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Les institutions judiciaires des seigneuries de Châteauneuf-du-Faou, de Huelgoat et de Landeleau.

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Les institutions judiciaires des seigneuries de Châteauneuf-du-Faou, de Huelgoat et de Landeleau.

La faible importance des domaines de Châteauneuf-du-Faou, Huelgoat et Landeleau, a un résultat fâcheux. Les mandements émanés de la chancellerie de Nantes contiennent fort peu de détails sur leurs institutions judiciaires. Ceux qui leur sont relatifs sont du reste en fort petit nombre ; mais, joints à d'autres documents glanés çà et là, ils permettent de constater dans ces terres la présence d'officiers ducaux aux attributions indécises, qui avaient uni de bonne heure, semble-t-il, les trois châtellenies de Châteauneuf, Huelgoat et Landeleau, dans une administration commune, tout en maintenant à chacune d'elles son autonomie vis-à-vis des deux autres. Ils jettent également quelque lumière sur le recrutement, le nombre et les fonctions des juges, des sergents et des notaires à cette époque. Il ne saurait pourtant être question d'étude approfondie, jusqu'au moment où les édits de Henri II et de Charles IX vinrent modifier l’ordre primitif et après lesquels les trois seigneuries s'unirent définitivement pour former une véritable sénéchaussée sans en porter le nom.

Le roi de France maintenait d'ordinaire l'ancienne organisation des fiefs, en les réunissant à sa couronne [Note : Esmein, Histoire du droit français, 345. — Dupont-Ferrier, Les officiers royaux des bailliages et sénéchaussées, 33]. Il est infiniment probable que c’est ce qui se passa dans ces châtellenies lorsqu'elles entrèrent dans le domaine ducal : elles durent conserver les mêmes officiers qu'auparavant : juges et receveurs. Les degrés de juridiction ne furent certainement pas diminués : au XVIème siècle, ces sièges, comme anciennes mouvances de la vicomte de Poher, portaient toujours les appels de leurs sentences à Carhaix, qui en était le chef-lieu [Note : Arch. L.-Inf., B, 1191, f° 9 v°].

Huelgoat et Châteauneuf, et plus tard Landeleau, gardèrent donc leurs châtelains. Mais on est mal renseigné sur les fonctions de ces officiers. Un mandement adressé, en 1336, au châtelain d’Huelgoat, prouve simplement son existence [Note : De La Borderie, Chartes inédites de Locmaria, Bull. Soc. Archéol. du Finistère, XXIV, 96]. Dans d'autres juridictions, leurs attributions auraient été assez étendues [Note : H. Sée, Les classes rurales en Bretagne, 54]. En 1373, lors de son expédition en Bretagne contre les Anglais appelés par Jean de Montfort, Du Guesclin nomma Guillaume de Kermartin gouverneur pour Charles V du château de Huelgoat [Note : Dom Morice, Preuves, II, 76]. Ce gouverneur différait du châtelain. En effet, quelques années plus tard, en 1380, quand Jean de Montfort revint d'Angleterre, où il avait fui l'invasion française, il reçut le serment de fidélité de Eon de Kermellec comme garde du château de Huelgoat « durant le bon plaisir de son maître », et comme châtelain à vie des châtellenies de Huelgoat et de Châteauneuf-du-Faou [Note : Arch. L.-Inf., E, 135]. Les deux charges n'étaient donc pas identiques.

Au XVème siècle, il n'est plus question ni de gouverneurs ni de châtelains. Le nom de châtellenie persiste cependant. Une montre de l'évêché de Cornouailles tenue en 1481, et qui sans doute reproduisait les rubriques de plus anciennes, énumère les châtellenies de Huelgoat, Châteauneuf-du-Faou et Landeleau [Note : De Fréminville, Antiquités du Finistère, II, 364]. A cette époque pourtant, la dénomination de juridiction tendait à l'emporter [Note : Arch. Fin., H, 50 (17 janvier 1443) ; — Arch. L.-Inf., E, 128 (5 mai 1491)] ; elle fut employée exclusivement au siècle suivant. Ce changement d'appellation avait sa raison : depuis longtemps les châteaux n'existaient plus ; celui de Châteauneuf était en démolition dès 1440 [Note : Arch. L.-Inf., E, 83. — Jean V fit démanteler plusieurs places fortes ayant appartenu aux Penthièvre (De Fréminville, Antiquités des Côtes-du-Nord, 209, 269)]. Il ne restait donc plus comme représentants du duc que les officiers de justice et des comptes. La justice prenant le pas sur la guerre avait amené cette modification dans le titre des seigneuries.

