrir de son propre mouvement et sans être connu, pour les aider de son conseil. La première pierre de ce corps de logis fut posée, le 30 janvier 1664, par cinq pauvres, pour représenter la Sainte Famille. Dans la suite de l’oeuvre, jamais rien ne manqua, quoiqu’il y eût plus de 80 ouvriers à la fois ; pas un n’eut faute de matériaux, ni ne passa la semaine sans être payé, bien que souvent le samedi matin il n’y eut pas un sol ; mais il en venait à temps et par où l’on en attendait le moins. En 18 mois la maison fut logeable et capable de recevoir 80 religieuses » (Chron. Ursul. I. 253).

Ce bâtiment forme le côté nord du cloître, avec un retour de 30 pieds à l’ouest : il coûta 43,604 livres. Il fut bénit le 17 juin 1666 par Mgr Charles de Rosmadec, et le jour de sainte Anne, 26 juillet, les religieuses prirent possession de leurs cellules neuves.

Les murailles de l’enclos, commencées en 1665, furent terminées en 1667, et coûtèrent 5,404 livres.

En succédant à sa soeur, le 20 mars 1666, la mère Jeanne Le Corvaisier de Pellaine, dite de la Nativité, trouva un monastère en parfait état. Elle n’eut qu’à finir quelques travaux, solder certaines dépenses, et put se livrer entièrement à la conduite de ses compagnes.

De son temps on trouve les noms odes soeurs : Hélène de Lourmel, Vincente Racouet, Anne Martin, Françoise Belliguet, Anne Le Moenne, Susanne Le Marié, Vincente Bigarré, Marie Manceau, Jeanne Gicquel, Louise du Gourvinec du Beizit, Françoise de Keralbaut, Gilette de Francheville, Françoise de Bourgon, Marie-Françoise Reminiac, Marie-Mauricette des Portes, Françoise-Agnès de Sérent, Julienne Le Faure, Marie et Louise Girard de la Hardouinaye, Anne-Françoise Kerguyo, Anne-Renée Reminiac, Vincente Le Moyne, Laurence-Thérèse de Lannion, Vincente de Francheville, Louise La Perche, Elise Boutouillic, Marie-Ursule Pitouays, Jacquette Pihan, etc.

La mère Jeanne Le Corvaisier arrivait au terme de ses six ans de supériorité, quand elle se trouva mêlée à une affaire d'une certaine importance. Mlle Catherine de Francheville cherchait une communauté religieuse pour y fonder une maison de retraite à l’usage des femmes ; ayant jeté les yeux sur le couvent des Ursulines, elle obtint le consentement de la communauté et l’approbation de Mgr Charles de Rosmadec. La fondatrice envoya secrètement à la supérieure une somme d’argent pour les premiers frais. La première pierre fut posée, le 20 mars 1671, par M. de Kerlivio, qui avait dressé le plan de cette maison de manière qu’elle fût sur le terrain de la communauté, mais en dehors de la clôture. C’est le bâtiment qui a servi plus tard de pensionnat, et qui est occupé à la fin du XIXème siècle par les externes de Saint-François-Xavier. On y travailla si activement que la maison fut achevée et meublée dès le mois d’avril 1672.

On donna la direction des retraites à la mère Jeanne Le Corvaisier, qui sortait de l’emploi de supérieure, et pendant neuf mois elle s’acquitta de sa charge à la satisfaction générale. Mais le successeur de Mgr de Rosmadec, prévenu par des gens qui n’avaient pas le même zèle que M. de Kerlivio et Mlle de Francheville, interdit les retraites des femmes. Mlle de Francheville, qui avait fait les frais de l'établissement, demanda aux Ursulines d’obtenir la permission de continuer les retraites, ou en cas de refus de lui rembourser ses avances. Les religieuses firent auprès de Mgr de Vautorte toutes les tentatives possibles, et n’ayant pu réussir, elles rendirent à Mlle de Francheville son argent et le Mobilier de la maison. Elles conservèrent l’immeuble et l’affectèrent au pensionnat de leurs élèves.

