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LE GENERAL FRABOULET

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La famille Fraboulet était d'origine belge, et avait acquis des attaches écossaises par le mariage d'un de ses membres qui, fait prisonnier à la bataille navale d'Ouessant, le 27 juillet 1778, avait été transporté sur un ponton, dans le Nord de l'Angleterre. Elle était entrée en France avec le duc de Mercœur, vers 1550, et s'était fixée en Bretagne, dans le pays d'Auray.

Le Général naquit à Brest, le 26 mai 1817. Son père était alors capitaine à la Légion du Morbihan, et c'est au contact des vieux briscars de la chouannerie et des Cent Jours, guerriers endurcis et éprouvés, que le futur général acquit la passion des armes et de l'honneur. Après une première formation au Prytanée militaire de La Flèche, il entrait à Saint Cyr, à l'âge de 18 ans, en sortait deux ans plus tard sous-lieutenant et était affecté au 41ème de ligne avec lequel il s'embarquait pour l'Afrique le 29 septembre 1839.

C'était l'époque où Abd-el-Kader, devenu, après le Traité de la Tafna, souverain d'un véritable royaume arabe, reprenait, avec plus de violence et d'audace, la guerre contre la France. Sur la terre algérienne, alors inhospitalière, dans des régions désertiques que dévorait un soleil ardent, le jeune officier devait, comme tous ses compagnons d'armes, connaître une existence pénible et pleine de dangers. Un rapide coup d'oeil sur les pistes glorieues et ensanglantées de cette campagne nous en convaincra.

Le 10 mai 1840, à l'attaque du col de la Mouzaîa, le sous-lieutenant Fraboulet reçoit, avec une première blessure au bras droit, les galons de lieutenant et une première citation pour sa belle conduite. L'année suivante, il rapporte du combat de Tilhouanet, avec une blessure à la cuisse gauche, une nouvelle citation, et peu de temps après, il est promu capitaine. La lutte bat son plein. Bugeaud, qui s'apprête à frapper les coups décisifs, forme de puissantes colonnes mobiles qui, par une guerre de courses et de razzias, ont pour résultat de soumettre les tribus les unes après les autres, et de réduire bientôt Abd-el-Kader à une lutte de partisans.

Le jeune capitaine prend part à la campagne menée contre le Sultan du Maroc, allié de l'Emir. Si cette fois il en sort indemne, il n'en a pas moins frôlé de près la mort, puisqu'il a son cheval tué sous lui à la fameuse bataille de l'Isly qui consacre la défaite du Sultan. L'année suivante, on le retrouve dans les monts du Traras aux prises avec les tribus berbères de cette région accidentée. Une nouvelle citation et la Croix de la Légion d'Honneur viennent, en 1845, récompenser ses efforts et ses succès.

A la suite de la soumission d'Abd-el-Kader, à Lamoricière en 1847, le capitaine Fraboulet rentra en France, où, en 1850, il fut promu chef d'escadron et reçut la rosette. Mais il trouvait son pays en pleine crise politique. Il dut être le témoin de marchandages, de compromissions, d'offres scandaleuses, de tout l'inévitable déballage de malhonnêtetés, accompagnement ordinaire des expériences de ce genre, et qui blessaient profondément ses sentiments d'honneur et de loyauté.

Quand Louis Napoléon Bonaparte eut mis fin, par le coup d'État du 2 décembre 1851, au conflit qui l'opposait à l'Assemblée Législative, il en fut écœuré et, fidèle à son idéal de servir, mais proprement, il pria ses chefs qui l'avaient en haute estime, de le renvoyer en Algérie. Ceux-ci firent gré à sa demande et lui enjoignirent de rejoindre le 2ème Zouave à Oran.

Son second séjour en Afrique fut d'ailleurs de courte durée, juste le temps d'acquérir les galons de lieutenant-colonel avant de se rendre en Crimée, où il se trouvait, à la tête du 44ème de ligne, au siège de Sébastopol en septembre 1854. Retour de Crimée, il fut nommé colonel et reçut le commandement du 29ème de ligne avec lequel il fit garnison en France, pendant 4 ans, quand il entendit l'appel du Pape.

Nulle autre voix ne pouvait retentir plus profondément au coeur du chrétien, du Français, du Breton qu'était le général Fraboulet. Nulle autre ne pouvait réveiller en lui des échos plus fidèles, ni susciter les élans du plus spontané et du plus filial dévouement. Fortement ébranlé par le cri d'alarme qui remontait de l'autre côté des Alpes, il n'eut pas une hésitation.

Le défenseur du pays allait devenir le défenseur de l'Eglise. Si la cravate de Commandeur de la Légion d'Honneur, comme le titre « de Kerleadec », dont il fut ennobli pour la vaillance de son épée, couronnèrent sa carrière toute consacrée à la défense de la Patrie, la cravate de Commandeur de l'Ordre de Pie IX récompensa son zèle et son dévouement au service de l'Eglise et de la Papauté.

