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LES RELIGIEUSES URSULINES DE MORLAIX

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Les religieuses Ursulines de la Congrégation de Bordeaux, établies à Tréguier dès 1625, fondèrent treize ans plus tard la Communauté de Morlaix, au même diocèse. Et voici dans quelles conditions.

Prêchant à Morlaix, le 23 Février 1638, devant le comte de Boiséon, gouverneur de la cité, les magistrats et les nobles habitants du « corps de ville », Mgr. Noël Deslandes, évêque de Tréguier, leur montra l’utilité que l’on pouvait retirer de l'Institut des Ursulines pour l’éducation des jeunes filles. Le même jour il y eut délibération du « corps de ville » pour conférer sur les propositions du prélat. Elles furent agréées, et le 9 Août suivant, l’évêque envoya à Morlaix huit religieuses de la Communauté de Tréguier : Louise Guay, dite de Jésus, Supérieure (qui avait été la fondatrice de la maison de Tréguier), — Claude de Kerouartz, dite des Anges, Préfète, — Anne Blosse, dite de Saint Charles, — Marie Nobletz, dite du Saint-Esprit, — Françoise Turpin, dite de Sainte Ursule, — Françoise-Thérèse de Bégaignon, dite de Jésus [Note : Un prélat de ce nom, Yves de Bégaignon, originaire de Plestin-les-Grèves, avait été dominicain à Morlaix, évêque de Tréguier, puis cardinal], — Françoise Tavignon, dite de la Croix, — Scholastique Martin, dite de Jésus, — Soeur Anne Carzel, dite de Saint Joseph, novice converse. Ces moniales étaient accompagnées de messire Michel Thépault, sieur de Rumelin, chanoine de Tréguier, ainsi que de plusieurs personnes de qualité.

Elles s’établirent d’abord dans une maison qu’on avait meublée pour elles et y restèrent deux mois, fidèles aux observances régulières et à la récitation de l'Office. Elles occupèrent ensuite un autre local, y dressèrent une chapelle où des personnes pieuses faisaient célébrer quotidiennement la messe, et y ouvrirent des classes, aussitôt remplies d’écolières, « ce qui leur donna matière de faire paroitre leur zèle pour l’instruction de ces petites armes à quoy les encourageoit l’exemple de la Mère Louise Guay qui s’est rendue si recommandable par son rare talent et capacité pour le gouvernement que sa mémoire est en singulière vénération non seulement en cette maison mais en toutes celles de la province ».

L’institut souffrait des contradictions de la part du menu peuple qui « méprisoit les Ursulines et donnoit beaucoup d’exercice à leur patience, outre une affliction universelle causée par la peste (en 1640), qui infecta presque toute la ville et obligea les gens de qualité à se retirer à la campagne de manière qu’elles se voyoient souvent sans assistance temporelle, ne les osant demander à personne à cause de ces mutineries populaires ». Quelques religieuses proposaient de s’en retourner à Tréguier, mais la Mère Guay leur répondait « qu’elles prissent courage et que la fondation de Morlaix seroit l’une des meilleures maisons de l'Ordre puisque saint Joseph étoit son protecteur ». Peu après, en effet, messire Guy Thépault, ancien prieur de Beauport, recteur d'Etables, donna à la maison 6.000 livres, qui furent employées à acheter un terrain pour la construction du monastère.

Dans le même temps les Religieuses eurent la consolation de recevoir chez elles un grand nombre de pensionnaires des meilleures familles de la ville et des environs. Plusieurs de ces jeunes personnes firent ensuite profession dans la Communauté, entre autres Scholastique Thépault, fille du sieur de Leinquelvez, que suivirent plus tard ses petites filles, Guillemette et Françoise Thépault.

Louise Guay, chargée d’ans et d’infirmités, retourna à la maison de Laval, où elle mourut en Mars 1642.

Le 13 Juin de la même année, la Mère Ursuline Charbonnel étant Supérieure, Mgr. Deslandes, évêque de Tréguier, présida la procession solennelle qui eut lieu pour la plantation de la croix sur le terrain que la Supérieure avait acquis, afin d’y bâtir le monastère, hors de la ville, au haut de la rue de Bréhat. A cette cérémonie assistèrent le clergé et les ordres monastiques, le Gouverneur, les magistrats et une foule immense de peuple. La croix était portée par des Messieurs de la ville, et les instruments de la Passion par de jeunes demoiselles vêtues de blanc.

On commença immédiatement la construction du monastère, qui se trouva en état de recevoir les Religieuses au mois de Septembre 1645.

A la requête de la Mère Françoise-Thérèse de Bégaignon (de Jésus), alors Supérieure, messire Michel Thépault de Rumelin fut délégué par le Chapitre de Tréguier, le siège épiscopal étant vacant par la mort de Mgr. Deslandes [Note : Il venait de mourir le 19 Août 1945], pour porter le Saint-Sacrement dans la procession générale qui devait conduire les Religieuses à leur couvent. Les pensionnaires et les autres élèves, vêtues de blanc, suivaient immédiatement le Saint-Sacrement. A leur sortie de la maison occupée par les Ursulines et à leur entrée au monastère, elles récitèrent des vers en l’honneur de l'Eucharistie et à la gloire de sainte Ursule. Les Religieuses suivaient leurs élèves, deux à deux, le crucifix sur le bras et un cierge à la main. Elles étaient au nombre de vingt : dix-sept professes et trois novices voilées. Le pieux cortège passa par les églises de Saint-Melaine et de Saint-Dominique. A Saint-Dominique fut prononcée le panégyrique de l'Institut des Ursulines.

