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YAN' DARGENT, SA VIE, SON OEUVRE.

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Le peintre Yan Dargent

Edouard Yan’ Dargent est né le 15 octobre 1824, dans le département du Finistère, à Saint-Servais, petit bourg d'aspect original, situé entre Landerneau et Landivisiau. Son père, Claude Dargent, émigré lorrain, est tanneur, sa mère, Marguerite Perrine Clémentine Robée, fille de Pierre Robée aubergiste, tenait également le relais de poste et le débit de tabac ; à la Monarchie de Juillet, il devint maire. L'enfant n'a que deux ans quand sa mère décède. Son enfance s'écoula à Plouaret, dans le pays de Tréguier (Côtes-d'Armor), c’est-à-dire au berceau des traditions et des légendes bretonnes. A la mort de sa mère, son père s'étant remarié, l'enfant fut confié par son grand-père maternel, Pierre Robée, ancien marin retraité, à l'un de ses oncles nommé Thomas, vieux chouan, maître d'école à Plouaret, qui lui donna les premières leçons élémentaires en compagnie de son condisciple M. François-Marie Luzel, qui était resté son ami. Il est d'abord élève au collège Saint-Joseph de Landerneau, puis en 1836, à l'âge de douze ans, à l'institution Notre-Dame du Kreizker de Saint-Pol-de-Léon.

Le 3 juillet 1867, il épouse Eugénie Antoinette Stéphanie Mathieu, musicienne, fille du peintre Eugène Mathieu et directeur de la publication La France illustrée. De 1869 à 1878, il est chargé par le clergé de la décoration de plusieurs églises : Saint-Servais, Landerneau, Morlaix, Ploudalmézeau et surtout la cathédrale Saint-Corentin de Quimper dont il réalise l'ornementation de toutes les chapelles latérales, qui lui prendra sept ans.

A la fin de sa vie, en proie à des difficultés financières, il sera accueilli par son fils. Il meurt le 19 novembre 1899 à Paris, dit-on d'une embolie pulmonaire, et est enterré à Saint-Servais.  

Voir Yan' Dargent et la cathédrale de Quimper

Quand vint le moment de choisir une carrière, le grand-père de Yan'Dargent voulut faire de son petit-fils un marin, mais Yan’ Dargent ne se sentit pas destiné au rôle de navigateur : il s'adonna alors principalement aux mathématiques et au dessin. Après de brillants examens, il fut admis dans l'administration des ponts et chaussées, puis il passa dans le service des chemins de fer. En 1846, il était à Troyes, comme inspecteur des travaux à la construction du chemin de fer de Montereau, lorsqu'un professeur du collège du nom de Schitz, éveilla chez le jeune fonctionnaire la première étincelle de sa vocation : ils allaient tous deux, épris de la nature, dessinant ensemble dans la campagne. C'est alors qu’il se fit connaître de quelques amis comme dessinateur habile.

Bientôt, sur les instances réitérées de M. Furne, fils de l'éditeur, qui avait deviné son talent, Yan’ Dargent quitta définitivement l'administration. Vers 1850, il vint se fixer à Paris, où se fait la consécration de tous les talents et, se sentant irrésistiblement appelé, il affronta la périlleuse carrière de l'art sans passer par aucun atelier. Il conquit rapidement sa place comme dessinateur d'illustration, à côté de Gustave Doré, avec des qualités de sentiment, de grâce et de variété dans l'invention et la composition qui manquaient à son heureux émule.

Dans le cadre restreint que nous nous sommes tracé, nous ne pourrions donner à notre étude tous les développements nécessaires. Il faut donc abréger et nous borner à de rapides et brèves indications.

L'oeuvre de Yan’ Dargent, comme dessinateur, est immense, et nous ne pouvons en esquisser sommairement qu’un aperçu très incomplet.

Outre des milliers de dessins qu'il a publiés dans le Magasin pittoresque, la France illustrée, dont il a été longtemps le collaborateur infatigable, l'artiste breton a fourni de nombreux dessins sur bois à un grand nombre de publications, revues et journaux artistiques, parmi lesquels nous rappelons notamment le Tour du Monde, journal des voyages publiés sous la direction d'Edouard Charton (Hachette et Cie) ; la Chasse illustrée (Firmin Didot et Cie) ; l'Exposition universelle illustrée de 1867 (Dueuing) ; le Korrigan journal artistique et d'extraction bretonne, etc.