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SUITE

Depuis longtemps la communauté des Ursulines était en rapport avec une personne pieuse, nommée Armelle Nicolas. Cette fille, née à Campénéac en 1606, avait suivi sa maîtresse, Mme du Bois-de-la-Salle, quand elle vint s’établir à Vannes et au château de Roguédas en Arradon, en 1636. En 1651 elle avait, renoncé à ses gages par amour de la pauvreté, et avait déclaré vouloir servir le reste de ses jours, pour sa nourriture seulement. Bien plus, le 31 janvier 1655, elle avait fait voeu de pauvreté dans le parloir des Ursulines, en présence de la supérieure, Claire Lesfroy, et du recteur des Jésuites, Simon de Lessau.

Mgr Charles de Rosmadec, qui connaissait ses vertus héroïques, ne rencontrait jamais Armelle sans la saluer avec respect et se recommander à ses prières, principalement lorsqu’il allait visiter le gentilhomme chez qui elle servait, et s’entretenait avec elle d’une manière qui marquait l’estime la plus parfaite.

Elle mourut le samedi 24 octobre 1671, en odeur de sainteté. Son Maître la pleura comme sa propre fille, et quand elle eut été exposée sur un lit de parade, il alla lui baiser les pieds à genoux : ce qu’imitèrent les membres de sa famille et plusieurs autres personnes. Elle fut inhumée, suivant son désir, dans la chapelle des Ursulines, près de la grille du choeur, avec le concours des quatre paroisses de la ville. L’inscription funéraire, placée plus tard par les Jésuites, portait ces simples mots : D. O. M. Cy gît le corps d’Armelle Nicolas, appelée communément la bonne Armelle, décédée le 24 octobre 1671, âgée de 65 ans, R. I. P. Ses restes ont été transférés, le 9 août 1876, de l’ancienne chapelle des Ursulines dans la chapelle de l'Evêché, et inhumés dans le chœur auprès de la table de communion.

Un autre personnage, qui a été en rapports encore plus intimes avec les Ursulines ; est leur aumônier et confesseur, M. Jean de l4Isle. Il n’y avait pas de prêtre plus humble, plus désintéressé, plus mortifié, ni plus zélé que lui. Mgr de Rosmadec et les grands vicaires se servaient de lui pour les entreprises de zèle et de charité, et il était l’instrument d’une foule de bonnes oeuvres de la ville et du diocèse. Il avait une si grande compassion pour les misères du prochain, qu’il se serait dépouillé de tout, si l’on n’y avait pris garde. Son petit logement près de la chapelle des Ursulines était comme un hôpital : il y retirait les enfants abandonnés et malades, les soignait jusqu’à ce qu’ils fussent guéris ; puis il leur faisait apprendre quelque métier.

Après avoir confessé les Ursulines pendant 26 ans, il fut frappé de paralysie, et resta cloué sur un lit de douleur durant deux ans. Il mourut saintement le 3 mai 1675, à l’âge de 54 ans. Les pauvres le pleurèrent comme un père ; tout le clergé de la ville, les ordres religieux, et une foule de fidèles assistèrent le 4 à ses obsèques ; son corps fut inhumé, comme de juste, dans la chapelle des Ursulines. Son successeur auprès des religieuses fut M. Olivier Chambrin. Celui-ci intervint, comme mandataire des Soeurs, en 1680, pour un échange de terrains entre les Ursulines et les Carmes Déchaussés, échange qui permettait aux deux parties de faire, entre leurs propriétés respectives, un mur de séparation en ligne droite depuis l’ancienne venelle du Lorido jusqu’au chemin de Trussac.

Ce mur terminé, il fallut s’occuper de la chapelle définitive. Les travaux commencèrent le 17 mars 1688, et ne furent terminés qu’en 1690. La dépense monta à 44,054 livres, y compris 2,800 livres pour le maître-autel. C’est un édifice en forme de parallélogramme, ayant l’autel au fond, la grille des religieuses du côté, de l’épître, et une petite chapelle du côté de l’évangile. La façade, du côté du port, est du style de la Renaissance, comme le reste de la chapelle, et porte l’inscription suivante en lettres majuscules : Sacrœ Famillœ. 1690.

Elle est aujourd’hui remplacée par une chapelle neuve, donnant sur la rue du Drézen. 

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SUPERIEURES

Les supérieures des Ursulines étaient élues pour trois ans.

Au terme de leur mandat, elles pouvaient être réélues pour une nouvelle période de trois ans. Mais au bout de six ans, elles devenaient inéligibles, et il fallait choisir une autre supérieure pour trois ou six ans, avant de reprendre les anciennes.

