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LA RÉVOLUTION EN BRETAGNE

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PRELUDES DE LA REVOLUTION EN BRETAGNE.

EVENEMENTS DE 1788.

I.

Nous sommes en juillet 1788, c'est-à-dire en pleine période aiguë de la lutte entre les parlements et le pouvoir royal. Les événements de mai, juin, juillet et août 1788 peuvent être considérés comme les préludes, en Bretagne, de la Révolution qui anéantit peu après, dans un même cataclysme, ces deux institutions plusieurs fois séculaires : la Royauté et la Magistrature parlementaire.

L'Assemblée des Notables, convoquée par Louis XVI, bien qu'uniquement composée de représentants de la noblesse et du haut clergé, avait consenti de grandes et utiles réformes. Le Tiers-Etat obtenait enfin quelques-unes de celles qu'il appelait depuis si longtemps de ses voeux, notamment l'abolition de la corvée et rétablissement de l'impôt territorial, première et grave atteinte portée aux privilèges de la noblesse, demeurés invulnérables jusqu'à ce jour.

Loin d'approuver ces mesures libérales et égalitaires, les Parlements s'y montrèrent hostiles et refusèrent même d'enregistrer les édits qui en étaient la conséquence. A plus forte raison repoussèrent-ils énergiquement la réforme judiciaire dont Louis XVI prit l'initiative, de concert son ministre Brienne, réforme qui consistait dans la suppression de la Chambre des requêtes et des tribunaux d'exception, la création et l'augmentation de la compétence des cours inférieures et l'institution d'une cour plénière pour l'enregistrement des lois.

Le Parlement de Bretagne, chargé d'examiner les mesures qui, diminuant ses attributions, le menaçaient d'une ruine irrémédiable, ne pouvait se résoudre, en enregistrant ces édits, à signer lui-même sa propre condamnation. Il se prépara donc à la résistance.

D'autre part, la nation, lasse des revirements et des fluctuations du pouvoir entre les mains honnêtes mais débiles de Louis XVI ; fatiguée des ministères trop souvent renouvelés pour qu'aucun d'eux pût faire aboutir les utiles réformes ébauchées, tour-à-tour, par chacun ; la nation, disons-nous, aspirait, de plus en plus, à se gouverner elle-même. La France appelait de tous ses voeux la convocation des Etats-Généraux. Là était, croyait-on, le puissant remède à opposer aux grands maux des difficultés présentes, l'espoir assuré de la constitution idéale appelée à changer en une ère de prospérité l'état de souffrance qui était, au déclin du grand siècle, le sort commun de toutes les classes de la société française.

II.

A tous les arguments invoqués par les parlements en faveur de la conservation de l'ancienne organisation judiciaire, celui de Rennes en joignait un qui assurait à sa cause l'appui de la province entière. C'était cette clause du contrat d'union de la Bretagne à la France, clause violée de la façon la plus formelle par les nouveaux édits : « Il ne sera rien changé au nombre, qualité, fonction exercice des officiers de la province, il ne sera fait aucune création d'officier ni de nouvelle juridiction » (Article 22 et 23 du contrat d'union de 1500). Aussi tout le parti breton fut-il bientôt debout pour soutenir les droits de la nationalité bretonne, droits que la Cour affectait de considérer comme des privilèges, afin de les abolir ensuite avec moins de scrupules.

Lorsque, le 10 mai 1788, les édits eurent été enregistrés de force par le Parlement, une émeute éclata à Rennes où l'armée seule empêcha la foule de faire un mauvais parti aux commissaires du Roi, Messieurs le comte de Thiard, gouverneur de la ville de Rennes et Bertrand de Molleville, Intendant général de la Bretagne.

Mis en vacance jusqu'à nouvel ordre, mais soutenu alors par toutes les classes, le Parlement breton ne se regarda pas comme battu et tint des assemblées de protestation dans la demeure particulière de quelques-uns de ses membres. La ville, profondément troublée par tous ces incidents, fut pourvue d'une garnison de dix-neuf cents hommes, au grand mécontentement de la population qui refusa de les loger.