Ce dessinateur infatigable compte une production extraordinairement abondante et ininterrompue, il a illustré une foule de livres publiés chez les principaux éditeurs et qui sont aujourd'hui entre toutes les mains [Note : Citons entre autres les Contes bleus, d'Edouard  Laboulave, Les Contes de Perrault, Les Contes danois d'Andersen, La Divine Comédie Fabiola, Christophe Colomb, et la Vie des Saints par M. Paul Guérin].

S'élevant toujours dans le domaine de l'art, Yan’ Dargent se livra bientôt à la peinture et se fit remarquer d'abord par ses paysages exposés aux Salons annuels, où il obtint, dès ses premiers débuts, un rang distingué parmi les maîtres. Ces paysages, pleins de sentiment et dont les sujets sont presque toujours empruntés à la Bretagne, respirent tous dans leur pureté d'hermine ce parfum âpre et pénétrant qui s'exhale de la terre de granit, toute parée d'ajoncs et de genêts d'or. A son indépendance, à la puissante originalité de son caractère autant qu’à son amour profond du sol natal, il doit d'être véritablement novateur. Yan’ Dargent, dans l'école moderne de peinture française, représente seul le côté fantastique et la légende bretonne. C'est en ce genre qu'il s'est révélé, du premier coup, comme un puissant initiateur.

Yan’ D’argent, quoi qu'il fasse, est resté Bepred Breizad (toujours Breton). C'est l'artiste de notre temps qui a le mieux aimé, le mieux compris, le mieux traduit la Bretagne. Il s'est constamment inspiré des traditions qui l'ont bercé. On voit, en effet, en étudiant de près toutes ses productions, que sa pensée n'a jamais quitté les grèves natales, et, s'il s'en éloigne parfois, son âme en garde comme une perpétuelle nostalgie.

C'est en 1851, qu’il débuta dans la peinture, par deux tableaux : le Retour et les Baigneuses. Il n'a cessé d'exposer qu'en 1877, lorsqu’il fut mis hors concours.

Voici la nomenclature de ses principaux ouvrages :

Exposition de 1852. — Au bord de la mer ; souvenir de Bretagne.

Exposition de 1853. — Les dénicheurs d'aigles ; paysans bas-bretons.

Le Chariot : bords de la mer, environs de Saint-Pol-de­Léon (Finistère).

Exposition de 1855. — Derniers Rayons ; souvenir de Bretagne.

Exposition de 1857. — Bords de la mer à Lokirech.

Sauvetage à Guisseny (Finistère).

Expositions de 1859. — Saint Houardon, un des premiers apôtres du christianisme en Bretagne, patron de l'église paroissiale de Landerneau (Finistère) ; ce tableau est aujourd’hui dans ladite église.

Le Gué ; peinture.

Exposition de 1861. — Les Lavandières de la nuit ; oeuvre bizarre, inspirée par une légende bretonne qu'Emile Souvestre a publiée dans son volume, le Foyer breton. Les arbres qui parlent dans la légende, Yan' Dargent les rendit plus parlants encore, et, dans ces troncs noueux, l'oeil trouve nous ne savons quels êtres que l'on croit voir dans une vision au crépuscule, dans les prairies. Les lavandières, blanches comme les pèris, mènent un branle diabolique et enlèvent dans leurs bras le pauvre ivrogne de la ballade.

Les Pilleurs de mer à Guisseny (Finistère).

(Ces deux derniers tableaux ont été acquis par le duc de Hamilton).

Pâtre des plaines de Kerlouan, Menhir (Finistère).

Souvenir de collège ; environs de Saint-Pol-de-Léon (Finistère).

Exposition de 1863. — Les Vapeurs ; ce tableau est un résumé des qualités de l'auteur.

Un soir dans la lande ; souvenir de Bretagne.

La Famille du Pêcheur (côtes du Finistère).

Exposition de 1864. — La vache récalcitrante ; effet de crépuscule dans les landes de Kerlouan (Finistère).

Idylle bretonne.

La Mort du dernier barde ; complainte populaire du quinzième siècle. Dessin au fusain.

Le Feu follet des cimetières ; autre dessin au fusain.

Exposition de 1865. — Mort du dernier barde breton. Tableau d'une réelle beauté fantastique, au fond duquel passe la Fortune, suivie d’un cortège allégorique de peintres, de poètes, etc.

Exposition de 1866. — Souvenir d'enfance ; paysage breton.

Le Menhir ; légende du barde Gwenclan.