Il est impossible aujourd’hui, avec les archives mutilées du monastère, de donner une liste complète des supérieures. Espérons que la découverte de nouveaux documents permettra plus tard de compléter la série, et de préciser quelques dates. Comme presque toutes les supérieures ont gouverné pendant six, ans, on ne donnera ici, pour chacune, que la date de la première élection, la seconde ayant eu lieu trois ans après. 

1628. Soeur Jeanne Rolland, dite des Séraphins.

163..  Soeur N... ?

1635. Soeur Jeanne Rolland, dite des Séraphins.

1641. Soeur Susanne Guays, dite Marie des Anges.

1647. Soeur Colombe Guymarho, de Sainte-Ursule.

1654, le 23 mars, Claire Lesfroy, du Saint-Sacrement.

1660, le 20 mars, Hélène Le Corvaisier, de Sainte-Croix.

1666, le 20 mars, Jeanne Le Corvaisier, de la Nativité.

1672. Soeur N...

1678. Soeur Madeleine de Valleaux, de Jésus ?

1684. Soeur N...

Lacune.

1711. Soeur Renée de Cornulier, dite de Sainte-Marie.

1717. Soeur N...

1723. Soeur Renée de Cornulier, de Sainte-Marie.

1729. Soeur N...

1735. Soeur Jeanne de Keronyant, de Sainte-Pélagie.

1741. Soeur Jeanne Le Boudoul, de Saint-Charles.

1747. Soeur Jeanne de Keronyant, de Sainte-Pélagie.

1753. Soeur Gertrude Guiller, de Saint-Xavier.

1759. Bonne de Quifistre, de Sainte-Marie-Madeleine.

1765.  Soeur Gertrude Guiller, de Saint-Xavier, morte 1766.

1766.  Soeur Ursule Le Meilleur, de Sainte-Eulalie morte 1767.

1767.  Soeur Claude de Perdiguier, de Sainte-Agnès.

1774. Soeur Valentine-Françoise de Carné, de Sainte-Eugénie.

1780. Soeur Thérèse Le Minihy du Rumen, de Saint-Augustin.

1783. Soeur Marie-Anne Damain, de Sainte-Marie-Joseph.

1789. Soeur Marie-Rose Le Vaillant, de Sainte-Cécile.

Chez les Ursulines, comme chez les autres religieuses, la supérieure était chargée de représenter la communauté vis-à-vis des personnes du dehors. A l’intérieur, elle était chargée de veiller à l’observation de la règle, au fonctionnement des différents services de la maison, et à la direction spirituelle et temporelle de la communauté. Elle pouvait accorder les menues dispenses de la règle et trancher seule une foule de cas de détail ; mais dans toutes les affaires importantes, telles que l’admission des novices, l’acquisition d’immeubles, les emprunts ou les prêts de capitaux, les constructions d’édifices, etc ...  elle était obligée d’avoir l’assentiment de son conseil, et parfois même celui de la communauté.

La supérieure avait encore à veiller sur les classes internes et externes. Le pensionnat était nombreux, et fournissait souvent des postulantes et des novices à la communauté. Les classes externes se tenaient dans les vieilles maisons de la rue de Comohic, ou de l'Unité, et recevaient une foule de jeunes filles de la ville, qui venaient là pour apprendre à lire, à écrire, à compter, à coudre, et à connaître leur religion.

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REVOLUTION

Dès l’origine, la Révolution française se montra hostile aux établissements religieux Le 2 novembre 1789, elle confisqua tous les biens de l'Eglise ; le 13 février 1790, elle supprima les voeux monastiques ; et le 12 juillet suivant elle lança la Constitution civile du Clergé.

Les commissaires du district de Vannes se présentèrent chez les Ursulines le 15 novembre 1790, pour dresser l’état de leurs biens. En voici le tableau sommaire :

1° Revenus.

Revenu du jardin et de l’enclos : 1,275 livres.

Maison, rue de Poulho, servant de caserne : 400 livres.

Maison du Pouldu, rue du Drézen : 130 livres.

Métairie au village de Cliscoet : 410 livres 6 sols 3 deniers.

Prés à Poulho, et deux tiers de pré au Grador : 121 livres 18 sols 1 denier.