A la suite de l'orageuse journée du 2 juin, où le Parlement tint une assemblée générale, malgré la défense qui lui en avait été faite, les membres de cette compagnie furent exilés dans leurs terres par quarante-huit lettres de cachet. La Bretagne prit dès lors une part plus active aux agitations de sa capitale : toutes les villes donnèrent leur adhésion aux protestations faites par les magistrats et la Commission intermédiaire des Etats, en qui se concentrait, en ce moment, toute l'autorité de la province.

La noblesse, assemblée à Vannes et à Saint-Brieuc, décida de députer vers le Roi douze gentilshommes porteurs d'un Mémoire, rédigea Rennes le 5juillet, qui était, à la fois, un appel touchant à la bonté du souverain et une condamnation accablante des projets ministériels. Quatorze cent-dix signatures accompagnaient ce message : c'étaient les plus beaux et les plus vieux noms de la noblesse bretonne. Mais, arrivés à Versailles, ces députés font de vains efforts pour parvenir jusqu'au Roi. Ils s'adressent alors aux membres de la noblesse bretonne présents à Paris, ou ayant charge à la Cour, pour les prier de faire lever la consigne rigoureuse qui les sépare du but de leur mission. Ils se réunissent et concertent le plan de nouvelles tentatives qui devaient être faites pour y parvenir, lorsque, dans la nuit du 14 au 15 juillet, les douze gentilshommes sont enlevés de leur domiciles et jetés à la Bastille, tandis que leurs amis de la Cour, destitués et disgraciés, sont, dès le lendemain, exilés pour avoir prêté conseil et appui aux douze Bretons coupables « d'avoir provoqué à Paris des conciliabules illicites ».

Nous avons vu par ailleurs les termes de la correspondance du comte de Boisgeslin qu'il échangea avec Louis XVI, en cette circonstance où il fut exilé et destitué de sa charge de maître de la garde-robe du Roi, et les félicitations qu'il reçut alors de la noblesse bretonne (Voir notice sur le comte Louis-Bruno du Boisgelin).

L'arrestation des députés bretons eut, dans toute la France, un retentissement considérable, mais, en Bretagne, elle porta à son paroxisme l'exaspération des esprits et l'animosité contre le ministère que l'on accusait d'influencer le Roi dans ses décisions. La province entière s'émeut. On acclame les « martyrs de la liberté » !. Les épouses des douze gentilshommes détenus, revêtues d'un deuil uniforme, se jettent dans des voitures, accompagnées de plusieurs autres dames de la noblesse, et prennent rapidement la route de Paris.

Invoquant, en sa faveur, une ordonnance « proscrivant les lettres de cachet et défendant aux magistrats d'y avoir égard » (Ordonnance des Etats d'Orléans et de Blois. Ordonnance de Moulins, article 81). le Parlement dispersé se réunit de nouveau et décide, aussitôt, l'envoi au Roi d'une députation de douze de ses membres choisis parmi les conseillers au Parlement.

Ceux-ci sont arrêtés à Houdan, par les ordres du Roi qui leur défendait, sous peine de désobéissance, de passer outre. Ils revinrent à Rennes le 3 août 1788.

Le Parlement étant considéré désormais comme assemblée illégale, la Commission des Etats [Note : Il s'agit ici de la Commission Intermédiaire des Etats de Bretagne, qui, nommée par ceux-ci à chaque tenue, était chargée de l'exécution matérielle de leurs décisions dans l'intervalle des deux années qui s'écoulaient entre les tenues d'Etats. Elle réglait la capitation, le service des fourrages, les étapes, le casernement, la grande voirie, les devoirs etc.. Cette commission intermédiaire que le roi avait supprimée en 1732, fut rétablie en 1734 et, de très peu stable qu'elle était, les Etats la rendirent alors permanente. Il y avait, par évêché, un bureau formé de trois membres de chaque ordre. Le bureau de Rennes, dit le grand bureau, en avait six de chaque ordre, en tout dix-huit commissaires] qui, elle, avait un mandat régulier, décide alors d'agir à son tour. Dix-huit commissaires partent bientôt pour Versailles, afin de suppléer aux douze « héros de la Bretagne » et de réclamer leur liberté. Arrivée à Pontchartrain cette députation reçoit, elle aussi, de la Cour défense expresse d'aller plus loin.