Le Général, nous l'avons dit, n'aimait pas la politique. Il se gardait bien de s'en servir comme tremplin, afin de gagner les bonnes grâces des vedettes de l'époque. Il avait trop l'amour de son métier de soldat et trop de droiture pour consacrer son temps en démarches intrigantes et riquer ainsi de compromettre et son service et sa conscience.

Ce n'était pas lui qui faisait traîner son sabre, dans les anti-chambres des hommes influents, ni briller ses éperons, rue Saint-Dominique ou Place du Carrousel. On ne le connaissait pas non plus aux Tuileries dans l'enceinte desquelles se mouvaient tant d'obséquieux tout disposés, pour contenter leurs ambitions, à compenser par des bassesses leur défaut de valeur personnelle. Quand le 21 décembre 1866, il fut nommé général de brigade et que, suivant la coutume, il s'en vint, au sortir de la messe aux Tuileries, remercier l'Empereur de sa nomination, le mot que lui adressa celui-ci et qui voulait être un reproche n'était-il pas plutôt le plus flatteur des éloges ? « On ne vous voit pas souvent ici, général ».

Comme général, Monsieur Fraboulet commanda successivement le département de la Mayenne, puis une brigade à Châlons, enfin le département du Morbihan.

Il était donc chez nous, quand éclata la guerre de 1870, durant laquelle il reçut le commandement de la 4ème Brigade du 1er Corps d'Armée, commandé lui-même par le Maréchal Mac-Mahon. Il avait partagé les lauriers de ce dernier, lors de la conquête de l'Algérie ; il devait cette fois partager ses revers.

Après l'écrasement d'une de ses divisions, à Wissembourg, le 1er Corps d'Armée battit en retraite à travers les Vosges, fut attaqué et vaincu à Reichshoffen, et il dut abandonner l'Alsace pour se retirer sur Châlons. Puis, ce fut Sedan.

Durant cette bataille, le général Fraboulet défendait à Bazeilles, un point important et si le vieux roi Guillaume qui contemplait la mêlée des hauteurs du Fresnois, en s'écriant devant le magnifique courage des Français : « Oh ! les braves gens ! », adressait un hommage irréfléchi peut-être mais réel à la valeur commune de nos soldats, c'est un autre hommage que rend à la valeur personnelle du général, le grand Etat-Major allemand, en le citant élogieusement plusieurs fois dans son ouvrage.

Cependant, c'était le désastre. Le général Fraboulet qui avait pris la tête de la division pour remplacer le général de Lartigue, grièvement blessé, eut soudain l'épaule fracassée, pendant que l'armée entière était encerclée par l'ennemi. Les Allemands, sans se soucier de son atroce blessure, s'emparèrent de lui et l'embarquèrent dans un train, où, en compagnie d'autres officiers, il fut emmené en captivité.

Le « Journal de Rennes », du 24 mai 1887, auquel est empruntée une partie de cette documentation, relate le fait suivant qui illustra ce pénible voyage et faillit coûter la vie au blessé.

Le convoi était formé de wagons à plates-formes, dont un factionnaire, placé de deux en deux voitures, asurait la surveillance. En traversant les montagnes de la Hesse, quelques jeunes officiers eurent l'idée de tenter l'évasion. Ils projetèrent de dételer, au cours d'une pente, le dernier couple de wagons et de prendre la fuite, après avoir étranglé la dernière sentinelle.

Le général se trouvait précisément dans le dernier wagon. Sachant que sa blessure l'empêcherait de fuir et qu'il serait ainsi livré à une mort certaine, les officiers hésitèrent un instant à mettre leur projet à exécution. Mais la guerre émousse bien vite tout sentiment de pitié et refoule les scrupules, si bien que l'entreprise fut quand même décidée. Elle ne devait d'ailleurs pas réussir, les attelles n'ayant pas voulu céder.

C'est en 1874, que le général voyait son épaulette s'enrichir de la troisième étoile, et Vannes, d'où il commandait la 22ème division et le territoire du Morbihan et du Finistère, devenait sa dernière affectation.

Au cours de la période de sept années, durant laquelle il occupa ce poste de premier plan, il sut gagner la sympathie et l'affection de ses subordonnés et de tous ceux qui l'approchèrent. Ses beaux états de service ainsi que la gloire qui auréolait sa longue carrière militaire, en imposait aux officiers et aux hommes de troupe qui, par ailleurs, étaient conquis par l'ascendant de son caractère chevaleresque, la noblesse de ses sentiments, la simplicité de son abord.

De par ses hautes fonctions, il ne pouvait évidemment se cantonner entre les murs des casernes ou dans le cercle restreint de son Etat-Major. Il lui fallait étendre ses relations jusque dans le monde officiel et dans le monde tout court, et c'était toujours avec affabilité et empressement qu'il répondait aux invitations chaque fois que les obligations de sa charge, ses convictions ou simplement la bienséance et la courtoisie lui faisaient un devoir de se produire. S'il participait volontiers aux cérémonies officielles dénuées de tout caractère partisan, il se faisait une douce obligation de prendre part aux manifestations religieuses où sa présence était très remarquée. C'est ainsi que nous relevons son nom sur la liste des notabilités qui assistaient aux fêtes du couronnement de la statue de Sainte-Anne d'Auray.