Tenue au village de Bindre, en Séné : 184 livres 9 sols 5 deniers.

Petite métairie à Kerprado, en Elven : 68 livres.

Tenue au village de Bourgerel, en Noyalo : 166 livres 8 sols 4 deniers.

Rente constituée sur la Généralité de Bretagne : 105 livres.

Rente constituée sur la municipalité du Croisic : 49 livres 13 sols 6 deniers.

Rente constituée sur M. de Coué : 160 livres.

Pensions viagères à diverses religieuses : 2121 livres.

Total : 5,191 livres 15 sols 7 deniers.

 

2° Charges.

Messes de fondations : 322 livres.

Chapelain et médecin : 1,000 livres.

Décimes de la communauté : 116 livres 15 sols.

Capitation des domestiques : 33 livres.

Rentes féodales et foncières : 22 livres 2 sols.

Deux rentes viagères : 300 livres.

Sept contrats d’emprunt de 28,3001 : 1,205 livres.
Total : 2,999 livres 1 sol.

En défalquant les charges des revenus, il restait 2,192 livres 14 sols 7 deniers pour entretenir les immeubles, et nourrir 48 religieuses et 19 domestiques.

Quant au mobilier, l’argenterie comprenait un ostensoir doré, trois calices, deux ciboires, une custode, un encensoir, trois plateaux et leurs burettes, une boîte des saintes huiles, un bénitier, une lampe, trois flambeaux, 44 couverts, 3 cuillères, 32 petites cuillères, et deux gobelets.

La sacristie renfermait 37 ornements, 22 devants d’autel, 54 aubes, etc., etc...

Dans les chambres, il y avait 48 lits garnis pour les religieuses, 58 lits pour les pensionnaires et 38 lits disponibles.

A la lingerie, on trouvait 144 paires de draps, 108 nappes, 1,200 serviettes, etc...

A la bibliothèque, 1,447 livres de piété.

A la cuisine, les ustensiles ordinaires.

(L. 785, 788).

Une déclaration faite par les Ursulines, dès le 26 février 1790, mentionne divers objets mobiliers, qui nous font connaître les usages de la communauté. Ainsi, dans le réfectoire, il y avait un crucifix, une chaire pour la lecture, des bancs d’attache, onze tables, 90 écuelles d’étain, 90 assiettes d’étain, 12 plats d’étain, une fontaine d’étain, 104 assiettes de faïence : celles-ci étaient évidemment d’introduction récente et elles auraient fini par détrôner l’étain, si on leur en avait laissé le temps.

De même encore, chaque cellule de religieuse renfermait un lit à ciel et dossier de bois, un crucifix et un prie-Dieu, un grand carré de bois couvert d'images en papier, une table et trois chaises, un chandelier de cuivre et des mouchettes de fer, un escabeau, une cuvette et un pot-à-eau, sans compter le linge et les vêtements.

Elles étaient habillées, comme les Ursulines de la congrégation de Paris, d’une robe noire, d’un tablier noir, d’une guimpe blanche et d’un voile noir : les différences de costumes étaient minimes.

Enfin clans le jardin, il y avait une petite chapelle, avec un tableau de Notre-Seigneur, et plus loin un petit oratoire. Q. 302.

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PERSONNEL

Voici la liste des religieuses de choeur, en 1790 :

Marie-Rose Le Vaillant, de Pontivy, supérieure, 54 ans.

Marie-Anne Damain, de Redon, sous-prieure, 54 ans.

Pélagie Le Minihy du Rumen, de Morlaix, économe, 56 ans.

Claude de Perdiguier, dite de Sainte-Agnès, de Nantes, 81 ans.

Marie Le Coedic, de l’Ange-Gardien, de Neulliac, 70 ans.

Françoise-Madeleine Frogier, de Sainte-Anne, du Croisic, 67ans.

Marie-Jeanne Le Minihy du Rumen, de Morlaix, 64 ans. 

Madeleine de Véraye, de Saint-Romain, de Vannes, 57 ans. 

Françoise Launay, de Saint-Stanislas, de Vannes, 59 ans.

Marie-Anne Guilmaut de Beaulieu, de Saint-Malo, 59 ans.

Radegonde Michel, de Sainte-Rose, de Lorient, 49 ans. 

Sébastienne de la Roche-Hercules, de Sainte-Madeleine, de Brest, 55 ans.

