Retour page d'accueil      Retour page "Chevalerie du duché de Bretagne"   

Nos historiens mentionnent si souvent les neuf anciennes baronnies et les neuf barons de Bretagne, qu'une étude historique sur ce titre, sur son origine, sur les prérogatives qui y étaient attachées, a quelque chance d'obtenir l'attention des Bretons qui s'intéressent à l'histoire de leur pays.

Les plus connues de ces prérogatives sont celles qui s'exerçaient, aux deux ou trois derniers siècles, dans l'assemblée des Etats de Bretagne.

Là, en effet, la présidence de l'ordre de la noblesse appartenait aux possesseurs des neuf anciennes baronnies, à l'exclusion de tous autres gentilshommes.

De plus, le seul titre, la seule préséance nobiliaire dans les Etats était le titre et la qualité d'ancien baron de Bretagne. Tous les autres gentilshommes, quels que fussent leurs titres, leurs dignités, et même l'ancienneté de leur race, étaient aux Etats les uns vis à vis des autres et signaient au registre sur un pied d'entière égalité.

Les neuf baronnies anciennes.

Réfutation du système de Dom Morice.

Les barons de Bretagne aux XIème et XIIème siècles.

Les barons des barons.

Les barons de Bretagne au XIIIème siècle.

Les barons de Bretagne au XIVème siècle.

Les barons de Bretagne au début du XVème siècle.

Avènement des neuf baronnies anciennes dans les institutions de la Bretagne.

On peut maintenant se faire une idée juste des barons et des baronnies de Bretagne depuis le XIème siècle, et aussi des origines relativement modernes de l'institution des neuf baronies, dites anciennes on ne sait pourquoi, car elles ne l'étaient pas plus que les autres.

Aux XIème et XIIème siècles, le titre de baron est purement personnel ; dans l'usage les chartes bretonnes l'appliquent à tous les individus, quels qu'ils soient, qui garnissent la cour du suzerain ; en droit toutefois il eût dû être réservé aux vassaux qui tenaient directement leur fief de ce suzerain, et que leur devoir féodal obligeait à garnir sa cour.

Vers la fin du XIIème siècle, en ce qui touche les barons du duc de Bretagne, ce titre commence à être appliqué exclusivement aux principaux feudataires qui tiennent de lui in capite, et on le leur applique aussi bien quand ils sont absents de la cour du suzerain que quand ils y sont présents.

Peu à peu, le titre de baron de Bretagne se substitue à celui de baron du duc, et les « barons de Bretagne » sont considérés comme une sorte de collège et de corps politique formant la tête de l'ordre de la noblesse. Sous le coup de circonstances diverses, ce corps des barons de Bretagne joue un grand rôle dans les événements de la première moitié du XIIIème siècle ; le nombre des membres qui le composent est indéterminé, il dépasse certainement à cette époque le chiffre de cinquante.

Le titre baronal devient peu à peu territorial, les seigneuries des barons sont appelées baronnies ; la première qui ait reçu ce titre dans un acte officiel est la baronnie de Châteaugiron, en 1317.

Dans la seconde moitié du XIIIème siècle et la première du suivant, la politique des ducs de Bretagne, sans engager ouvertement la lutte contre les barons, tend constamment à réduire leur rôle et leur action politique.

Mais la guerre de Blois et de Montfort et, après la bataille d'Aurai (Auray), la nécessité de rassembler les Etats de la nation pour obtenir des subsides, rendent aux barons toute leur importance, qui, sous le règne de Jean IV, est très grande. Mais l'empressement des barons à soutenir cette importance, à jouer le rôle qui leur est départi, semble s’affaiblir : dans l'assemblée des Etats, dans les conseils du duc, au lieu de se présenter comme autrefois au nombre d’une quarantaine, le plus souvent ils sont à peine huit, neuf, dix.

Cette circonstance donne lieu à un préjugé populaire qui se manifeste pour la première fois dans les dix premières années du XVème siècle, et suivant lequel, de même que le clergé de Bretagne avait à sa tête neuf chefs, c'est-à-dire ses neuf évêques, la noblesse aussi devait avoir neuf chefs seulement, c'est à dire neuf barons, titulaires des neuf anciennes baronnies de Bretagne, qui auraient été Avaugour, Léon, Vitré, Fougères, Châteaubriant, Retz, la Roche-Bernard, Ancenis et Lanvaux.

Pendant la première moitié du XVème siècle, cette légende se répand et s'accrédite peu à peu, sans être toutefois acceptée ni mise en œuvre dans les institutions politiques. Sous le duc Jean V, nous voyons encore une quarantaine de seigneuries au moins investies de la qualité baronale, sans que les neuf baronnies prétendues anciennes aient sur les autres aucun privilège.

C'est seulement avec le duc Pierre II, qui régna de 1450 à 1457, que la légende des neuf baronnies anciennes fit son entrée dans les institutions bretonnes. Pierre II s’était fort attaché à ce système, et dès la première année de son règne il voulut lui donner tout son lustre. Des neuf baronnies soi-disant anciennes (qui ne l'étaient pas plus que les autres), trois se trouvant alors réunies au domaine ducal ne pouvaient être représentées dans les Etats, et le nombre sacro-saint des neuf barons était en déficit. Pierre II s'empressa de le compléter en conférant le privilège baronal à trois autres seigneuries qu'il assimila aux six anciennes baronnies encore représentées, et ces neuf seigneuries jouirent seules désormais du titre et du privilège de « baronie de Bretagne », à l'exclusion des trente à quarante autres terres qui jusque là en avaient joui pareillement. Les Etats de 1451 et surtout ceux de 1455 virent l'avènement complet et officiel du système des neuf baronnies de Bretagne.

Trente ans après, ce système était devenu une sorte de dogme. En 1480, le duc François II proclamait solennellement comme un privilège de la Bretagne d'avoir été de tout temps « régie et gouvernée en ordre et police de neuf prélats et de neuf barons » — et comme une nécessité politique, de tenir au complet ce nombre de neuf.

Liste des baronnies de Bretagne du XIème au XVème siècle.

Depuis lors, l'institution des neuf anciennes baronnies de Bretagne fut acceptée par tout le monde et fleurit jusqu'à la Révolution (A. de La Borderie).