C’est le 18 Novembre 1646 que Mgr. Balthasar Grangier fut sacré, à Paris, évêque de Tréguier. Il portait un intérêt tout particulier aux filles de Sainte Angèle et de Sainte Ursule. Lors de sa première visite à Morlaix, il fit l’honneur à la Communauté des Ursulines d’y descendre : c’est à l’entrée du monastère qu’il fut complimenté par le premier magistrat. Le prélat pénétra ensuite dans l’église, où il donna sa bénédiction aux Religieuses réunies au choeur. Celles-ci chantèrent le Te Deum et aux strophes de ce chant d’action de grâces la musique de la ville répondit alternativement. Toute sa vie, Mgr. Grangier viendra chaque année au monastère de Morlaix, il y présidera tous les trois ans les élections des supérieures, et désignera d’autre part, avec soin, les aumôniers du Couvent.

En 1647, la Mère Ursule Charbonnel remplaça comme Supérieure Françoise de Bégaignon, et trois ans plus tard, au mois d'Août 1650, elle céda la place elle-même à la Mère Madeleine Tavignon, dite de Jésus, soeur jumelle de Françoise, l’une des fondatrices.

Enfin le projet que l'on nourrissait depuis longtemps de bâtir une église sous le vocable de Saint Joseph commença à se réaliser. La première pierre en fut posée le 15 Juin 1654 par Mgr. Grangier. On peut lire aux Archives Départementales le procès-verbal de la cérémonie.

A cause des difficultés que présentait le terrain, l’église ne fut terminée que onze ans plus tard. Elle fut bénite solennellement le 12 Octobre 1665, par Mgr. Grangier, assisté de tout le clergé de la ville. Le prélat y célébra la première messe que lui servit messire Charles Beuset, son chapelain et secrétaire [Note : La source des événements exposés est un manuscrit de vingt-cinq feuillets écrit par une Ursuline de la maison, vers la fin de 1665].

La chapelle porte la date de 1661 sur le fronton du choeur des religieuses, à gauche. Le maître-autel est orné d’un beau retable Renaissance représentant la Sainte Famille. De chaque côté on aperçoit un grand tableau [Note : Une petite chapelle moderne fait face au chœur des moniales].

L’établissement de Morlaix fut confirmé par Lettres patentes du Roi, en Mars 1686.

Au mois de Mai de cette même année, deux jeunes personnes de la paroisse de Sion, au diocèse de Nantes, abjurèrent, dans la chapelle des Ursulines, l’hérésie de Calvin, Mlle Françoise Guitton, le 22 Mai, Mlle Elisabeth Guitton, le 25.

En 1698, le jardinier de la Communauté, Hervé Le Dantec, lui légua, en mourant, une rente de 50 livres, toutes ses économies.

Un Bref de Benoît XIV, en date du 1er Avril 1746, érigea canoniquement dans le monastère la confrérie du Sacré-Coeur de Jésus.

A la suite de Louise Guay, leur première Supérieure, les Ursulines professèrent toujours une grande dévotion à l’égard de saint Joseph.

Pendant deux ans elles eurent comme confesseur Maurice Le Gall, sieur de Kerdu, qui leur enseigna sa sainte et pieuse méthode d’oraison intérieure. Quand l’évêque de Tréguier l’appela au rectorat de Servel, il fut remplacé par son ami, M. Lemer, « vertueux ecclésiastique ayant un grand talent pour la direction » et qui logeait avec lui à Morlaix, ainsi qu’un « homme de Dieu appelé Jan Ausmont, sieur de la Croix, qui travailloit journellement à mettre en lumière un livre intitulé l'Agneau Occis qui enseigne merveilleusement cette pratique intérieure. L’ayant achevé, M. de Kerdu en a poursuivi l’approbation après l’avoir fait imprimer dans Paris, et cette oeuvre à la gloire de Dieu produit des effets admirables dont cette communauté peut porter témoignage pour le bonheur qu’elle à reçu d’en être enseignée par ces trois Messieurs ».

SUPÉRIEURES DES URSULINES.

Louise Guay (1638-1641). — Ursule Charbonnel (1641-1645). — Thérèse-Françoise de Bégaignon (1645-1647). — Ursule Charbonnel (1647-1650). — Magdeleine Tavignon (1650-1660). — Françoise Tavignon, soeur jumelle de Madeleine, et l’une des fondatrices (1660-1663) [Note : Elle quitta le monastère le 24 Mai 1666 pour gouverner une nouvelle fondation]. — Magdeleine de Tavignon (1663-1683). — Angèle Blanchard (1692-1694). — Louise Guillou (1698-1701, 1712). — Gabrielle Jégou (1704, 1706). — Barbe Pastour (1712-1719, 1728). — Elisabeth de Partenay (1723, 1728). — Marie-Marthe Hubac (1737, 1738, 1743, 1746, 1747, 1751). — Brigitte Rodellec du Porzic (1748, 1750, 1758, 1760-1762). — Madeleine Tuault (1768, 1769, 1770). — Catherine de Kerangal (1776, 1783). — Anne-Marie Beau (1779, 1784-1786-1788). Née à Morlaix le 26 Novembre 1734, elle avait fait profession le 23 Août 1763. Au dire de la Chronique, elle « avoit un très grand mérite, une rare capacité pour le gouvernement, une délicatesse de conscience qu’elle poussoit jusqu’au scrupule ». — Catherine Léon, originaire de Plounéour­Ménez (1790). — Anne-Marie Beau (1792), décédée le 20 Mars 1801. 

(Archives de l'Evêché).

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