Exposition de 1868. — La Roche-Maurice ; effet de soir.

Kloareck en vacances.

Exposition de 1869. — Le Petit Poucet.

Promenade sur l'Eure à Tachainville, près de Chartres.

Exposition de 1870. — L’intempérance et le Travail (ces deux tableaux ont été acquis par l'Etat pour les musés de Rennes et de Quimper).

Fragments de la décoration de la chapelle obituaire de l'église de Saint-Servais ; aquarelle.

Exposition de 1872. — Chanson de Laouïc, ravissante idylle bretonne. — Le sujet représente un jeune pâtre qui, juché sur la tête trop souvent émondée d’un vieux saule aux profils fantastiques, garde ses vaches dans une position pleine de désinvolture et de naturel ; « Il chante », a dit un de nos plus brillants critiques : « Il chante à gorge déployés, une chanson sans air » ; — C'est dans cet article, spirituellement touché, que nous trouvons analysé en peu de mots le talent du Yan’ Dargent, toujours simple dans la traduction de sa pensée, et dont la partie esthétique se marie si bien avec ses procédés matériels.

Exposition de 1873. — Les pins de Santec (Finistère).

Le sentier aux ramiers Brézal (Finistère).

Exposition de 1874. — Saint Roch dans la solitude.

Korn-boud : environs do Saint-Pol-de-Léon (Finistère).

Exposition de 1875. — Sentier près de Telgruc (Finistère).

Falaise à Goullien (pointe du Raz).

Conversion extutique de saint Corentin et de saint Primel.

Exposition de 1876. — Bords du Scorff au Sac'h (Finistère).

Falaise à Morgat (Finistère).

Comme on peut le voir pur l'énumération de son oeuvre, Yan’ Dargent a prouvé, depuis de longues années, qu'il joint aux qualités spéciales du peintre, celles d'un maître du crayon, maître ingénieux, alerte et plein du savoir.

Tout en traitant plus particulièrement le paysage, l'artiste se livrait sans relâche à des études sérieuses dans le but d'arriver à la peinture d'histoire sacrée. La guerre de 1870 et le siège de Paris l'avaient surpris en Bretagne. Il céda alors au vœu du curé de sa ville natale et peignit, dans la chapelle obituaire de l'église Saint-Servais, sur le grand côté de la chapelle l'Aumône et la Prière délivrent l'âme, sujets traités en trois tableaux accostés de deux anges et dont les personnages sont de grandeur nature. Sur la paroi latérale méridionale de la même chapelle, dont il a composé jusqu'aux vitraux, l'artiste traita de nouveau la vieille légende le Mort et le Vif, si populaire au moyen âge, mais en la renouvelant au point de vue de l'art moderne. En exécutant ces peintures, le peintre avait un motif personnel d'inspiration, car c'est dans cette chapelle, ou l'appelait un prêtre intelligent et ami de l'art, que reposaient les cendres de sa mère. Aussi l'artiste fut-il rarement mieux inspiré.

A la même époque, Yan’ Dargent fut chargé de peindre à Morlaix, dans la chapelle de saint Joseph, les Douze Apôtres, accompagnés de deux anges admirateurs, composition de quatorze figures plus grandes que nature. Dans la tribune, il représenta le Repos en Egypte et l'Enfance de Jésus, et, dans le bas de la chapelle, la Présentation au Temple.

Ces peintures furent les premiers essais dans la voie nouvelle où l'artiste n'avait pas craint de s'engager. C'est alors que Mgr. Sergent, évêque de Quimper, jeta les yeux sur lui pour lui confier la décoration générale des principales chapelles de sa cathédrale.

C'est un art bien de nos jours, que celui de la décoration des monuments religieux d'architecture ogivale, parce que l'on a depuis longtemps remplacé par la fantaisie la tradition des lois inflexibles, mais sures, qui servaient de guides aux imagiers du moyen âge. A cette époque où le peintre était souvent sculpteur, quelquefois architecte, il n4oubliait jamais que son oeuvre, si importante qu'elle fût, n'était dans l'harmonie de l'ensemble qu'une note qu'il devait s'efforcer de rendre aussi juste que possible. Soucieux des règles de la perspective, sans laquelle il n'y a pas d'harmonie, il prenait grand soin de donner à ses figures des proportions en rapport avec la partie du monument où s'exerçait son pinceau. S'il avait, par exemple, à décorer une chapelle de dimensions restreintes, éclairée par des vitraux à petits sujets, il se gardait bien d'y faire figurer des personnages de grandeur réelle. Quant à l'idéal qu'il recherchait, au point de vue esthétique, il était exclusivement chrétien et dégagé de toute préoccupation terrestre.