Marie-Anne Hulin, de Sainte-Thérèse, de Josselin, 38 ans.

Marie-Angèle Taillart, de Saint-Charles, de Plouha, 45 ans.

Marguerite Tiret, Marie-Elisabeth, de Vannes, 37 ans.

Anne-Marie Hulbert, Marie-Céleste, de Sarzeau, 39 ans. 

Jeanne-Vincente Chenu de Kerhedin, Marie-Xavier, de Vannes, 38 ans.

Adelaïde Jacquelot, Marie-Gertrude, de Piriac, 37 ans.

Marie-Jeanne Mazurié, Marie-Ursule, de Morlaix, 39 ans.

Elisabeth Le Bihan, Marie-Catherine, de Noyal-Pontivy, 35ans.

Marie-Anne Le Texier, Marie des Anges, de Malansac, 38 ans.

Elisabeth-Félicité Jacquelot, de Sainte-Rosalie, de Piriac, 34 ans.

Yvonne-Marguerite Aubry, de Saint-Basile, de Vannes, 37 ans.

Jeanne-Louise Jamet, de Saint-Valentin, de Pluneret, 38 ans.

Marie-Victoire Thomas de Bénéac, de la Roche-Bernard, 36 ans.

Louise-Augustine Thomas de Bénéac, du même lieu, 33 ans.

Marie-Monique Collenno, de Sainte-Anastasie, d’Ambon, 56 ans.

Marie-Pauline Canonge, de Sainte-Reine, de Vannes, 29 ans.

Marie-Catherine Blancho, de Saint-Hyacinthe, de Sarzeau, 31 ans. 

Marie-Rose Le Pourceau de Tréméac, Marie-Angèle, d'Escoublac, 32 ans.

Françoise-Louise Chardevel, Marie-Constance, de Guer, 30 ans.

Marie-Charlotte Le Bescond de Kermarquer, du Palais, 32 ans.

Marie-Angélique Le Goff, de Sainte-Marie, de Vannes, 32 ans.

Marie-Julienne Descourbes, Marie-Madeleine, de Pontaven, 36 ans.

Jeanne-Marie Denis, de Sainte-Ursule, d’Ambon, 32 ans.

Jeanne-Marie Le Besque, de Saint-Paul, d’Ambon, 32 ans.

Jeanne Collet, dite de Saint-Joachim, de Brech, 22 ans.

Hyacinthe Jousbert, Marie-Thérèse, de Luçon, 21 ans.

Soeurs converses.

Susanne Racapé, de Saint-François, de Vannes, 68 ans.

Françoise Eveno, de Saint-Michel, de Questembert, 67 ans.

Marguerite Renaud, de Saint-Ambroise, de Vannes, 60 ans.

Julie Le Guyader, de Sainte-Agathe, de Ploërmel, 45 ans.

Marie Boudet, Marie-de-Jésus, de Saint-Gonnery, 47 ans.

Marie-Anne Pasco, de Sainte-Monique, de Crach, 52 ans.

Marie-Jeanne Rio, de Saint-Armel, de Ploërmel, 40 ans. 

Julienne Le Peuchant, de Saint-André, de Saint-Avé, 46 ans.

Marie Guillerme, Marie-Louise, de Plumergat, 34 ans.

Olive Le Bouëdec, Marie-Anne, de Ploeren, 33 ans.

Toutes ces religieuses déclarèrent vouloir persister dans leur vocation.

Ces pauvres filles, pour prolonger leur agonie, consentirent à se soumettre au décret de l'Assemblée Nationale, qui les obligeait à faire de nouvelles élections, afin de toucher la maigre pension qu’on leur attribuait, en échange de leurs biens confisqués. Elles se réunirent, le 13 janvier 1791, sur la convocation d’un officier municipal, et nommèrent pour supérieure Mme Le Vaillant, de Sainte-Cécile, et pour économe Mme Le Minihy, de Sainte-Pélagie.

Cette soumission leur procura une trève de vingt mois.

Au mois de juillet 1792, elles eurent la charité de recueillir chez elles neuf Ursulines, renvoyées d'Hennebont, et une autre venue de Metz. Mais le terme fatal du 1er octobre 1792 arrivait. Dès le 26 septembre, les commissaires civils commencèrent l’expulsion des religieuses, et la continuèrent les jours suivants, par groupes successifs, de manière à finir le 1er octobre. Chaque religieuse eut la permission d’emporter tout ce qui était dans sa cellule à son usage personnel, mais dut quitter immédiatement le voile et la guimpe, avant de sortir.