A cette nouvelle, l'effervescence est à son comble. Monsieur de Thiard porte à dix mille hommes le nombre des troupes engagées dans Rennes. Mais rien ne saurait comprimer l'élan de la province : les Bretons ont pour eux le droit et la loi. Une grande assemblée de députés des trois ordres se réunit à Rennes et décide l'envoi au Roi d'une troisième députation, cette fois composée de cinquante-trois membres choisis dans le Clergé, la Noblesse et le Tiers-Etat.

Toute la France étonnée de cette ténacité a les yeux fixés sur la Bretagne avec intérêt et admiration.

Les cinquante-trois députés arrivent à Paris avec l'ordre « de ne céder qu'à la force et de ne donner aucun reçu de toutes les réquisitions ou défenses qui leur seraient faites ».

Après du temps perdu en vaines démarches pour parvenir jusqu'au Roi, la chute du ministère de Brienne, sous la réprobation universelle, et l'avènement de Necker viennent, enfin, faciliter l'entrée à Versailles des députés bretons.

Admis en présence de Louis XVI, le 31 août 1788, ils remettent au roi le mémoire dont ils étaient porteurs en lui disant : « Sire, écouter avec bonté les doléances de ses peuples, les accueillir quand elles sont justes, c'est le devoir des rois. Présenter avec respect ces réclamations, en attendre l'effet avec une confiance inébranlable, voilà le nôtre ».

Le souverain les accueille avec bienveillance et prend connaissance du mémoire qui, dans un langage respectueux mais ferme, demandait la mise en liberté des députés de la noblesse bretonne, enfermés à la Bastille, et le maintien de la constitution et des franchises nationales.

Ce fut le signal d'un revirement complet : le roi ordonne aussitôt de relâcher les douze prisonniers, et les députés bretons, admis à la Cour, sont salués et fêtés par tous les princes et les gentilshommes de l'entourage des souverains et par ceux-ci eux-mêmes : « Nous ne nous lasserons jamais de dire, répétaient plus tard ces députés à leurs concitoyens, que, nous étant trouvés, plusieurs fois dans ce jour, en face de Leurs Majestés, tant à leur dîner auquel nous assistâmes, qu'au jeu de la Reine, où nous fûmes admis le soir, nous eûmes, à chaque fois, le bonheur de fixer d'une manière particulière leurs regards et spécialement ceux de la Reine, et d'y découvrir tous les signes de la bienveillance et de l'intérêt » (Rapport de Boullé, l'un des députés en Cour de la ville de Pontivy, à l'assemblée communale de cette ville).

Un triomphe plus éclatant encore les attend à Paris. Ils s'y rendent, au moment même où le rétablissement des Parlements vient d'être décrété, et sont invités à assister à la rentrée solennelle du Parlement de Paris. A leur arrivée, les officiers en robes courtes viennent les recevoir au bas du grand escalier ; les tambours battent aux champs, comme pour l'entrée du Roi, et les magistrats, se découvrants, les saluent de ces acclamations : « Honneur aux Bretons ! chapeau bas pour les Bretons ! ». Tandis que le peuple criait : « Vivent les Bretons ! bravo les Bretons ! ».

Le même accueil les attendait à leur retour en Bretagne, où ils furent choyés et fêtés. Ce fut la dernière manifestation de l'union parfaite de toutes les classes de la société bretonne pour le maintien de nos franchises nationales. Nous verrons bientôt que ce bon accord ne fut pas de longue durée et que le Parlement rétabli ne devait guère jouir de son triomphe (J. Baudry).

Voir aussi  Révolution en Bretagne "Les émeutes de Rennes en janvier 1789

Voir aussi  Révolution en Bretagne "Les derniers Etats de Bretagne (1788-1789)"

Voir aussi  Révolution en Bretagne "La convocation aux Etats-Généraux"

Voir aussi  Révolution en Bretagne "L'émigration durant la Révolution"

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