En présence des imperfections et des lacunes que présente en France l'enseignement de l'art religieux et en l'absence d'une haute tradition acceptée, on est heureux, comme Mgr. Sergent, de pouvoir confier la décoration générale de la cathédrale à un artiste tel que Yan’ Dargent, qui, à défaut des conditions d'érudition archéologique spéciales qui ne sont écrites nulle part, réunissait au moins, deux qualités indispensables pour l'exécution de ce vaste programme, d'une importance égale toutes deux : 1° cette souplesse d'invention et cette science de composition dont il avait fait preuve dans cinquante volumes illustrés consacrés par le succès ; 2° la foi robuste d'un chrétien sincère et convaincu. C'est à la réunion de ces qualités que nous devons la décoration remarquable à tant de titres, dont nous allons essayer de donner une idée et qui reste jusqu'ici comme l'effort capital de la carrière de Yan’ Dargent.

« La cathédrale de Quimper, classée au rang des monuments historiques, est considérée à juste titre comme l'édifice religieux le plus intéressant de l'ancienne Bretagne. Fondée par Bertrand de Rosmadec au commencement du quinzième siècle (24 juillet 1424), sur l'emplacement du palais du roi Grallon, selon la légende d'Albert le Grand, cette oeuvre architecturale ne s'éleva que lentement et de siècle en siècle, comme tous les monuments religieux de cette époque. Les flèches, incendiées en 1613, n'avaient jamais été relevées, lorsque, en 1854, Mgr. Graveran imagina , pour les reconstruire, de demander à ses fidèles un sou par an et pendant cinq ans. Cc fut l'oeuvre qu'on appela le sou de Saint-Corentin. Cet appel produisit une somme de plus de cent cinquante mille Francs et donna à l'habile architecte, M. Bigot, l'occasion d'élever ces deux flèches célèbres, si élégantes, et qui font tant d'honneur à son savoir, couronnement imposant de cette magnifique cathédrale. Mgr. Sergent, poursuivant l'oeuvre de son prédécesseur, eut l'heureuse inspiration de faire exécuter la décoration générale de la cathédrale bretonne à un seul artiste, Breton lui-même. C'était assuré à l'œuvre ce caractère d'unité qui est regardé comme une condition première de réussite. C'était une tâche formidable que d’assumer la responsabilité de peindre à la cire, et à l'huile, sur le mur même, neuf chapelles principales, sans compter les pendentifs, les impostes, les retombées de voûtes. Yan’ Dargent accepta cette lourde responsabilité, et après un travail assidu de plusieurs années, oubliant tout pour se consacrer à ce grand labeur, acceptant chrétiennement, pour prix de son temps et de son talent, la modeste rétribution du peintre, homme de foi du moyen âge, il a mené seul son œuvre à bien sans aide ni concours d'aucune sorte. Tous les personnages ont été dessinés d'après des études directes sur les types bretons. Outre ces dessins, l'artiste a fait poser ses modèles et les a peints d'après nature, sur les échafaudages même de ses chapelles. Beaucoup de personnes se sont imaginé qu'on pouvait se réveiller tout-à-coup un pinceau à la main et se mettre sans préparation en présence d'une œuvre aussi considérable et aussi hérissée de difficultés. Ceux-là seuls, qui sont étrangers à la pratique des arts du dessin, peuvent se faire une aussi étrange illusion. C'est après un noviciat de plus de vingt ans dont " les livrets du Salon " portent le témoignage que Yan’ Dargent a pu aborder enfin la peinture d'histoire ».

Les qualités que nous trouvons chez le paysagiste, nous les voyons grandir et s'élever encore chez le peintre d'histoire religieuse, et, dans l'un comme dans l'autre cas, le maître montre qu'il n'en est pas à son coup d'essai. Yan’ Dargent n'a pas voulu de succès faciles ; les circonstances l'ont amené à ce but, qu'il a sans doute rêvé et auquel de longs travaux et des études sérieuses ont dû seuls le si bien préparer. A l'approche de la grande œuvre, il parut comme transfiguré. Il s'y prépara, à l'instar d'un Fra-Angelico, avec le respect religieux d'un prêtre qui va monter à l'autel (Georges HANCIAU).

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