Pendant la Terreur, la moitié de ces religieuses furent enfermées à l’hospice de Saint-Nicolas de Vannes ou à Auray. La supérieure Marie-Rose Le Vaillant y termina ses jours, en disant que le trajet n’était pas long de la prison au ciel.

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VENTES

La vente des biens des Ursulines commença avant même leur expulsion du couvent. Ainsi la maison du Pouldu et ses dépendances fut vendue, dès le 28 février 1791, à M. Malherbe, pour le prix de 4,600 livres.

Deux prés, situés l’un sur le chemin de Bernus, l’autre sur le chemin de Kercado, furent adjugés, en avril 1791, au sieur Le Calonnec, pour 1,372 livres.

La petite métairie de Kerprado, en Elven, fut vendue le 1er juin 1791, au sieur Périer, pour 1,575 livres, puis le 16 octobre 1793 au citoyen Jéhanno, pour 1,725 livres.

La métairie de Cliscoet fut adjugée, le 14 mai 1792, à M. Danet, aîné, pour la somme de 9,050 livres.

Deux tiers de pré, situés sur la route de Rennes, près du Grador, furent vendus le 1er septembre 1792, à M. Jomard, pour le prix de 2,854 livres.

Le mobilier des religieuses, vendu le 2 septembre 1793 et le 12 avril 1794, produisit une somme totale de 14,356 livres, 9 sous.

La tenue de Bindre, en Séné, fut adjugée, le 15 janvier 1798, à M. Goujeon, pour la somme fabuleuse de 40,069 livres, en assignats dépréciés.

La tenue de Bourgerel, en Noyalo, fut vendue le 16 février suivant, au même citoyen, pour 23,136 livres, dans les mêmes conditions.

La portion méridionale de l’enclos, appelée plus tard enclos Béluze, l’ancien pensionnat, devenu dans la suite l’école des Frères, les trois maisons de la rue de Poulho, dites les Casernes, furent vendus séparément vers 1796.

Le 3 novembre 1797, l’administration centrale du département mit en vente :

1° Un corps de bâtiment nommé les Ursulines, avec cours au couchant et au devant de l’église, et les édifices où étaient auparavant le parloir, le logement de la tourière et la maison de l’aumônier ; de plus une cour au nord, avec un puits et une porte cochère sur la rue de Comohic ou de Bara-Segal ;

2° Un corps de logis, dit les Classes, et quatre autres maisons à la suite, formant le logement des garçons, la boulangerie, les celliers et autres dépendances, dans la rue susdite et la rue du Pessu ;

3° Un grand jardin vers le couchant, partagé en 48 carrés ; une pièce de terre à la suite, et deux petits jardins au midi de la sacristie.

L’église et la sacristie, ainsi que la petite cour d’entrée furent formellement exceptées de la vente, et devaient rester propriété de l'Etat Tous ces biens, mis à prix à 51,000 fr., furent adjugés, le 29 novembre 1797, à J. Mocquart, pour 52,559 fr. Ces immeubles furent ensuite loués à divers particuliers, plusieurs même furent aliénés par l’acquéreur.

L’église et la sacristie, restées propriété nationale, furent affectées par un arrêté des Consuls de la République, en date du 28 février 1802, à la tenue d’une bourse de commerce dans la ville de Vannes. La bourse n’y fonctionna que pendant quatre mois.

Mgr de Pancemont, ayant obtenu la libre disposition de cette ancienne chapelle, l’érigea en oratoire, par son ordonnance du 13 septembre 1802, et nomma un chapelain pour le desservir. Depuis cette époque, la chapelle des Ursulines n’a jamais cessé de servir au culte, et d’avoir un chapelain nommé par l’évêque, jusqu’à ce que la jouissance en ait été abandonnée, en 1850, par Mgr de la Motte, aux RR. PP. Jésuites, qui depuis en ont acquis la propriété.

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JESUITES

Les Jésuites, rétablis pour l'Eglise universelle le 7 août 1814, par une bulle de Pie VII, furent chargés dans notre diocèse de la direction du petit séminaire de Sainte-Anne en 1815.