Mais de même qu'au XIVème siècle Châteauneuf et Huelgoat n'avaient qu'un seul châtelain, au siècle suivant les officiers exerçaient leurs fonctions dans les trois juridictions. Celles-ci avaient donc été réunies bien avant la fin du XVIème siècle [Note : Trévédy, Organisation judiciaire en Bretagne avant 1789, dans la Revue historique du droit, 1893, p. 247]. Il est passible et même probable que cette réunion fut simplement le résultat de la nomination des mêmes officiers aux trois charges : chacun des ressorts avait peu d'étendue et le cumul des charges était alors commun. Il ne dut pas y avoir de Lettres d'union : nous trouverons jusqu’à la fin de l'ancien régime des particularités qui rappelleront la distinction primitive des trois sièges.

Quoiqu'il en soit, cet état doit être ancien. Un mandement de 1336, adressé au château de Huelgoat, se rapporte à des biens situés en la châtellenie de Châteauneuf. La réunion serait-elle déjà opérée ? Le fait qu'Eon de Kermellec était châtelain de Huelgoat et de Châteauneuf nous inclinerait à cette conclusion. Mais le doute n'est plus possible en 1405, où Guillaume Pencoët était receveur du domaine des trois juridictions. En 1455, Jean de Coetsoeff occupait cette charge [Note : Arch. L.-Inf., compte non coté]. En 1491, Guillaume de Keramanac'h était lieutenant ordinaire de Huelgoat, Châteauneuf-du-Faou et Landeleau [Note : Arch. L.-Inf., E, 128]. En 1540, les trois cours avaient toutes les mêmes juges [Note : Arch. L.-Inf., B, 1191]. Aussi, dans la liste des juridictions royales de Cornouailles, en 1562, le nom de Châteauneuf est-il seul mentionné : son auteur enregistre un fait accompli depuis longtemps [Note : De Fréminville, Antiq. du Finistère, II, 428].

Du reste, juges et receveurs ne prennent le plus souvent que le titre de la juridiction où ils opèrent : le sénéchal de Landeleau sera le lendemain sénéchal de Châtcauneuf, et le jour suivant sénéchal de Huelgoat. Cela persistera jusque dans la seconde moitié du XVIIème siècle. Jusqu'à cette époque, en effet, le tribunal siégera au chef-lieu de chacune des cours : à Huelgoat, où des plaids généraux sont tenus le 23 octobre 1465 [Note : Arch. Fin., H, 50] ; en 1542, les magistrats jugent aussi bien à Landeleau qu'à Huelgoat [Note : H. Bourde de La Rogerie, Analyse d'un compte du Relec, Bullet. soc. archéol. du Finistère, XXXI, 66] ; et il n'est pas douteux qu'ils ne le fissent également à Châteauneuf. Au début, l'union ne fut pas faite en faveur d'un siège au détriment des deux autres. Châteauneuf ne prit décidément le pas sur Huelgoat, toujours placé au premier rang au XVème siècle, et sur Landeleau, pour devenir le lieu ordinaire de l'exercice de la justice, qu'entre 1660 et 1680. Sa situation plus avantageuse et son agglomération plus importante amenèrent ce résultat.

Les juges étant donc ambulants et dans la nécessité de se transporter d'un lieu à un autre, il était impossible qu'un seul magistrat exerçât la justice. Cela ne convenait du reste plus dans les seigneuries devenues ducales. De fort bonne heure, il dut y avoir les trois officiers de justice signalés dans une pièce de 1443 [Note : Arch. Fin., H, 50] : le sénéchal, qui remplaça le châtelain, l'alloué ou bailli, second juge et lieutenant du sénéchal, et le procureur du duc. En 1491, on remarque un lieutenant ordinaire qui était en fait un second lieutenant du sénéchal [Note : Arch. L.-Inf., E, 128]. Avant le XVIème siècle, il y avait donc dans la juridiction trois juges et un représentant direct du pouvoir.

Le procureur, homme du duc, devait être à son entière discrétion. Les juges furent d'abord aussi nommés par le duc. Charles V donna au duc d'Anjou son lieutenant général en Bretagne, le droit d'instituer « sénéchaux, baillis et autres officiers et receveurs » [Note : Dom Morice, Pr., II, 78-79]. De même, lorsque Jean V confisqua les biens des Penthièvre, il institua un sénéchal à Châteaulin et à Châteauneuf, qui appartenaient auparavant à Olivier de Blois [Note : Arch. L.-Inf., Inventaire Turnus Brutus, f° 101].

Ce système fut changé dans la suite et remplacé par l’élection. En 1561, Yves de Kergoet, bailli de Châteauneuf, Huelgoat et Landeleau, fut élu sénéchal de Quimperlé et Carnoël, « après réunion des advocats, procureurs, greffier et gens hantans çà trois ans derrains la practicque audit Kemperlé » [Note : Arch. du palais de Rennes, Registre d'enregistrement, V, f°s 33-34].