Il devint ainsi très populaire. Mais un incident lamentable, et qui marque bien la triste mentalité de cette époque de 1880 comme aussi le caractère magnanime du général Fraboulet, devait mettre bientôt fin à une carrière militaire si magnifiquement remplie.

Un fonctionnaire, d'un rang assez élevé d'ailleurs, qui s'était un jour permis de prodiguer de graves insultes à l'adresse de tout un corps d'officiers, fut, à la suite de protestations énergiques, blâmé par le Gouvernement. Mais si ces remontrances eurent pour effet de l'inciter désormais à plus de modération dans son langage, elles ne désarmèrent point pour autant sa mauvaise humeur et la trop bouillante « personnalité » se promit bien de prendre sa revanche sur l'armée.

Le prétexte fut tout trouvé lors de l'application des décrets concernant les Congrégations religieuses. Personne n'ignorait les opinions personnelles du général, opinions qu'il pouvait afficher aussi crânement que ses titres militaires. M. Fraboulet fut donc impitoyablement « fiché », dénoncé comme hostile aux institutions nouvelles et comme étant une entrave à l'exécution de ces décrets.

Gambetta, alors tout puissant, n'approuvait pas au fond, la manoeuvre maladroite de l'Administrateur contre le militaire qu'il avait lui-même en haute estime, mais d'autre part il était lié par les nécessités politiques. Il essaya donc de s'en tirer par une demi-mesure qui avait l'avantage de ménager « la chèvre et le chou ». Il dépêcha à Vannes un mandataire porteur de ce message pour le général « Une carte à l'Elysée, une visite au Palais-Bourbon et le commandement en chef est à vous. Rennes ou Nantes, à votre choix ».

C'était bien mal connaître le général Fraboulet que de vouloir le tenter par une offre, dont le prix équivalait à une indigne concession. Aussi répondit-il comme il convenait, par le silence. Une deuxième tentative le trouva aussi irréductible. « Je n'allais pas aux Tuileries sous l'Empire, dit-il, je ne mettais même pas les pieds à l'Elysée quand le Maréchal, mon ancien chef, s'y trouvait ; pourquoi irai-je maintenant ? ». La sentence ne se fit pas attendre.

Un matin, alors que le général, au retour de manoeuvres, terminait l'inspection du 116ème Régiment d'Infanterie, son courrier lui fut présenté, dans lequel se trouvait une lettre ainsi rédigée : « Général, les circonstances ne me permettent pas de vous conserver à Vannes ; dites-moi bien si le poste de Bordeaux vous convient ».

C'était la rançon de son entêtement, le coup de poignard déloyal, dont la blessure lui fut, sans doute, plus douloureuse que toutes celles qui marquèrent sa chair au cours des nombreux combats livrés pour le pays. Il répliqua, sur le champ, par une réponse toute de droiture et de dignité : « Les circonstances qui vous empêchent de me conserver à Vannes ne vous permettront pas de me conserver à Bordeaux. Veuillez me mettre en disponibilité ». Puis, remontant à cheval, il termina la cérémonie militaire par la remise aux régiments, en garnison à Vannes, des nouveaux étendards qu'il leur demanda de considérer toujours comme les symboles de l'honneur, de la Patrie.

Le général se retira dès lors au milieu des siens, au château de Kéranskoët. Ce grand soldat, qui n'avait pas hésité à briser son épée plutôt que de se prêter à des manoeuvres qui répugnaient à sa conscience de chrétien et à son honneur d'officier français, emportait dans sa retraite les regrets unanimes de l'armée et l'admiration de tous ceux qui l'avaient connu.

L'ombre ne put obnubiler le rayonnement de cette belle figure. Sans doute, son entourage fut composé désormais de gens simples, mais ce sont précisément les simples, qui sont les plus sensibles aux beautés immatérielles et les plus habiles à juger sans détours. Aussi le général fut-il vraiment aimé, sinon vénéré dans le pays de Saint-Yves. Bien que son « Maner Général » ne fit pas encore partie de la paroisse à cette époque, il fut très attaché à ce petit coin de terre, à cette chapelle qu'il fréquenta assidûment et dota de plusieurs dons, à l'humble cimetière où il voulut dormir son dernier sommeil.

Joseph Henri Fortuné Fraboulet de Kerléadec s'éteignit à Kéranskoët, le 28 avril 1887, à l'âge de 68 ans. Un demi-siècle plus tard, sa famille se dispersait et abandonnait, non sans amertume, la propriété actuelle qui passait aux mains d'une autre lignée de soldats : la famille de Grout de Beaufort. (L. Le Brazidec).

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