Expulsés de cet asile par les ordonnances de 1828, ils durent se réfugier à l’étranger, pour continuer l’enseignement secondaire. Seuls les missionnaires bretons et français restèrent dans le pays et se fixèrent à Vannes.

Après avoir erré dans diverses maisons de la ville, louées par eux, ils s’établirent dans l’ancien couvent des Ursulines, que la famille de deux d’entre eux avait racheté en juin 1838.

C’est là que vécut le bon Père Leleu, dont les travaux apostoliques ne sont pas oubliés dans nos campagnes ; c’est là qu’il mourut en odeur de sainteté le 1er août 1849.

On discutait alors à la Chambre des députés un projet de loi, qui donnait la liberté de l’enseignement secondaire, et ce projet, présenté par M. de Falloux, fut enfin voté le 15 mars 1850.

Aussitôt les Jésuites se mirent à l'oeuvre, et à Vannes ils ouvrirent, dès le mois d’octobre 1850, le collège Saint-François-Xavier dans les bâtiments des anciennes Ursulines. Ils n’eurent que des externes pour commercer, mais le 12 mars suivant ils inaugurèrent un pensionnat, qui devint bientôt très nombreux.

De nouvelles constructions s’imposaient pour recevoir la population scolaire. En 1852 les Jésuites continuèrent le côté ouest du cloître, commencé jadis par les Ursulines.

En 1853, ils bâtirent le côté sud, et complétèrent ainsi le cloître. En même temps, ils édifièrent, le long des murs de clôture du jardin, deux longs bâtiments, pour les séances solennelles, pour les leçons de musique et pour les récréations couvertes. Tout le reste du jardin fut converti en lieu de recréation en plein air.

A l’angle sud-ouest de l’établissement fut cachée une charmante chapelle de congrégation, en style ogival flamboyant du XVème siècle, tapissée de fines découpures dans la hauteur de deux étages. M. Charier, de Vannes, en fut l’architecte, et M. Carado ; le sculpteur vannetais, l’orna des statues de l'Immaculée Conception, de saint Ignace, de saint François-Xavier, de saint Louis de Gonzague et de saint Stanislas de Kostka. L'inauguration eut lieu en 1857. 

Le collège Saint-François-Xavier était à peu près complet, et les inspecteurs ont pu rendre ce témoignage qu’il était l’un des plus beaux consacrés en France à l’instruction secondaire libre. Les belles lignes de ses vastes constructions se voient dans la cour intérieure du cloître, et surtout dans la façade du côté de l’ouest, où l’on compte 25 ouvertures à chaque étage.

Il est regrettable que la façade de l’est, celle par où l’on entre au collège, soit masquée par de vieilles constructions. Les Jésuites voulaient lui donner un air monumental, et pour cela il fallait démolir l’ancienne chapelle des Ursulines. Mais là se présentait une difficulté. L'Etat, on s’en souvient, s’était réservé la propriété de la chapelle et de la sacristie ; la ville de son côté croyait y avoir quelque droit, parce qu’elle avait été affectée pendant quelques mois à la tenue d’une bourse.

Las d’attendre la solution de ce conflit, les Révérends Pères se décidèrent à construire une autre chapelle au sud de leur établissement, avec entrée publique du côté de la rue Drézen, et communication avec le collège. Cet édifice, de style ogival du XIIIème siècle, se compose d’une longue nef et de deux bas côtés, avec une large tribune au bas. Les fenêtres sont géminées et ornées de magnifiques verrières, où se voient les armes des donateurs. Les travaux commencés en 1870, continués en 1871, ont été terminés en 1872. L’architecte a été le P. Tournesac, de la Compagnie de Jésus. La chapelle a été inaugurée par Mgr Bécel, pour la rentrée des élèves, le jeudi 10 octobre 1872, en la fête de saint François de Borgia ; la consécration n’en a été faite que plus tard.

L’ouverture de cette nouvelle chapelle fit fermer l’ancienne. Le Domaine, resté propriétaire de cet immeuble et ne sachant qu’en faire, finit par le mettre en vente. Les Jésuites s’en rendirent acquéreurs le 15 décembre 1877. Désormais ils peuvent, s’ils le jugent convenable, modifier l’entrée de leur établissement.

J.M. Le Mené

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