On voit donc que les fonctions des sénéchaux et des lieutenants étaient essentiellement judiciaires, puisqu'ils étaient élus par des hommes de loi. Une enquête faite en 1566 prouva qu'ils avaient toujours été « de robe longue » [Note : Dom Morice, Pr., III, 1349]. Mais depuis l'union de la Bretagne à la France, les juges avaient eu à s'occuper comme ceux des autres provinces de la convocation du ban et de l'arrière-ban, à faire bannir dans leurs ressorts les montres et à présenter leurs hommes à ces revues. Auparavant, en 1481, par exemple, le procureur de Cornouailles s'occupait seul comme officier de justice, de la montre qui se tenait à Carhaix [Note : De Fréminville, Antiq, du Finistère, II, 316, 428].

Les noms des officiers de justice de cette époque qui nous sont parvenus montrent pourtant qu'ils appartenaient à des familles nobles, comme Benerven, Keramanach, Kergoët, Quélennec, Kerperennes. Plusieurs étaient gradués : le sénéchal Hervé du Quélennec était « docteur aux droits » [Note : Arch. L.-lnf., B, 1191, f° 9 v°] : Jehan de Kerperennes, bailli de Carhaix et procureur du duc aux juridictions de Châteauneuf. Huelgoat et Landeleau, l’était aussi [Note : Arch. L.-Inf., B, 1191, f° 12] ; Yves de Kergoët, bailli, était simplement « licencié aux loix » [Note : Arch. du Palais de Rennes, Registre d'enregistrement, V, f° 33].

Plusieurs sergents appartenaient à des familles aussi élevées que les juges, leurs supérieurs hiérarchiques : Jehan de Kernigués et Loys de Kergoët étaient sergents en 1540 [Note : Arch. L.-lnf., B 1191, f° 9 v°] ; mais à côté, on trouve des noms de roturiers, et ceux-ci remplirent exclusivement ces charges dans la suite.

Le nombre des sergents ne devait pas être considérable : peut-être quatre pour les trois ressorts. On en distinguait, en effet, de deux sortes : les uns exploitant seulement dans une seule cour, à Huelgoat ou bien à Landeleau, par exemple, les autres dans le ressort d'une juridiction principale et des sièges qui en dépendaient [Note : Trévédy, Sergents féodés sergents généraux et d'armes, 29] ; le sergent général établi à Carhaix exerçait donc non seulement à Carhaix, mais aussi dans les juridictions qui y portaient leurs appels ; les premiers, au contraire, les seuls qui fussent établis dans celles-ci, n'étaient de fait que de simples bailliagers, bien que le nom ne leur en fut pas donné : ils prenaient le titre de sergent « pour le roi nostre sire duc de Bretagne » en 1500, et de sergent royal en 1540 [Note : Fonds de Kerverziou, Lsse 6, n° 10 ; — Arch. L.-Inf., B 1191, f° 9 v°]. C'était, en effet, le duc puis le roi qui les nommaient [Note : Arch. L.-Inf., B 24, 26, 36].

Comme les sergents, les notaires appartenaient sinon à des familles nobles [Note : « Tous les notaires antiennement en Bretagne estoient nobles il y a 200 ans ils mettoient un (signe ?) passe et on les apeloit passeurs ». Bib. Nat., ms. 22.461, f° 594], comme les du Bot, de Rosily, Kergonniou, de Botmeur, Keramanac'h, du moins aux familles les plus notables du pays [Note : Pièces du XVIème siècle aux Arch. de la Fabrique de Châteauneuf-du-Faou]. Puis les roturiers restèrent seuls à partir du milieu du XVIème siècle : les nobles avaient déserte ces fonctions.

Dans les actes passés par la cour de Châteauneuf, au courant de ce siècle, on peut relever environ quarante signatures différentes de notaires, mais on n'est pas plus fixé sur le nombre qu'ils pouvaient atteindre. Déjà à cette époque les attributions des notaires, des tabellions et des gardes-notes se confondaient : en 1543. Riou était tabellion et notaire ; en 1554, Capiten écrivait au bas d'un acte qu'il en gardait le « registre minutté » [Note : Pièces aux Arch. de la Fabrique de Châteauneuf-du-Faou]. Outre les contrats qu'ils passaient et à l'exécution desquels ils condamnaient les parties par la cour à laquelle ils avaient juré soumission, les notaires semblent aussi avoir rempli l'office de greffier en donnant acte aux plaideurs des sentences prononcées par les juges [Note : Pièces aux Arch. de la Fabrique de Châteauneuf-du-Faou, Pièce de 1547. — Arch. Fin., H 50, Pièce de 1465].

(Raymond Delaporte).

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